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Chapitre 3 – L'évaluation des fréquentations récréatives des forêts

3.2/ Les grandes enquêtes quantitatives et leurs limites

3.2.2/ Les thèmes des grandes enquêtes quantitatives et leurs résultats

3.2.2.3/ Les usages récréatifs

Toutes les enquêtes montrent que la promenade est l'activité principale des usagers, même si elle a proportionnellement perdu un peu de son importance, avant d'en regagner et de se stabiliser. Les promeneurs apparaissent donc comme de fidèles usagers des forêts (ONF, 2012a). Dans le Nord-Pas- de-Calais, les promeneurs représentaient 72 % des usagers en 1974, alors qu'ils n'étaient plus que 65 % en 1992 (Aubépart, 1996). Dans les années suivantes, ce mouvement de baisse ne s'est semble t- il pas généralisé ou il a ralenti, puisqu'en 2004, selon l'ONF, à l'échelle de la France entière les

promeneurs représentaient 58 % des usagers. En 2002, selon l'enquête du LEF (Berger, Peyron, 2005), la promenade était l'activité principale de 64 % des ménages, et en 2010, l' ONF et l'Université de Caen confirment que la promenade est une activité privilégiée pour 64 % des usagers. Si elle est suffisamment longue ou intense, la marche à pied peut être considérée comme une véritable activité physique. Les promenades peuvent aussi être courtes et les enquêtes quantitatives ne permettent pas toujours de discrétiser les pratiques des usagers. Selon l'institut BVA, plus de 80 % des habitants d'Île-de-France disent qu'ils se promènent souvent en forêt (Laffite, 1991) mais l'enquête ne précise pas l'intensité de cette activité. Selon d'autres recherches, de nombreux usagers restent à proximité de leur voiture (Kalaora, 1981 ; Morange, 1997).

Compte tenu de ces informations assez imprécises, il est difficile de généraliser et de considérer la promenade comme une activité physique ou sportive, quoique 62 % des individus interrogés disent fréquenter les chemins balisés ou les sentiers de découverte (ONF, 2012a).

Les forêts apparaissent souvent comme des espaces propices aux sports et aux pratiques ludo- sportives qui sont considérés comme d'importantes activités de loisirs. Au début des années quatre- vingt-dix, environ 20 % des usagers appréciaient le sport en forêt (Laffite, 1991), et une dizaine d'années plus tard les sports tels que le jogging, le cyclisme et le VTT sont les activités de plus de 20 % des usagers franciliens (Maresca, 2000). En 2004 et en 2010, les enquêtes de l'ONF (2012) sont arrivées aux mêmes résultats : 22 % des usagers vont en forêt pour faire du sport. Ces résultats sont donc homogènes sur une durée de plus de 20 ans. Cependant, en 2002, les enquêteurs du LEF ont estimé que les activités sportives n'étaient le but que de 11 % des sorties familiales (Berger, Peyron, 2005). Alors que le thème et les résultats d'enquête relatifs aux sports semblent relativement consensuels, une légère modification dans la méthode ou dans la formulation des questions produit donc des résultats très différents.

Selon la plupart des enquêtes, la promenade et les pratiques sportives sont clairement les activités les plus populaires sur une longue période, même si des méthodes et des problèmes de sémantique révèlent des nuances. Par contre, pour d'autres activités, les enquêtes quantitatives révèlent davantage de différences que de similitudes. Ces disparités entre les résultats d'enquêtes, concernent notamment les activités liées à l'observation de la nature et aux pique-niques.

En 2000, l'enquête du CREDOC réalisée en Île-de-France montre que 60 % des visiteurs en forêt accordent du temps à l'observation de la nature et que 26 % des usagers pique-niquent et pratiquent la cueillette (Maresca, 2000). Par contre, l'enquête du LEF établit qu'en 2002, les activités de cueillette, de pique-nique et d'observation de la nature génèrent moins de une sortie par an et par ménage (Berger, Peyron, 2005). En 2004, dans le cadre de l'enquête réalisée par l'Université de

Caen-Lasmas (ONF, 2011a), 35 % des usagers ont déclaré être adeptes de la cueillette, 15 % des usagers ont dit qu'ils observent la nature et 15 % se reposent, pique-niquent et jouent.

La formulation des résultats de ces enquêtes révèle que ces disparités sont, en grande partie, une conséquence de l'appréhension de la forêt et du mode de questionnement des usagers. Comment définir l'observation de la nature ? Un usager qui pratique une cueillette observe t-il la nature ? Les premières enquêtes quantitatives réalisées dans les années soixante et soixante-dix, ont montré un rapport entre les activités récréatives et la profession ou la catégorie sociale des usagers (Kalaora, 1981). Pendant une période, cette appréhension catégorielle des activités récréatives a peut-être été excessive et depuis les années soixante-dix, l'évolution sociale qui a individualisé les comportements, a modifié certains aspects socio-économiques liés aux loisirs (Kalaora, 1998 ; Laffite, 1991 ; Lahire, 1998 ; Parant, Alexandre, 1998). Depuis les années quatre-vingt-dix, la plupart des enquêtes réalisées au niveau national ne mettent plus en évidence les caractéristiques socio-économiques comme le principal discriminant des activités récréatives en forêt.

Malgré ces analyses et ces divergences liées au statut socio-professionnel des usagers, il semble que le coût généré par les déplacements hors des grandes villes, influe toujours sur les niveaux d'activités qui sont enregistrés dans les forêts des périphéries éloignées. Ainsi, pour les citadins de la métropole rhodanienne, il a été montré que les coûts de déplacement sont l'un des déterminants des sorties loin de la ville (Boutefeu, 2008 ; 2009).

Hors des pratiques les plus courantes, l'évaluation de la popularité de certaines activités semble liée à l'échelle à laquelle les enquêtes sont menées. Entre le niveau national et celui des grandes régions urbaines, les résultats et les analyses des grandes enquêtes sont parfois sensiblement différents. L'une des raisons de ces constats est liée à l'appréhension statistique qui a tendance à lisser les phénomènes sociaux et locaux.

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