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L’émergence de nouvelles théories de la génération à la fin du XVIIème siècle, principalement l’ovisme et l’animalculisme, est due à la recherche sur les animaux, ainsi qu’aux nouvelles

29 Fischer (Jean-Louis), « Des semences », Avant la naissance, 5000 ans d’images…, op. cit., p. 15.

30 Fischer (Jean-Louis), L’art de faire de beaux enfants…, op. cit., p. 34.

31 Mauriceau (François), Traité des maladies des femmes grosses…, op. cit., 1681, p. 41.

32 Ibid.

33 Ibid., p. 9.

34 Analyse tirée de Carol (Anne), « Esquisse d’une topographie des organes génitaux féminins… », art. cit., p. 4.

35 Mauriceau (François), Traité des maladies des femmes grosses…, op. cit., 1681, p. 13.

36 Ibid.

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observations microscopiques, principalement hollandaises, qui aboutissent à la découverte des ovaires et des spermatozoïdes. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ces découvertes compliquent les choses et lancent les recherches sur de fausses pistes, inspirées par les théories de la préformation ou de la préexistence des germes qui s’installent au XVIIIème

siècle38.

Le modèle « oviste »

Dès le milieu du XVIIème siècle, plusieurs travaux amènent à rejeter les doctrines des Anciens en matière de génération et conduisent à théoriser la génération par les œufs pour tous les organismes vivants.

Tout d’abord, les recherches sur les animaux de William Harvey (1578-1657) l’amènent à formuler son célèbre « Ex ovo omnia » (1651) : tout provient de l’œuf39. Pour lui, tous les animaux sont engendrés de cette manière, mais il n’est pas encore à proprement parler oviste40

. Ne trouvant pas de fluide séminal dans l’utérus après le coït, il en conclut que la fécondation s’opère par le biais, non du sperme lui-même, mais de l’aura seminalis (essence vitale, esprit émanant de la semence masculine) qui excite l’utérus, qui sécrète alors une humeur destinée à se transformer en œuf. Ce qu’on prend pour des testicules féminins ne sont pour lui que des ganglions lymphatiques sans rôle générateur. Tout en divergeant fondamentalement sur ce point de l’ovisme, sa théorie prépare les esprits aux découvertes postérieures de ce courant. Les expériences de Francisco Redi (1626-1668) permettent également en 1661 de rejeter, au moins en partie, la génération spontanée. On condamne ainsi ce grand principe aristotélicien qui veut que de la matière morte puisse produire des êtres vivants ; la viande pourrie passant ainsi pour générer des mouches. Mais Redi montre que celles-ci proviennent d’œufs qui se transforment en asticots, puis en pupe, avant d’achever leur mue en mouches41. Enfin, plusieurs savants comme Nicolas Sténon (1636-1686) en 1667, Johan Van Horne (1621-1670) en 1668 et Theodor Kerckring (1640-1693) en 1671 postulent, après un certain nombre d’observations, l’analogie entre les ovaires des poissons et des oiseaux et celui des testicules féminins42.

De Graaf lance véritablement la théorie oviste en découvrant chez la lapine des « boursouflures sur les « testicules » féminins qu’il prend pour des œufs (en fait ce ne sont que des follicules qui portent aujourd’hui son nom) et il extrapole cette observation à la femme. La publication de son ouvrage Histoire anatomique des parties génitales de l’homme et de la femme43 en 1672, diffuse l’ovisme en Europe et fait l’objet de débats intenses qui durent plus d’un siècle. Cette théorie postule que l’œuf de la femme, produit par ce qu’on appelle désormais les ovaires44, a toute capacité à créer un être humain, pourvu qu’une impulsion masculine les anime45

. Comme la femme n’éjacule plus de semence dans la matrice, les savants s’interrogent sur la manière dont se fait la rencontre de la semence masculine avec l’œuf, et ils se demandent quels sont les trajets et les lieux impliqués dans ce processus46. Les scénarios varient selon les auteurs, mais la majorité pense que le coït provoque une irritation ou une contraction des parties sexuelles féminines, en particulier de l’utérus et des trompes, qui permet la remontée de la semence masculine. Ces mouvements, par une « ingénieuse mécanique

38 Giordan (André) dir, Histoire de la biologie…, op. cit., p. 79. Voir la définition de ces termes plus loin.

39 Harvey (William), Exercitationes de Generatione Animalium, 1651.

40 Fischer (Jean-Louis), « Des œufs à la génétique ou l’évolution de la conception de l’embryon du XVIIème au XXème siècle », Avant la naissance, 5000 ans d’images…, op. cit., p. 86.

