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Chapitre 4 Présentation des données et analyses des résultats: parcours migratoire des répondants

4.4 Mobilité des immigrants et leur choix de destination

4.4.3 De la Ville de Québec à la région de Québec (aucun déplacement interrégional)

Ce parcours a été effectué par les immigrants qui ont choisi la région de Québec comme leur première destination et qui y sont revenus après une tentative d’installation dans d’autres villes, que ce soit pour leurs projets d’études ou de travail. Les immigrants qui restent toujours dans la région de Québec sont aussi classés sous cette catégorie.

Dans le cas de F7, sa mobilité géographique était influencée par son conjoint, qui a effectué plusieurs changements d’emploi en différents endroits. F7, qui a travaillé dans le domaine de la restauration et de la traduction à Sherbrooke, a décidé de se lancer sa propre entreprise dans la région de Québec.

« Mon conjoint avait un contrat de deux ans à Sherbrooke. Pendant ce temps-là, je travaillais comme traductrice et serveuse. Et puis mon conjoint a trouvé du travail à Québec et nous y retournions en suivant cette opportunité de travail. J’ai fait mon bac en traduction et j’aime mon domaine; donc j’ai créé mon emploi de traductrice dans la région de Québec. » (F7, créatrice)

Après avoir travaillé pendant dix ans dans le domaine de l’informatique, F8 a décidé de sortir de la ville de Québec pour aller faire des études à Montréal. Et son projet d’études l’a reconduite vers la région de Québec, où elle a établi un centre de soins de santé en médecine chinoise.

« À l’époque, j’ai travaillé dans une entreprise privée à Québec dans le secteur de TI et j’ai commencé à avoir des troubles de santé, surtout des maladies professionnelles. Durant le traitement chez les acupuncteurs, j’ai remarqué mon intérêt dans la médecine chinoise et je suis allée à Montréal pour faire mes études. Depuis 2010, j’ai ma propre centre à Québec. » (F8, créatrice)

H10 a quitté son poste de chercheur pour aider sa femme, qui travaillait seule dans une épicerie. Depuis sa démission, le couple a vendu la petite épicerie pour en acheter

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une plus grande.

« Je suis arrivé au Canada à l’âge de 43 ans et maintenant j’ai 50 ans. Je travaillais le weekend pour aider ma femme qui gère son épicerie et du lundi au vendredi je travaillais dans le centre de recherche. La première épicerie était petite, et c’était facile de combiner mon travail de recherche et celui à l’épicerie. Maintenant on a changé pour une plus grande épicerie et je me sentais très fatigué de combiner deux jobs. La démission me permet d’avoir du temps à moi, et d’être capable de prendre des décisions pour moi. C’est moi qui décide de gérer l’épicerie par moi-même ou d’embaucher des gens. En fait, travailler dans une épicerie est très demandant. Mais en même temps, c’est un travail stable. Je gagne même plus que dans le centre de recherche. Et je ne serai jamais au chômage. » (H10, repreneur)

Malgré que les trajectoires chez les immigrants soient diverses, les répondants nouveaux arrivants cherchent tous une localité où ils peuvent saisir de meilleures occasions d’affaires. La mobilité des immigrants laisse voir que leur décision de déménagement ainsi que leur choix de lieu d’installation représentent souvent une « mobilité positive » qui leur permet d’aller vers une promotion sociale (Vatz Laaroussi, Guilbert et al., 2007 : 135).

Il ressort de cette analyse que les immigrants possèdent en général trois catégories de trajectoires : ceux qui se sont lancé en affaires dans la région de Montréal avant de déménager dans la région de Québec, ceux qui ont passé par des villes de transit où ils ont accumulé de l’expérience d’entreprendre, et ceux qui n’ont jamais quitté la région de Québec ou qui y sont retournés après avoir vécu ailleurs. Leur trajectoire migratoire ainsi que leur choix de ville sont souvent liés aux opportunités de travail, au désir d’acquérir un sentiment de sécurité financière, aux réseaux sociaux qu’ils ont développés avec les amis et avec les organismes du secteur d’immigration. On note aussi que la création ou la reprise d’entreprise est souvent un plan professionnel voire familial adopté après l’immigration chez les immigrants participants qui ont vécu des difficultés dans leurs premières expériences d’intégration économique à la société québécoise. Les différences linguistiques et culturelles sont les barrières les plus marquées dans leur démarche. Au lieu d’être restreints par les conditions défavorables

avec lesquels beaucoup d’immigrants sont aux prises, ces individus empruntent des chemins d’entrepreneuriat pour en sortir.

