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Chapitre 6 Dynamique d’entrepreneuriat chez les immigrants créateurs et repreneurs

6.2 Perception durant le parcours d’entrepreneuriat et d’immigration

6.2.3 Nouvel apprentissage dans le parcours migratoire

Plusieurs immigrants dans la présente recherche déclarent que la migration leur donne l’occasion de mettre en œuvre des apprentissages formels et informels. Ils évoquent

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en même temps leur persévérance plus développée dans cette circonstance.

H1 décrit son processus d’apprentissage d’une nouvelle langue en précisant qu’étudier le français était un défi, mais qu’il est une personne qui ose se battre dans la vie et qui s’adapte bien aux changements. Il affirme qu’il est toujours ouvert à l’apprentissage, que ce soit pour apprendre une langue ou pour faire face à différentes situations.

« Mon amie m’a dit qu’elle était trop âgée pour apprendre une nouvelle langue. Je ne suis pas d’accord. J’ai commencé à apprendre la langue française quand j’avais 26 ans, et dans la même classe, les autres étudiants étaient tous plus jeunes que moi. J’avais souvent de mauvaises notes quand il y avait des examens, mais je n’ai pas abandonné. Maintenant, j’ai réussi à maîtriser cette langue. Il y a un proverbe dans ma région : « Ceux qui ne veulent pas faire des sacrifices ne peuvent pas réussir ». Il faut avoir la compétence de résilience et de persévérance. Il faut se forcer à apprendre une nouvelle langue, même si l’on n’en a pas tout le temps envie. Durant la migration, j’ai aussi travaillé dans un restaurant : j’ai beaucoup appris de notre chef cuisinier. Je l’observais, je faisais des analyses. Je suis quelqu’un qui est ouvert à apprendre. Je me pose souvent des questions : si je suis à la place du directeur, qu’est-ce que je vais faire ? J’apprends beaucoup par moi-même. » (H1, repreneur)

Dans la traversée difficile de l’entrepreneuriat, F5 a pris conscience que son conjoint et elle avaient beaucoup appris, que ce soit sur le fonctionnement de la société d’accueil ou sur la gestion et le développement des affaires. Selon elle, le projet d’entrepreneuriat leur permet d’apprendre des nouvelles choses, d’accumuler des ressources personnelles et d’approfondir leurs connaissances dans le domaine de l’entrepreneuriat. Cette expérience lui a appris qu’elle était capable de faire toutes sortes d’apprentissages et de surmonter des obstacles.

« Mon conjoint n’a jamais travaillé avec le bois, mais maintenant il est un bon menuisier qui a beaucoup de précision et de rigueur. Je détestais travailler avec l’ordinateur, mais j’ai réussi à créer des dépliants d’entreprise par moi-même. Ce sont de nouveaux domaines que l’on ne connaissait pas auparavant. Mais nos compétences se développent progressivement. » (F5, créatrice)

F3 se considère comme une personne dépendante, puisque le projet de migration et de reprise d’entreprise a été entièrement initié par son conjoint. Même après la reprise

d’entreprise, c’était toujours lui qui faisait les premiers pas dans le développement des affaires. Pourtant, ce monsieur a rencontré plus de difficulté qu’il n’aurait cru durant son apprentissage de français et d’anglais. Quand il se sentait découragé en raison des difficultés linguistiques et communicatives et qu’il voulait vendre leur entreprise, c’est F3 qui a insisté et a pris la décision de se battre sans peur. Elle est de plus en plus indépendante et elle commence à jouer un rôle important avec les employés.

« Vivre la situation difficile de la migration me force à apprendre de nouvelles choses. Mon conjoint ne parle pas bien le français ni l'anglais, et quelquefois il se sent découragé devant les difficultés linguistiques. Je le comprends très bien. J’étais quelqu’un de dépendant, mais maintenant je dois être capable d’aider mon conjoint. » (F3, repreneuse)

Pour F8, immigrer au Québec est vécu comme un retour à soi. En Chine, elle aspire à changer d’emploi, mais ses parents ne lui permettaient pas. L’expérience d’études à Québec correspond à ses aspirations professionnelles et peu de temps après, elle a pu trouver un emploi. L’expérience de la migration contribue à sa réussite professionnelle : entre autres, elle a beaucoup plus confiance en elle-même et elle a appris à se connaître.

« Quand j’étais en Chine, je n’avais pas confiance en moi. Mes parents m’ont trouvé un emploi que je n’aimais pas. Je ne savais pas quoi faire dans le futur. Je voulais travailler dans le tourisme, mais mes parents n’étaient pas d’accord. Ils m’ont persuadée de rester dans l’ancien emploi. D’ailleurs, le Guanxi s’applique beaucoup en Chine. Pour trouver un travail ou pour atteindre des objectifs commerciaux, les Chinois aiment se donner des cadeaux. Ils donnent même de l’argent sous la table pour créer des liens. Moi je déteste ce genre de réseaux corrompus et je refuse de le faire. Je me sentais déprimée et je ne voyais pas d’espoir. À Québec, j’ai appris à me connaître, à trouver mes intérêts et à travailler dans le secteur qui m’intéresse. Je fais mes choix indépendamment et je n’ai pas besoin d’être surveillée par mes parents. » (F8, créatrice)

F7 affirme que le fait d’avoir sa propre entreprise lui permet de transférer son savoir et ses compétences du pays de départ vers la société québécoise, malgré le changement des contextes social et économique. Mais elle évoque aussi l’importance d’apprendre et de mettre à jour ses connaissances dans la société d’accueil.

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« En général, les travailleurs qualifiés sélectionnés par le gouvernement du Québec possèdent déjà les compétences nécessaires pour s’intégrer au marché du travail québécois. Mais il leur faut encore du temps pour combler leur manque d’information, de liens sociaux. C’est un processus de transfert et d’apprentissage. » (F7, créatrice)

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