41 Cependant, certains savants persistent à croire la génération spontanée possible dans certains cas, notamment pour les infiniment petits, et ce, jusqu’au XIXème siècle.

42 Ibid., p. 88.

43 Le titre original de l’ouvrage de De Graaf est De mulierum organis generationi inservientibus tractatus novus,

demonstrans tam homines et animalia caetera omnia, quae vivipara dicuntur, haud minus quam ovipara, ab ovo originem ducere, Leyde, Hack, 1672.

44 Le changement de dénomination des « testicules » féminins signale la rupture avec le séminisme : les ovaires produisent des œufs à leur surface, au lieu d’éjaculer une semence comme le postulaient les séministes.

45 Cependant, comme le souligne Anne Carol, les représentations anciennes en matière de fécondation ne disparaissent pas : on continue de croire que la libération de l’œuf est déclenchée par le coït, manifestant ainsi la permanence de l’idée de l’émission simultanée d’une double semence masculine et féminine ; Carol (Anne), « Le genre face aux mutations du savoir médical… », art. cit., p. 86.

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féminine »47, permettent la captation de l’œuf par le pavillon de la trompe et son transit jusqu’à la matrice, son lieu d’incubation48. Pour beaucoup, l’œuf est activé, non pas directement par le sperme lui-même, mais par l’aura seminalis, en un lieu qui n’est pas encore précisément déterminé.

Nombre de savants souscrivent à ce système au XVIIIème siècle, notamment Malpighi, Réaumur, Swammerdan ou Malebranche, ainsi que la plupart des accoucheurs. Ainsi, Procope Couteau avance les arguments suivants en faveur de l’ovisme :

L’uniformité générale de la nature dans les opérations semblables, l’existence incontestable d’œufs chez les femelles de tous les animaux, la situation des ovaires, leur convection avec la matrice (…) les œufs trouvés tantôt prêts à quitter l’ovaire, tantôt déjà tombés dans le canal formés pour leur donner passage (…) le nombre égal à celui des cicatrices faits à l’ovaire…49. L’analogie avec le règne animal semble en effet accréditer la théorie oviste. Celle-ci permet aussi d’expliquer les grossesses extra-utérines, car de nombreux fœtus retrouvés dans les trompes ou la cavité abdominale ont été signalés par les praticiens. Les monstres doubles, les jumeaux, les môles, etc. trouvent également une explication grâce à ce système. Pierre Dionis, dans son Traité général des

accouchements (1718), incarne ce nouveau modèle oviste, toutefois encore imprégné des

représentations héritées du séminisme. Il participe à la diffusion d’un nouveau système ternaire ovaire-trompe-matrice qui aboutit à un bouleversement de la topographie des organes génitaux et de leur hiérarchie. La matrice garde un rôle important, mais les ovaires et les trompes gagnent en dignité50, ce qui conduit l’appareil génital féminin à se distinguer de celui de l’homme. Toutefois, le scénario de fécondation n’est pas encore bien fixé et il varie selon les ouvrages de Dionis. Des idées proches se retrouvent chez le chirurgien Nicolas Puzos, dans son Traité des accouchements (1759), avec une valorisation des trompes presque plus importante que celle des ovaires51.

La plupart des ovistes contestent l’épigenèse longtemps admise et sont qualifiés de préformistes, car ils pensent que l’enfant est déjà tout formé dans l’ovule et qu’il n’a plus qu’à se développer. Ils considèrent que c’est l’individu qui participe à la construction du germe par son âme ou par des résidus nobles provenant de la nourriture52. Certains penseurs vont jusqu’à croire à la « préexistence des germes » qui postule que les individus préexistent dans le germe avant d’exister53. C’est donc Dieu qui, au moment de la Création, a placé dans les ovaires d’Eve tous les œufs de l’humanité où se trouvent les germes humains par emboîtement continu. Le mâle n’intervient que par une action stimulante, principalement par son aura seminalis, qui active l’œuf en s’élevant jusqu’à lui. Cette théorie est développée par le naturaliste hollandais Jan Swammerdam (1637-1680), dans son

