• Aucun résultat trouvé

Une importante économie industrielle basée sur les ressources naturelles

profondément politiques

Cadre 8 : Le défrichage forestier autour de Léfoutou, sur les sommets ferrugineu

3.3 Un ancien cœur économique pour l’ensemble du Congo

3.3.2 Une importante économie industrielle basée sur les ressources naturelles

Si les investissements, publics ou privés, ont été importants en ce qui concerne l’agriculture, celle-ci est loin d’être la seule activité économique porteuse pour la région. Outre son potentiel agronomique inégalé au Congo, la région est riche en pétrole, bois, fer, manganèse, or et diamant pour ne citer que les ressources les plus importantes ou les plus attractives. La situation de carrefour de la région, sa richesse agricole et minière sont à la base d’un certain dynamisme industriel, ici encore le seul existant au Congo hors des deux capitales.

La construction du barrage de Moukoukoulou, au Nord de Mouyondzi (Bouenza), réalisée dans les années 1980 pour alimenter la SIAN et Huilka (E_346 ; cadre 5) a renforcé l’attrait de la région en offrant une couverture électrique non négligeable à la vallée. La carte de l’INRAP (1983, Carte 23), présente ainsi les entreprises les plus importantes, localisées pour la plupart d’Est en Ouest le long de la ligne du CFCO.

Chapitre 3 : Les pays du Niari, des territoires fonctionnels et profondément politiques

CARTE 23 :INRAP1983, P.54.LES ACTIVITÉS DE LA VALLÉE DANS LES ANNÉES 1980.

Dans la Bouenza, les activités agricoles ont entrainé la mise en place d’activités de transformation et de conservation (Carte 23). Le complexe agro-industriel de Nkayi forme l’essentiel de l’activité agro-alimentaire de la région et constitue le plus grand ensemble industriel du Congo dans les années 1980 (INRAP, p. 34). Il est composé de trois entreprises de transformation : la SUCO (plantation de canne à sucre et sucrerie), Huilka (production d’huile d’arachide) et MAB (production de farine de blé).

PHOTOS 4 :HUILKA (À L’ABANDON), LA MAB(UTILISÉE PAR L’IPHD) ET L’USINE SARIS 1(À L’ABANDON).NKAYI, 2009.

Aujourd’hui, presque toutes les activités de la vallée ont disparu, ne reste que la SARIS, ex-Sucrerie du Congo (SUCO, Cadre 5).

1ère partie : Construire une géographie du conflit et du post-conflit dans les pays du Niari

Cadre 5 : De la SIAN à la SARIS : de l’agriculture de plantations à un complexe agro-industriel d’État.

La SARIS (Société Agricole de Raffinage Industriel de Sucre) est depuis la colonisation la principale entreprise agricole du pays. Son histoire mouvementée résulte de la bascule entre gestion privée et publique.

Le complexe agro-industriel de la SIAN (Société industrielle et agricole du Niari) est créé en 1956 par un colon, M. Ottino, à Jacob (Nkayi aujourd’hui). Devenu SOSUNIARI (1966) puis SIA Congo (Société Industrielle et Agricole) lors de sa nationalisation en 1970, elle éclate en 1978 pour donner les trois grandes unités qui font vivre la ville de Nkayi et sa région : la SUCO (sucreries du Congo), la MAB (Minoterie et Aliment de Bétail), et Huilka (Huilerie de Kayes).

PHOTOS 5 :SLOGAN MAB, HÉRITAGE SUR LES HANGARS DE STOCKAGE IPHD(2009).OBJECTIF NON RÉALISÉ...

En 1991, la privatisation de la SUCO donne naissance à la SARIS Congo, appartenant à la société SOMDIAA SA, société holding française implantée dans les filières sucre et blé en Afrique. L’État garde 34% du capital de l’entreprise. La SARIS n’a connu qu’une brève interruption pendant les conflits. Avec les guerres, Huilka, pillée, est définitivement arrêtée. La MAB devient la MINOCO (société privée) en 2000. Celle-ci arrête la production de farine et se délocalise à Pointe-Noire. Depuis 2003 puis 2010, l’entreprise tente de relancer la fabrication d’aliment de bétail.

PHOTO 6 :USINE SARIS 2 DE MOUTÉLA (CONSTRUITE EN 1966), À L’ÉCART DE NKAYI (2009) ;RÉCOLTE DE LA CANNE À SUCRE,2010.

