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Choix des terrains d’étude et élaboration des protocoles d’expérimentation

Section 2 : Les outils d’analyse théorique mobilisés dans la recherche

2.3 La théorie des grandeurs

2.3.1 Eléments d’une « sociologie de la critique »

L’émergence au début des années 90 de cette « sociologie de la critique » (L. Boltanski, 1990), par opposition à la « sociologie critique » de Pierre Bourdieu, correspond à un désir de rupture clairement exprimé par ses fondateurs Laurent Thévenot et Luc Boltanski. Cette rupture s’effectue d’une part vis-à-vis de la sociologie d’inspiration Durkheimienne « selon

laquelle la société dépasse largement l’individu dans le temps comme dans l’espace » (P.

Corcuff, 1998) et commande les comportements individuels ; et d’autre part vis-à-vis de l’individualisme méthodologique qui suggère au contraire une vision de la société et des phénomènes collectifs comme étant le résultat d’un ensemble d’actes, de croyances et de comportements individuels (voir à ce sujet les travaux de Raymond Boudon).

« Point de groupes, de classes sociales, d'ouvriers, de cadres, de jeunes, de femmes, d'électeurs, etc. auxquels nous ont habitués aussi bien les sciences sociales que les nombreuses données chiffrées qui circulent aujourd'hui sur la société. Point encore de ces personnes sans qualités que l'économie nomme les individus et qui servent de support à des connaissances et à des préférences. Point non plus de ces personnages grandeur nature que les formes les plus littéraires de la sociologie, de l'histoire et de l'anthropologie transportent dans l'espace du savoir scientifique, au travers de témoignages souvent très semblables à ceux que recueillent les journalistes ou que mettent en scène les romanciers. Pauvre en groupes, en individus ou en personnages, cet ouvrage regorge en revanche d'une multitude d'êtres qui, tantôt êtres humains tantôt choses, n'apparaissent jamais sans que soit qualifié en même temps l'état dans lequel ils interviennent. C'est la relation entre ces états-personnes et ces états-choses, constitutive d'une situation, qui fait l'objet de ce livre. » (L. Boltanski, L. Thévenot, 1991)

En adoptant, pour comprendre l’acteur en situation, une posture reposant sur une approche sociologique compréhensive (poursuivant ainsi la recherche du « sens subjectif visé

par l’agent » selon l’expression de Max Weber116) et pluraliste, les penseurs de cette théorie proposent une grille de lecture originale des mécanismes de formation des accords interindividuels. Cette grille intéresse notre recherche pour deux raisons : l’objet qu’elle aspire à interpréter (les formes de coordination interindividuelle) et la méthode d’analyse qu’elle commande.

 Des origines de l’œuvre…

« De la justification, les économies de la grandeur » (1991) de l’économiste L. Thévenot

et du sociologue L. Boltanski - disciple de Bourdieu - constitue l’ouvrage de référence de la sociologie de la critique. Les auteurs y développent avec force et détails ce que l’on nomme souvent « la grammaire des mondes ». Mais les principes fondateurs de cette approche se dessinent déjà dans les précédents écrits de L. Boltanski, et en particulier dans « Les Cadres -

Formation d’un groupe social » (1982) et dans « La dénonciation » (1984). Le premier de ces

deux travaux amène l’auteur à reconsidérer le processus de catégorisation, qu’il considère

116 « Comprendre une action, un comportement, des façons d’agir, c’est savoir ce qui les explique, les justifie par les sujets eux-mêmes », M. Weber.

comme l’activité à la base de toute analyse scientifique, et à (re-) découvrir notamment « la

compétence réflexive des non spécialistes, la capacité des personnes à la généralisation » (H.

Isaac, 96). Ceci l’amènera à repenser la relation chercheur - acteur, et finalement à rompre avec la posture du « sociologue critique » qui revendique « la capacité à apporter sur la réalité

un éclairage différent et supérieur à celui des acteurs117 » (L. Boltanski, 1990). Il proposera

alors de « se doter d’une extériorité de rang plus élevée » en l’échange du « sacrifice de son

intelligence », de l’acceptation pour le sociologue d’être un acteur au même titre que les autres

et donc soumis aux mêmes contraintes. Le second de ces travaux lui permet d’identifier la capacité d’une action de protestation à accéder à un certain degré de généralité, par référence à un principe de justice qui se veut universel. Ceci marque la naissance du concept de « grandeur » au cœur de la théorie des mondes.

