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LES STATIONS DE BÉNÉFICIAIRES

5. L E SANCTUAIRE DE LA STATION À LA LUMIÈRE DES TÉMOIGNAGES ARCHÉOLOGIQUES , ÉPIGRAPHIQUES ET PAPYROLOGIQUES

5.1. La station : espace sacré et fonctionnel

Nous avons déjà évoqué plus haut les documents du dossier où il est question d'une construction ou d'une restauration d'un édifice que le bénéficiaire a pu effectuer à titre privé, à l'image des personnalités relativement bien placées dans l'échelle sociale, gouverneurs, procurateurs, membres de l'élite municipale, commandants de troupes (préfets ou tribuns) ou même centurions 354. Les nouvelles découvertes d'Osterburken et de Sirmium ainsi que notre

étude détaillée des stations et de leur environnement immédiat nous invitent à une relecture attentive des documents de ce type lorsqu'ils sont issus du contexte d'une station. Les signes d'une intervention, réorganisation ou transformation qui s'en dégagent et qui sont dus à un geste personnel du bénéficiaire concernent de ce fait le complexe de la station et plus précisément son espace sacré. Ils nous permettent de nous faire une idée plus précise de l'organisation concrète de la station et du cadre dans lequel les beneficiarii accomplissaient leurs fonctions.

351 CBI, 834 : Annexe 1.3. Sur la route : Roldan Hervas 1975, 266. Pline, Histoire Naturelle, 3.3.26

mentionne les deux toponymes antiques Segisama Iulia et Segisamo, sans doute proches l'un de l'autre. A Tarragone : II, 4085 - ILS, 5405 - RIT, 39 ; sur l'exèdre dégagée à Osterburken dans les fouilles du sanctuaire : supra p. 136.

352 CBI, 837 : Annexe 1.3 ; Le Roux 1982, 130 soutient la thèse de l'origine locale ; d'un avis différent,

Alföldy 1987, 496 ; sur la route : Roldan Hervas 1975, 266 et Palli Aguilera 1985, 68-70. Un poste de douane se trouvait au nord des Pyrénées, sur le versant gaulois à la Cluse-Haute, comme le suggère une inscription découverte dans l'église de Théza : cf Grau 1985, selon lequel une présence militaire a pu prendre place dans l'enceinte établie sur la rive droite de la Rom.

353 I 140b - AE, 1995, 961 (AE, 1994, 1068). 354 Annexe 15.

Les travaux relatifs à un espace sacré ou à un bâtiment à caractère sacré nécessitaient une nouvelle consécration comme le montre l'expression qui figure sur l'autel de L. Memmius Iuvenis, Nymfae Apollinares renouatae meritoque aris dedicandae quod

utrumque a se factum gaudet pro se et suis. Iuvenis a consacré cet autel au cours de son

stationnement à Stockstadt en 166 p.C., soit un an avant que L. Flavius Paternus puis C. Iulius Petunnatius ne soient détachés dans le poste 355. Son autel, le premier témoignage

daté de l'importante série épigraphique de Stockstadt, ne laisse pas de doute sur l'existence antérieure d'un sanctuaire ou espace sacré en ce lieu. La mention de plusieurs autels (aris) remis en place et consacrés par ses soins (renouatae / dedicandae / utrumque a se factum) confirme qu'il n'était pas le premier dédicant en 166 p.C. 356 A Stockstadt comme à

Osterburken, l'existence d'un sanctuaire aux Nymphes est par conséquent antérieure à 166 p.C. et au premier autel daté. Iuvenis n'explicite pas les circonstances qui ont suscité son geste, mais la chronologie coïncide avec le climat de pressions extérieures ressenties sur le Rhin et le long des frontières de l'Empire 357. A Osterburken, comme nous l'avons vu, c'est

précisément à cette période, vers 165 p.C. (phase 3), que les fouilles ont permis de dater les travaux de réaménagement de la station et la démolition du petit temple en bois.

