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 Direction d’amont en aval et réciproquement, indication de relief par rapport à un point donné sur une oblique obéissant à un conditionnement sismique et atmosphérique. L’eau coule d’amont en aval (du mont vers le val), je peux me situer

en amont ou en aval d’un raisonnement, permettant ainsi de figurer le raisonnement

comme un point en chronologie (autre expression imagée : sur l’échelle du temps) où l’analogie est faite entre espace et temps par l’image du mouvement que je donne à voir en employant amont et aval. Espace et temps sont des catégories du réel mesurable, le temps lui-même ayant trois acceptions, dont l’une d’entre elles diffère des deux autres, que la traduction en anglais nous permet de cerner :

 le temps (time) mesuré en durée quantifiable et qualifiable (longue, courte,

moyenne, infinie, etc.), à l’intérieur d’une vie, selon sa teneur possiblement

objectivée par le chronomètre (heure, minutes, seconde), le sablier, l’ombre portée du soleil, un temps planétaire quadrillé mathématiquement, et au-delà d’une vie, mesuré alors selon un calendrier qui nous inscrit dans une culture, assimilée à un culte personnalisé, dont l’une d’entre elles a été acceptée comme mesure d’information terrestre

 le temps (weather) mesuré en variation atmosphérique dans un espace défini, mais ressenti par le corps humain et ayant des effets sur lui et son environnement, traces et découpages pouvant être l’unité à deux faces du temps conçu dans ses deux sens objectivables d’espace et de durée dans le cadre d’une sémiologie de l’information.

 Le temps grammatical (tense)255

n’est pas une catégorie du réel, mais une catégorie de l’énonciation. Il n’est donc pas mesurable car il est lui-même mesure de situation.

253 Relisant « Sémantique structurale » de A.J. Greimas, je comprends a postériori la motivation de cette section

et en particulier la nécessité de définition du mot « sens ». « On connaît la fameuse définition du signe linguistique donnée par Bloomfield (Language) : celui-ci est « une forme phonétique qui a un sens » (p.138), « un sens dont on ne peut rien savoir » (p.162) […] Et pourtant comme le remarque justement Jakobson en parlant de ceux qui disent « que les questions de sens n’ont pas de sens pour eux : quand il disent « pas « de sens », de deux choses l’une : ou bien ils savent ce qu’ils veulent dire, et par le fait même la question du sens prend du sens, ou bien ils ne le savent pas, et alors leur formule n’a plus de sens du tout » (Essais, p.38-39) »,

Sémantique structurale, p.7 Cependant je relis à nouveau Jakobson pour y chercher ce passage et j’en extrais

cette phrase qui justifie mon objet d’étude : « Les problèmes imposent leur propre calendrier ». (Essais, p.38)

254 Geneviève Fraisse : de la notion de consentement

255 Ce troisième temps m’est apparu grâce à la note de Marc-André Béra, traducteur de Milic Capek (Boston

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 Direction de la poupe à la proue et réciproquement, indication de mouvement par rapport à deux points donnés sur l’axe horizontal,

 Direction de bas en haut et de haut en bas, indication de mouvement sur l’axe vertical  Direction de gauche à droite et réciproquement, indication de position, ou de

mouvement pour l’écriture, qui se réfère à l’unique sujet. Gauche et droite ne sont pas objectivables. C’est pourquoi, cette notion peut ne pas exister dans une langue. Elle est chez nous le signe d’une culture (si ce n’est d’un culte) de l’individuel,

 Direction de soi-même à l’autre et réciproquement, l’autre pouvant être un sujet ou un objet, la langue française, en ne faisant pas de distinction entre l’être animé et l’inanimé dans la détermination, permet de rendre l’insaisissable de cet aller-retour entre l’autre et soi-même. Dans l’exemple « sa vue lui permettait d’imaginer son

goût », est-ce de la vue de l’objet vu dont il est question ou de la vue du sujet voyant ?

Quant à « son goût », est-ce le goût de l’objet vu ou est-ce le goût du sujet voyant ? S’il n’avait été de langue française, Lamartine aurait-il pu écrire :

« Objets inanimés, avez-vous donc une âme

Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer » ?

 Direction d’un point cardinal à un autre, indication de position ou de mouvement sur la terre par rapport au soleil.

à la notion de signification (meaning)

: il peut s’agir d’acception ou de signe. Un signe peut faire sens et un sens peut faire signe. La signification s’inscrit à l’intérieur d’un cadre, ou d’un champ, dont les limites doivent être annoncées. Quoi qu’il en soit, le sens implique ici deux sujets au moins : le sujet encodeur et le sujet décodeur et aucun des deux ne peut avoir de certitude sur l’adéquation du sens avec la réalité de l’autre et d’autant plus quand nous sommes dans une communication différée ou indirecte comme est celle de l’écrit public.

en passant par la notion de sensation

: chacun de nos sens peut repérer des signes qu’il interprète selon ses attentes, ses connaissances, ses désirs.

Cependant, si nous intégrons le sens directionnel (en aller-retour) à celui de la signification autant qu’à celui de la sensation (par l’intermédiaire d’un ou plusieurs des cinq sens256

) nous obtenons la mise en œuvre du processus de création.

Le sens que nous avons utilisé dans notre recherche est celui de la vue. Et le signe que nous avons traqué est celui du signifiant grammaticalement genré qui renvoie à un signifié sexué dans les écrits qui se présentent à nos yeux sur la voie publique.

