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Deuxième partie Les activités récréatives dans les forêts périurbaines d'Alençon, de Blois et du Mans

Chapitre 5 La méthodologie d'enquête et la présentation des usagers

5.2/ La population des individus interrogés

5.2.5/ Les niveaux de fréquentation selon la PCS des usagers

Les travaux de la SARES et de Kalaora (1976 ; 1998), de l'INSEE et Ballion (1975) ou de ceux de Mathieu et Praicheux (1983) sur les usages récréatifs des forêts périurbaines, montraient clairement des corrélations entre les niveaux ou les types de fréquentations et la profession des usagers. Les cadres, les professions intellectuelles supérieures et certaines élites fréquentaient plus souvent les espaces boisés, où ils avaient imposé leurs références face aux usages et aux « consommations » de ces espaces par les classes plus populaires. Selon ces chercheurs, les ouvriers fréquentaient moins les bois et ils paraissaient moins attirés par le milieu naturel que les élites.

Dans le cadre des espaces locaux de cette recherche, il semblait donc intéressant de rappeler les statistiques de l'INSEE (2011), et d'analyser les niveaux de fréquentation dans les deux types d'espaces boisés selon la PCS des usagers interviewés. Le tableau n° 9 montre la répartition statistique des PCS dans la population de chacune des trois aires urbaines. Ces chiffres officiels sont mis en perspective avec ceux qui ont été produits dans le cadre de cette recherche.

Les chiffres de l'INSEE montrent que dans les trois aires urbaines, la PCS la plus représentée est celle des retraités avec plus de 27 % de la population de plus de 15 ans. Les autres catégories les plus représentées sont les employés, les ouvriers et les personnes sans activité professionnelle. La PCS des cadres et des professions intellectuelles supérieures n'arrive qu'en sixième position et elle représente de 5,7 % à 7,3 % de la population de chacune des aires urbaines.

Entre les trois aires urbaines, la composition sociale de la population est relativement identique. Le plus grand écart concerne les retraités. Ils sont moins nombreux au Mans (27 %), et plus nombreux à Alençon (29 %). Les autres différences sont toutes inférieures à 2 %.

Tableau n°9 - Les PCS de la population des aires urbaines et des usagers des espaces boisés

Répartition par PCS dans les aires urbaines

et dans les deux types d'espaces boisés

Chiffres de l'INSEE¹ Espaces boisés de la recherche¹

Alençon² Blois² Le Mans²

Forêts domaniales Espaces suburbains Total forêts périurbaines Agriculteurs exploitants 1,2 0,8 0,7 1,8 1,5 1,7 Artisans commerçants 2,9 3 2,5 3,1 2,6 2,8 Cadres 5,7 7,3 6,8 11 10,8 10,9 Professions intermédiaires 13,6 14,5 14,5 8 7,7 7,8 Employés 17 17,5 17,8 11,7 22,2 17,4 Ouvriers 15 14,9 15,4 4,3 5,7 5 Retraités 29 27,5 27 46 38,7 42

Personnes sans activité

professionnelle 15,6 14,4 15,2 14,1 10,8 12,3

Total 100 100 100 100 100 100

¹Tous les chiffres sont en pourcentage

²Les chiffres des PCS par aire urbaine, sont ceux de 2008. Ils ont été publiés par l'INSEE en 2011.

Dans les espaces boisés pris en compte dans cette recherche, les chiffres sont très différents de ceux de l'INSEE. La PCS la plus représentée est celle des retraités avec 42 % des personnes interrogées, avant celle des employés, des personnes sans activité professionnelle et des cadres.

Dans les deux types d'espaces boisés, les retraités sont les plus représentés. Les discussions et l'analyse des réponses montrent que plusieurs personnes étaient en retraite bien qu'elles n'aient pas encore atteint l'âge de 60 ans. Des quinquagénaires ont bénéficié d'accords de pré-retraites et ils

sont dans des conditions physiques diverses. Certains ont été exposés à l'amiante, d'autres sont visiblement en grande forme, car ils sont sportifs et circulent à vélo ou entretiennent leur condition physique par la marche et la promenade. A contrario de ces jeunes retraités, quelques usagers ont encore une activité professionnelle alors qu'ils ont largement dépassé l'âge légal de la retraite. Ils sont commerçants ou exercent des professions intellectuelles supérieures.

Les questions relatives à l'état civil et les entretiens montrent que les personnes sans activité professionnelle peuvent être divisés en deux groupes: les femmes au foyer, et les personnes dans d'autres situations. Les femmes au foyer ont été assez fréquemment rencontrées dans les deux types d'espace, tandis que dans les parcs suburbains, les autres personnes sans activité professionnelle sont plutôt des chômeurs et des personnes en situation de handicap, alors que dans les forêts domaniales il s'agit davantage d'étudiants et de chômeurs.

