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transport/territoire

II.2 L’accessibilité, conception et quantification au centre des relations transport/territoire

II.2.2 L’accès comme déterminant métropolitain

Comme nous l‟avons vu précédemment, la métropolisation se caractérise entres autres phénomènes par la mise en relations des composantes des territoires. La mise en réseau constitue un élément structurant de la métropolisation des territoires. La connexion au réseau « métropolitain » va ainsi, déterminer le niveau de développement socio-économique des espaces autant voire davantage que les potentialités de site et la création de richesses « sur

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place ». Cet impératif de la connexion, s‟il n‟est pas toujours accepté par les populations et élus locaux (syndromes NIMBY etc.), traduit une dimension métropolitaine essentielle.

En effet, en intégrant toute la dimension stratégique de la métropolisation, Gabriel Jourdan montre que « des investissements en faveur de la « grande accessibilité » européenne ou

internationale » correspondent à l‟une des cinq principales manifestations des politiques de

métropolisation.

La politique de la DIACT (anciennement DATAR, l‟ajout du mot « compétitivité » n‟étant certainement pas anodin) s‟appuie d‟ailleurs depuis 2004 (DATAR 2004) explicitement sur le rayonnement des métropoles françaises pour le développement économique de la France. Le rayonnement de la métropole est un élément discriminant de celle-ci (l‟importance de l‟accessibilité dans la construction métropolitaine à Lille en est un exemple, voir Paris et Stevens 2000) et à ce titre la mesure de l‟accessibilité des métropoles à leur environnement international ou européen est un indicateur de métropolisation tout à fait pertinent (Bozzani 2005).

La métropolisation s‟appuie donc entre autres sur une bonne accessibilité internationale. De surcroît, à une autre échelle, l‟accessibilité construit les territoires métropolitains. À propos de la « mise en synergie » des villes dans l‟espace métropolitain, Jourdan remarque que « cette

mise en réseau des villes est fortement dépendante de l’accessibilité et de la rapidité des déplacements entre les pôles du réseau. » (Jourdan 2005 page 9).

Immanquablement, cette mise en réseau interne aux territoires métropolitains est sensible aux différentiels d‟accessibilité et génératrice d‟inégalités (Baptiste et L'Hostis 2002). La réorganisation et le creusement des inégalités qui accompagnent la métropolisation sont donc pour une certaine partie et dans une certaine mesure appréhendables par l‟accessibilité.

Les deux approches de l‟accessibilité, à savoir celui d‟accompagnement de la compétitivité économique et celui de rééquilibrage des déséquilibres territoriaux sont donc mobilisables dans le cas de la métropolisation.

A titre d‟illustration de ce propos, il peut être intéressant d‟examiner les résultats de la méthode territorialisée DELPHI.

Cette méthode, fondée sur des techniques d‟enquêtes, propose de sélectionner un panel d‟experts et de l‟interroger sur des prévisions ou stratégies prêtant à l‟interprétation. L‟utilisation de questionnaires et la consultation d‟experts permettent de rationaliser des positions pouvant paraître subjectives. Le LET (Laboratoire d‟Economie des Transports) a développé ces méthodes dans le domaine de l‟aménagement du territoire afin de déterminer quelles stratégies de développement territorial paraissaient les plus efficaces.

En 1993, Alain Bonnafous s‟est interrogé sur la métropolisation et les attributs des villes internationales. L‟attribut présenté comme le plus important pour le développement des métropoles, classé comme « aspect reconnu comme primordial par presque tous les experts » selon la méthode DELPHI, est « liaisons de transport » (Bonnafous 1993 page 5). L‟auteur

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remarque qu‟ « au-delà du seul aspect Transport, on peut dire que l’idée dominante divulguée

par cette enquête est un facteur général d’accessibilité (Bonnafous 1993 page 7). Si l‟idée

d‟accessibilité-rayonnement émerge, Bonnafous insiste quant à lui sur l‟aspect accessibilité- rééquilibrage : « Mais à cette nécessité, qui correspond à ce que l’on peut appeler un effet d‟accompagnement, s’opposent des effets déséquilibrants : tout se passe comme si l’activité

du transport favorisait subrepticement les contrastes entre les flux les plus importants et les flux les plus faibles, entre les régions puissantes et les moins développées, mais aussi entre le centre et la périphérie. » (Bonnafous 1993 page 8).

Plus tard, une recherche plus large menée par une équipe du LET, intéressée par les relations entre villes et transport, et reprenant la méthode DELPHI, enrichit ces premiers résultats. Ainsi dans les actions jugées « très efficaces » pour le développement des métropoles apparaissent respectivement en première et en quatrième position « développer les transports

en commun en site propre » et « intégrer chaque métropole dans le réseau TGV ». Les deux

actions jugées « très efficaces » pour le développement des villes moyennes sont quant à elles « développer une bonne accessibilité au réseau autoroutier (un changeur à moins de 20

minutes de chaque ville moyenne) » et « développer des liaisons ferroviaires rapides permettant une liaison à des gares TGV en moins de 45 minutes » (Buisson et Mignot 1995

page 26).

En tant que dires d‟experts, ces informations restent empreintes d‟une certaine subjectivité, mais le fait est qu‟elles démontrent que les questions d‟accessibilité sont au cœur des stratégies territoriales. Mieux encore, ces résultats présentent clairement l’accessibilité

comme une notion opérante dans la métropolisation à deux échelles : l‟accessibilité de la

tête de pont aux réseaux européens et la couverture du territoire métropolitain ; l‟accessibilité entre les pôles urbains.

La démonstration ne doit cependant pas laisser penser que l‟accessibilité suffit au développement. Le rayonnement est un élément primordial de la métropolisation mais il n‟en est pas le seul. L‟ « importance des politiques d’accompagnement urbaines » a été mis en relief entre autres par Gabriel Jourdan, qui stipule bien que le territoire doit « s’approprier

l’ « objet métropolitain » » pour intégrer la société locale aux possibilités de construction

métropolitaine offertes par l‟accessibilité (Jourdan 2005 page 7).

Les stratégies territoriales ayant recours aux infrastructures de transport peuvent alors se résumer à cette phrase : « les investissements nouveaux ne constituent que des conditions

permissives du développement régional [et] ne se définissent qu’en négatif du point de vue des effets structurants : on ne sait pas si ces capacités nouvelles seront suivies du développement souhaité mais on sait qu’en leur absence, celui-ci ne pourrait pas se réaliser. » (Bonnafous

1992).

L‟ensemble de ces réflexions et résultats peut amener à penser que l‟accessibilité est une

condition nécessaire mais pas suffisante du fonctionnement territorial, une condition sine

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L‟intérêt de l‟accessibilité dans notre approche des relations transport-territoires métropolitains étant avéré, encore faut-il savoir comment la mesurer.