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L'évaluation des apports en nature par les associés

Les apports concernés par la formation du capital social

A. L'évaluation des apports en nature par les associés

86. La nécessité d'évaluer les apports en nature. Lorsque l'on apporte un billet de banque au capital social, la valeur de l'apport est indiquée sur le billet. Il peut s'agir soit de 10€, 50€ et s'il y a plusieurs billets, n'importe qui peut faire l'addition de ces billets. Ce qui n'est pas le cas de l'apport en nature. La valeur de l'apport en nature doit être précisée. Le capital social, réceptacle de la valeur des apports correspond en réalité à un chiffre. Les biens qui y sont incorporés doivent être chiffrés. Dans ce sens le Plan comptable de 1947 affirmait que : "le capital social est la valeur … des éléments mis à la disposition de l’entreprise par le

231 Infra n°

232 Art. L225-8 et L225-12 C. com.

233 M. COZIAN,A. VIANDIER et F. DEBOISSY, Droit des sociétés, ouvrage préc., n° 488, p. 238. 234 Les commissaires aux apports sont également tenus de suivre cette méthode.

propriétaire ou les associés, sous forme d’apports en espèces ou en nature."235. Le capital

social reste donc un chiffre et c'est pourquoi le législateur prescrit aux sociétés d'évaluer les apports en nature. En effet, l'alinéa 1 de l'article L223-9 du Code de commerce applicable aux sociétés à responsabilité limitée dispose que : "Les statuts doivent contenir l'évaluation de

chaque apport en nature." La même prescription apparaît à l'article L225-14 du même Code

applicable à toutes les sociétés par actions au regard des articles L226-1 et L227-1 qui n'excluent pas l'application de ce texte. Les sociétés à risque illimité ne sont pas soumises à cette obligation puisque aucun texte ne le prévoit. Mais cela ne veut pas dire qu'elles ne doivent pas évaluer les apports en nature. L'article 1835 du Code civil impose que le montant du capital social apparaisse dans leurs statuts. Si l'apport en nature est effectué, il est évident qu'elles sont tenues de l'évaluer puisque cet apport ne comporte pas de chiffre en son sein.

87. L'évaluation de l'apport en nature par les associés dans les sociétés à risque

illimité. Dans les sociétés à risque illimité, l'évaluation des apports en nature pourrait être

effectuée par les associés. Il s'agit principalement des sociétés en nom collectif, en commandite simple et des sociétés civiles. Les associés peuvent parfaitement décider d'évaluer les apports en nature afin de leur attribuer une valeur. Cette possibilité résulte de l'absence de texte imposant une évaluation émanant d'un expert.

88. L'évaluation difficile de l'apport en nature par les associés dans les sociétés à

responsabilité limitée. L'absence d'imposition d'un commissaire aux apports dans certains

cas rapproche la société à responsabilité limitée des sociétés à risque illimité. En effet, l'alinéa 2 de l'article L223-9 du Code de commerce qui dispose que : "Toutefois, les futurs associés

peuvent décider à l'unanimité que le recours à un commissaire aux apports ne sera pas obligatoire, lorsque la valeur d'aucun apport en nature n'excède 7 500 euros et si la valeur totale de l'ensemble des apports en nature non soumis à l'évaluation d'un commissaire aux apports n'excède pas la moitié du capital." Le texte institue trois conditions pour que les

associés évaluent les apports en nature. La première condition concerne la majorité des voix qui s'exprimeront en faveur de l'absence de recours du commissaire aux apports. Toutes les voix doivent aller dans ce sens, c'est la manifestation de l'unanimité. Si l'un des associés refuse cette décision, l'évaluation par un expert s'impose dans le cas contraire l'apport pourra être évalué par les associés. Pour ce faire, il faut en plus que les deux autres conditions soient

remplies. La première, la valeur d'aucun apport en nature ne doit excéder 7 500€. Pour mette en application cette condition, il faut prendre isolément chaque apport en nature pour comparer individuellement leur valeur par rapport au montant indiqué. C'est l'ancien capital social minimum, qu'imposait la loi du 24 juillet 1966 aux sociétés à responsabilité limitée et convertis en euro par l'ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000, qui constitue la limite à ne pas dépasser pour chaque apport. Si, l'un des apports dépasse ce montant, le recours d'un commissaire aux apports semble être obligatoire. Dans le cas contraire, les deux premières conditions satisfaites restent tout de même insuffisantes. C'est l'emploi de la conjonction de coordination "et", à travers l'alinéa 2 de l'article L223-9 précité, qui laisse penser que ces trois conditions sont cumulatives. En effet, juste après avoir énoncé la deuxième condition, le législateur utilise ce lien pour annoncer la dernière condition. Pour écarter les services d'un expert de l'évaluation des apports en nature, il faut enfin que l'addition des valeurs des apports en nature ne dépasse pas la moitié du capital social fixé statutairement.

Au regard de toutes ces conditions cumulatives énoncées à l'alinéa 2 de l'article L223-9 précité, il est quand même difficile de mettre à l'écart un commissaire aux apports dans une société à responsabilité limitée contrairement aux sociétés à risque illimité. Il est quasiment certain que l'unanimité ne pourra pas être remplie s'il y a des apporteurs en numéraire. Le partage des droits et obligations en dépend. Même si cette condition est satisfaite, il n'est pas certain de remplir les autres s'il y a plusieurs autres apporteurs en nature. Ces apports pourraient facilement dépasser l'ancien capital social minimum des sociétés à responsabilité limitée. En outre, depuis la loi sur l'initiative économique du 1er août 2003, le capital social

minimum n'est plus imposé, les associés peuvent symboliquement fixer ce montant. Ainsi la limite de la troisième condition pourrait être dépassée.

Les règles applicables à l'évaluation des apports en nature sont hétéroclites. Au sein des sociétés à risque illimité, aucune règle n'est imposée mais il en est autrement au sein des sociétés à risque limité à savoir la SARL. L'évaluation libre n'est possible que sous certaines conditions qui nous paraissent tout de même difficile à remplir. Mais, s'il arrivait que les conditions soient remplies, alors comment les associés procèdent-ils à l'évaluation des apports en nature pour éviter que le capital social ne corresponde pas à la réalité des apports ? C'est ce que nous verrons dans les développements qui suivent consacrés à la méthode d'évaluation.

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