 … à la grammaire des mondes

Boltanski et Thévenot se sont intéressés aux modalités de construction des accords entre acteurs ou groupes sociaux. Ils ont en particulier porté leur attention sur des « scènes

courtes »118, où la tension des échanges interindividuels oblige les différentes parties prenantes à déployer leurs argumentaires afin de se justifier face à des critiques, ou de pouvoir critiquer des positions différentes des leurs119. Pour les auteurs la force de conviction d’un argument - d’une justification – dépend de sa capacité à renvoyer à un « principe supérieur commun », un « principe de justice » intelligible par tous et qui par sa « montée en généralité » (L. Boltanski, L. Thévenot, 1991) transcende les individus et rend possible une dynamique cognitive collective, en donnant des repères qui guident dans la situation. Celle-ci est alors susceptible d’aboutir à la formation d’un accord.

Le point essentiel de cette approche est la reconnaissance de « la pluralité des formes de

généralité » qui semblent fonctionner « à la fois comme systèmes d’interprétation du monde, comme modes d’organisation des hommes et des choses et comme supports des remises en cause de ces ordonnancements » (P. Juhem, 1994). Les auteurs distinguent des valeurs

« légitimes » et « illégitimes », ces dernières ne pouvant supporter une « montée en

généralité » visant à démontrer leur universalité. L’hypothèse est que les personnes

s’accordent parce que leur raison les conduit à adopter concomitamment l’un ou l’autre de ces « principes supérieurs communs ». En s’adossant à l’analyse de textes de philosophie politique120 cherchant justement à proposer une vision sociétale entièrement organisée et même hiérarchisée selon un principe fondamental à vocation universelle - « un modèle de

justice » -, ils recensent dans nos sociétés occidentales six principes stabilisés. Ceux-ci sont

susceptibles a priori d’être sollicités par n’importe quel acteur devant se livrer à un exercice de justification afin de rechercher un accord ou soutenir un litige. Ces grandeurs ne sont donc attachées ni à des individus, ni à des collectifs, ni à des situations spécifiques : ce sont des références universelles, des outils, susceptibles d’être mobilisés à tout moment par chacun. Ce

117 « D’autre part sa validité ne dépend pas de l’acquiescement des acteurs » (L. Boltanski, 1990).

118 Cette notion de temporalité réduite est importante car marque une rupture franche avec de nombreux courants sociologiques français comme la sociologie de la pratique de P. Bourdieu ou le modèle stratégique développé par Crozier par exemple, qui contraignent le sociologue, dans son souci de mettre à jour la vérité sociale, à procéder à de longues enquêtes socio-historiques individuelles et sectorielles (récits de vie, analyses des champs, jeux de pouvoirs, systèmes d’action concret, etc.), et se référer à des « construits sociaux » (dans la tradition Durkheimienne) se rapportant à de longues échelles de temps. En revanche le modèle des grandeurs aspire à s’inscrire dans l’observation et l’interprétation du présent, uniquement à partir de ce qu’il s’y passe. L’aspect « pratique » - et non simpliste - de cette démarche ne peut que séduire les sociologues de terrain.

119 La notion de « publicité » liée à l’épreuve de justification, c’est-à-dire sa visibilité, son accessibilité à l’ensemble des membres d’une collectivité, est très importante. Elle renforce selon les auteurs le besoin de s’appuyer sur des arguments forts, touchant tout le monde.

120 Les auteurs précisent que les textes choisis doivent énoncer les principes de justice régissant la cité et doivent comporter une visée pratique. Ces ouvrages doivent avoir connu une grande diffusion et leurs textes doivent avoir été mis à contribution pour "confectionner des technologies politiques", c’est à dire pour construire ou justifier des instruments politiques reposant sur la mise en équivalence de principes de validité très générale.Les auteurs donnent ainsi l’exemple du Contrat social qui a justifié les constructions juridiques sous la révolution.

« détachement » permet notamment aux auteurs de replacer la notion de libre-arbitre121 au cœur de leur approche sociologique. Dans le jargon de la théorie des mondes, ces six grandeurs se déploient dans autant de « mondes purs », composés d’un ensemble d’« êtres » (personnes, objet, concepts), et au sein desquelles les « cités » constituent des formes d’organisation idéales dont l’équilibre est justement permis par l’autorité naturelle de la grandeur en vigueur. Ces cités sont : « la cité de l’inspiration, la cité domestique, la cité de

l’opinion, la cité civique, la cité marchande et la cité industrielle ». Leur construction serait

soutenue par cinq axiomes. Nous en citerons deux pour ce qu’ils nous semblent être sujets à critiques dans le champ d’application particulier qui intéresse notre recherche : le premier spécifie le « principe de commune humanité », qui suppose que toutes les personnes d’une cité sont concernées par l’ordre politique ; le dernier axiome pose que le bonheur est un « bien

commun », au sens où le bonheur des « êtres grands » d’une cité rejaillit automatiquement sur

les « petits » (L. Boltanski, L. Thévenot, 1991).