4.5 Conclusion

Ce chapitre a permis d’illustrer le déploiement des parcours migratoires des immigrants chinois, spécifiquement durant les premières années suivant leur arrivée au pays d’accueil. On s’attarde à leurs motifs d’immigrer, des difficultés qu’ils ont rencontrées ainsi que les stratégies qu’ils ont adoptées. Les analyses permettent de comprendre que le choix de l’immigration est influencé par un ensemble de facteurs ayant trait aux conditions socioéconomiques et culturelles du pays de départ et aux motivations personnelles de chaque répondant. Possédant un certain statut social et un emploi stable en Chine, ces répondants, dont la majorité s’est mariée avant l’immigration, partaient pour le Québec pour concrétiser leur projet professionnel, éducatif et familial. Ils aspiraient à voir le monde extérieur, à parvenir à une ascension de carrière, à faire des études en Occident et à éduquer leurs enfants dans un environnement francophone et moins concurrentiel que leur pays de départ.

Les choix professionnels des participants durant les premières années en terre d’accueil étaient très variés. Ils ont suivi différentes pistes pour s’intégrer au marché du travail une fois arrivés au Québec: aller à l’université pour reprendre leur formation, travailler dans des institutions universitaires avec le permis de travail, créer ou reprendre des entreprises existantes et chercher de l’emploi à l’aide de liens forts et faibles. On note que le niveau de langue française insuffisant, les différences culturelles entre le Québec et la Chine, la difficulté de faire reconnaître des diplômes chinois, le manque d’expérience de travail locale et le faible développement de réseaux sociaux dans le pays d’accueil représentent les principaux défis qui ont aggravé leur précarité.

Les réseaux établis entre les immigrants et la société d’accueil ont influencé leur choix de première localité de destination, le fait d’avoir de la famille ou des amis dans

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leur première ville d’installation permet aux nouveaux arrivants de s’y intégrer plus vite. En plus des réseaux de connaissances, les organismes communautaires et les organisations gouvernementales et non gouvernementales sont des endroits où ces derniers cherchent de l’information durant leur période de transition. Plusieurs répondants déclarent que les conférences dans le secteur d’immigration ont durablement influencé leur décision de déménager et de maîtriser la langue française. Les liens ethniques en situation migratoire ont une certaine utilité, dans la mesure où ils permettent aux immigrants de vite s’installer dans la société d’accueil en leur offrant une certaine forme d’accompagnement pour la recherche d’un premier emploi et d’un premier logement. Cependant, ces liens demeurent peu efficaces lorsqu’il s’agit d’une intégration professionnelle durable correspondant au niveau de formation des immigrants. Les immigrants rencontrés n’ont accepté leur déclassement professionnel que temporairement. Au lieu d’être restreints par les liens forts qui forment leur premier réseau et par les conditions socio-économiques défavorables avec lesquelles ils sont aux prises, ils empruntent des chemins de mobilité nécessitant de constantes adaptations au nouvel environnement afin d’obtenir des ascension socioprofessionnelles.

Dans la présente recherche, la majorité des participants chinois rencontrés ont quitté leur première ville de destination pour aller s’installer dans la région de Québec, après y avoir saisi une opportunité entrepreneuriale. Leur choix de ville de destination et leur trajectoire portent une couleur très positive tout en leur permettant d’aller vers une promotion sociale et économique, comme l’on le verra dans les chapitres suivants.

Chapitre 5 Situation de carrière actuelle : immigrants créateurs et repreneurs

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