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transport/territoire

II.1 Un ensemble de processus récents

II.1.2 Métropolisation et réseau

Le dévellopement du libre-échange a produit une multiplication des échanges entre métropoles. Cette nouvelle organisation a donné naissance à ce qu‟Olivier Dollfus a appelé l‟Archipel Mégalopolitain Mondial, écrin de l‟ « économie d’archipel » (Veltz 2005).

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De plus, c‟est le fonctionnement en réseau des structures de production et de consommation qui a permis la concentration des fonctions de commandement dans les métropoles. L‟exemple des relations siège-établissement est probant. La figure II-7 donne un aperçu rapide mais clair de la situation en France. Signalons aussi à ce sujet des travaux plus élaborés dans ce domaine et qui corroborent le propos sur la mise en réseau des villes et des firmes, processus révélateur de la métropolisation (Damette 1994, Cicille et Rozenblat 2003).

Figure II- 7 : Les sièges sociaux parisiens dans la France des firmes (FNAU 2006)

La métropolisation conduit donc à une mise en réseau des espaces métropolitains. Dès lors la circulation rapide des informations ainsi que la multiplication des interactions deviennent des avantages décisifs pour le développement économique (Claval 1976). F. Ascher (Ascher 2003), J.-P. Ferrier (Ferrier 2000) et d‟autres auteurs insistent aussi sur la nécessité de la mise en relation des agents du système métropolitain entre eux pour conserver sa cohérence.

R. Brunet (Brunet 1989) perçoit la métropole avant tout comme un espace de flux, qu‟elle régule, confirmant son rôle de vanne du réseau régional. Antier affirme que la métropole est le « point de passage obligé pour tous types d’échanges » (Antier 2005).

Enfin, nous devons mentionner l‟approche de Jacques Beauchard qui différencie l’espace-

réseau, mondial et excentré, et l‟espace-lieu, local et surcentré. Les représentations et les

temporalités en sont différentes, bien que ces deux types d‟espaces soient coprésents dans la métropole. J. Beauchard, qui partage la vision de la métropole comme un ensemble de flux, traduit ainsi l‟importance de l‟espace-réseau, i. e. celui ayant une fonction de circulation dans la métropole (Beauchard 1996).

La métropolisation est donc aussi définie par des processus de mise en relation spatiale. Les réseaux de transport prennent tout leur sens dans le contexte de métropolisation. La métropole se développe comme un point de réseau dominant et assurant la concentration des hommes et des activités. Le rôle de commutateur aux réseaux internationaux joué par la métropole définit une fonction particulière des réseaux entre des échelles différentes. Giddens et Castells ont

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chacun dans leur domaine présenté la métropolisation comme l‟avènement de la « société en

réseau » (Castells 1998, Giddens 1994). Peter Taylor a lui mesuré de manière quantitative les

capacités du « World City Network », donnant naissance à la « Topological metageography of

mercantile modernity » (Méta-géographie rétistique de la modernité commerciale. Traduction

personnelle de Taylor 2004 p. 181). Le mouvement général de réduction des temps de trajet entre les métropoles provoque une réduction des distances inter-villes que Peter Haggett nomme « urban implosion » (Haggett 2001 page 247).

Les territoires métropolitains se distinguent ainsi par une prépondérance des territorialités en réseau qui se manifestent par une forte hiérarchie et donc de fortes inégalités.

En effet, les logiques d‟accumulation et de concentration de richesses vont mécaniquement accentuer les dichotomies entre les espaces en bénéficiant ; lieux de la métropolisation dans toute son ampleur « internationale », clinquante, mise en scène, et les autres, interstitiels, périphériques, vides, délaissés.

Le capital appelant le capital, les populations à forts revenus vont exclure les populations moins aisées vers des espaces où ils vont se concentrer.