A partir de là, toute situation d’échanges interindividuels est considérée par les auteurs comme une combinaison des différents mondes définis plus hauts. Il est ainsi possible de comprendre les situations et leur dynamique à partir des représentations qu’en donnent, au travers de leur justification, les personnes qui en sont parties prenantes (H. Isaac, 1996). Les auteurs identifient alors dans cet ouvrage trois principaux modes de construction de l’accord : la « clarification dans un seul monde » qui survient lorsque le recours à un principe supérieur commun par l’une des parties prenantes trouvent écho auprès de ses interlocuteurs ; « l’arrangement local » qui est contingent aux personnes et aux circonstances, ne vise pas un bien général, et de fait est limité dans le temps et non reproductible ; et enfin « le

compromis » qui lui s’appuie sur un bien commun, et dont la durabilité est assurée par un

« dispositif ». Le compromis suggère l’éventualité d’un principe capable de rendre compatibles des jugements s’appuyant sur des objets relevant de mondes différents.

Leurs travaux suivants ont amené les auteurs à élargir leur réflexion à d’autres régimes d’action s’ajoutant à celui de la justification : le « régime de l’agapé » (se rapportant à l’amour, au pardon, et modélisé à partir de la tradition théologique chrétienne), le « régime de la

violence » et le « régime de la justesse » caractérisé par l’absence d’opérations critiques et la

prédominance des « routines » (L. Boltanski, 1991, et P. Corcuff, 1998). Ils identifient également différents « régimes d’engagement », fonctions du niveau de publicité dans lesquels sont engagés les choses et les êtres dans la coordination (L. Thévenot, 1990). Dans leurs travaux les plus récents semble se dessiner une volonté de circonscrire plus précisément la zone de validité de leur approche par les mondes, et de rejoindre d’autres courants d’analyse sociologiques (en particulier celui de l’analyse stratégique, et celui de l’action située) plus aptes à interpréter l’action sociale correspondant à d’autres régimes d’action (L. Thévenot, 2006).

2.3.2 Pourquoi recourir à la théorie des grandeurs dans le cadre de cette recherche ?

Le premier intérêt que cette théorie présente au regard de notre travail de recherche est son adéquation avec les principes qui sous-tendent l’élaboration de notre démarche d’intervention : une approche « compréhensive » qui considère l’Acteur comme véritablement acteur de son développement, et qui rééquilibre les poids entre chercheurs et acteurs (sujets d’investigation). Souligner et exploiter la correspondance entre cette posture sociologique et la conception de la pratique du développement qui justifie le questionnement du recours à la Vidéo Participative (cf. première partie) nous semble relever d’un devoir de cohérence.

Ensuite, comme le dit L. Boltanski lui-même, l’aspiration de cette théorie est bien de « fournir un instrument pour analyser les opérations qu’accomplissent les acteurs lorsque, se

livrant à la critique, ils doivent justifier les critiques qu’ils avancent, mais aussi lorsqu’ils se

121 Réduite à peau de chagrin par la plupart des courants sociologiques dominants de l’époque s’attachant soit à l’étude des déterminants, soit à une vision de l’individu comme cherchant seulement à améliorer ses conditions matérielles.

justifient face à la critique ou collaborent dans la recherche d’un accord justifié » (L. Boltanski,

1990). Elle se revendique donc pleinement comme un outil d’analyse des processus de concertation. Dans le cadre spécifique de la théorie des grandeurs, notre deuxième hypothèse de recherche pourrait être reformulée de la sorte : « la réalisation partagée de la vidéo permet-elle à chacun des acteurs impliqués dans le processus de recherche d’un accord d’identifier les mondes dans lesquels chacun évolue ?122 Facilite-t-elle la recherche d’un principe supérieur commun susceptible d’être accepté par tous, ou éventuellement susceptible de supporter un dispositif de compromis ? » En ce sens la théorie des mondes a un impact à la fois sur notre manière de concevoir notre démarche d’intervention et sur notre méthode d’analyse de son impact. En effet nous attacherons un soin tout particulier à inviter les acteurs impliqués à entrer dans un régime de justification au moment des interviews, de façon à permettre à chacun au moment des réunions de projection multi-acteurs de comprendre les critiques des uns et des autres, de pousser un peu plus leur argumentation ou encore de les amener à se déplacer progressivement d’un monde à l’autre en vue d’obtenir un accord. C’est donc en ayant recours à cette « grammaire » que nous identifierons ou non la capacité du travail participatif en vidéo tel que nous le concevons à proposer un cadre interprétatif commun, une « représentation collective » de la situation.

Enfin les méthodes de collecte et d’analyse des données relatives à cette approche sont parfaitement compatibles avec la multiplicité et les contraintes de nos travaux de terrain. Proche des méthodes de l’éthnométhodologie, reposant pour l’essentiel sur l’analyse conversationnelle, le sociologue de la critique se concentre sur la récolte mot à mot des discours des acteurs en situations diverses (un travail facilité par l’utilisation de l’enregistrement vidéo, mais toujours fastidieux), élabore des « rapports de rapports » qu’il croise afin non pas d’interpréter le discours de l’acteur et de risquer de le dénaturer, mais pour le clarifier.