Une fois consacrés, les autels et l'espace sacré sur lequel ils étaient érigés ne devaient pas être souillés. C'est de cela dont voulait s'assurer le bf cos L. Virilius Pupus en poste à Sisak-Siscia en Pannonie Supérieure, comme l'atteste l'interdiction qu'il fit graver sur son autel consacré à IOM Héliopolitain 358. Comme ses collègues en poste à Siscia, Pupus avait

dû ériger son autel sur l'espace sacré de la station dont l'existence est attestée dans l'épigraphie jusque dans les années 222-235 p.C., à une époque où deux bénéficiaires étaient postés ensemble dans la station 359. Les bénéficiaires du procurateur en poste à Siscia étaient

peut-être employés en relation avec des activités annonaires : réquisitions, acheminement de convois destinés au ravitaillement des troupes, perception de taxes. Certains d'entre eux (dont deux ensemble) consacrent en effet leur autel à Cérès. Ce culte, s'il n'est pas attesté ailleurs parmi les bénéficiaires, est en revanche bien représenté parmi les militaires ou les civils employés au service du ravitaillement. Leur présence locale pourrait s'expliquer par la

355 CBI, 184 (un poisson orne l'une des faces de l'autel consacré aux Nymphes ; voir aussi CBI, 149 à

Osterburken) avec CBI, 193, 167 p.C., CBI, 194 et 195, 167 p.C., et peu après cette date. Sur ces bf cos, voir supra p. 138-139. Le premier consacre son autel à IOM, Junon Reine, Mercure et le Génie du lieu, divinités que le second invoque aussi mais séparément, sur les deux autels qu'il érige à Stockstadt, l'un dédié à la triade des bénéficiaires (IOM, Junon et le Génie du lieu), l'autre, à Mercure. Quant aux Nymphes, nous avons vu précédemment que les bénéficiaires ne les mentionnent jamais ailleurs, même si leur culte est attesté dans le contexte même de la station d'Osterburken.

356 Sur le site et les fouilles : Römer/H, 1987, 479-481 ; plan fig. 454, p. 480. Le dernier témoignage d'un

bénéficiaire en poste à Stockstadt se situe en 208 p.C. (CBI, 190) ce qui n'exclut pas que la station ait été occupée après cette date.

357 CBI, 190.

358 CBI, 304 : ne quis in hac ara porcos agi facere uelit. Ara pourrait être employé pour area (espace, soit

l'espace sacré sur lequels les autels étaient érigés) plutôt que pour ara (autel) ou hara (étable), dans cette défense relative à la protection de l'aire sacrée. Pour des parallèles, par ex. à Rome : VI, 826 - 30937b - ILS, 4914, ou XI, 944 - ILS, 4909.

359 CBI, 311 (222-235 p.C.) et CBI, 303 : 227 p.C. La même année à Sopron-Scarbantia (au nord, entre

Vienne et Szombathely-Sauaria) : CBI, 315. Parmi les bénéficiaires connus à Siscia, C. Iulius Flav(us) célèbre le renouvellement de son séjour dans le poste en consacrant un autel à IOM : CBI, 310. On ne lui en connaît pas d'autre en ce lieu. Sur le même site : CBI, 313, épitaphe d'un vétéran, ainsi que la n. suivante.

localisation possible du siège du procurateur financier, dont on ignore encore s'il se trouvait à Siscia ou à Poetouio 360.

Un lieu sacré qui avait subi une violation ou pollution devait être purifié. La mise en garde contre toute tentative de souillure d'un lieu ou d'un monument consacré se rencontre surtout sur des monuments funéraires, en particulier dans les provinces orientales. Elle est généralement accompagnée d'une menace d'amende pour toute personne qui entraverait l'interdiction 361. A Bath en Bretagne, la purification du locus religiosus per insolentiam

dirutus a été assurée par un centurion reg(ionarius), c'est-à-dire un centurion en charge de la

supervision d'une région ou d'un district. Il était d'ordinaire à la tête d'un détachement militaire ou d'une vexillation, comme les centurions regionarii et les praepositi en poste par exemple dans la regio minière de Montana, à Carlisle, ou dans le castellum de Ribchester. Le terme dirutus révèle qu'il était question dans le cas précis d'une destruction, et celui d'insolentia, qu'elle est mise au compte d'un acte volontaire 362.