Alexis Conesa 2009

Figure II- 8 : Schéma indicatif de l’organisation de l’espace métropolitain par les revenus

Les mécanismes économiques qui aboutissent à une spécialisation de l‟espace peuvent alors s‟accompagner d‟une ségrégation sociale. Les couches sociales exclues du processus d‟accumulation se concentrent ainsi dans des espaces éloignés ou enclavés, dans des conditions d‟équipements et d‟habitat souvent délicates (HLM). Les dynamiques de

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regroupement social vont contribuer à la marginalisation de ces couches pauvres et susciter des tensions sociales menant parfois au conflit.

Michel Bassand (Bassand, Kaufmann et Joye 2007) va même jusqu‟à employer le terme de « chaos de la métropole » en raison de son éclatement et de sa fragmentation (voir aussi May, Veltz, Landrieu et Spector 1998). Ces processus d‟exclusion sont désormais un enjeu des territoires urbains et appellent à des politiques urbaines adéquates (El Haggar, Paris et Shahrour 2003)

Il faut donc signaler que la métropole est le lieu de la fragmentation des territoires par les réseaux et que les inégalités sociospatiales produites par les territorialités en réseau, évoquées dans le Chapitre I trouvent tout leur sens dans ce contexte. La métropolisation et la mise en réseau des territoires se caractérisent ainsi par une importance décisive donnée à l‟accès aux réseaux métropolitains.

Conclusion

La métropolisation est appréhendée comme un nouveau processus de territorialisation de l‟espace par l‟homme, bouleversant les structures économiques, sociétales, culturelles, jusque dans l‟éthique7

.

Ainsi, comme l‟exprime J.-P. Ferrier : “Dans les pays développés, sous nos yeux, sans que le

public puisse en prendre encore suffisamment conscience, un système nouveau s’est structuré, qui a transformé d’abord les plus grandes régions urbanisées. L’organisation spatiale des phénomènes de résidence et de production, notamment les fonctions les plus élevées de l’activité humaine (centres de décision, recherche, enseignement supérieur, création artistique, services, banques, …), peut s’opérer de manière non polarisée, au sein des territoires très vastes, naturels et/ou plus ou moins profondément cultivés, exploités, équipés…, des lieux qui peuvent être monumentaux et magnifiquement paysagés…comprenant aussi bien habitat et emploi. Les habitants y déroulent leur vie de manière diffuse car les circulations des informations, des biens et des services, des personnes sont de plus en pus nombreuses et intenses.”(Ferrier 2000).

Ce nouveau système se caractérise au niveau géographique par des processus de

concentration et de croissance dans les grandes villes ainsi que d‟extension des périmètres

de territorialisation. La mise en réseau de l‟espace à plusieurs échelles en constitue aussi un critère discriminant. La figure II-9 résume tous ces aspects géographiques de la métropolisation.

7Bien que généralement définie comme « science de la morale », et selon Chris YOUNES et Thierry PAQUOT

(Younes et Paquot 2000) « L’éthique, selon son étymologie, est un "ethos", c’est-à-dire, une "manière d’être".

Séjour de l’homme au monde, elle est un mode d’existence qui s’adresse à chacun et se distingue aussi bien d’une morale comme rapport à soi que d’une pensée moralisatrice pour l’Autre. » Dans cet ordre d’idée, ne

76 Légende Métropole Réseau de niveau national et international Réseau de niveau régional Réseau de niveau local Centre principal Centre secondaire Petite ville ou quartiers d’agglomération

Alexis Conesa 2009

Figure II- 9 : L’espace métropolitain multinodal desservi par des réseaux multi-échelles

Le contexte métropolitain vient donc préciser la manière d‟appréhender les relations transport/territoire et le rôle des transports dans la structuration des territoires sur plusieurs points :

- les territorialités en réseau sont omniprésentes et la société en réseau s‟impose au fonctionnement du territoire ;

- l‟appropriation du territoire métropolitain est relative à des problématiques communes et surtout se construit autour de projets métropolitains ;

- Les processus de concentration et de domination ainsi que les stratégies métropolitaines visant au rayonnement induisent une forte hiérarchie des réseaux de transport ;

- Réciproquement, les inégalités sont très fortes et les réseaux de transport matérialisent la

fragmentation des territoires métropolitains dans un contexte où l‟accès au réseau est

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II.2 L’accessibilité, conception et quantification au centre