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Les conditions de validité du contrat de cautionnement

L'utilité du capital social au sein des garanties de droit commun

A. Les conditions de validité du contrat de cautionnement

196. Les conditions de validité du contrat de cautionnement. Le cautionnement est un contrat unilatéral par lequel une personne s'engage envers une autre à satisfaire une obligation pour le cas où le débiteur n'y satisferait pas lui-même. Dès lors les conditions de validité de l'article 1108 du Code civil s'appliquent. Il s'agit principalement de la capacité, de l'objet, la cause et le consentement. Le consentement exempt de vices doit exister à plusieurs niveaux compte tenu de la particularité du contrat de cautionnement qui fait intervenir trois personnes. Il y a d'abord l'accord entre le créancier et le débiteur, le premier subordonnant telle ou telle prestation à la fourniture d'une sûreté. Il y a ensuite l'accord donné par la caution au débiteur et, enfin, l'accord donné par la caution au créancier. En principe, le contrat se conclut par le seul accord des parties478. Autrement dit, aucune autre condition n'est requise

477 Lorsqu'il est donné contre rémunération, la cautionnement devient commercial. Il revêt cette qualification

lorsqu'un commerçant se porte caution pour les besoins de son commerce ou lorsque le cautionnement prend la forme d'un aval ou d'une lettre de change. La jurisprudence a ajouté le cautionnement donné par un associé ou un dirigeant pour garantir le paiement des dettes sociales d'une société v. S.SCHILLER,Les limites de la liberté

pour la validité de la convention. Toutefois, la loi exige, pour certains contrats, que le consentement soit donné en une forme particulière. Celle-ci consiste le plus souvent en la rédaction d'un écrit479. Il en est ainsi du contrat de cautionnement sur le fondement de l'article 2292 du Code civil. En effet, selon ce texte : "Le cautionnement ne se présume point ; il doit

être exprès ". Cela dit, le contrat de cautionnement est alors considéré comme un contrat

solennel.

197. Les conséquences de l'inobservation des conditions de validité du contrat de

cautionnement. En principe, le non-respect des conditions de l'article 1108 du Code civil

entraîne la nullité du contrat. Toutefois, les vices du consentement sont inopérants lorsqu’ils sont invoqués par un professionnel qui se porte caution car il s’engage en connaissance de cause480. Il en est ainsi du dirigeant et de l'associé considérés comme des personnes impliquées dans la bonne marche des affaires sociales. Il serait difficile pour eux d'établir leur ignorance sur la situation de la société à tel point d'invoquer l'erreur sur les qualités déterminantes de la prestation. Ils ne peuvent pas prétendre ignorer la qualité en laquelle ils signaient481. Ainsi, il n'est pas admis qu'une personne qui a perçu le sens du cautionnement puisse invoquer une telle erreur482. La garantie du créancier est à l'abri de l'annulation lorsque

la caution est professionnelle. Mais, il en est autrement lorsque la caution est une personne étrangère aux affaires sociales.

Toutefois, la jurisprudence a délimité les conditions dans lesquelles l'erreur sur les qualités déterminantes peut être invoquée. Elle n'est possible que lorsqu'elle porte sur la nature de l'engagement483. La jurisprudence admet aussi que la caution puisse dénoncer l'insolvabilité

du débiteur pour faire annuler le contrat. Il en sera ainsi lorsque la solvabilité du débiteur était

478 F. TERRE,PH.SIMLER etY. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, op. cit., n° 63, p. 77. 479 Ibidem.

480D. DANET, Le dirigeant et l'omnibus, RTD com. 1994, p. 181.

481 Cass. com. 17 juin 1997, JCP E 1997, 1007, note D. LEGEAIS ; D. P. nov. 1997, n° 54, note B. SAINT-ALARY

; Bull. Joly oct. 1997, § 313, p. 866, note P. LE CANNU.

482 S.SCHILLER,Les limites de la liberté contractuelle en droit des sociétés, les connexions radicales, op. cit.,

n° 905, p. 446.

483 Cass. civ. 1er, 25 mai 1964, Bull. civ. I, 1964, n° 269. Critiques doctrinales PH.SIMLER,Cautionnement et

garantie autonome, Litec, 3ème éd. 2000, n° 138, p. 132 ; L. AYNES, note sous Cass. civ. 1er, 10 juin 1987, D.