Sur l'autel qu'il érigea à Osijek-Mursa, en Pannonie Inférieure, le bénéficiaire du gouverneur Iulius Salutaris précisait qu'il avait remis en place des autels, aras in hunc locum

recollocauerit 363. Le locus en question devait certainement être l'espace sacré de la station

sur lequel il consacra à son tour son autel. Les autels auxquels il faisait allusion (ou du moins une partie d'entre eux) ont effectivement été découverts près du sien, en 1971, in situ et accompagnés de leur base. Il s'agit de celui T. Fl. Iustus de la légion IV Flavia, en poste à

Mursa en 164 p.C. 364, et de celui de Censorinius Maximus. Ce dernier célébrait ainsi la fin

de son service militaire, acc(epta) missione, qui coïncidait avec la fin de son séjour à

360 Bf proc. à Siscia : CBI, 307 et 308 ; voir aussi 309 : la dédicace à Cérès fait penser qu'il s'agissait de

deux bf pr[oc(uratoris)] – plutôt que de ceux d'un pr[aeses]. Pour le culte de Cérès et l'annone : CBI, 859, à Ostie, avec la mention du titre de patronus mensor(um) frumentatior(um) Cereris Aug(ustae). Ce patron était aussi celui des beneficiarii proc(uratoris) Aug(usti). Pour une dédicace à Cérès et à d'autres divinités en 194 p.C. de la part d'un tesserarius ou d'un quaestionarius, dans la capitale Carnuntum : Haensch 1997a, 694. L'ensemble des documents épigraphiques évoquant le procurateur financier de Pannonie Supérieure proviennent essentiellement de

Poetouio et de Siscia (avec les exceptions de Crumerum et Vienne : CBI, 286 et 363) : Haensch 1997a, 698-699,

avec une discussion sur la localisation à Poetouio ou à Siscia du siège du procurateur financier, p. 352-353.

361 Dans le dossier, par ex. CBI, 681-682 à Olympos ; CBI, 674 à Apameia Cibotos ; voir aussi CBI, 655 à Odessos.

362 VII, 45 - ILS, 4920 - RIB, 152 : locum religiosum per insolentiam dirutum Virtuti et n(umini) Aug(usti) repurgatum reddidit C. Seuerius Emeritus © reg(ionarius) ; sur la question : Glinister 1997, 65-66 avec Tacite, Histoires, 4.53. Sur les regionarii, par exemple à Ribchester au IIIe s : RIB, 583 et 587 : un centurion praepositus n(umeri) et regi[onis] ; un centurion regionarius en poste à Carlisle au tout début du IIe s., connu par une tablette de Vindolanda : Tab. Vindol., II, 250.8 - Bowman 1994, 19 et p. 28 : Annius Equester, © regionarius Luguualio. Il

pouvait avoir été chargé de superviser l'organisation du census sur toute la regio ; voir aussi IGR, III, 301 = 1490 (cité plus haut, à Antioche) ; AE, 1950, 105 - AE, 1944, 103 : à Környe en Pannonie Supérieure ; ides d'octobre 210 p.C. : reg(ionarius) sub cura Ful(uii) Maximi cos ; AE, 1953, 129 ; XIII, 2958 : à Sens-Agedincum en Gaule Lyonnaise ; AE, 1985, 724 et 738 ; voir aussi Alston 1995, 86-96, part. 93 et Davies 1989, 249, 176, 281. La présence de regionarii est également connue dans le district minier de Montana en Mésie Inférieure où le sanctuaire à Diane et Apollon était visité par l'ensemble des agents du pouvoir et des militaires détachés dans la région, centurions, bénéficiaires et autres : Bozilova 1987 ; Velkov 1988, 101-108 ; Speidel 1992a, 140-144.

