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La négociation de dispositifs collectifs interentreprises

L E CADRE DE LA MOBILITE INTERENTREPRISES AU SEIN DES ENSEMBLES ECONOMIQUES ET

Paragraphe 2. Un socle conventionnel commun : gage d'une sécurisation du parcours professionnel

B. La négociation de dispositifs collectifs interentreprises

251. La consécration d'une politique sociale commune nécessite la mise en place de

dispositifs intégrés au niveau de l'ensemble économique et social. Le but est alors de construire un réel statut social de l’organisation interentreprises. Tout d'abord, les accords de groupe ou interentreprises peuvent traiter des conditions de travail des salariés. Ce sujet est d'ailleurs à renforcer face à une politique de mobilité, impliquant donc de la sous-traitance ou des mises à disposition. Madame Magali Gadrat indique que « ce sont principalement le temps de travail

et les salaires, thèmes de négociation obligatoire, qui intéressent les partenaires sociaux au

386 S. Selusi, La cession du contrat de travail, op. cit.

387 J.-L. Denier, Menace sur le groupe ?, SSL 2003, n°1116.

388 D. Chatard, Réflexions sur le jeu croisé des pouvoirs et des responsabilités dans les groupes de sociétés, op. cit.

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niveau du groupe »389.

252. Ensuite, sans omettre que la seule responsabilité de l'obligation de rémunération pèse

sur l'employeur390, les accords peuvent également avoir pour objet la gestion financière du personnel au sein de l'ensemble économique et social. Selon Monsieur Damien Chatard, « le

groupe apparaît aujourd'hui comme un cadre de variabilité de la rémunération du salarié »391, ajoutant que « la mobilité des salariés entre les filiales du groupe, dans des situations de

détachement ou d'expatriation, fait également du groupe un cadre particulier de rémunération ». Il s'agit d'une problématique non encore évoquée quant aux réseaux.

Concernant les accords de groupe sur la rémunération, selon Madame Magali Gadrat, cela « semble particulièrement opportun dans la mesure où tous les salariés du groupe quelles que

soient leur ancienneté, leur classification, l'entité pour laquelle ils travaillent, participent à la réalisation d'un seul et même objectif »392. Madame Sophie Selusi-Subirats, dans sa thèse consacrée à la cession du contrat de travail, met en avant que de par la mise en place, au niveau de l'ensemble économique et sociale, de plans d'épargne salariale, aucun transfert des avoirs n'est alors nécessaire lorsque le salarié est transféré d'une entreprise à l'autre393. Beaucoup de groupes, à l'instar du groupe Rhodia, mettent en place des « mesures d'augmentation de salaire

collectives dont le taux est identique pour tous les personnels »394. Ces politiques de rémunération sont complétées par des dispositifs intégrés. Comme le rappelle habilement Monsieur Damien Chatard, « la rémunération collective renvoie à la notion d'épargne

salariale »395. Le but poursuivi dans ces accords est d'instituer une épargne salariale qui est calculée et répartie de la même manière dans les sociétés du groupe. Ainsi, bien que certaines entreprises ne contribuent pas à la réserve de participation, leurs salariés ont pourtant vocation à en bénéficier. Tout d'abord, un accord de participation peut être conclu au niveau du groupe. La conclusion d'un accord entre toutes les sociétés du groupe ou seulement certaines d'entre elles est une possibilité de mise en place d'un accord de participation parmi d'autres. Ainsi, la réserve spéciale de participation peut être envisagée au niveau du groupe. En vertu de l'article L. 3324-2 du code du travail, « lorsqu'un accord est conclu au sein d'un groupe de sociétés,

389 M. Gadrat, Le contenu des accords de groupe, Dr. Soc. 2010, p. 651.

390 D. Chatard met cela en lumière dans sa thèse en rappelant que « si le groupe est un cadre de variabilité de la

rémunération, celle-ci est mise en œuvre dans chacune des entreprises », op. cit.

