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5.2 1998-1999 : Guerre de libération du Sud ou guerre de consolidation du pouvoir ?

Cadre 14 Histoires de pillages : chacun son tour

Voici l’exemple de pillages mentionnées par les habitants dans nos entretiens (extraits). 1. Historique du pillage COMILOG à Mbinda

Récit de Hilaire Nzoussi (E_198), ex-travailleur COMILOG à Mbinda.

- La COMILOG a tout laissé intact (maisons, grand dépôt, réseau électrique, eau, hôpital) lors de son arrêt en 1991. Il y a bien eu un pillage de la part des travailleurs mais ce n’était pas trop grave.

- Lors de la guerre de 1997, « le colonel Bougouanza qui a besoin d’argent pour résister » pille le site (en fait les Cocoyes). Les ex-travailleurs COMILOG organisent la protection du site. A la fin des guerres restent les tôles, les portes et fenêtres.

- Après la guerre, les jeunes désœuvrés au chômage finissent le pillage (réseau électrique, le cuivre est revendu à Pointe-Noire).

2. Le pillage des installations BOPLAC à Mboyi (Bambama) Récit des jeunes de Yakatoko (E_148)

- BOPLAC Mboyi a fermé en 1997. Ensuite, quand il y a eu la guerre à Zanaga (1999), les bandits armés sont venus piller le site.

- Après la guerre, comme le camp était déserté par les "mindélé" (les blancs), les villageois ont pris les tôles, et tout ce qui restait (confirmé par E_273, 277).

Jean-Pierre M. (E_282) ajoute que la guerre n’est jamais arrivée à Boplac, mais que les enfants autour en ont profité pour piller. Les jeunes lui ont demandé les clés du magasin : il les a données. « Les jeunes étaient en armes, moi en béquilles ». C’étaient des jeunes de Sibiti, « les mêmes qui travaillaient là ». Boplac a été pillé car la direction n’a pas voulu la protection du sous- préfet.

Chapitre 6 : Des guerres contre les civils

Un certain nombre de travailleurs des sociétés pillées affirment avoir voulu défendre leur outil de production, sans grand succès face à des jeunes en armes (E_282, 205). Est présente aussi souvent la possibilité de faire défendre certaines zones par l’armée : le travailleur de BOPLAC (E_282) affirme ainsi que les sociétés Socobois à Moutséké, et Essic à Komono n’ont pas eu les mêmes problèmes. Le témoignage de Philippe Guillot de FORALAC (E_072) mentionne que le préfet voulait envoyer l’armée protéger le site de Bivéla (début 1999). Philippe refuse, et le préfet envoie l’armée à une autre société, Man- Faï-Taï. Plus tard ils viendront de fin janvier à juin sécuriser le chantier, alors fermé (mais il y eu à nouveau des combats en juin contre les Cocoyes). Cette solution, outre qu’elle n’est pas possible pour les petites entreprises, est rarement bien vue de la part des entrepreneurs bien implantés localement85.

Le pillage du gros comme du petit bétail a été très important dans les zones productrices (Kibangou) et dans les ranchs d’État (Dihéssé, Massangui), du fait de la nécessité de se procurer de la nourriture. Le petit bétail notamment constituant un important capital- sécurité, ce sont les économies de bon nombre de paysans qui sont parties en fumée avec les animaux (Kibangou E_233, 240…).

Pendant la guerre, il y a eu du pillage. On avait 250 pondeuses, elles ont toutes disparu. Thérèse ABBON, E_296.

Les infrastructures sanitaires scolaires des pays du Niari ont-elles-aussi fortement subi les guerres. Si elles n’ont pas forcément été détruites directement pendant les conflits, elles ont souvent été réquisitionnées par les populations ou les armées (cf. Photo 29 du collège de Kibangou) pour servir de refuge. La plupart des dégâts sont liés au pillage des bâtiments, même dans les zones éloignées des combats directs. Le matériel et les tôles ont été pillés (parfois à la sortie des guerres), les tables-bancs et les portes et fenêtres (claustras) ont été récupérées pour être brûlées.

Dans la Bouenza, il y a eu surtout des pillages plus la casse de tables-bancs, utilisés pour faire du charbon ou comme cercueils. E_134, DDEPSA Bouenza.

