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L ES BÉNÉFICIAIRES DANS LES UNITÉS AUXILIAIRES

LES DIVERS TYPES DE BÉNÉFICIAIRES :

5. L ES BÉNÉFICIAIRES DANS LES UNITÉS AUXILIAIRES

Comme les autres officiers, les commandants des cohortes auxiliaires, préfets d'aile ou tribuns de cohorte, avaient droit à un officium, et de ce fait, à des bénéficiaires. Les documents qui l'attestent proviennent de toutes les régions de l'Empire. On peut toutefois s'étonner, alors que l'effectif des troupes auxiliaires était plus ou moins comparable à celui des légions, que le nombre de témoignages de bénéficiaires issus ou employés dans des troupes auxiliaires soit aussi limité 146. Cela ne saurait s'expliquer seulement par la nature des

documents et la coutume épigraphique, qui s'observerait avec plus d'insistance parmi les citoyens romains – et de ce fait avant tout parmi les légionnaires – que dans la population récemment intégrée à la société et à la culture romaines, au sein de laquelle se situent les auxiliaires. Jusqu'en 212 p.C., la majorité des auxiliaires ne reçoivent la citoyenneté qu'au terme de leurs années de service, avec comme attestation le diplôme qui leur est attribué personnellement. L'aspect financier peut entrer en ligne de compte, puisque pour des raisons

142 Roxan 1996, part. 253; sur la question de l'emploi du titre beneficiarius dans ce document dans un sens

général et non technique : Saddington 1997, part. 158-159.

143 Roxan 1996 ; Thomasson 1972-1990, 323.16 ; Saddington 1997. 144 Roxan 1996, part. 252.

145 I 113b. La provenance précise de ce diplôme demeure inconnue.

146 Voir les exemples suivants, où le nom de la troupe est exprimé. Les références en gras indiquent un

rattachement du bénéficiaire à l'officium d'un gouverneur : Par ex. en Bretagne : CBI, 15, 4 (?), I 3a et 3b (?), I 4 ;

Germanie Supérieure : CBI, 100 ; Norique : CBI, 254 et 256 ; Dalmatie : CBI, 491 ,497, 488 : Annexe 1.3 (ils sont

issus de la cohors Voluntariorum; cf. Alföldy 1987a, 255-263 et 294-297) ; Pannonie Supérieure : CBI, 301;

Pannonie Inférieure : CBI, 400, 402, 404, 405 ; Dacie : CBI, 558 ; Lycie-Pamphylie : CBI, 680 : Annexe 1.3 ; Cilicie : I 188a (?) ; Cappadoce : CBI, 691 : Annexe 1.3. ; Syrie, Doura : CBI, 712-720 (sans doute de la coh. XX

de position hiérarchique et de statut, les bénéficiaires d'un officier de troupe auxiliaire ne reçoivent pas la même solde que ceux d'un gouverneur de province par exemple. Soulignons en outre que la titulature d'un bénéficiaire, en particulier celui d'un préfet ou d'un tribun des troupes auxiliaires, ne se distingue de celle d'un autre type de préfet ou de tribun que lorsque le nom de sa troupe est précisé, à moins que la provenance du document – un castellum d'auxiliaires par exemple – ne lève toute ambiguïté. Si l'on ne prend en compte que les inscriptions dans lesquelles est précisé le nom de la troupe, le dossier est au départ amputé de près de la moitiée des documents 147, Enfin et surtout, nous avons vu précédemment

qu'une grande partie des documents épigraphiques des bénéficiaires sont des autels votifs, et que ces monuments sont généralement érigés par des bénéficiaires pendant leur détachement dans une station, autrement dit par les bénéficiaires d'un gouverneur. Ceux-ci étaient presque toujours rattachés à une troupe légionnaire, si l'on en croit les inscriptions dans lesquelles le nom de la troupe est précisé, les gouverneurs privilégiant en effet la collaboration de bénéficiaires légionnaires – et citoyens romains – à celle d'auxiliaires. Cela à moins que les auxiliaires en question ne fassent preuve de connaissances suffisantes de la langue et de l'écriture latines pour être promus comme officiales, et qu'ils jouissent du statut de citoyen 148.