La comparaison des chiffres de population par PCS, entre les aires urbaines et les forêts périurbaines, confirme partiellement certaines constatations et analyses qui ont été faites dans le cadre des enquêtes sociologiques des années soixante-dix et quatre-vingt (Ballion, 1975 ; Kalaora, 1978 ; Mathieu, Praicheux, 1983). Dans les forêts périurbaines de cette recherche, les cadres et les professions intellectuelles supérieures représentent de 10,8 % à 11 % des usagers, alors que dans les aires urbaines, ils ne comptent que pour 5,7 % à 7,3 % de la population de plus de 15 ans. Ils sont donc sur-représentés dans les deux types d'espaces boisés. Pour les ouvriers, les fréquentations sont inversement proportionnelles. Ils ne représentent que 4,3 % à 5,7 % des usagers interviewés dans les bois, alors que dans les aires urbaines, ils comptent pour 15 % de la population de plus de 15 ans.

Selon une approche par PCS, il apparaît que la forêt est encore (au moins partiellement) un marqueur social car les personnes les plus instruites fréquentent davantage ce milieu naturel dont elles connaissent mieux les codes d'utilisation. D'une façon générale, les cadres et les professions intellectuelles supérieures semblent avoir des pratiques sportives et/ou des attitudes cultivées. A l'inverse, les ouvriers et les personnes moins intellectualisées viennent moins en forêt, pourtant certains d'entre eux semblent particulièrement apprécier des activités telles que la cueillette des champignons ou du muguet.

Ces distinctions de classes sociales ne sont pas toujours vérifiées à l'échelon individuel. Malgré des différences assez marquées notamment entre les cadres et les ouvriers, il existe des doutes quant à la corrélation de la culture et des centres d'intérêts, avec la répartition selon la PCS. La multiplicité des déterminismes qui marquent les individus contemporains est parfois sensible chez les usagers. En forêt, parmi les personnes interviewées, des ingénieurs (ou personnes diplômées de Master) étaient

chômeurs, et certains couples d'usagers étaient constitués d'un(e) cadre et d'un ouvrier ou d'un(e) employé(e). D'autre part, les PCS n'apparaissent pas toujours comme des critères déterminants face aux questions d'âge. Ainsi, des jeunes gens dans des situations sociales très différentes fréquentent ensemble les forêts, notamment dans le cadre de sorties sportives ou thématiques entre amis.

Comparativement à la situation qui pré-existait il y une quarantaine d'années, aujourd'hui l'un des phénomènes les plus marquants est lié à l'évolution du nombre des retraités. En 1975, l'analyse des fréquentations en forêt faite par Ballion (1975) à partir des chiffres de l'INSEE, ne tenait pas compte des retraités, car ils étaient peu nombreux. En 1997, parmi les personnes interviewées dans les bois de Changé, 18 % étaient retraités (Dufour, 1997). En 2011, dans les aires urbaines et dans les forêts périurbaines concernées par cette recherche, la PCS des retraités est partout la plus nombreuse. Les retraités sont sur-représentés dans les forêts domaniales avec 46 % des usagers, et dans les parcs suburbains ils sont 38,7 % , alors que dans les aires urbaines ils ne représentent « que » 27 à 29 % des individus de 15 ans ou plus.

L'importance numérique des retraités dans les espaces boisés périurbains s'explique en partie par la méthode d'enquête qui a été réalisée sur l'ensemble des jours de la semaine. La présence des retraités a donc été davantage prise en compte que dans les enquêtes essentiellement réalisées les mercredis et les jours chômés (samedis, dimanches, jours fériés). L'autre explication d'une grande prise en compte des retraités est l'évolution démographique et sociétale. La population française vieillit et les retraités sont nombreux puisque l'espérance et la qualité de vie ont augmenté. L'abaissement de l'âge de cessation des activités professionnelles, et le développement des pratiques récréatives, initié par les professions de santé et par les associations de retraités, ont des conséquences sur les sorties en forêt. Depuis plusieurs années, les campagnes d'informations relatives à l'importance de l'activité physique pour le maintien des capacités physiques et intellectuelles, sont devenues plus prégnantes et elles ont trouvé des échos dans les secteurs associatifs, sportifs et culturels. Les journaux, les associations de retraités et différents intervenants professionnels ont contribué à la prise de conscience que la retraite n'est pas synonyme d'inactivité. Au-delà des promenades et des sorties traditionnelles telles que le pique-nique estival et les cueillettes de champignons dont les personnes de plus de 60 ans sont de fidèles adeptes, aujourd'hui la marche nordique est devenue une activité très populaire, qui explique de nombreuses visites72.

Les retraités sont rarement seuls. Ils sortent en couple, en famille ou avec des amis. Ils fréquentent davantage les forêts domaniales quand ils sont encore jeunes et valides, et ils sont parfois accompagnés de leurs enfants et/ou petit-enfants à qui ils transmettent leurs

72 Sources : Monsieur le Président de l'Association LMA 72, B. Sciberras, entretien du 1 juillet 2011 ; Monsieur le Président du CDRP de la Sarthe, C. Picault, Entretien du 27 septembre 2011)

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