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Le processus de création de la Régie des eaux de Montpellier, marqué par une forte complexité institutionnelle

I

NTRODUCTION DU CHAPITRE

5

Afin de proposer une identification des logiques la plus complète possible, nous croisons l’analyse historique de la gestion des services publics de l’eau français avec l’étude du cas spécifique de la gestion des services publics de l’eau au sein d’une collectivité française : la Direction de l’eau et de l’assainissement à la Métropole de Montpellier et sa Régie des Eaux. La Métropole de Montpellier Méditerranée (M3M), créée en 2014 dans le cadre de la loi de modernisation de l'action publique territoriale, prend la suite du District d'agglomération de Montpellier. M3M regroupe 31 communes et 434 101 habitants sur une superficie de 423,21 km². Quant à la Régie des Eaux de Montpellier Méditerranée Métropole, la décision formelle de sa création remonte au 28 avril 2015 et elle est instituée au 1er janvier 2016. Comme le montre la Carte 3 ci-dessous, elle assure depuis cette date l’exploitation du service d’eau potable de 13 communes. Son activité regroupe donc 80% de la population de la Métropole (soit 337 000 habitants) et est assurée par 86 salariés permanents.

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Carte 3 : Répartition des contrats de gestion des services publics de l’eau potable sur les communes de la Métropole de Montpellier au 01 janvier 2016 Le choix de ce terrain est motivé par plusieurs éléments :

- commencer la recherche à la création de la régie permet de suivre le processus de construction des outils de pilotage et d'observer de l'intérieur la création du SCG ; - la mise en place d'une régie à la suite d'une DSP avec reprise d'une bonne partie du personnel issu de l'entreprise privée contribue à une forte complexité institutionnelle ; - La métropole et la régie manifestent un intérêt pour approfondir l'analyse de leurs outils de pilotage et sont ouvertes aux collaborations avec les chercheurs, ce qui offre un contexte favorable à la recherche-intervention.

Dans un premier temps, la présentation des différentes étapes du retour en régie nous permet de souligner les particularités liées au début de l’exploitation de la Régie des Eaux de Montpellier Méditerranée Métropole. Dans un second temps, nous proposons une grille d’analyse des différentes logiques institutionnelles précédemment identifiées dans l’historique de la gestion des services publics de l’eau français et de la période de retour en régie sur la Métropole de Montpellier. Enfin, prolongeant la réflexion sur les multiples logiques de la gestion des services

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publics de l’eau, nous caractérisons la complexité institutionnelle propre aux relations entre la métropole et la régie, mais aussi les problèmes causés par cette complexité.

Le passage de DSP au vote du retour en régie montre une confrontation de logiques jusqu'à leur intégration dans les statuts de la régie (section 1). A partir de cet historique du retour en régie et des logiques institutionnelles identifiées dans le secteur de l'eau, nous proposons une caractérisation les multiples logiques locales, vecteurs de complexité institutionnelle (section 2).

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UBLIC A UN VOTE DE RETOUR EN REGIE

Pour comprendre la situation actuelle, il est utile de retracer l'historique du service public de la gestion de l'eau à Montpellier. Avant 1989, le service d'eau et d'assainissement de la ville de Montpellier est en régie. En 1989, Georges Frêche, maire de la ville, décide de passer en délégation et un premier contrat est signé entre la ville et la Compagnie générale des eaux, entreprise dominante du secteur. En 2000, avec la création de l'Agglomération, la compétence assainissement est transférée au niveau intercommunal. En 2010, la compétence eau potable est à son tour transférée à l'Agglomération. Comme plusieurs contrats de délégation, dont celui de Montpellier et de 13 communes de l'intercommunalité arrivent à échéance, la majorité décide de lancer à nouveau une DSP pour l'eau potable, mais également pour l'assainissement. La procédure est lancée par une délibération du 25 juillet 2013 pour un renouvellement des contrats début 2015. Cependant, le choix du mode de gestion ne fait pas consensus. Un fort courant mené par des associations et relayé par certains élus d'opposition de gauche milite pour la gestion entièrement publique et réclame un retour en régie. Ce mouvement témoigne du sentiment de défiance à l'égard du délégataire en place. En 2014, une coalition entre le maire élu, Philippe Saurel, dissident socialiste et le front de gauche mené par René Revol, se constitue en particulier autour de la promesse d'un retour en régie. Cette coalition l'emporte aux municipales en 2014 ; Philippe Saurel est élu aux municipales de 2014 et devient président de la métropole le 1er janvier 2015. La nouvelle majorité décide alors un retour en régie pour la compétence « eau potable ». Les contrats de délégation sont prolongés d'un an pour permettre la mise en place de la régie au 1er janvier 2016, dans un temps record.

La collaboration que nous entreprenons à la fois avec la Métropole et sa régie nous a permis de participer aux grandes étapes de la mise en place de la régie et des dispositifs de pilotage négociés entre ces deux entités. Ce processus d’observation et de participation au développement de la régie et de ses modalités de pilotage est au cœur de notre travail de recherche à la fois théorique et opérationnelle visant à identifier les différentes logiques en présence.

Après un bref historique de la gestion de l'eau à Montpellier (1.), nous explicitons les arguments de l'ancienne majorité en faveur d'une DSP (2.), et les arguments de l'opposition et des écologistes en faveur d'un retour en régie (3.). Avec le changement de majorité, la logique politique domine (4.), conduisant à un renforcement de la logique citoyenne à travers la mise en place d'un comité de suivi citoyen (5.). Le choix du type de régie et les statuts sont porteurs

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de multiples logiques (6.), mais aussi d'une logique de personnel suite au transfert du personnel de l'ancien délégataire (7.).

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