Il est remarquable que sur les militaires qui précisent leur rattachement à une troupe auxiliaire, on n'en compte que trois qui ont été promus dans l'officium d'un gouverneur, en Dalmatie, en Cappadoce vraisemblablement, ainsi qu'en Lycie-Pamphylie. Deux d'entre eux au moins faisaient partie d'une troupe composée de citoyens romains. Claudius Torquatus, rattaché probablement à la cohorte I Lepidiana c. R., a été promu comme bénéficiaire dans l'officium de Cassius Apollinaris, gouverneur de la Cappadoce vers 151-154 p.C., et P. Bennius Egregius, incorporé dans la cohorte VIII Voluntariorum, est devenu bénéficiaire du gouverneur de Dalmatie 149. Ce n'était pas le cas en revanche du bénéficiaire Philopatorus,

un soldat recruté dans la cohorte I Musulamiorum et sélectionné pour faire partie de l'officium du gouverneur de Lycie-Pamphylie. Cette unité s'est installée dans la province dans la première partie du IIe s., comme l'atteste un diplôme militaire récemment découvert,

plus précisément entre 113 et 138 p.C. 150. L'inscription de Aurelius Moca décédé à Aquilée à

l'âge de 55 ans offre un exemple de bénéficiaire d'un tribun de cohorte auxiliaire transféré dans une troupe légionnaire, la III Augusta de Lambèse, où il est devenu signifer 151.

Précisons que ce transfert a eu lieu au cours IIIe s., après la constitutio Antoniniana, lorsque

l'entrée dans la légion ne pouvait plus être freinée par les questions liées à l'acquisition ou non de la citoyenneté.

147 Il figure approximativement dans 40 % des inscriptions votives et dans 50 % des inscriptions

funéraires : cf. Chap. II p. 82.

148 Ces qualités, et en particulier la dernière citée, sont appréciables sinon requises, en particulier pour ceux

des officiales qui, en leur qualité de bénéficiaires d'un gouverneur, sont régulièrement employés à traiter avec la population civile dans les provinces, les citoyens et les autres, ainsi qu'avec leurs autorités. Sur cette question, voir Chap. II p. 84-85.

149 CBI, 691 : Annexe 1.3 et CBI, 488 : Annexe 1.3. 150 CBI, 680 : Annexe 1.3.

Les premiers documents (inscriptions, tablettes) qui font connaître un bénéficiaire employé au service d'un préfet d'aile ou d'un tribun de troupe auxiliaire remontent au début du IIe s. Ils proviennent de castella militaires situés aux frontières de l'Empire, en Bretagne

sur le mur d'Hadrien, Housesteads, et peut-être Vindolanda, Birdoswald ou Catterick, au sud du mur. En Germanie Supérieure, la présence d'un tel bénéficiaire est attestée à Bad Wimpfen, sur la ligne de frontière du Main, et en Pannonie Inférieure, à Intercisa, sur le

limes danubien 152. A Bad Wimpfen, l'autel consacré par le bénéficiaire d'un préfet d'une

cohorte auxiliaire rappelle, aussi bien par son style et sa forme que par sa localisation dans la topographie du site, ceux des nombreux bénéficiaires que le gouverneur va détacher, dans les années suivantes, dans l'une ou l'autre des nombreuses stations de bénéficiaires implantées dans cette région de frontière 153. On observe le même phénomène à Dura-

Europos, où les bénéficiaires au service du responsable de la garnison se trouvaient en poste

à la Porte de Palmyre si l'on en croit les graffites qu'ils y ont laissés sur les murs, soit postés à la seule voie d'accès dans la ville. Cette localisation suggère qu'ils devaient contrôler des passages dans la cité. Mais une chose est certaine. Aucun des documents contenant la mention d'une statio, dans les formules de stationnement comme dans les dédicaces, n'apparaît de manière explicite en relation avec un bénéficiaire autre que celui d'un gouverneur 154. Même si les beneficiarii au service d'un officier de troupe auxiliaire ont pu

exercer des fonctions comparables à celles d'autres types de bénéficiaires, ils n'ont jamais, à notre connaissance, dirigé une station de bénéficiaires à proprement parler, une responsabilité réservée aux bénéficiaires du gouverneur.

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