Chapitre 3 : Les pays du Niari, des territoires fonctionnels et profondément politiques

À ces activités particulières, qui ont fortement contribué à façonner la région, on peut ajouter une multitude d’activités secondaires. Au niveau agricole, il faut mentionner la présence de nombreuses huileries modernes dans les zones de culture du palmier à huile (Atlas ORSTOM, 1965). Celle de Mossendjo employait 19 ouvriers en 1954 (Villien-Rossi, 1978, p. 160). Mais certaines étaient déjà fermées en 1965. Plusieurs rizeries ont également été créées dans les zones les plus humides de la région, notamment dans le Chaillu (zone de Zanaga et de Mossendjo). Mais ces activités importées et très encadrées (PADEL Zanaga, et Villien-Rossi, 1978, p. 160 : « une rizerie sera établie en 1958 avec des crédits du Fonds d’Aide et de coopération, pour le traitement de 500 T de paddy ») n’ont plus fonctionné lorsque les aides d’État se sont arrêtées.

Ainsi, alors que la région est riche en ressources agricoles transformables, il y a eu somme toute peu de valorisation industrielle en dehors du complexe de Nkayi. Il n’y a pas eu de mise en place de conserveries ou autres entreprises d’agroalimentaires hormis quelques entreprises individuelles de colons ou anciens colons comme un peu de culture de jute (essais de fermiers européens).

La région est également riche en ressources naturelles, et notamment minières. Villien- Rossi (1978) mentionne dans le Niari les entreprises minières qui opèrent au moment de l’indépendance dans le massif du Chaillu : Champroux, Robin, Avoine (or alluvionnaire de rendement médiocre) ou la SOREDIA (Société de recherche du diamant). Si la recherche minière dans le Niari n’a pas permis la création d’exploitations durables, plusieurs industries se sont installées à proximité des zones d’extraction dans la Bouenza. La cimenterie domaniale de Loutété (CIDOLOU) acheminait son ciment depuis 1970 vers Brazzaville via le CFCO. Cette société allemande, comme d’autres, fut soumise aux tribulations politiques des alternances de nationalisations - privatisations. Elle fut reprise par des Norvégiens avant d’être nationalisée sous le nom de Socico (Société des ciments du Congo) et laissée en déshérence. À Mfouati et Boko-Songho, l’entreprise SOCOREM (Société Congolaise de Recherche Minière) exploitait les polymétaux (zinc, cuivre, plomb). Née d’un partenariat russo-congolais, l’exploitation a cessé après la Conférence Nationale en 1991. Ces deux entreprises dynamisaient fortement la partie Est de la Bouenza. Enfin, il y a eu à Mbinda et à Mossendjo la création tardive (1995-1996) de fabriques de céramiques et tuiles par des sociétés malaisiennes et vietnamiennes (E_094, Photos 7), rapidement arrêtées.

PHOTOS 7:CE QUI RESTE DU « COMPLEXE LISSOUBA » À MBINDA (2010) ; TUILES SORTIES DE L’UNITÉ DE CÉRAMIQUE DE MBINDA (CEG DE TSINGUIDI,2010).

1ère partie : Construire une géographie du conflit et du post-conflit dans les pays du Niari

PHOTOS 8 :LA CIMENTERIE DE LOUTÉTÉ,INRAP, P.53 ; L’USINE DE MFOUATI OU CE QU’IL EN RESTE,2010.

La mise en exploitation du manganèse gabonais de Moanda a également permis la création de nombreux chantiers ferroviaires le long de la ligne COMILOG ; outre la période de construction du chemin de fer qui a drainé de nombreux ouvriers, on trouvait des ateliers de réparation de la COMILOG à Mbinda et Makabana, où se trouvait également les bureaux de la direction de la COMIRAIL (qui s’occupait des rails COMILOG). Cette entreprise a énormément dynamisé la partie nord du Niari en la désenclavant et en maintenant sur place de nombreux personnels salariés. Par exemple, 450 personnes étaient affectées à Mbinda pour l’entretien et la surveillance du téléphérique (Villien- Rossi, 1978, p. 196). À Dolisie, ce sont des ateliers du CFCO qui fournissaient à la ville un contingent de travailleurs. La centrale hydro-électrique de Moukoukoulou ou les activités liées à l’entretien des chemins de fer (CFCO et COMILOG) ont ainsi fourni de nombreux emplois et entraîné l’arrivée de populations exogènes dans la région (Photos 8).

Au sud de Dolisie a également été installée une usine de transformation du fer (programme Lissouba), pour transformer les ferrailles de récupération en fers à béton et en tôles de couverture. FERCO finissait d’être équipée lorsque les guerres ont éclaté. L’usine n’a jamais fonctionné.

Le secteur industriel régional, le plus dynamique et diversifié du Congo, est donc en pleine restructuration (privatisations, nouvelles créations) à la veille des guerres.

Outline

Documents relatifs