363 CBI, 415. Les six autels de bénéficiaires connus sur le site sont tous consacrés à IOM.

364 Sur le détachement à Sirmium d'autres bénéficiaires d'un gouverneur de Pannonie issus de cette troupe,

et sur le rattachement de cette légion à cette époque à la Pannonie Inférieure et non pas à la Mésie : Mirkoviç 1994a, 354-356.

Mursa 365. C'est donc à l'endroit précis où ces autels ont été mis au jour qu'il convient

vraisemblablement de localiser le sanctuaire de la station des bénéficiaires 366. Comme

Iustus, le bf cos Iulius Iulianus, également détaché à Sirmium, avait lui aussi été recruté dans la légion IV Flavia 367. On soulignera enfin que le procurateur financier de la province avait

aussi ses bénéficiaires à Mursa, comme à Siscia et dans d'autres sites, par exemple dans le district des mines d'or d'Ampelum en Dacie 368.

Les circonstances qui ont entraîné la remise en place des autels de la station de Mursa dans une période postérieure à l'année 164 p.C. ne sont pas explicitées dans l'inscription. S'agissait-il d'un simple réaménagement de l'espace et de la disposition des autels pour des raisons de place, suite à une dégradation naturelle, ou de travaux de transformation de l'aire sacrée, au cours d'une réorganisation de la station, ou à la suite de la reconstruction d'un édifice tombé en ruines, comme on en connaît des exemples à Mayence, en Norique, à Atrans et à Tiffen, ou en Dacie, dans la station de Càhei-Samum 369? La station aurait-elle été

endommagée au cours des événements marcomaniques et des troubles qui ont suivi, alors qu'une partie des forces militaires romaines était engagées en Orient dans la guerre parthique? L'attaque du Norique par les Marcomans au début de 167 p.C. et leur avancée vers le sud, retenue par les troupes de Pannonie Supérieure, aboutit aux accords avec le roi Bellomar et la confédération marcomanique, soit les Quades et les Iazyges. A la même période, durant l'hiver 166-167 p.C., les Lombards et les Obii traversèrent le Danube et pénétrèrent jusqu'au coeur de la Pannonie Inférieure. Le premier traité de paix conclu avec les Marcomans se situe en 173 p.C. 370 Les travaux de réaménagement ou reconstruction ne

doivent certes pas systématiquement se comprendre dans un contexte ou un climat de violence et d'attaques, et il faut se garder d'une manière générale de tenter à tout prix de lier un événement particulier à la grande histoire. Signalons toutefois qu'à Osterburken, comme dans le poste voisin de Stockstadt, les signes d'un réaménagement des deux postes se situent vers 165-166 p.C., soit à une période où les pressions extérieures commencent à se faire ressentir avec force en Germanie et en Pannonie. Quant à la station de Sirmium, qui s'inscrivait dans un contexte géographique et chronologique proche de celui de la station de

Mursa, les traces de destruction et de restauration qui s'observent dans l'archéologie ont été

mises en relation directe avec les événements de la guerre des Marcomans et avec les pressions politiques portées contre le pouvoir romain 371.

365 CBI, 414. Il s'agit bien dans le cas de Maximus d'une formule qui indiquerait la fin du service, acc(epta) missione, de préférence à la fin d'un séjour dans une station comme le pense Sasel-Kos 1995a, 159 ; voir à ce sujet

l'emploi comparable de missus dans l'expression missus honesta missione et CBI, 888. A la différence, la fin d'une mission (munus) ou d'un stationnement (statio) dans un lieu s'exprime habituellement par des formules comme

expleta, emerita ou exacta statione : Annexe 5.

366 Ils se trouvaient à une profondeur de 2 mètres sous la Place Vladimir-Nazor.

367 I 16 et I 70, avec Annexe 3. Sur cette légion : voir supra p. 146-147 à propos de la station de Sirmium,

ainsi que Mirkoviç 1994a, 355.

368 CBI, 416 et Chap. V p. 245-246, avec la discussion sur l'hypothèse d'un contrôle réciproque entre les

deux types de beneficiarii.

