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La formalisation des choix dans un document de référence reste néanmoins utile

n’exclut pas un pilotage d’ensemble

1.3.1. Les formes du pilotage de l’action économique des personnes publiques

1.3.1.2. La formalisation des choix dans un document de référence reste néanmoins utile

De la prospective à la planification, il n’y a parfois qu’un pas. Lorsque France Stratégie travaille, à la demande du Président de la République, sur « La France dans 10 ans »196 et articule une série d’axes stratégiques et de propositions sur lesquels il est ensuite appelé à faire des préconisations opérationnelles, il s’agit bien d’un exercice de planification, même s’il n’y a pas de validation formelle des options retenues, ce qui est paradoxal, alors que par ailleurs de nombreux exercices formalisés de planification sectoriels ou ponctuels se développent.

192. Art. 1er du décret n° 2006-260 du 6 mars 2006 portant création du Centre d’analyse stratégique.

193. Art. 1er du décret n° 2013-333 du 22 avril 2013 portant création du Commissariat géné-ral à la stratégie et à la prospective.

194. Il s’agit du Conseil d’orientation des retraites, du Conseil d’orientation pour l’emploi, du Haut Conseil de la famille, du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, du Haut Conseil du financement de la protection sociale, du Conseil national de l’industrie et du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (article 3 du même décret).

195. Notamment à la suite des recommandations de la commission « État, administration et services publics de l’an 2000 » du XIe plan (celui là même qui n’a pas été officiellement adopté).

196. « La France dans 10 ans » est un processus initié par le séminaire gouvernemental du 19 août 2013. Le rapport sur ce thème a été remis le 25 juin 2014.

„ La formalisation existe dans de nombreux secteurs

La démarche planificatrice a inspiré un grand nombre de dispositifs dans des domaines sectoriels197. Ils peuvent prendre la forme de « lois de programmation » fondées sur l’antépénultième alinéa de l’article 34 de la Constitution ou de lois

« mixtes » comportant des dispositions de programmation à côté de dispositions normatives, par exemple en matière de solidarité internationale, de politique de la ville, de défense ou de sécurité intérieure198.

Des planifications peuvent aussi être formalisées dans des documents ne figurant pas dans des textes législatifs mais expressément approuvés par le gouvernement, comme par exemple les « 34 plans de la Nouvelle France industrielle » ou les diverses « Stratégies nationales » comme en matière de recherche (SNR)199. Ces plans et stratégies fixent ainsi sur plusieurs années les priorités de l’État et donnent lieu à un suivi précis de leur mise en œuvre.

La planification formalisée est également très dynamique à l’échelon territorial.

Outre les contrats de plans État-région, qui viennent d’être relancés dans le cadre de la « génération 2014-2020 », on peut mentionner les schémas régionaux de développement économique, les pôles de compétitivité ou même les « stratégies économiques » arrêtées par certaines grandes villes200.

Dans un autre domaine, le besoin d’une planification formalisée s’est fait ressentir lors de la crise financière et s’est traduit par l’adoption du plan de relance de l’économie en 2008-2009, dans le cadre du plan européen d’action concertée du 12 octobre 2008201.

La résurgence de la logique planificatrice : l’exemple du « Plan d’action économique » du Canada

Le plan d’action économique (PAE) a été initié pour la première fois dans le cadre du budget fédéral de 2009 afin de combattre les effets de la récession mondiale.

Le PAE est adopté dans le cadre du budget (il figure dans son dernier état dans la loi C-59 de juin 2015) et est regardé de ce fait comme revêtu d’une valeur législative. Il fait l’objet de révisions à l’occasion de chaque budget annuel et rectificatif.

Ce plan d’action trace les orientations de la politique économique et sociale du Gouvernement à court et moyen terme. Celles-ci se traduisent par un ensemble 197. Ce phénomène se retrouve dans un grand nombre de pays étrangers, comme en Es-pagne, avec des plans sectoriels assez divers : « plan national et intégral du tourisme »,

« programme d’incitation aux véhicules efficaces » ; « agenda numérique espagnol 2020 »...

198. Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la poli-tique de développement et de solidarité internationale, loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

199. Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche.

200. V. par ex., la « Stratégie économique du Grand Lyon » (2008-2014).

201. V. S. Nicinski, « Le plan de relance de l’économie », RFDA, 2009, p. 73.

de mesures, notamment via le budget fédéral qui les décline dans plusieurs programmes particuliers avec un horizon pluriannuel. Ce plan ne s’apparente pas à un document contractuel. Les opérations cofinancées avec l’échelon infra-national (provinces) étant conduites dans le cadre d’appels à projets spécifiques.