391 Ibid.

392 M. Gadrat, Le contenu des accords de groupe, préc.

393 S. Selusi, La cession du contrat de travail, op. cit.

394 M. Gadrat, Le contenu des accords de groupe, préc.

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l'équivalence des avantages consentis aux salariés s'apprécie globalement au niveau du groupe et non entreprise par entreprise». Par ailleurs, un accord d'intéressement peut également être conclu à ce niveau, ce qui suppose, en vertu de l'article L. 3344-1 du code du travail que les entreprises aient tissé des liens financiers et économiques entre elles. Une circulaire du 14 septembre 2005 régit en partie la question de l'intéressement au niveau du groupe, ce dernier devant être « l'étalon de l'intéressement »396. Plusieurs modalités peuvent être prévues pour la participation et l'intéressement comme la création d'une réserve de participation globale en additionnant la participation de chacune des sociétés397 ou encore l'institution de plusieurs niveaux de calcul de l'intéressement398. Il est également possible, d'instaurer un intéressement supplémentaire qui s'ajoute aux systèmes de chaque entreprise399. Monsieur Damien Chatard étudie également, dans sa thèse, la possibilité de mettre en place un plan d'épargne de groupe, soulignant que « la promotion de l'actionnariat de groupe exalte le sentiment d'appartenance

à la communauté de travail étendue au groupe en son entier »400. L'auteur précise, à ce titre, que « la mise en place unilatérale [d'un tel accord] serait […] une voie subsidiaire, susceptible

d'être empruntée uniquement en cas de blocage de la voie conventionnelle spécifique ». 253. Madame Magali Gadrat émet cependant une réserve concernant ces mécanismes en

affirmant que « dans la mesure où la mise en place de l'intéressement ou de la participation

[au niveau du groupe] a pour conséquence, en général, de créer une épargne salariale lissée, identique pour tous les salariés du groupe, une telle négociation est susceptible de rencontrer des résistances »401. En effet, certaines entreprises dégagent une épargne salariale plus importante et instituer cette épargne au niveau du réseau peut avoir pour conséquence de diminuer ce montant pour les salariés de certaines entreprises par rapport à leur épargne salariale d'entreprise. Selon nous, il serait donc judicieux, comme le font certains accords, d'instituer des systèmes d'épargne à plusieurs niveaux. Cela pourrait même être transposé au niveau du réseau. En effet, l'accord interentreprises est un nouvel outil pour la mise en place de ces dispositifs intégrés. Il a d'ailleurs été précisé qu'un « plan épargne interentreprises (PEIE)

396 P. Morvan, Groupes d'entreprises et rémunération du travail, Droit social 2010.

397 Accords sur la participation et l'épargne salariale du groupe Snecma des 7 février et 9 mars 2005, LSQ, 8 avril 2005, n°14357.

398 Accord du groupe Rhodia sur l'intéressement du 16 juin 2008.

399 Accord du groupe Suez du 3 juillet 2007 sur l'intéressement financier au niveau du groupe, LSQ, 9 juillet 2007, n°14909.

400 D. Chatard, Réflexions sur le jeu croisé des pouvoirs et des responsabilités dans les groupes de sociétés, préf. B. Teyssié, LexisNexis, coll. Planète social, 2013.

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peut être mis en place [...] »402, les articles L. 1 et suivants ainsi que les articles R. 3332-1 et suivants étant applicables à ce niveau. Cependant, la conclusion d'un accord interentreprises, ne permet pas de répondre aux obligations des entités en termes de négociation, sur certains sujets. Les entreprises devront donc continuer à répondre à leurs obligations. Des dispositifs pourront ainsi se cumuler à ces négociations d'entreprises au niveau du réseau.

254. Toujours dans le but de palier les disparités entre entités appartenant à un même

ensemble économique et social, certains groupes prévoient une protection sociale complémentaire visant à mettre en place « un régime de prévoyance collective dans le groupe »403 et à générer ainsi « une solidarité entre les différents personnels du groupe ». Monsieur Damien Chatard évoque également la possibilité d'instituer une prime de partage des profits. Ayant vocation à s'appliquer aux sociétés commerciales de droit privé et créée par une loi de 2011404, ce dispositif n'est, selon nous, pas transposable au niveau du réseau.

402 Le Lamy négociation collective, Lamy, 2019.

403 M. Gadrat, Le contenu des accords de groupe, préc.

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