369 Annexe 15, avec CBI, 131, 266 et 264, 533 dans la station de Càhei-Samum ou le sacrarium consacré

à Némésis, tombé en ruines, a été reconstruit complètement par l'un des bénéficiaires en charge de la station,

sacrarium uetustate dilapsum a solo restituit Cass(ius) Erotianus, bf cos agens in m[u]nere stat(ionis). 370 Sur le contexte historique : Fitz 1962, 33. Voir aussi CBI, p. 336.

En Bretagne, à Winchester-Venta Belgarum, un carrefour routier situé dans la partie méridionale de la province, le bénéficiaire du gouverneur Antonius Lucretius a lui aussi fait allusion à une remise en place ou en état, rest(ituit), sur l'autel qu'il consacra aux Matres d'Italie, des Germanies, des Gaules et de Bretagne 372. Il ne précisa ni la date ni la nature

exacte de son geste sur son autel, consacré dans le sanctuaire d'une station installée dans la région, probablement déjà au cours du IIe s. On ignore donc s'il s'agissait de la simple remise

en place ou en état de son propre autel, ou de plusieurs autels consacrés par ses prédécesseurs dans le poste et rassemblés sur l'aire sacrée du sanctuaire. Le caractère cosmopolitain des divinités invoquées ici s'explique sans doute par la situation de la station le long de la voie qui se dirigeait vers le sud de la province et permettait d'accéder à la mer et au continent. La seule autre trace d'une station dans le sud de la Bretagne provient nous l'avons vu de Dorchester-on-Thames, au nord de Winchester. L'exploitation de carrières un peu plus au sud, dans la Studland Bay, n'était peut-être pas sans rapport avec la présence d'une station de bénéficiaires dans la région, au croisement des voies fluviales et routières, à un endroit de transbordement des marchandises acheminées vers la Manche, puis le port de Boulogne-Gesoriacum et la Gaule, les Germanies et l'Italie, ou en sens inverse 373. Le

bénéficiaire en poste à Dorchester a entouré son autel d'une clôture, aram cum cancellis 374.

Il est possible qu'il ne s'agisse dans le cas précis que d'un petit enclos dressé autour de son autel, comme on en connaît autour de monuments funéraires 375. Mais l'évocation d'une telle

barrière dans ce contexte rappelle la clôture qui entourait à Osterburken l'ensemble de l'espace sacré de la station, l'isolant du reste du territoire et limitant son accès aux seules personnes autorisées. Une violation de la règle sacrée constituerait un sacrilège. La chaîne enroulée au centre d'une haste du type dit de bénéficiaires sur un monument funéraire de Périnthe – celui d'un bénéficiaire? – a pu avoir été utilisée d'une manière comparable. Sa présence à Périnthe pourrait s'expliquer par le statut de ce site, qui semble s'imposer parmi d'autres comme capitale provinciale de la Thrace 376. On retrouve une haste entourée d'une

telle chaîne sur le relief du monument funéraire du bénéficiaire G(---) Damianus, à Alexandrie, où il devait se trouver au moment de son décès. Ce bénéficiaire représenté avec un rouleau dans sa main faisait partie de l'officium du préfet d'Égypte 377.

372 CBI, 20 ; sur la situation de ce carrefour routier : Margary 1973, 90-100. La dédicace aux Matres de

diverses régions ou de différentes ethnies est attestée ailleurs en Britannia, dans un contexte militaire : VII, 238 -

RIB, 653 à York-Eburacum : le dédicant est un gubernator légionnaire ; voir aussi VII, 887 - RIB, 1988 à

Castlesteads-Uxellodunum : [Deabu]s [Mat]ribu[s] omnium gentium templum olim uetustate conlabsum G(aius)

Iul(ius) Cupitianus © p(rae)p(ositus) restituit.