Histoire générale des insectes54. En « comparant l’histoire du pou, du papillon, de la fourmi à celle de la grenouille ou d’un œillet, il s’efforce de montrer qu’il n’y a jamais métamorphose mais simple apparition graduelle d’un fœtus qui était déjà préformé dans l’œuf »55. Il n’y a donc pas vraiment génération, puisque les parents ne sont en rien à l’origine d’un être déjà parfaitement constitué ; ils se contentent, par la fonction génitale, de réveiller le germe qui peut commencer sa croissance56. Il

47 Carol (Anne), « Le genre face aux mutations du savoir médical… », art. cit., pp. 86-87.

48 On retrouve ici certaines idées d’Aristote pour qui la semence femelle fournit le principe matériel et la nourriture du fœtus, le mâle intervenant pour communiquer le principe du mouvement, qui la met en forme ; Giordan (André) dir., Histoire de la biologie…, op. cit., p. 81.

49 Procope Couteau (Michel), L’Art de faire des garçons, 1745, Chap. II : « En faveur des ovistes », p. 84.

50 Les trompes en particulier se voient attribuer un rôle important ; par leurs contractions, elles contribuent à amener la semence vers les ovaires, et elles permettent aussi de faire descendre l’œuf (fécondé ou non) vers la matrice.

51 Puzos (Nicolas), Traité des accouchements, contenant des observations, Paris, Desaint et Saillant, 1759.

52 Fischer (Jean-Louis), L’art de faire de beaux enfants, op. cit., p. 126.

53 Au début les deux doctrines sont souvent confondues, puis les positions se sont éclaircies et les deux doctrines sont devenues rivales et la préexistence a triomphé. Pour plus de détails voir Roger (Jacques), Les sciences de la

vie…, op. cit., Partie II, Chap. III : « La préexistence des germes » ; voir aussi Fischer (Jean-Louis), L’art de faire de beaux enfants, op. cit., pp. 126 et sq.

54 Swammerdam (J.), Histoire générale des insectes, Utrecht, G. de Walcheren, 1682 (1ère éd. en latin 1669).

55 Giordan (André) dir., Histoire de la biologie…, op. cit., p. 85.

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précise qu’« une fois ces œufs épuisés, ce sera la fin du genre humain »57, ce qui soulève un débat complexe entre certains savants sur la possibilité ou non de la divisibilité de la matière à l’infini. Cette question, aux implications philosophiques et religieuses, associe scientifiques et théologiens. Le prêtre de l’Oratoire de Jésus, Nicolas Malebranche (1638-1715) dans De la Recherche de la Vérité (1674-1678), penche pour une divisibilité de la matière à l’infini et contribue à diffuser la théorie de la préexistence des germes au XVIIIème siècle58. L’Eglise approuve l’ovisme grâce à cette doctrine de la préexistence des germes, car elle confirme la vision biblique de la Création. Elle a aussi l’avantage d’apporter une réponse aux difficultés soulevées au XVIIème siècle sur la question de l’origine des formes à partir de la matière et de la mise en fonction du mouvement59. Aussi farfelue que nous paraisse aujourd’hui cette théorie de la préformation, elle s’appuie alors sur un certain nombre d’arguments et d’expériences dont les preuves semblent irréfutables, en l’état des connaissances de l’époque60. Les travaux sur le développement de l’œuf de poulet et la parthénogenèse des pucerons de Charles Bonnet (1720-1793)61, les travaux du physiologiste Albrecht von Haller (1708-1777) et surtout les expériences sur les grenouilles de Lazzaro Spallanzani (1729-1799)62 semblent en effet accréditer cette théorie.

Après avoir été un temps menacé par l’animalculisme, l’ovisme est à nouveau à la mode au début du XVIIIème siècle, comme en témoigne l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert63. Ces idées ne concernent cependant pas que les plus hauts cercles scientifiques ; on en retrouve la trace notamment dans l’Abrégé de l’art des accouchements, de Mme du Coudray, paru en 1759. Elle évoque en effet les différences d’opinions en vogue et pense que « le plus vraisemblable est celui où l’on veut que l’homme et tous les animaux (…) tirent leur origine d’un œuf »64

, « de même aussi dans les petits œufs de l’ovaire de la femme, toutes les parties qui doivent composer le fœtus, y sont en raccourcis »65

. Même un manuel destiné aux sages-femmes se fait donc l’écho des querelles théoriques de l’époque et contribue à diffuser ce système.

