• Aucun résultat trouvé

transport/territoire

II.2 L’accessibilité, conception et quantification au centre des relations transport/territoire

II.2.1 Un concept riche et opérant

Comme la grande majorité des propriétés rétistiques des réseaux, l‟accessibilité est un concept dérivé de la recherche opérationnelle et plus précisément de la théorie des graphes. L‟accessibilité est alors une mesure de la facilité à atteindre un nœud (Kansky 1963).

Cette définition universelle diffère selon les disciplines et les champs d‟application (Cauvin 2005, Martellato et Nijkamp 1998, Rietveld et Bruinsma 1998). Notons qu‟elle est aussi utilisée pour identifier les éventuelles inadéquations des transports en vue d‟être mobilisés par les populations possédant la plus faible compétence de mobilité, appelées personnes à mobilité réduite (PMR). Cette définition ramène à une problématique de prise en compte des handicaps dans les transports et s‟accompagne d‟une dimension politique.

Des conceptions plus spatialisées de l‟accessibilité renvoient aux conditions du déplacement indépendamment des compétences de mobilité (Izquierdo et Monzon 1992, Koenig 1975). Parmi celles-là, une définition globale paraît satisfaisante, formulée d‟abord en économie spatiale (Huriot et Perreur 1994), puis reprise en géographie des transports. Il s‟agit de « la

plus ou moins grande facilité avec laquelle un lieu ou une fonction économique attractive (emplois, commerces, services…) peut être atteint à partir d’un ou plusieurs autres lieux, à l’aide de tout ou partie des moyens de transport existants » (Bavoux, Beaucire, Chapelon et

78

Si l‟accessibilité peut être vue comme une mesure de distance séparant un lieu d‟un ou plusieurs autres, elle « ne renvoie pas uniquement à la seule possibilité d’atteindre ou non un

lieu donné, elle traduit également la pénibilité du déplacement, la difficulté de la mise en relation » (http ://hypergéo.free.fr/, définition donnée par Laurent Chapelon).

La notion de pénibilité, plus encore que celle de facilité, renvoie de manière directe aux possibilités d‟appropriation individuelle de l'offre de transports. Les lieux les plus accessibles sont ainsi les plus propices à l‟attraction des déplacements.

Comme le suppose une autre définition (Lévy 2003a), l‟accessibilité peut être considérée comme l‟offre de mobilité. En effet, elle représente tous les éléments externes du processus décisionnel de mobilité, tout ce qui ne dépend pas de l‟individu potentiellement mobile mais de ce que lui propose le service de transport.

L‟accessibilité est donc un élément d‟offre de transport et se situe à l‟interférence entre l‟espace et la société.

C‟est une mesure « contextualisée » (Dumolard 1999) de l‟espacement en ce sens qu‟elle dépend grandement du contexte. On comprendra aisément que la notion de pénibilité n‟est pas la même car vécue différemment selon où l‟on se trouve sur le globe, à quel moment de la semaine ou de la journée, à quel âge, avec quels revenus…

L‟accessibilité représente donc le pendant virtuel du déplacement, en ce sens qu‟elle est mobilisée pour estimer des caractéristiques de déplacement indépendamment du fait qu‟ils soient effectués ou non. Cette virtualité permet d‟établir des potentiels de déplacement plutôt qu‟une analyse de déplacements réels. Une étude des conditions d‟accessibilité dans un territoire donné va ainsi permettre d‟établir un bilan des potentiels de structuration territoriale que peuvent offrir les moyens de se déplacer.

Une seconde caractéristique du concept d‟accessibilité mérite de s‟y attarder. Le déplacement potentiel s‟effectue d‟un lieu à un autre lieu ou à une « fonction économique attractive ». Cette définition insiste sur le caractère économique des lieux du territoire, mais en généralisant on peut parler de fonction attractive.

Cela signifie que le déplacement potentiel est nourri par un motif et que la finalité, dans la visée de l‟acteur, n‟est pas le déplacement en soi mais l‟activité permise par ce déplacement (travail, tourisme, achats…). L‟accessibilité correspond donc à une opportunité de déplacement, à une attractivité : on se déplace pour effectuer une activité (L'Hostis et Conesa 2009). La combinaison d‟une forte attractivité et d‟une bonne accessibilité se matérialise par un déplacement fortement probable et donc potentiellement structurant. C‟est du moins de cette manière que nous l‟envisageons.

La répartition des fonctions attractives donne donc une idée des opportunités de déplacement et prend une grande importance dans le fonctionnement des territoires (Lévy 2003a). Considérant que ce fonctionnement est matérialisé en grande partie par les relations entre les fonctions socio-économiques du territoire, la mesure de l‟accessibilité à ces fonctions en établit un potentiel. En effet, l‟accessibilité aux fonctions attractives du territoire (bassins

79

d‟emploi, centres administratifs, zones commerciales…) va définir la façon dont le territoire peut fonctionner, au sens quasi mécanique du terme (voir IV.1.1).

Jacques Lévy remarque par ailleurs que l‟accessibilité donne lieu à deux interprétations différentes quant à sa prise en compte (Lévy 2003a). Une approche considère l‟accessibilité comme un accompagnement du développement économique qui améliore la compétitivité des territoires. C‟est dans cette perspective que les métropoles s‟équipent de « superstructures » de transport (Wolff 2003). Une seconde acception rapproche l‟accessibilité d‟un rééquilibrage territorial, vers la couverture des disparités spatiales et le comblement des inégalités (Chapelon 1997, Faivre d'Acier 1983a). Ces deux approches divergentes peuvent toutefois être mobilisées dans notre approche comme nous le verrons plus tard.

L‟examen rapide des définitions et autres approches du concept d‟accessibilité informe sur la compréhension qui en est faite. Mais en tant que mesure, l‟accessibilité contient et représente aussi des réalités territoriales.

Il a été avancé que l‟accessibilité recouvre deux dimensions principales (Vickerman 1974) : la position géographique des lieux par rapport aux autres, c‟est-à-dire la longueur géométrique du déplacement, et la performance intrinsèque du réseau de transport, c‟est-à-dire le niveau du service de transport offert.

Ce second élément peut lui-même être décomposé en plusieurs facteurs selon le mode de transport, comme le propose Sandra Bozzani-Franc dans sa thèse page 199 (Bozzani 2005). Nous retiendrons deux aspects dominants : la forme du réseau et la qualité du service, comprenant la vitesse permise, la desserte, la fréquence ou encore la capacité.

Le concept d‟accessibilité paraît donc être particulièrement adapté à l‟analyse des relations entre transport et territoire et ce à plusieurs titres :

- le service de transport peut être estimé de manière satisfaisante ; -l‟établissement d‟un potentiel de structuration est possible ;

-les problématiques relatives aux inégalités, aux appropriations et au fonctionnement des territoires sont concernées par l‟entrée « accessibilité ».

Ces qualités ne suffisent toutefois pas à justifier un choix de méthode. En effet, comme nous l‟avons vu, l‟adéquation de la méthode au contexte de métropolisation est indispensable.