précisée dans le contrat comme condition484. L'erreur est aussi cause de nullité du contrat de

cautionnement que si elle n'est pas inexcusable. Sur cette condition, la cour de cassation a rejeté une demande en nullité parce que la caution "ne pouvait sérieusement soutenir avoir

ignoré l'insolvabilité de la société, d'une part, parce qu'il en était le gérant lors de la signature de l'acte de caution, d'autre part, parce qu'il s'était engagé à suivre la situation financière de ladite société"485. Il est ainsi difficile pour un associé ou un dirigeant d'invoquer

l'erreur pour faire échec à la protection du créancier. Il en sera également ainsi s'ils invoquent la tromperie sur l'affectation du crédit garantie486. A ce niveau, la protection du créancier est efficace lorsque ce dernier cherche à contourner la limitation de responsabilité. Les juges protègent très peu le dirigeant ou l'associé caution pour de dol487 ou encore du fait des

exigences sur l'objet et la cause488 et la doctrine est favorable à cette position489. Les juges

protègent également le créancier en cas d'absence de la mention manuscrite du dirigeant ou de l'associé caution. Ainsi, ils considèrent que la simple omission de la mention manuscrite ne suffit pas à rendre nul le cautionnement si les fonctions de la caution lui permettaient d'avoir conscience de son engagement490.

Toutefois, une autre jurisprudence a adopté une autre position défavorable au créancier491.

Dans les faits de l'arrêt de cassation rendu par la première chambre civile le 2 juillet 1996, l'URSSAF se prévalait d'un acte sous seing privé du 4 mars 1985 aux termes duquel X s'était porté caution à son profit des obligations de la société générale de bijouterie. Or, la caution dirigeante déniait sa signature. Les faits révélaient que ce dernier avait pourtant apposé sur

484 Cass. civ. 1er, 19 mars 1985, Bull. civ. I, 1985, n° 98 ; Cass. civ. 1er, 11 fév. 1986, Bull. civ. I, 1986, n° 22 ;

Cass. civ. 1er, 11 déc. 1990, Bull. civ. I, 1990, n° 286.

485 Cass. civ. 1er, 11 juill. 1984, Bull. civ. 1984, n° 229 ; JCP 1986, II, 20576, note B. H. DUMORTIER.

486 S.SCHILLER,Les limites de la liberté contractuelle en droit des sociétés, les connexions radicales, op. cit.,

n° 909, p. 447.

487 Cass. com. 26 mai 1956, Bull. civ. III, 1956, n° 134 ; Cass. com. 16 nov. 1993, Bull. civ. IV, 1993, n° 404 ;

Cass. com. 26 mai 1992, Bull. civ. IV, 19926, n° 134.

488 Cass. com. 8 nov. 1972, Bull. civ. IV, 1972, n° 278 ; Cass. com. 16 fév. 1977, JCP N 1980, II, 217, obs. PH.

SIMLER ; Cass. com. 17 juill. 1978, Bull. civ. IV, 1978, n° 200 ; Cass. com. 6 déc. 1988, Bull. civ. IV, 1988, n°

334.

489 S.SCHILLER,Les limites de la liberté contractuelle en droit des sociétés, les connexions radicales, op. cit.,

n° 915, p. 449 pour le dol n° 921, p. 452 pour absence d'objet et n° 932, p. 457.

490 Cass. com. 29 janvier 1991, Bull. civ. IV, 1991, n° 42 ; Cass. com. 12 mai 1992, Bull. civ. IV, 1992, n° 177. 491 Cass. civ. 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210 ; Cass. civ. 1er, 2 juill. 1996, Bull. civ. 1996, n° 281, p. 196 à 197.

l'acte la mention manuscrite conforme aux exigences de l'article 1326 du Code civil. La Cour de cassation a refusé de substituer cette mention à la signature sur la base de l'article 2292 du Code civil. L'accord exprès constaté par la signature de celui qui se porte caution est donc exigé comme supplément pour la validité de l'acte sous seing privé492. Selon les juges la combinaison des articles 1326 et 2292 du Code civil a pour finalité la protection de la caution fut-elle dirigeante. Ainsi, l'acte par lequel la caution s'engage doit être constaté dans un titre qui comporte en plus de sa signature, le montant de l'engagement écrit en lettre et en chiffre de la main de la caution. Le non-respect de ces conditions entraîne la nullité du contrat. Dans ces conditions, le créancier ne pourra plus se prévaloir de sa garantie supplémentaire. Le patrimoine privé de la caution n'est plus engagé. Il perd totalement sa protection supplémentaire. Mais une autre jurisprudence protège le créancier en considérant que le cautionnement donné par le dirigeant ou un associé ne peut être, en raison de leur personnalité, de leur fonction.

Nous constatons que le contrat de cautionnement est soumis aux conditions de validité de droit commun des contrats. En principe, le non-respect d'une de ces conditions est susceptible de mettre en cause l'existence de la garantie. Mais, en pratique l'application de cette sanction reste hétérogène. Les juges opèrent une distinction selon la qualité de la caution alors même que les textes ne la prévoient pas. Ainsi, seules les cautions non professionnelles lorsqu'elles invoquent l'inobservation des conditions de validité de droit commun, peuvent mettre en échec la garantie du créancier. Cette conséquence traduit tout même l'incertitude du contrat de cautionnement. En est-il de même en cas de non-respect des conditions spécifiques du cautionnement.

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