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Tableau récapitulatif des dédicaces aux déesses Mères

inscriptions personnages supports formulaires statuts divinités datation et lieux et gentes

ILN 14 – R 39 D. Demarius autel ex-voto citoyen Matris Augustis Ier/IIèmesc.

Vienne Messulus calcaire

ILN 15 – R 40 Cn. Pompeius Quartus autel u.s.l.m. citoyen Matris Augustis ind. Vienne (Pompeia)

ILN 16 – R 41 C. Titius Sedulus autel ex-voto citoyen Matris Augustis ind. Sainte-Colombe (Titia) calcaire

ILN 359 – R 67 T. Cassius Eros autel sacrum riche évergète Matris Augustis 50 à 200 Grenoble (Cassia) calcaire

ILN 662 – R 129 M. Helvius bloc ex-voto citoyen Comedovae ind. Aix-les-Bains Iuuentius calcaire auguste

ILN 693 – R 131 M. Carminius bloc ex-voto citoyen Dominae > à 150 Brison-St-Innocent Magnus calcaire pro salute

u.s.l.m.

ILN 694 – R 132 L. Daverius M... plaque u.s.l.m. citoyen Matris Augustis ind. Brison-St-Innocent calcaire

ILN 695 – R 133 L. A...rius ...inus ind. ex-voto citoyen Matris Augustis ind. Brison-St-Innocent sacrum

170 Le site gallo-romain de Châteauneuf

171

Le triomphe de Vienne, la

Déesse tutélaire

conduisant un bige, coiffée par une

Victoire

172 A l’échelle de la Provincia Narbonensis, comme à celle des Alpes occidentales, le panthéon viennois est sans aucun doute l’un des plus riches et des plus complexes.924 Portée par ses élites, nous assistons à la mise en place d’une véritable acculturation religieuse, et ceci dès le début du Haut-Empire. Les notables sont à l’origine d’une religiosité spécifique accompagnant leur intégration et leur promotion civique, en concomitance avec l’urbanisation et la romanisation précoce de leur territoire. L’étude des documents inscrits découverts sur celui-ci permet de cerner notablement les divers aspects de la société allobroge, « s’imposant comme des sources irremplaçables pour connaître les croyances ».925

Les élites ont tout d’abord, par des donations, contribué très largement à la diffusion du culte impérial, à travers l’image de la Maison divine et de la déesse Roma, laissant notamment des traces archéologiques venues jusqu’à nous. Parallèlement, s’appuyant sur les puissantes fratries locales, la cité a favorisé l’établissement précoce du flaminat impérial, l’instauration d’un flaminat de la Jeunesse servant de structure à la future aristocratie, offrant aux femmes de haut rang la possibilité d’accéder à un sacerdoce, le flaminicat, et encourageant, enfin, le corporatisme séviral.

Après avoir adopté des manières romaines pour honorer l’Empereur, les Viennois, comme d’autres communautés alpines, tendent à faire de même en vénérant collectivement les dieux926. Socle de leur religion et de leur panthéon, les citoyens fortunés rendent hommage à une « triade » originale composée de Mercure, Mars et Jupiter. Il faut cependant nuancer certaines impressions, car une hiérarchisation des divinités ne peut qu’apparaître délicate, en raison de la diversité des cultes et des aléas des découvertes archéologiques.

Mercure est le dieu primordial des Allobroges. Populaire et omniprésent, notables, grandes familles, évergètes, toutes les strates de la société vénèrent son caractère romain, que ce soit sur les témoignages épigraphiques ou iconographiques. Son prestige est d’autant plus fort, qu’il s’accompagne de celui de sa parèdre, Maïa. Le dieu Mars, à la romanité affirmée927, est, lui, essentiellement honoré par les magistrats de la cité. Son flaminat, s’inscrivant dans les

cursus de ceux-ci, le singularise des autres dieux gréco-romains. Il faut aussi noter le fait que

son culte se soit particulièrement développé dans la partie orientale du territoire, dans les pagi d’Apollon et d’Auguste, autour de Boutae et de Genava. Le troisième dieu étant l’objet du plus grand nombre d’hommages, Jupiter, se distingue chez les Allobroges pour son caractère capitolin et le fait qu’il soit vénéré par les plus puissantes gentes, dans les principales agglomérations urbaines.

Derrière la triade, Apollon, à la forte connotation celtique, a avant tout un caractère plébéien de guérisseur ; alors que l’image d’Hercule, elle, est loin de celle qu’il a ailleurs dans les Alpes, les témoignages figurés faisant de lui le « pendant iconographique » de Vénus. Le prestige d’Hercule demeure, néanmoins, privé et très localisé, dans quelques familles.

