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La bataille pour la constitution en France d’un vaste groupe industriel inté gré, du minerai de fer à la mécanique et à l’ingénierie Usinor et Sacilor se dispu-

Dans le document La sidérurgie française, 1945-1979. (Page 114-116)

L’entrée en scène de la nouvelle classe ouvrière 1968-

4.10. La bataille pour la constitution en France d’un vaste groupe industriel inté gré, du minerai de fer à la mécanique et à l’ingénierie Usinor et Sacilor se dispu-

tent le contrôle de Creusot-Loire. L’échec d’Usinor et la constitution de Marine-Wendel

Au printemps 1974 une occasion se présente pour les sociétés sidérurgiques françaises. Marine-Firminy (qui détient en 1973, entre autres, 12% du capital de Sacilor) gagne son procès contre Empain-Schneider pour rupture de l’accord d’équilibre (50/50) qu’elles avaient passé en constituant en 1920 le holding Marine-Schneider, contrôlant Creu- sot-Loire (60,0%). Empain-Schneider avait en effet racheté en bourse, fin 1973, 34% des actions de Marine-Firminy. Détenant ainsi chez son partenaire la minorité de blo- cage, il prenait de fait le contrôle de Creusot-Loire. Or, Creusot-Loire, c’est à la fois le premier producteur français d’aciers spéciaux, le deuxième fabricant d’emballage métal- lique par sa filiale Farembal, un ensemble industriel de mécanique lourde, et par sa fi- liale Framatome, le principal fabricant français de centrales nucléaires (devant réaliser d’ici 1982, 23 tranches nucléaires pour EDF). Le chiffre d’affaires de Creusot-Loire a progressé rapidement et a atteint en 1973, 67% de celui de Sacilor-Sollac. Suite au pro- cès, Empain-Schneider doit revendre les actions de Marine-Firminy qu’il a achetées. Des négociations s’engagent alors avec Usinor et de Wendel. Par ailleurs, Saint-Gobain Pont-à-Mousson veut se débarrasser de ses actions dans les Aciéries de Dilling, en les vendant à Marine-Firminy ou en les échangeant contre les 30% d’actions que détient Marine-Firminy dans Davun.

Les enjeux sont considérables. Pour de Wendel prendre le contrôle de Ma- rine-Firminy, c’est atteindre deux objectifs : d’une part constituer un groupe industriel très intégré de la mine à la mécanique, et ainsi, pour une fois, ne pas manquer un tour- nant stratégique historique décisif ; d’autre part devenir le maître sans partage de Saci- lor-Sollac, des Aciéries de Dilling en Sarre, gros producteur de tôles fortes, devenir un monopole quasi absolu sur l’emballage métallique (Férembal détenu par Ma- rine-Firminy, s’ajoutant à Carnaud Basse-Indre et aux Forges de Gueugnon détenues par de Wendel). Pour Usinor, contrôler Marine-Firminy, c’est être au rendez-vous des grands choix stratégiques, d’être le groupe sidérurgique français le plus solide et le plus puissant, d’avoir des initiatives dominantes et ne plus être gêné par les décisions à contre-temps de de Wendel, et peut-être d’avoir un droit de regard dans la sidérurgie lorraine, tout au moins d’avoir une place importante dans les aciéries de Dilling, dans Sollac et indirectement dans Solmer.

Pour les pouvoirs publics, Usinor présente plus de garanties, une meilleure rentabili- té, une plus grande capacité financière, un état-major soudé capable de faire le poids face à Empain-Schneider. Mais lui donner la préférence, c’est rompre l’équilibre entre Usinor et de Wendel, et c’est risquer une opposition ou un recours de la commission de

Bruxelles, gardienne en vertu du traité de la CECA des conditions de la concurrence. Marine-Firminy, comme Empain-Schneider d’ailleurs, craignent que de Wendel ne soit pas capable d’assurer les financements nécessaires au programme d’investissement de Creusot-Loire. Mais ils sont attirés cependant vers cette solution, en raison des ambi- tions plus limitées des de Wendel sur Creusot-Loire. De plus, DNEL, holding d’Usinor, est lié à la Banque de Paris et des Pays-Bas, elle-même liée à la CGE, principal concur- rent d’Empain-Schneider sur de nombreux marchés.

Un compromis semble avoir été cherché dans un partage entre Usinor et de Wendel : Usinor prenant le contrôle de Creusot-Loire et de Wendel prenant les participations de Marine-Firminy dans la sidérurgie de l’Est et le secteur du fer blanc. Pour dénouer en sa faveur les négociations qui durent, DNEL lance le 2 décembre 1973 une offre publique d’échange d’actions de Marine-Firminy contre des actions d’Usinor plus une « soulte » de 45 francs, soit un équivalent de 138,07 francs l’action, en laissant entendre qu’il a l’accord du gouvernement et de la commission de Bruxelles.

Les réactions sont très vives. DNEL précise qu’il n’a pas l’intention de s’immiscer dans la sidérurgie lorraine et qu’il est prêt à céder à de Wendel la participation de Ma- rine-Firminy dans Sacilor, s’il en prend le contrôle, et même dans les aciéries de Dil- ling. La Compagnie Lorraine et Financière (la CLIF), nouvelle appellation du holding de Wendel, réagit en rachetant les actions Marine-Firminy à un prix plus élevé (149 F) que celui proposé par Usinor. Marine-Firminy encourage ses petits actionnaires à ven- dre à de Wendel. En quelques jours, 20% des actions de Marine-Firminy passent dans les mains de la CLIF. La commission de la CEE demande à Usinor de suspendre son OPE et à la CLIF d’arrêter ses achats. Face à ce blocage, la CLIF et Schneider S.A. an- noncent le 28 décembre 1974 qu’ils ont l’intention de constituer « un vaste holding au- tour de Marine-Firminy, diversifié mais homogène et équilibré ». Marine-Firminy fait aussitôt ratifier cette solution par ses actionnaires. La première contre-attaque de de Wendel, puis la deuxième lancée par de Wendel et Empain prennent de court tout le monde. DNEL a perdu. Successivement le gouvernement, puis la commission de Bruxelles, donnent leur accord sur le plan Empain-de Wendel.

Finalement la bataille aboutira aux résultats suivants. La participation de Schneider S.A. dans Marine-Firminy est réduite à 10%. Empain aura le commandement effectif de Creusot-Loire, mais la compagnie financière qui coiffera Creusot-Loire devra toujours rester 50/50 entre Schneider S.A. et Marine-Firminy. La CLIF fait apport à Ma- rine-Firminy de ses principales participations dans le domaine industriel, commercial et financier, et en devient l’actionnaire majoritaire avec 60% du capital. Saint-Gobain Pont-à-Mousson cède à Firminy sa participation dans les aciéries de Dilling (34%) dont Marine-Firminy possède déjà 25%.

Le nouveau Marine-Firminy contrôle désormais totalement Sollac qui était encore détenu à 21% par les Aciéries de Dilling. En échange, SGPM reçoit les actions que Ma- rine Firminy détenait dans les sociétés dont SGPM était l’actionnaire principal : Davum, Tréfilunion, Actuma, Société financière, et les Aciéries de Micheville. Saint-Gobain Pont-à-Mousson vend en bourse les 16% de Sacilor qu’il possède, et vend à Sacilor les 51% de Tréfilunion qu’il vient d’acquérir. Marine-Firminy prend le nom de Marine- Wendel en mars 1975.

4.11. Pendant le boom de la demande et des prix de l’acier, la crise des sidérurgies

Dans le document La sidérurgie française, 1945-1979. (Page 114-116)

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