Ce plan présente notamment l’intérêt de sécuriser les opérateurs économiques publics et privés en leur permettant d’anticiper les décisions prises sur la politique budgétaire, les programmes d’infrastructure... Il fait l’objet d’une évaluation régulière de ces résultats, rendue publique sur un site dédié (plandaction.gc.ca/fr)

„ Une formalisation de la stratégie économique nationale reste à développer La stratégie économique nationale servant de référence à l’action économique de l’État et des autres personnes publiques est en principe fixée dans la déclaration de politique générale prévue à l’article 49 de la Constitution et mise en œuvre chaque année dans les orientations que le Gouvernement énonce à l’occasion du projet de loi de finances.

Le nouveau cadre issu du renforcement de la surveillance des politiques budgétaires et macroéconomiques (v. supra 1.1.2.) amène en outre le Gouvernement à actualiser sa stratégie économique pluriannuelle dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques prévue par l’avant-dernier alinéa de l’article 34 de la Constitution et, plusieurs fois par an, dans le cadre du semestre européen, qui au-delà des seuls aspects budgétaires, comporte un volet de plus en plus significatif sur les équilibres et les perspectives macroéconomiques, ainsi que sur les projets de réforme202.

Compte tenu de leur objet et de leur pluralité, ces différentes interventions devant le Parlement ou la Commission européenne peuvent difficilement constituer le document de référence de la stratégie économique nationale, même si elles peuvent le nourrir.

La formalisation d’un tel document, qui pourrait être confiée à France Stratégie, présenterait des avantages. Elle permettrait d’abord, sans pour autant prendre la forme d’une loi de plan ou de programmation, d’associer plus étroitement les parlementaires – ainsi que le CESE et les représentants des élus locaux, notamment des régions et des métropoles – en les faisant participer à un débat général sur la stratégie économique et ses déclinaisons concrètes. Sa préparation conduirait à une large concertation avec les partenaires sociaux comme cela a existé dans le cadre du plan de la Nation203. Cette concertation donnerait une légitimité supplémentaire à la stratégie économique, une solennité particulière et un effet d’entraînement pouvant contribuer à sa réussite.

202. Le rapport des cinq présidents du 22 juin 2015 précité propose de renforcer ces élé-ments dans la perspective de l’approfondissement de l’union économique et monétaire.

203. La forme de cette concertation avait évolué en 1982. Aux termes de l’article 6 de la loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification précitée : « Il est créé, pour chaque plan, une commission nationale de planification, de caractère consultatif, chargée de conduire les consultations nécessaires à l’élaboration du Plan et de participer au suivi de son exécution (...) Y sont notamment représentés : chaque région, les organisations syndi-

Cette stratégie, fixée en début de législature, devrait être souple et adaptable en fonction des circonstances. Elle aurait néanmoins vocation à servir de document de référence et être prise en compte par les autres documents de programmation ou de planification sectoriels, qu’il s’agisse des contrats passés par l’État avec les régions (CPER) ou avec ses opérateurs – établissements publics, sociétés publiques – (contrats d’objectifs), ainsi que par les autres documents de programmation ou de planification élaborés par les personnes publiques.

Comme cela était admis pour le plan lui-même, la stratégie économique nationale n’aurait pas vocation « à s’occuper de tout » ni à traiter de chaque question significative pour l’économie, au risque de devenir illisible. Comme le proposait dès 1994 le rapport de J. de Gaulle, à propos du plan : « L’objectif a changé : il s’agit désormais de planifier les changements nécessaires (...). Appuyée sur un travail d’évaluation, confrontée aux défis de l’avenir par des études prospectives, enrichie par les points de vue des acteurs, l’analyse stratégique a pour but de dégager des priorités d’action ».

Proposition n° 12 : Mieux organiser la prospective publique en matière économique et se doter d’une stratégie économique nationale formalisée 1) confier à France Stratégie un rôle de référent en matière de prospective publique et de mise en réseau des travaux des centres de prospective ;

Vecteur : décret d’organisation de France Stratégie 2) demander à France Stratégie d’élaborer un document de référence portant sur la « stratégie économique nationale » et intégrant les engagements pris par la France au niveau européen ; définir les axes de cette stratégie nationale susceptibles d’être déclinés par les autres personnes publiques, notamment les collectivités locales ; concevoir cette stratégie sur une période pluriannuelle (3 à 5 ans) ;

Vecteur : décret d’organisation de France Stratégie 3) organiser une large concertation sur le contenu de cette stratégie avant un débat au Parlement.

Vecteur : action du Gouvernement et inscription à l’ordre du jour des assemblées (France Stratégie, ministre des finances et des comptes publics, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, ministre de l’intérieur, Parlement)

ales représentatives des salariés et du patronat, les organismes représentant l’agriculture, l’artisanat, le commerce et les professions libérales, le secteur public industriel et bancaire, le secteur coopératif et mutualiste, les mouvements associatifs et culturels. Elle peut être complétée par des personnalités qualifiées nommées par le Gouvernement ». Cette organi-sation s’est toutefois révélée décevante. Mais rien n’obligerait à définir un cadre rigide pour cette concertation qui pourrait se tenir selon des modalités à définir le cas échéant par les participants eux-mêmes.

1.3.2. La nécessaire cartographie de l’action économique

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