924Cartes, p. 52 à 54, 488 à 502.

925F. Bérard, L’épigraphie : une mine d’informations très variées, in H. Savay-Guerraz, A. Destat ( sous la dir.), Rencontres en Gaule

romaine, 2005-Expo. Lyon, 2005, p. 35.

926S. Cibu, Villes alpines et religion civique, in La ville des Alpes occidentales à l’époque romaines, Actes du colloque international,

Grenoble, 6-8 Octobre 2006, Grenoble, 2008, p. 138.

173 D’autres documents exceptionnels marquent la grande diversité des dieux gréco- romains, caractérisés le plus souvent par des personnalités traditionnelles : les Dioscures dans les pagi de Diane et d’Apollon, mais aussi Esculape, Silvain, ou plus rare encore les témoignages se référant à Saturne, Pluton, Neptune ou Quirinus…

Longtemps mésestimé, le rôle des déesses gréco-romaines n’est plus à négliger, leurs cultes étant portés, le plus souvent, par certains puissants personnages de Vienne. Toutefois, c’est Maïa, la parèdre du dieu primordial du panthéon, qui est la déesse la plus importante d’entre toutes. Elle est honorée, seule ou avec Mercure, sur l’ensemble du territoire, dans les grands centres comme dans les hauts sanctuaires, son culte dépassant ceux d’Apollon et d’Hercule. Quasi absent dans le reste de la province et dans les Alpes, son culte apparaît comme des plus singuliers et des plus significatifs dans la cité. Par sa personnalité toute gréco-romaine, elle est dans le cœur des notables tout à côté de Mercure, Mars et Jupiter.

Vénus, elle, est la divinité par excellence des documents iconographiques, les témoignages la figurant étant plus nombreux que pour Hercule ou même Mercure. De plus, la statuaire, se référant à Vénus, se différencie par sa qualité, son classicisme, et le fait qu’elle soit majoritairement localisée dans les agglomérations de Vienna et Boutae.

Comme pour les dieux gréco-romains, les Allobroges honorent, parallèlement, une grande diversité de déesses : Minerve et Junon, les divinités capitolines, à Vienna, Diane la chasseresse, Fortune, Victoire, Cérès ou encore Abondance…

Comme nous l’avons vu, les religions à Mystères ont une situation à part dans l’affection des élites viennoises. En premier lieu, le culte de Cybèle, proche de celui de l’empereur, surtout à partir d’Antonin le Pieux928, est largement implanté à Vienna, alors que

celui d’Isis, formellement romanisé, est attesté autour de Cularo.

La diversité des hommages se retrouve également dans les témoignages honorant les divinités indigènes, dont la variété, le caractère énigmatique ou local rendent parfois l’interprétation difficile. Toutefois, on est surtout frappé par la pérennité de leurs cultes tout au long de la période du Haut-Empire. Ainsi, Vintius est le dieu référant du pagus de Diane, sa vénération étant favorisée par les personnages les plus importants du district. Les déesses Mères, elles, comme dans l’ensemble de la Gaule, sont honorées par de nombreux citoyens. Les pratiques des notables permettent d’appréhender les particularismes du panthéon viennois, de comprendre l’intégration des élites à travers le développement d’une religiosité répondant au syncrétisme romain. La géographie cultuelle s’inscrit dans la complexité religieuse des croyances allobroges. Les divinités les plus vénérées dans la cité ont un caractère protecteur, de prospérité, de fertilité et de fécondité, expliquant les cultes rendus à Mercure, Maïa, Mars, Jupiter, Cybèle, Isis ou encore aux déesses Mères.

La mise en place de ces cultes est avant tout une prérogative relevant de magistrats et d’un conseil929. Il est donc indispensable de s’intéresser à présent aux statuts, aux fonctions, à

la place dans les hiérarchies civiques et sacerdotales de ces évergètes et citoyens rendant hommage aux dieux du panthéon, ce qui nous donnera la possibilité de saisir l’intégration et la promotion des élites à travers leur piété. En effet, la vie civile et la vie religieuse, se calquant sur le mode de vie de la société romaine, sont étroitement liées.

928B. Rémy, N. Mathieu, Les femmes en Gaule romaine (Ier siècle av. J.-C. – Vème siècle ap. J.-C.), Paris, 2009, p. 154.

929N. Laubry, Marcus Herennius Albanus, affranchi lyonnais, adepte du culte de Mercure , in H. Savay-Guerraz, A. Destat ( sous la dir.),

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