2.3.3 Critiques de la grille de lecture proposée par L. Boltanski et L. Thévenot

Diverses critiques ont tour à tour été formulées à l’encontre de cette nouvelle voie d’exploration sociologique qui, il faut le reconnaître, y résiste assez bien de par la richesse des perspectives qu’elle offre et la diversité des domaines d’application touchés. Il nous semble cependant primordial de porter notre attention sur deux caractéristiques inhérentes à cette approche, qui nous en compliquent l’accès.

Rappelons que cette théorie a été élaborée dans le cadre spécifique des sociétés occidentales (française et américaine essentiellement), au travers d’un consciencieux décorticage de leur héritage littéraire en matière de philosophie politique. Or comme le disent eux-mêmes les auteurs « pour décrire chacun de ces ordres de généralité [...] nous devions

être particulièrement attentifs à notre langage de description. Il fallait éviter d'importer des références à des formes de généralité étrangères, ce qui aurait pour effet de transformer, comme c'est souvent le cas en science sociale, un constat en critique. » (L. Boltanski, L.

Thévenot, 1991). Ceci implique que dans le cadre de sociétés étrangères aux « appareillages

métaphysiques » différents (P. Juhem, 1994), la translation des « grandeurs » identifiées dans

leur ouvrage de référence n’est pas immédiate. Or nous allons justement devoir analyser des exercices de recherche de formes de coordination interindividuelles en Bolivie, en Equateur et au Mali. L’identification avec détails et certitude des « grandeurs » en jeu dans les régimes de justification propre à chacune de ces sociétés123 n’étant pas le sujet de notre recherche, nous

122 L’une des hypothèses posées par L. Boltanski et L. Thévenot est justement que « l’identification des mondes est une phase nécessaire à la construction des accords » (L. Boltanski, L. Thévenot, 1991)

123 Bien sûr la proximité socio-historique de l’Equateur et de la Bolivie peut laisser supposer que des conventions collectives de justice comparables y seraient en vigueur… Il faut néanmoins prendre garde à ne pas confondre les contextes andins (en Bolivie) et amazonien (en Equateur), ni associer les références politiques traditionnelles ou les

concentrerons essentiellement notre analyse sur l’identification des « régimes de justification » (en dehors de ceux volontairement suscités au travers des questionnaires écrits et des interviews), et l’analyse de ces « scènes courtes » (moments d’une réunion, d’une discussion informelle ou d’une interview). Nous tâcherons bel et bien de clarifier les principes semblant soutenir les argumentations, mais ne prétendrons pas qu’il s’agisse dans la société envisagée, d’un « principe supérieur commun » disons « localement constitué ».

La seconde critique qu’il nous semble important de formuler ici concerne l’une des hypothèses fondamentales de la théorie, à savoir l’aptitude d’emblée conférée à tous, indistinctement, de pouvoir faire appel à la logique de chacune des « cités ». Même si les auteurs nuancent quelque peu leur propos en précisant que ce travail se positionne dans « des

sociétés critiques au sens où les acteurs disposent tous de capacités critiques, ont tous accès quoique sans doute à des degrés inégaux, à des ressources critiques et les mettent en œuvre de façon quasi permanente dans le cours ordinaire de la vie sociale » (L. Boltanski, 1990), il

n’en demeure pas moins qu’ils évacuent (ou du moins mettent au second plan) les questions de degré d’instruction, d’aisance oratoire, et de contexte de réception du message. Or ces questions, qui nous renvoient à une analyse du type stratégique ou « bourdieusienne » en attirant notre attention sur les jeux de pouvoir, semblent être d’autant plus pertinentes dans le contexte des pays du sud où les inégalités entre individus sont souvent plus marquées que dans nos sociétés occidentales124. La maîtrise même d’un langage commun entre toutes les personnes impliquées dans le processus de recherche d’un accord n’est pas assurée : en Equateur nos partenaires locaux parlent espagnol et/ou quechua, et au Mali, ils parlent français et/ou bambara. Cette critique suggère donc de questionner sur le terrain les conditions dans lesquelles se déroule la recherche de l’accord : permettent-elles aux différentes parties prenantes de l’échange d’avoir accès à l’ensemble (ou tout au moins à un même nombre) des registres de justification acceptables par les autres ? Ceci n’est pas sans rappeler notre troisième hypothèse de recherche, pour laquelle il nous semble pertinent de mobiliser l’approche stratégique développée par L. Mermet dans le cadre de la gestion environnementale, et notamment d’étudier en quoi les conditions de déroulement de la recherche de l’accord permettent ou non de limiter ce qu’il appelle « les dispositifs de forçage » (L. Mermet et al., 2004)125.

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