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profondément politiques

Cadre 8 : Le défrichage forestier autour de Léfoutou, sur les sommets ferrugineu

3.3 Un ancien cœur économique pour l’ensemble du Congo

3.3.3 La forêt, l’ « or vert » du Niar

Il existe un dernier secteur industriel qui se distingue largement et contribue à donner à l’ensemble de la région son dynamisme : le secteur bois.

Chapitre 3 : Les pays du Niari, des territoires fonctionnels et profondément politiques

FIGURE 5 :AUGMENTATION DE LA PRODUCTION DE BOIS DANS LE CHAILLU AU COURS DES ANNÉES 1950

(IN VENNETIER,1966, P.84)

Le massif du Mayombe, à l’interface du département du Kouilou et du Niari, a été la première région exploitée pour ses grands arbres, avant que, face à son épuisement progressif, le massif du Chaillu ne devienne la principale région productrice de bois à la fin des années 1950 (le Niari forestier est protégé jusqu’en 1957 ; Vennetier, p. 84, et Figure 5).

Dans les années 1960 cette tendance fut confirmée, lorsque l’ouverture de la voie

ferrée COMILOG (1962) permit le

désenclavement de la partie nord de la région. La Carte 24 montre bien la très forte présence des campements forestiers autour de la voie ferrée COMILOG. On peut compter dans les années 1960 14 entreprises étrangères notables sur 300 000 ha et une trentaine de congolais sur 90 000 ha (district de Mossendjo, Villien-Rossi, 1978, p. 235).

M.-L. Villien-Rossi (1978, p. 175) montre que si une partie de la main-d’œuvre des sociétés forestières est trouvée sur place, la démographie des villages se modifie : ils se déplacent au profit des campements de travailleurs, notamment dans les chantiers forestiers. Les campagnes se vident, les femmes s’installent dans les cités ouvrières, il ne reste que les vieillards dans les villages. Elle précise (p. 217) que les lots pour les petits forestiers congolais sont établis le long de la voie ferrée, alors que les grands permis industriels sont plus loin (y compris le secteur nationalisé de l’ONAF). Pour exploiter, les forestiers sont à l’origine de « la création ou l’amélioration de nombreuses pistes et la construction de ponts », notamment vers le chemin de fer. La compagnie SFD par exemple (société forestière Desbrosses) a créé une piste entre Loubetsi et la gare de Thomas, qu’elle a créé. « Le bois a révolutionné la région en suscitant la création de gares forestières » : Tsinguidi, Vouka, Moungoudou, Thomas, Mabafi et Dihéssé. Ainsi, « cette exploitation forestière a eu le grand mérite d’arrêter le dépeuplement de la région, de stimuler l’agriculture (car les hommes des chantiers achètent le manioc, l’arachide et les fruits dans les villages) et de développer le commerce d’épicerie, en particulier des boissons » (p. 239).

1ère partie : Construire une géographie du conflit et du post-conflit dans les pays du Niari

CARTE 24 :CAMPEMENTS ET CHANTIERS FORESTIERS ENTRE LES ANNÉES 1950 ET AUJOURD’HUI, RECENSEMENT NON EXHAUSTIF ÉTABLI PAR NOS SOINS.L’ACTIVITÉ DE L’USINE ASIA CONGO INDUSTRIE (ACI) DE DOLISIE EST À NUANCER : OUVERTE OFFICIELLEMENT, ELLE NE FONCTIONNE TOUJOURS PAS EN 2011.

Mais si l’exploitation de la forêt est beaucoup liée à la création d’infrastructures, elle est surtout liée au cours du marché mondial. En 1974, la chute des cours du bois a eu des effets néfastes sur le Congo forestier, avec la fermeture de nombreux chantiers. Pour M.- L. Villien-Rossi, seuls s’en sortent ceux qui avaient des commandes locales. De nombreux petits exploitants expatriés se reconvertissent dans d’autres activités (transport, commerce). Ceux qui ont des scieries ou des usines (déroulage) parviennent à se maintenir par la demande locale. Les plus grosses entreprises, à capitaux européens pour la plupart (Placongo, CongoBois, Socobois, Sidetra et la Foralac), fonctionnent en veilleuse et s’adaptent tant bien que mal aux fluctuations du cours du bois. Mais ces exploitations suffisent à créer une dynamique importante dans les départements forestiers.

Chapitre 3 : Les pays du Niari, des territoires fonctionnels et profondément politiques

L’exemple de Dolisie est symptomatique de ces dynamiques liées au secteur bois. Dolisie était surnommée, au moment où les guerres ont éclaté, la « capitale de l’or vert », pour deux raisons. Tout d’abord, en raison de la présence d’un grand parc à bois à l’échelle de la région. Celui-ci accueillait le bois avant chargement en gare à destination du port de Pointe-Noire de toutes les entreprises forestières du Nord Niari et d’une partie de la Lékoumou, l’autre partie étant chargée en gare de Loudima. D’autre part, l’entreprise allemande SOCOBOIS possédait à Dolisie une usine de déroulage couplée d’une scierie, employant plus de 1000 travailleurs. Les effets induits de ses activités sont primordiaux pour la ville, les travailleurs constituant la principale source de revenus de la ville et contribuant à nourrir, selon les estimations, plus de 60 000 personnes. Ce secteur dynamique permettait le développement de secteurs secondaires commerçants et artisanaux important. La présence des expatriés de la Socobois était aussi l’occasion pour la ville d’entretenir des actions culturelles et sportives.

Le secteur forestier n’était cependant pas réservé à une seule usine. La ville comprenait plusieurs scieries, locales ou tenues par des expatriés (Ngoma Joseph, Romano, Gaps), et le secteur de la construction en bois a connu des beaux jours.

PHOTOS 9 :ANCIENNE SCIERIE NGOMA JOSEPH ET MAISON EN BOIS ENTREPRISE SCUB CONSTRUITE PAR G. ATHANÉE, AUJOURD’HUI LE LYCÉE TECHNIQUE.

En dehors de cet exemple de taille, le secteur bois était très actif dans toute la région. Par exemple, la société FORALAC (portugaise) exploitait depuis 1965 le chantier de Mouliéné (30 km au Nord de Mouyondzi). Il bénéficiait d’une unité de sciage et toutes les infrastructures nécessaires. A Dolisie mais également dans plusieurs villes secondaires (Loudima, Makabana), il existait de nombreuses petites entreprises de sciage et des activités de menuiserie qui occupaient une grande part de la population. Un certain nombre d’établissements scolaires techniques (Lycée technique de Dolisie, ENEF à Mossendjo, Grand Bois à Sibiti, sections menuiserie des CTEM de Zanaga, Komono, Nkayi35…) venaient, à différentes périodes, compléter cette sorte de « district industriel36 » consacré au bois.

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Ces établissement ont eu des fortunes diverses ; la plupart ont connu des reconversions liées aux processus politiques et économiques (nationalisations, conflits). Nous citerons juste l’exemple de Grand Bois à Sibiti, fonctionnel pendant la période coloniale, devenu aujourd’hui un lycée technique agricole.

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« Une entité socio-territoriale caractérisée par l’association active, dans une aire territoriale circonscrite et historiquement déterminée, d’une communauté de personnes et d’une population d’entreprises

1ère partie : Construire une géographie du conflit et du post-conflit dans les pays du Niari

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