Ainsi, à Sibiti, le lycée a perdu ses portes, ses fenêtres, son toit de tôles et ses bancs après la fin des combats, alors qu’il avait échappé aux bombardements.

Les guerres ont également fortement touché les structures de santé : vol des ambulances, du matériel médical et du mobilier, pillage des toitures en tôles et du matériel de pointe. Ainsi, le rapport PNUD de 2002 (p. 60) rapporte que « l’hôpital Général de Dolisie, complètement détruit et pillé en 1999, n’a plus que des structures métalliques et bétonnées sans équipement ».

6.3.3 La destruction et la dégradation des d’infrastructures déstructure la région

Les destructions ont été nombreuses, tant dans les villes que les villages. Les traces sont aujourd’hui encore très visibles dans les villes, du fait du grand nombre de bâtiments construits « en dur ».

85 Les entreprises et les ressortissants français, du fait du rôle d’Elf aux côtés de D. Sassou Nguesso dans le

conflit, étaient accusés par les Cocoyes de collusion avec « l’ennemi ». Ainsi cette insulte à l’égard d’un cadre français d’une entreprise forestière : « sale français c’est de ta faute » (E_072) ou le témoignage de Matha (E_025).

2ème partie : Une géohistoire des conflits dans les pays du Niari

PHOTO 20 :LA MAISON D’ARMAND SEPO À LOUDIMA EN

2009; DÉTRUITE ET OCCUPÉE PAR LES NINJA, SEULS LES TROUS DU TOIT ONT ÉTÉ REBOUCHÉS.

PHOTO 21:MAISON D’UN PORTUGAIS À MOSSENDJO

(2010).

Le rapport OCDH-FIDH de 1999 mentionne que « Après avoir été bombardées, les villes de Dolisie et Nkayi ont été totalement saccagées, visiblement à dessein pour y rendre la vie difficile au retour des populations déplacées. En effet, compte tenu de l'état des maisons, des hôpitaux, des commerces - complètement pillés, incendiés et bombardés- les conditions de vie seront très précaires pendant longtemps dans ces deux villes. »

Les zones rurales n’ont pas été épargnées, la plupart des villages en zone de fronts ont été détruits, pillés, brûlés. Autour du barrage de Moukoukoulou par exemple, tous les témoignages sont catastrophiques (E_333, 334) : tous les habitants ont fui pendant plus de 6 mois, il y a eu de nombreux morts, les maisons ont été cassées et brûlées, les femmes violées.

À partir de décembre 1998, il y a eu 90 maisons brûlées (par les Rwandais, et les Angolais). On est proche du barrage, eux venaient prendre la boisson ici, et acheter des vivres. Ils ont tué des gens dans le village (ceux qui ne pouvaient pas fuir). Mbounou 1 (au Nord de Mouyondzi), E_333.

Des pillages, des règlements de compte au sein des familles ou des villages ont également eu lieu, contribuant à susciter un climat de méfiance généralisé.

À Léfoutou, les Cocoyes ont tué un monsieur qui était dans le PCT. C’est quelqu’un qui a trahi, ils l’ont poursuivi. Ici [à Doumaï], il ne s’est rien passé, mais les jeunes sont allés renforcer les forces du Sud. Et il y a eu des règlements de compte. Tout le monde a quitté le village. Les gens de Zanaga sont allés à Franceville. Chef de terre de Doumaï, E_150.

Le problème, c’est que quand on a fui, les Cocoyes ont pris les poulets, les cabris, ils ont tué les membres du PCT, nos propres enfants ont mis la pagaille, il y a eu des règlements de compte familiaux. Tout le village a fui dans la forêt (là où on a des champs). Anc. Vice- président du village Missassa, E_155.

Si les traces des guerres sont aujourd’hui en partie effacées dans les villages, construits en torchis ou en planches, quelques tags ou peintures ravivent ici ou là la mémoire des combats (Photo 22).

Chapitre 6 : Des guerres contre les civils

PHOTO 22 :MAISON PEINTE À MAKOTO (MAYÉYÉ,2009).

Des répercussions importantes sur les transports régionaux et nationaux

Au niveau des infrastructures de transport, la destruction ou la dégradation de 32 gares du CFCO sur 50 a compromis pour longtemps la commercialisation des produits vivriers des pays du Niari (Carte 48).

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