373 Voir à ce sujet le commentaire à I 6 : Annexe 1.3 où il est question du plomb britannique acheminé en

Gaule ; ainsi par ex. un plomb fiscal de la st(atio) Arel(atensis) qui scellait des marchandises a-t-il été retrouvé à Londres : RIB, II.1, 2411.39 ; sur ces plombs : Chap. V p. 258 ; les transports maritimes avec le continent se faisaient aussi depuis le nord de la Bretagne, notamment depuis South Shields, en direction de la vallée du Rhin (à ce propos, voir supra le commentaire à CBI, 94, p. 150).

374 CBI, 12 à Dorchester ; sur le réseau de communications : Margary 1973, 165-167. 375 Par ex. VI, 5306 - ILS, 7930.

376 Sur l'interprétation du relief dans ce sens : Domaszewski 1902, 158-159 n. 2, à propos du relief publié

par Kalinka dans JÖAZW, 1, 1898, 117 dessin fig. 28 ; désormais : Sayar 1998, 84 (avec dessin; nous devons cette référence à R. Haensch), selon lequel il s'agirait d'un bénéficiaire, malgré la conservation des seules lettres D(is)

M(anibus) de l'inscription ; voir aussi Sayar 1998, 85 : ne pourrait-il pas s'agir d'une fustis? Sur le statut de Périnthe

comme capitale de la Thrace : Haensch 1997a, part. 329-332 et 665-671.

A Catterick-Cataractonium, le bf cos Q. Varius Vitalis a lui aussi remis en place (ou en état?) un autel dédié auparavant au deus qui uias et semitas commentus est. Cette dédicace est en relation directe avec la situation topographique du site mentionné dans les itinéraires anciens et établi dans une région de communications et de passage. C'est légèrement au nord de Cataractonium que se situait un croisement routier d'importance. Une voie bifurquait vers l'ouest en direction de Carlisle et de la partie occidentale du mur d'Hadrien (semita), alors que la route principale (uia) venant d'York, camp légionnaire et capitale de la Britannia Inferior, traversait la rivière Swale pour se rendre en direction du nord vers le mur d'Hadrien puis vers l'Écosse 378. Cataractonium, qui abritait un castellum

édifié sous les Flaviens, puis réoccupé vers 158 p.C., après une période d'abandon, se trouvait donc au cœur d'une région de circulation et d'échanges entre le nord de la province, York, et le continent 379. Sur l'autel en question qu'il a réutilisé et consacré une nouvelle fois,

Vitalis a simplement rajouté son nom et son titre à la suite de l'inscription se terminant alors par la formule votive VLLM, u(otum) l(ibens l(aetus) m(erito). Il a ensuite précisé son geste,

aram sacram restituit, et l'a daté, soit en l'année 191 p.C. L'autel est aujourd'hui perdu et le

texte qui y figurait ne nous est parvenu qu'à travers d'anciennes copies. Si l'on considère, comme cela semble s'imposer, que son prédécesseur se nommait T. Aur(elius) Dasso – et non pas T(itius) Irdas (?), insolite, suivi de l'abréviation SC comme le pensait le copiste –, le premier dédicant de l'autel n'était pas un s(ingularis) c(onsularis) ou un s(ummus) c(urator) comme on l'a pensé jusqu'ici. Signalons à ce propos que l'association entre un beneficiarius et un singularis d'un gouverneur demeure sans parallèle, que ce soit dans le cadre d'une dédicace commune ou dans le contexte d'un détachement conjoint dans la même station de

378 A Catterick : CBI, 7 : Annexe 1.3 ; voir aussi I 4. La question de la localisation éventuelle d'une station

de bénéficiaires à proximité ou dans le complexe de la mansio qui a été fouillée reste ouverte ; sur le site : Frere & Joseph 1983, 180-181 (photo fig. 110, p. 179) ; TIR Britannia Septentrionalis 1987, 21 ; sur le réseau routier : Margary 1973, 428-430. Sur les stations le long du Dere Street, du mur d'Hadrien et de la voie romaine qui se dirige de Carlisle vers le sud en direction du camp légionnaire de Deua, voir supra p. 270. Pour une discussion sur la

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