La théorie oviste, qu’elle soit ou non préformiste, suscite néanmoins des débats passionnés. Certains aspects de l’ovisme posent ainsi toujours problème : pourquoi le pavillon de la trompe est-il distant de l’ovaire ? Pourquoi y a-t-il deux ovaires et deux trompes ? En quoi consiste réellement l’œuf et que devient-il s’il n’est pas fécondé ? Mais surtout, l’idée que les femmes pondent des œufs offusque beaucoup de savants et certains théologiens ; la dignité humaine semble bafouée par cette proximité avec le monde animal. Pierre Roussel déclare ainsi : « Nous ignorons si les femmes s’accommodèrent d’un système qui les assimilait aux poules »66

. Il faut dire aussi que les idées de Graaf ne sont pas toujours bien comprises et qu’un certain nombre d’ovistes burlesques répandent des exemples fantaisistes. Pierre Darmon cite ainsi le cas de ce médecin de Brest qui affirme en 1684 qu’une femme grosse de sept mois a accouché d’un grand plat d’œufs67. L’ovisme semble aussi donner un trop grand rôle à la femme ; ainsi Planque refuse cette théorie « qui donne à la femme

57 Swammerdam (J.), Miraculum naturae, sive uteri muliebris fabrica…, Leyde, S. Matthieu, 1672, pp. 21-22 ; cité par Fischer (Jean-Louis), « Des œufs à la génétique ou l’évolution de la conception de l’embryon du XVIIème

au XXème siècle », Avant la naissance, 5000 ans d’images…, op. cit., p. 90.

58 Fischer (Jean-Louis), L’art de faire de beaux enfants, op. cit., p. 126 et sq.

59 Id., « Des œufs à la génétique…», Avant la naissance, 5000 ans d’images…, art. cit., p. 90.

60 Giordan (André) dir., Histoire de la biologie…, op. cit., p. 84.

61 Bonnet (Charles), Traité d’insectologie ou observation sur les pucerons, Paris, 1745. Il opère toutefois un début de conciliation entre le « préformé » et l’épigenèse.

62 Il réalise de nombreuses fécondations artificielles et des expériences très minutieuses sur les grenouilles, ce qui lui permet de démontrer la nécessité de la présence du sperme dans la fécondation (sous forme d’un contact direct et non par l’aura seminalis). Le sperme filtré des batraciens donnait un filtrat stérile et un résidu capable de féconder les œufs, mais comme le souligne A. Giordan, Spallanzani étant un oviste convaincu, il reste aveugle à certains faits et ces travaux n’aboutissent pas à démontrer l’importance des spermatozoïdes comme on aurait pu s’y attendre ; Giordan (André) dir., Histoire de la biologie…, op. cit.,

63 Article « Génération », Encyclopédie…, op. cit., t. VII, 1757, pp. 568-569.

64 Boursier du Coudray (Angélique), Abrégé de l’art des accouchements, op. cit., Chap. IV : « De la génération de l’homme », pp. 18 et sq.

65 Ibid.

66 Roussel (Pierre), Système physique et moral..., op. cit., 1770, p. 71.

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presque tout l’honneur de la génération, ce qui est injuste »68. Un autre système d’explication vient heureusement rétablir la dignité masculine et tenter de redonner aux hommes le premier rôle dans la génération.

Le deuxième modèle : « l’animalculisme »

L’observation du spermatozoïde grâce au microscope met cette théorie à la mode de manière éphémère à la fin du XVIIème et au début du XVIIIème siècle. La découverte est revendiquée par Anton van Leeuwenhoek (1632-1723) en 1677, Louis de Ham et Nicolas Hartsoecker (1656-1725). Ils repèrent des « animaux » nageant dans la liqueur séminale qu’ils nomment animalcules ou vers et dont le rôle suscite de nombreux débats et polémiques. Certains savants ne leur prêtent en effet aucun rôle dans la génération, d’autres pensent qu’ils servent à agiter la semence pour qu’elle ne se solidifie pas, qu’ils excitent l’homme à l’amour, ou encore qu’ils détachent les œufs des ovaires69. Cependant, la plupart des partisans de cette théorie, à l’exemple de Leeuwenhoek, considèrent que tout être humain vient d’un animalcule et non d’un œuf ; ainsi naît un système concurrent de l’ovisme, baptisé animalculisme.

