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La tentative pour résoudre la contradiction entre le capital sidérurgique et le capital des industries de transformation et pour effectuer les choix stratégiques qu

Dans le document La sidérurgie française, 1945-1979. (Page 50-52)

Sidérurgie Industries de transformation 1954

2.13. La tentative pour résoudre la contradiction entre le capital sidérurgique et le capital des industries de transformation et pour effectuer les choix stratégiques qu

s’imposent : le Plan intérimaire de 1960 et le 4e Plan

La poursuite de l'expansion, y compris pendant la dépression de 1958 que connaissent les autres sidérurgies, l'avènement de la Ve République, l'amélioration continue des ré- sultats financiers font que l'optimisme mesuré se transforme en euphorie. Sociétés sidé- rurgiques et pouvoirs publics décident non seulement de rattraper le retard pris dans la réalisation du 3e Plan, mais aussi d'atteindre des objectifs supérieurs par un plan intéri- maire de 18 mois (juillet 1960 - décembre 1961). Il s'agit de parvenir à une production de 18,5 Mt et à une capacité de 20 Mt en 1962.

L'effort supplémentaire d'investissements (2.600 MF) devra porter en priorité sur les opérations susceptibles de développer la production de fonte, c'est-à-dire essentielle- ment la construction de hauts fourneaux nouveaux et l'installation d'ateliers d'agglomé- ration de minerai. Sept ateliers d'agglomération seront réalisés, portant la capacité française de 6,7 Mt à 16,1 Mt en 1963. Les travaux de l'usine de Dunkerque ont com- mencé en 1959. L'usine est dimensionnée pour 1,5 Mt en première tranche (avec deux hauts fourneaux de 8,50 m de creuset, une aciérie à oxygène pur, un train à large bande et une tôlerie forte) et pour 4 Mt en deuxième tranche. En 1960, Usinor dote son usine de Denain d'un convertisseur à oxygène pur OLP.

Sollac parvient à doubler la capacité de son train à large bande (de 1 à 2 Mt/an). Sur- tout de Wendel a annoncé la construction d'une usine neuve intégrée dans l'étroite vallée de l'Orne (où elle a déjà les deux usines de Joeuf et de Moyeuvre à côté de l'usine Sidé- lor d'Homécourt), dimensionnée en dernière phase à 4 Mt/an, avec cinq hauts fourneaux neufs, allant de 8 à 12 mètres de creuset (les plus grands d'Europe), une aciérie à oxy- gène pur et des "grands trains de laminoirs modernes" (on parle entre autre d'un "train à large bande", mais un certain flou est gardé sur le programme). Ces installations doivent se substituer progressivement aux douze vieux hauts fourneaux de Joeuf et Moyeuvre, aux dix convertisseurs Thomas et aux seize laminoirs. Elles produiront quatre fois plus, avec un nombre équivalent d'ouvriers. Les de Wendel parient sur le minerai lorrain et sur la poursuite de la croissance, condition pour qu'ils puissent financer leur Programme de Joeuf. Par ailleurs, un projet ancien d'usine sidérurgique à Bône en Algérie est repris dans le cadre du Plan de Constantine. Schneider serait le maître d'oeuvre.

Le 4e Plan (1961-1965) est marqué par la tentative gaulliste de réconcilier les intérêts des sociétés sidérurgiques et des sociétés de l'industrie de transformation française, pour donner à la France une industrie puissante et compétitive. La sidérurgie française doit à la fois répondre largement à la demande intérieure et continuer à exporter. « Les indus-

tries mécaniques sont au premier rang des industries clientes de la sidérurgie ; or leur expansion ne sera pas freinée d'ici à 1965 par une saturation des besoins de consomma- tion et la demande de biens d'équipements dans le monde entier est immense ».

L'objectif fixé est donc de porter la capacité de production d’acier de 17,8 Mt en 1960 à 24,5 Mt en 1965, dont 6,6 Mt à oxygène pur (soit 25%). Ces objectifs, s'ils étaient réalisés, permettraient également de réduire l'écart avec l'Allemagne et d'éviter un affrontement trop dur avec la classe ouvrière. La mécanisation intégrale ne réduirait pas trop fortement l'effectif, si elle se faisait à l'occasion d'un accroissement de capacité. On l'a vu pour la mécanisation des mines de fer. En jouant intelligemment sur les en- trées et les départs, l'ajustement de l'effectif pourrait se faire sans trop de gros remous, d'autant plus que les sociétés lorraines entendent investir en Lorraine, au moins pour la

durée du 4e Plan. Le programme comprend : douze hauts fourneaux neufs, dont sept de plus de 8 m de diamètre de creuset, treize aciéries nouvelles dont sept à oxygène pur, neuf machines de coulée continue dont sept pour la production d'aciers fins et spéciaux. 50% de la capacité de laminage sera axé sur les produits plats. Surtout, il est prévu que la sidérurgie se dote d'un grand nombre de trains dans toutes les catégories de produits : deux trains continus à billettes (demi-produits relaminés ensuite), trois trains continus à fers marchands, deux trains continus à fil, trois trains continus à feuillard, surtout deux nouveaux trains à large bande (Dunkerque et vraisemblablement Joeuf), deux trains continus à froid (Sollac), deux trains à tôles fortes. Et vingt trains anciens doivent être modernisés. L'effort est considérable.

