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6.4 Les bénéficiaires légionnaires et les aspirations à la carrière équestre

Au IIIe s., deux anciens bénéficiaires désignés comme petitores et de ce fait pressentis

pour aborder la carrière équestre offrent un intéressant contraste par rapport à la norme. Les deux militaires viennent s'ajouter à un petit dossier constitué de petitores militiae, parmi lesquels figurent surtout d'anciens prétoriens ou d'autres soldats eux-mêmes fils d'officiers 254.

C. Tauricius Verus était déjà un vétéran lorsqu'il fut nommé equestris militiae petitor.

249 CBI, 897 ; il est inscrit dans la tribu Stellatina, comme les citoyens de Turin. 250 CBI, 867.

251 * I 191.

252 CBI, 858 avec II, 2554- ILS, 9126 - Le Roux 1982, 248.

253 CBI, 854 à Tarragone avec CBI, 855 et 856 à Villalís, en 166 et 167 p.C. En l'absence des tria nomina,

l'identification demeure incertaine comme le montre l'existence d'un troisième Valerius Flavus – le prénom est Marcus – décédé à Tarragone comme bénéficiaire, lui aussi, dans la première moitié du IIe s., CBI, 846.

Il avait achevé son cursus militaire avec le titre de bénéficiaire d'un gouverneur, en Germanie Inférieure 255. A ce titre, il avait érigé au moins deux autels dans la province, l'un

de provenance inconnue consacré en l'honneur de la maison impériale, à tous les dieux et déesses, aux Matres Vapthiae et au Génie du lieu, et l'autre consacré à Bonn en 233 p.C. aux

Sanctae Aufaniae. Cet autel a été découvert avec d'autres monuments votifs de bf cos dans la

crypte de la cathédrale de Bonn. Il est possible que Verus ait été en charge durant une période de l'année 233 p.C. d'une station de bénéficiaires établie dans les environs du camp légionnaire et dont la localisation a été pressentie sur l'emplacement actuel de la crypte de la cathédrale. Mais c'est à Cologne, dans la capitale de la province qu'il devait se trouver avec sa famille au moment de sa retraite et de sa mort 256.

Le second exemple d'un bénéficiaire candidat à la carrière équestre ou petitor est celui de Cassius Timotheus, également vers le milieu du IIIe s. Timotheus avait été employé

comme bénéficiaire au service de C. Iulius Priscus, le frère de l'empereur (ou futur empereur) Philippe l'Arabe, vraisemblablement lorsqu'il était préfet de Mésopotamie et qu'il jouissait d'un pouvoir militaire suprême sur toute la région de Syrie-Mésopotamie. En offrant une statue en l'honneur du fils de Priscus (le neveu de Philippe l'Arabe) à Shehba, ville d'origine de Priscus et de Philippe, sur l'emplacement de laquelle le nouvel empereur érigera Philippopolis, Timotheus a voulu remercier Priscus d'avoir soutenu sa candidature d'entrée comme petitor dans l'ordre équestre 257.

La nomination de l'ancien bénéficiaire M. Valerius Speratus comme préfet de cohorte vers la fin du IIe ou le début du IIIe s. présente un exemple de promotion unique en son genre.

Ce bénéficiaire d'un gouverneur de Mésie Supérieure était déjà à la retraite et engagé dans la carrière municipale comme décurion de Viminacium lorsqu'il fut rappelé au service pour participer à une expédition en Bretagne comme préfet de la cohorte I Aquitanorum. Il y trouva la mort, à l'âge de 55 ans. A sa retraite, il semble être resté à Viminacium, la capitale provinciale et le siège de la légion la légion VII Claudia dans laquelle il avait été recruté, là où il avait passé une partie de sa carrière militaire, et où il fut nommé décurion. Sa désignation au décurionat pourrait s'expliquer par une origine locale ou une tradition familiale, de même que sa nomination suivante comme préfet de cohorte 258. Si elle est

exceptionnelle pour un bénéficiaire, une promotion comme officier équestre est en revanche bien attestée pour les soldats issus de l'élite municipale. Une inscription du Ier s. découverte à

Ravna, dans la même province, nous livre l'exemple d'un chevalier originaire d'Ombrie qui, après avoir exercé ses fonctions municipales dans sa ville d'origine, fut promu comme

255 CBI, 72.

256 CBI, 95 et CBI, 53 avec Annexe 3. Sur la présence d'une station de bf cos à Bonn, voir Chap. IV p. 149

n. 99.

257 CBI, 708, avec IGR, III, 1201 ; selon Zozime, Histoires, 1.19.2 et 1.20.2 Iulius Priscus fut doté du

pouvoir suprême dans la région ; voir Thomasson 1972-1990, 340, 5 et Christol 1997b, 99-100.

258 CBI, 589. La datation se situerait entre 193 p.C. et 239 p.C., date à laquelle Viminacium devint colonie

romaine, ou au milieu du IIe s. si l'on en croit Devijver 1976-1993, V, 38 ; voir aussi Haensch 1997a, 682, n. 162.

Devijver 1989, 407 et 410 évoque ailleurs le recrutement des officiers équestres dans la noblesse municipale ainsi que parmi les simples soldats, vétérans et sous-officiers, s'interrogeant sur les relations entre ce phénomène et la crise économique du début du IIIe s. Sur cette promotion : Chap. VII p. 312. La cohorte I Aquitanorum est attestée à

Brough-on-Noe en Bretagne (RIB, 283) puis probablement à Brancaster au début du IIIe s., peut-être jusqu'à l'arrivée

officier en Syrie puis en Mésie Supérieure, où il est célébré par les soldats de la cohorte qu'il commande, en qualité de préfet 259.

Ces quelques exemples qui révèlent une promotion directe (ou du moins une aspiration) à la carrière équestre d'un bénéficiaire employé auprès du gouverneur d'une province se situent à une époque où les documents épigraphiques des bénéficiaires se font de plus en plus rares. Ils seraient les signes du déclin qui s'observe d'une manière générale dans le système des militiae 260. Il en va de même au IIIe s. pour le jeune fils du légionnaire

T. Aelius Macrobius promu comme bénéficiaire d'un gouverneur de Germanie Supérieure. Les lettres EQR que l'enfant décédé à Antibes à l'âge de cinq ans seulement portait à côté de son nom, comme l'atteste une récente révision du texte, sont le signe de son appartenance à l'ordre équestre 261. Les dossier épigraphique des beneficiarii livre au moins trois autres

exemples de fils de bénéficiaires reçus dans l'ordre équestre, en Numidie et en Mésie 262.

259 III, 8261 - ILS, 2733 - IMS, III/2, 23.

260 Voir les remarques de Devijver 1989, 356 au sujet de Cassius Timotheus. 261 CBI, 37 : Annexe 1.3.

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