Titre I. LA RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE DE L’ACTIVITÉ D’ENTREPRISES DES ÉTATS TIERS TOUCHANT AU MARCHÉ EUROPÉEN
Chapitre 1. L’application du droit européen de la concurrence aux entreprises des États tiers. La réglementation
52. Si l’entreprise non‐européenne n’est pas d’accord avec la décision de la Commission,
51. Concernant le contrôle des concentrations il faut noter que l’article 21 du
Règlement 139/2004 essaie de préserver l’exclusivité de l’analyse des concentrations de dimension communautaire par la Commission, en garantissant qu’il ne peut pas y avoir d’analyse parallèle en utilisant des critères du droit de la concurrence par la Commission et par une autorité nationale de concurrence ou une autre institution nationale. En même temps, il s’agit de garder un terrain pour que les gouvernements nationaux puissent s’opposer à des opérations, imposer des remèdes ou analyser des opérations de concentrations de concentration en prenant en compte des critères différents du droit de la concurrence. 292 Ainsi, après avoir examiné le rôle de la Commission on passe à l’analyse du rôle de la Cour de Justice et du Tribunal concernant l’application extraterritoriale du droit européen de la concurrence. II. Le rôle de la Cour de Justice et du Tribunal. 52. Si l’entreprise non‐européenne n’est pas d’accord avec la décision de la Commission,
elle peut introduire le recours en annulation de la décision de la Commission devant le Tribunal (l’article 263 TFUE). Si elle n’est toujours pas satisfaite de la décision du Tribunal elle peut introduire un pourvoi devant la Cour de Justice en demandant d’annulation de la décision du Tribunal. L’article 263 TFUE prévoit quatre motifs sur la base desquels l’annulation peut être prononcée : l’incompétence, la violation des formes substantielles, la violation du traité ou de toute règle de droit relative à son application et le détournement de pouvoir. 293
Lorsque la Cour de Justice ou le Tribunal fait droit à la demande en annulation de l'acte contesté, celui‐ci est présumé annulé. La décision porte en principe sur l'acte entier, sauf si les dispositions illégales peuvent être séparées des dispositions légales. Dans ce cas, des
292 Voir Marie‐Dominique HAGELSTEEN, Qui fait quoi? Des compétences institutionnelles en évolution, op.cit., p.141. Voir aussi Wouter P.J. WILS, EU antitrust enforcement powers and procedural rights and guarantees: The
interplay between EU law, national law, the Charter of fundamental rights of the EU and the European Convention on human rights, Concurrences N° 2‐2011, pp. 41‐54.
dispositions jugées contraires au droit européen de l’acte sont abrogées. L'arrêt d'annulation est opposable à tous, au‐delà des parties au litige. Il a, à ce titre, autorité absolue de chose jugée. 294
En principe, l'annulation de l'acte a un effet rétroactif. Ainsi, tous les effets juridiques de l'acte disparaissent, celui‐ci étant considéré n'avoir jamais existé (dans le cas d'une annulation partielle, seules les dispositions annulées sont concernées). Toutefois, la Cour de justice ou le Tribunal peut décider de limiter les effets de l'annulation. 295
Le Tribunal de première instance est compétent pour connaître des recours directs introduits par les personnes physiques ou morales et dirigés contre les actes des institutions communautaires. Ainsi, il est compétent, par exemple, pour statuer sur la demande d’annulation de décision de la Commission introduit par une entreprise d’un État tiers concerné par une telle décision. Il est aussi compétent pour statuer sur les recours formés par les requérants privilégiés (les États membres et les institutions européennes), à l'exception de ceux réservés à la Cour de Justice.
La Cour de justice peut être saisie de pourvois limités aux questions de droit contre les arrêts prononcés par le Tribunal de première instance dans le cadre du recours en annulation. Ainsi, si l’entreprise n’est pas satisfaite avec la décision du Tribunal elle peut introduire un pourvoi. Aussi conformément à l'article 51 du statut de la Cour de Justice, certains recours, en particulier ceux formés par un État membre sur la base de l'article 263 du TFUE contre le Parlement européen et/ou contre le Conseil, sont directement introduits devant elle.
Les cours nationales des États membres peuvent poser la question préjudicielle à la Cour de Justice, y compris dans les affaires concernant l’application du droit européen de la concurrence aux entreprises des États tiers. Selon l’article 267 TFUE la Cour de Justice est compétente pour statuer, à titre préjudiciel: a) sur l'interprétation des traités, b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'UE. 294 Ibidem. 295 Ibidem.
Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de Justice de statuer sur cette question. Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour de Justice. Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour de Justice statue dans les plus brefs délais.
Auparavant on a pu relever un exemple de la décision préjudicielle portant sur les délimitations des pouvoirs de la Commission et des autorités nationales des États membres rendue dans le cadre de conflit issus du droit de la concurrence concernant les entreprises multinationales comme Toshiba, Mitsubishi, Fuji, Siemens, Hitachi et autres (voir l’arrêt analysés au‐dessus Toshiba c/ UOHS).
Selon le paragraphe 3 de l’article 256 TFUE le Tribunal est aussi compétent pour connaître des questions préjudicielles, soumises en vertu de l'article 267 TFUE, dans des matières spécifiques déterminées par le statut (non encore prévues). Lorsque le Tribunal estime que l'affaire appelle une décision de principe susceptible d'affecter l'unité ou la cohérence du droit de l'UE, il peut renvoyer l'affaire devant la Cour de Justice pour qu'elle statue.
Les décisions rendues par le Tribunal sur des questions préjudicielles peuvent exceptionnellement faire l'objet d'un réexamen par la Cour de Justice, dans les conditions et limites prévues par le statut, en cas de risque sérieux d'atteinte à l'unité ou à la cohérence du droit de l'UE.
Comme on l’aura remarqué, les voies de recours contre les décisions des institutions européennes sont les mêmes pour les entreprises européennes et les entreprises non‐ européennes, ainsi, il n’est pas nécessaire de les analyser en détails dans le cadre de cette recherche spécifique. 296
296Sur les recours en droit européen voir, par exemple, Denys SIMON, Flavien MARIATTE, Dominique RITLENG,
Contentieux de l’Union Européenne 1 : Annulation, Exception d’illégalité, LAMY, 2010, 390p. ; Denys SIMON,
Flavien MARIATTE, Rodolphe MUNOZ, Contentieux de l’Union Européenne 2 : Carence, Responsabilité, LAMY, 2011, 292p. ; Denys SIMON, Christophe SOULARD, Anne RIGAUX, Rodolphe MUNOZ, Contentieux de l’Union
§ 2. Les conséquences de non‐coopération des entreprises des États tiers avec les institutions européennes.