La productivité doit s'accroître fortement. La proportion d'agglomérés dans le mine- rai enfourné passera de 15,6% en 1960 à 51,0% en 1965. La pression et la température du vent soufflé dans les hauts fourneaux seront augmentées. On injectera du fioul dans les tuyères. La « mise au mille » de coke diminuera de 972 kg à 850 kg. Le nombre de tonnes par ouvrier et par an s'élèvera de 120 à 165 t. Malgré cela, l'effectif ouvrier aug- mentera de 130.500 à 145.000. La sidérurgie française se donne deux sources d'approvi- sionnement en minerai de fer : d'une part le minerai lorrain, dont la compétitivité est assurée en l'enrichissant (cela consiste à séparer le fer d'une partie de sa gangue calcaire ou siliceuse avant de l'enfourner, donc d'accroître la teneur en fer de la charge) et en le dosant judicieusement (mélanges auto-fondants) ; d'autre part le minerai riche d'Ou- tre-Mer, dont l'extraction est réalisée par des sociétés, notamment la MIFERMA, que viennent de constituer un ensemble de sociétés françaises et européennes. Une deuxième usine littorale est envisagée, avec comme promoteur la Sollac. Les études se- ront réalisées au cours du 4e Plan et l'usine serait réalisée au cours du 5e Plan. On envi- sage d'équiper les laminoirs d'instruments de mesure et de contrôle pour préparer leur automatisation. Au cours du 4e Plan, la Moselle canalisée jusqu'à Frouard sera ouverte et les travaux pour la mise au gabarit de 1.350 t du canal Valenciennes-Dunkerque se- ront commencés.

Le tournant stratégique semble être pris. L'accent est mis sur les produits plats, l'acier à oxygène pur et l'agglomération du minerai. Les installations nouvelles doivent se substituer aux anciennes, qu'on n’aura plus à « rapiécer ». La nécessité d'une liaison étroite avec les industries transformatrices pour définir des nuances nouvelles d'acier et des parachèvements nouveaux de produits laminés est affirmée. Le patronat de la sidé- rurgie commence à reconnaître qu'il est plus profitable pour l'économie nationale et pour la sidérurgie elle-même d'exporter des produits manufacturés plutôt que de l'acier laminé. Du retard a été pris, des erreurs ont été faites, mais tout peut être rattrapé et dans de bonnes conditions.

Mais autant les projets de travaux sont importants, autant leur financement est incer- tain. Les sociétés présentent un plan de financement qui laisse, par rapport au coût des travaux envisagés et aux charges de remboursement des emprunts passés, un « solde non couvert » de 3.500 MF sur 11.600 MF en hypothèse moyenne et de 1.900 MF sur 12.200 MF en hypothèse forte. C'est beaucoup. Une fois de plus une bataille a lieu entre le patronat de la sidérurgie et l'État qui doit tenir compte des industries de transforma- tion. La Commission du 4e Plan fait des recommandations qui sont un compromis : d'un côté un relèvement des prix de l'acier, le maintien du régime particulier d'amortisse- ment, l'accès le plus large au marché financier français et éventuellement étranger, le maintien et l'élargissement du régime de bonification des intérêts des emprunts obliga- taires, et divers aménagements et allègements fiscaux de l'autre, un effort supplémen-

taire des sociétés en matière d'augmentation de capital. Mais, il y a plus grave encore que ce plan de financement peu élaboré. Le vaste programme du 4e Plan a des pieds d'argile. Sa réalisation suppose la poursuite de l'expansion. Les besoins en investisse- ments sont égaux à 1,2 fois le chiffre d'affaires de 1960 de l'ensemble de la sidérurgie. Ils supposent que le résultat brut d'exploitation soit constamment supérieur à 15% du chiffre d'affaires. Les réserves des sociétés au début du Plan sont de l'ordre de 1.000 MF, soit moins du dixième de ce qui est nécessaire. Tout est fondé sur les résultats fu- turs au jour le jour.

Dans le document La sidérurgie française, 1945-1979. (Page 50-52)

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