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La dimension philosophique des SCG fait aujourd’hui débat au sein des recherches contemporaines. Dans ce cadre, les travaux de Colon (2014) soulignent qu’il existe deux approches différentes des SCG : l’approche « fonctionnaliste » (3.1) et l’approche « institutionnaliste » (3.2).

Les SCG comme des outils techniques d’aide à la décision

De multiples recherches nous fournissent aujourd’hui des éléments de réponse sur l’émergence et les caractéristiques des SCG. L’ambiguïté autour de la notion de SCG est telle qu’il est difficile d’identifier et d’arrêter une définition qui ferait figure de référence. Simons (1995, p.5) propose comme définition : « des routines et procédures managériales utilisées pour maintenir ou modifier les activités et objectifs organisationnels » (Simons, 1995, p.5). Cette définition renvoie à l’approche fonctionnaliste de l’organisation et du contrôle de gestion, qui est présente dans la majorité des recherches en comptabilité au cours des années 80 et 90 (Covaleski et Aiken, 1986 ; Covaleiski et al. 1996). Morales et Sponem (2009, p.11) soulignent que cette « tradition fonctionnaliste » repose sur les « postulats des théories traditionnelles des

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organisations » et s’inspire de « la vision de Taylor ou celle de l’école des relations humaines ». La définition du SCG au sein de cette approche est définie en d’autres termes par Colon (2014, p.46) : « une technique, dont l’objectif est de faire converger les comportements des individus avec les objectifs de l’organisation ». L’auteur ajoute que dans cette approche, le contrôle de gestion sert « deux fonctions : l’aide à la décision et la gouvernance ».

Progressivement, le contrôle de gestion et les SCG qui l’accompagnent s’insèrent dans des démarches qui ne sont plus uniquement techniques. Ils cherchent aussi à remplir d’autres fonctions de « contrôle organisationnel et de management », de « surveillance des choix des gestionnaires », ainsi que d’orientation des « comportements » des acteurs de l’organisation (Colon, 2014, p.47). Ainsi, Bouquin (2006, p.94) complété par Meyssonnier (2012, p. 75) insistent sur le fait que le contrôle de gestion est composé « de processus et de systèmes qui permettent aux dirigeants d’avoir l’assurance que les choix stratégiques et les actions courantes seront, sont et ont été cohérents, notamment grâce au contrôle d’exécution ».

Dès lors, les recherches proposent de nouvelles conceptions pour dépasser et étendre les formes du contrôle de gestion aux modes d’action qu’il déploie pour atteindre des objectifs organisationnels plus larges (Ferreira et Otley, 2009 ; Morales et Sponem, 2009). En ce sens, Colon (2014, p.47) souligne qu’un tel élargissement du contrôle de gestion renvoie « à l’idée développée par Bouquin que le contrôle de gestion dans une perspective étendue fait partie intégrante du management au sens large de l’organisation dont il est indissociable ». Néanmoins, l’auteur ajoute qu’une telle vision élargie implique que le contrôle de gestion devient potentiellement « plus difficile à définir ».

Les SCG comme des fruits d’idéaux : l’approche institutionnaliste

La deuxième approche des SCG identifiée par Colon (2014, p.48) est l’approche « institutionnaliste ». L’auteur souligne que cette approche les aborde non plus comme de simples outils techniques, mais comme « des structures formelles porteuses de sens qui permettent aux organisations de gagner de la légitimité en leur donnant l’air d’être plus rationnelles et efficientes ». Si l’on se place dans cette perspective, alors les SCG ont pour objectif une « rationalisation technique et économique, dans le but d’aboutir à une quête de légitimité de l’organisation » auprès de son environnement. L’auteur ajoute que le contrôle de gestion, tout comme « la culture et les institutions, porte une dimension cognitive, véhicule des normes de comportements et de règles ».

Une telle approche sous un angle institutionnaliste est utilisé par d’autres auteurs, tel que Boitier et Rivière (2011). Dans leurs travaux qui portent sur l’étude de SCG, ils s’appuient sur les

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fondements de la TNI (Meyer et Rowan, 1977) pour mieux retranscrire les spécificités de leur contexte institutionnel. Ainsi, ils soulignent que les SCG « constituent également des objets qui donnent corps à une représentation du contexte institutionnel qui est parfois considérée comme trop abstraite » (Boitier et Rivière, 2011, p.81). Une telle vision considère les SCG comme des « fruits d’idéaux ». Colon (2014, p.49) souligne que l’approche institutionnelle autorise par exemple à aborder la comptabilité « non pas comme un outil neutre, mais comme une structure formelle porteuse de sens. Celle-ci permet aux organisations de gagner en légitimité en leur donnant une image plus rationnelle et efficace ». Dans cette optique, les SCG peuvent être abordés comme des mythes rationnels. L’auteur ajoute qu’une « bonne gestion renvoie alors à celle qui se conforme aux prescriptions du champ auquel appartient l’organisation ». Une organisation efficace doit alors se conformer aux rythmes et coutumes présents dans le champ organisationnel (Meyer et Rowan, 1977). Par conséquent le contrôle de gestion est porteur de sens et vecteurs de valeurs institutionnelles dans l’organisation. Dès lors, les SCG ne renvoient plus uniquement aux modèles tels que proposés par Simons (1995), c’est-à-dire aux modèles de contrôle et aux outils dont ils sont porteurs (tableaux de bord, IP…). Les SCG constituent des institutions qui implémentent « des normes, des valeurs, des symboles », à travers des « codifications techniques ». (Boitier et Rivière, 2011, p.84).

La thèse aborde donc la définition des SCG de la manière suivante : « des objets cognitifs, coercitifs et normatifs qui régulent les relations inter et intra organisationnelles et les activités techniques. Ils constituent également des objets qui donnent du corps à une représentation du contexte institutionnel qui est parfois considéré comme trop abstrait » (Boitier et Rivière, 2011, p.81). Dans cette approche, la TNI offre un apport indéniable à l’analyse du processus de création d’un SCG : accroître les connaissances autour du contexte institutionnel de l’organisation pour les intégrer au processus empirique de mise en place des SCG.

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