Nous éliminons cependant les écrits sur les corps en mouvement, par respect de la vie privée, car nous les considérons comme de la pure expression personnelle et non de l’information, nous ferons la distinction plus loin entre ces deux notions, qu’il s’agisse de tatouage ou de message sur des vêtements. Par ailleurs, si nous photographions les messages fixes c’est qu’ils s’adressent effectivement aux passantes et passants. Nous en sommes donc simplement une parmi d’autres. Et dans la mesure où notre préoccupation a porté depuis plus de 12 ans sur l’information véhiculée par la contrainte grammaticale du genre en français dans l’écriture, nous inaugurons à présent une posture de lectrice qui porte une attention exclusive à ces marques afin de repérer en retour l’existence ou non de cette problématique dans l’écriture des autres, sachant qu’en 2009 à Toulouse, j’avais remarqué une affiche dont un mot écrit en capitales, MOTARD(E)S, en signalait la conscience dans l’écriture communicante. C’est même le déclic du travail actuel et la justification de son inscription en sciences de l’information et de la communication.

2. Le mot « mot »

Outre qu’en français, il est homophone de « maux » lui-même pluriel de mal, celui-ci pouvant encore être entendu, dans certains idiolectes, comme homophone de mâle, antonyme

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de femelle, la difficulté de sa définition trop générale l’a fait abandonner comme concept opératoire au profit de lexie ou lexis suivant que la base est française ou non, dans le domaine du lexique. Le rapport à la lecture et donc à la vue est ici tangible quand celui de vocabulaire se réfère à la voix et par conséquent au sens de l’ouïe, où le mot sera alors défini comme

vocable (du latin vocare : parler).

Cependant pour faire la distinction entre les formes dont le signifié renvoie à un référent et celles qui n’indiquent qu’un lien entre les signifiants en présence, André Martinet avait proposé la distinction entre monème, unité distinctive de sens et morphème unité distinctive fonctionnelle. Mais l’ouvrage de Bloomfield « La linguistique » a popularisé le morpheme [mᴐ:fim] anglais qui recouvrait à la fois le sens de monème et de morphème et rendait par là- même la distinction d’autant plus difficile que le mot anglais prononcé à la française le rendait synonyme de monème !

Cependant pour nous défaire de toute attache à un vocabulaire spécialisé, nous utiliserons le terme257 « mot » dans son acception, à présent informatiquement répandue à l’écrit, de signes ou groupement de signes entre deux blancs, dits « espaces ». Est appelé « blanc » en typographie l’espace (au masculin) qui sépare un « caractère » d’un autre, ce qui n’existe pas dans l’écriture manuscrite cursive. Est appelé « espace », au féminin, le plus grand blanc qui sépare un groupement de « caractères » ou une lettre seule d’un groupement ou d’une autre lettre seule. Cette « espace » qui facilite la lecture en séparant les unités minimales de sens est souvent appelée « blanc » dans l’écriture manuscrite cursive parce qu’elle est l’endroit du blanc sur la page blanche, créé par l’outil scripteur qui se détache un moment du papier, à la fin du mot, avant de toucher l’endroit suivant, au début du mot qui suit.

Nous avons vu plus haut que chaque mot peut être un mal ou un bien, ou plutôt qu’aucun n’est un mal ni un bien en soi mais qu’il peut en revanche être un outil de défense, de défiance, de confiance ou d’attaque ! C’est alors le mot pris avec sa charge de sens, qui ne tient pas plus à lui qu’à sa reconnaissance par le sujet récepteur. Que m’importe d’être insultée dans une langue que je ne connais pas ! sachant que le geste qui peut accompagner l’insulte peut ne pas être interprété comme m’étant adressé. Par ailleurs ce qui peut être envoyé comme une insulte peut ne pas être reçu comme telle, de même que ce qui peut être envoyé comme un compliment peut être reçu comme une insulte. Le jeu vidéo conçu par Suyin en est l’illustration. C’est un jeu qui met en scène un « dragueur » possiblement identifié à un harceleur et la joueuse (ou le joueur) répond par un tir meurtrier ou un remerciement.

Pour décliner le mot dans son contexte énonciatif, l’expression « un bon mot » renvoie à l’énonciation, à l’effet produit sur les autres par l’expression concise et souvent amusante d’une pensée (dans « amusante » nous avons « muse », l’inspiratrice). « Un bon mot » est généralement composé de plusieurs mots ; alors que « trouver le bon mot » renvoie à une recherche d’exactitude. Marie-Agnès Palaisi me disait que étudiant·es et enseignant·es « sont tellement dans la rapidité que trouver le mot juste devient une quête secondaire »258

Or, notre travail de recherche ne doit-il pas être celui de trouver justement le bon mot pour exprimer l’idée ou la pensée juste, au point que, si le bon mot n’existe pas, il faudra l’inventer ? C’est pourquoi André Martinet enjoignait ses disciples à se méfier des néologismes faciles avant d’avoir examiné le vocabulaire existant déjà et qui pouvait être utilisé et au besoin réactualisé.

Et je termine ce passage en donnant la parole à l’avocate Gisèle Halimi :

« Les mots, seule arme, mais arme absolue. Pour qu’ils expliquent, frappent, l’emportent, ou, à défaut, sauvent la liberté ou l’honneur de l’accusé·e259

, les mots doivent dire, se mouvoir, se nouer, courir, s’appesantir, s’arrêter, se répéter. Le tout dans la plus absolue liberté. Dans

257 Encore un « mot » pour dire « mot ». Celui-ci met l’accent sur la limite du sens. 258

Conversation du 1er juillet 2014 à l’université nouvellement nommée Jean-Jaurès.

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l’irrespect total des tribunaux, des institutions. Dans le rejet de ce fatras qu’on veut nous contraindre à intérioriser comme une limite, une autocensure. »260

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Historique méthodologique