Les accoucheurs qui souscrivent à ces idées, comme Jean Astruc (1684-1766) dans son Traité

des maladies des femmes, ne remettent pas en cause la topographie génitale développée précédemment

dans le système oviste70. Ils évoquent différents scenarios sur le rôle et le trajet des spermatozoïdes, mais les trompes continuent d’être le passage obligé : les animalcules jouent désormais le rôle tenu par l’aura seminalis de la théorie oviste71. Dans ce modèle, l’animalcule est le germe exclusif du fœtus, la femme n’ayant qu’un rôle de nourricière et de protectrice de l’embryon. En fait, le scénario est le même que dans le modèle précédent, mais c’est l’animalcule qui a le rôle déterminant72

. La plupart des partisans de l’animalculisme se rangent aussi dans le camp, soit des préformistes, si l’embryon est préformé en partie, soit de la préexistence si le futur enfant se trouve déjà totalement formé dans la tête de l’animalcule73. Nicolas Hartsoeker, Nicolas Andry de Boisregard (1658-1742)74, George Garden (1649-1733) et Etienne-François Geoffroy (1672-1731) en particulier se rallient à ce courant, en tenant parfois compte des découvertes ovistes. Ainsi, le système d’Andry peut être qualifié d’ovo-vermisme75 :

L’homme et tous les animaux viennent d’un ver, que ce ver est le raccourci de l’animal qui en doit venir ; que si ce ver est mâle, il en vient un mâle, que s’il est femelle, il en vient une femelle ; que quand il est dans la matrice, il y prend un accroissement par le moyen d’un œuf, où il entre, et où il demeure le temps arrêté par la nature, pour s’y développer entièrement, et croître jusqu’à une certain mesure ; après quoi l’animal force la membrane de cet œuf et prend naissance76.

Mais ce système, malgré une apparente proximité avec la réalité, reste erroné car seul l’animalcule constitue un principe actif de la génération ; il renoue en fait avec la théorie aristotélicienne.

68 Planque (F.), Bibliothèque de médecine, t. I, art « Accouchements monstrueux », p. 11 ; cité par Darmon (Pierre), Le mythe de la procréation…, op. cit., p. 64.

69 Roger (Jacques), Les sciences de la vie…, op. cit., Partie II, Chap . II, 2° : « Les animalcules spermatiques ».

70 Astruc (Jean), Traité des maladies des femmes, Paris, 1761-1766, 6 vol. Carol (Anne), « Le genre face aux mutations du savoir médical... », art. cit., p. 87.

71 Id, « Esquisse d’une topographie des organes génitaux féminins… », art. cit., p. 7.

72 Les animalculistes se partagent aussi entre emboîtementalistes et disséminationnistes pour expliquer la provenance de l’embryon. Pour les premiers, l’embryon était emboîté dans les spermatozoïdes comme dans des poupées russes ; pour les seconds, les germes étaient répandus dans l’air puis se concentraient dans les testicules des mâles où ils se nourrissaient, avant d’être expulsés lors du coït ; voir Giordan (André) dir., Histoire de la

biologie…, op. cit, pp. 95-97.

73 En 1699, François de Plantade (1670-1741) affirme même avoir observé un embryon parfaitement constitué à l’intérieur d’un animalcule ; voir Fischer (Jean-Louis), La naissance de la vie, op. cit., p. 13 ; Darmon (Pierre),

Le mythe de la procréation…, op. cit., p. 70.

74 Andry (Nicolas), De la génération des vers dans le corps de l’homme, 1700.

75 Gottfried Wilhelm Leibnitz (1646-1716) est un des partisans les plus célèbres de cette thèse.

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Le succès de l’animalculisme est cependant très éphémère. Une trentaine d’années après sa découverte, les critiques se multiplient et il n’arrive jamais à supplanter l’ovisme. Beaucoup refusent notamment l’idée que des millions spermatozoïdes soient gaspillés en vain par la nature77. En outre, l’idée de descendre d’un vulgaire ver ou têtard n’est pas non plus très flatteur. Ainsi, pour Procope Couteau : « Comment cet orgueilleux tyran de tout ce qui respire, peut-il se reconnaître au travers de déguisements si vils et se donner des vers pour successeurs ? »78. Les observations, soit disant « scientifiques », mais en fait très farfelues et délirantes sur la vie des animalcules, contribuent aussi à décrédibiliser l’animalculisme. Leeuwenhoek lui-même contribue à nourrir ce genre de mythe par ses