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transport/territoire

II.2 L’accessibilité, conception et quantification au centre des relations transport/territoire

II.2.3 Des mesures rétistiques qu’il faut territorialiser

Le grand nombre des variables potentiellement mobilisables dans le concept d‟accessibilité et les différentes méthodes d‟agrégation de ces données existantes multiplient les indicateurs produits.

Néanmoins, la manière de mesurer l‟accessibilité est assez fidèle à ce que les définitions précédentes laissent envisager. Ainsi la mesure la plus immédiate de l‟accessibilité est celle qui se rapproche le plus de sa conception mathématique dans la théorie des graphes : l‟accessibilité est un potentiel d‟interaction entre un nœud et un ou plusieurs autres. Plusieurs approches territorialisées restent concentrées sur cette conception (Cattan 1992, Bruinsma et Rietvelt 1993).

Cependant, rappelons que l‟accent a été mis sur le fait que le déplacement était obligatoirement motivé par la possibilité d’effectuer une activité. Le calcul de potentiel s‟enrichit donc de l‟activité en question. Autrement dit : Que peut-on faire à partir d‟une accessibilité donnée ? A quoi a-t-on accès ?

Ainsi, le calcul de potentiels activables, en termes d‟emploi accessibles, de population pouvant accéder, d‟opportunités pouvant être atteintes, se multiplient dans les analyses territoriales (Chapelon, Jouvaud et Ramora 2004, Chapelon et Leclerc 2007, Kalsas et Aase 1997). En particulier les mesures des potentiels économiques ont mené à des indicateurs spécifiques (Reggiani 1998, Vickerman 1996). Ces mesures s‟ajoutent à d‟autres plus classiques en économétrie ou en économie spatiale basées sur le modèle gravitaire (Geurs et Ritsema Van Eck 2001) ou sur le calcul de fonctions d‟utilité (Geurs et Van Wee 2004). La méthode simple des cumuls d‟opportunités a en outre été mobilisée pour construire des indicateurs d‟accessibilité « soutenable » (sustainable en version originale), en combinant différentes variables dans les villes néerlandaises (Bertolini, Le Clercq et Kapoen 2005).

D‟autre part, comme précisé antérieurement, l‟accessibilité est une mesure contextualisée qui diffère de la distance. Il est ainsi important de prendre en compte le caractère contextuel et particulier de l‟accessibilité. Comme l'affirme Renaud De Crécy : « La mesure par une

distance (que ce soit à vol d’oiseau, ou par cheminement) est à exclure : l’accessibilité redevient alors un simple indicateur de structure urbaine, et ne prend plus en compte l’aspect qualitatif du réseau de transport » (De Crecy 1979).

De ce point de vue, les indicateurs classiques basés sur des mesures de séparation spatiale absolue entre les lieux (Keeble, Offord et Walker 1988, Linneker et Spence 1992, Pooler 1995) apparaissent insuffisants.

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A l‟aide des SIG, des indicateurs neutralisant l‟importance de la localisation, comme par exemple le fait que malgré la performance des réseaux de transports, les lieux périphériques soient inévitablement moins accessibles, ont donc été mis au point (Gutierrez, Monzon et Pinero 1998). L‟objectif d‟aménagement et de prospective dans le domaine des transports est ici favorisé. La dimensionsociale de l‟accessibilité se substitue alors progressivement à une simple distance physique (Monzon 1988).

Notons aussi les efforts réalisés pour prendre en compte les performances des transports dans un ensemble régional, avec des indicateurs appliqués non à un noeud mais à un territoire (Chatelus 1997, Murray, Davis, Stimson et Ferreira 1998). Dans ce cas, la performance du réseau est largement favorisée dans le formalisme et les contraintes spatiales et temporelles sont sous-estimées.

La seconde réponse possible à cette inadaptation de la distance spatiale pour le calcul de l‟accessibilité peut être le recours à une autre formulation de la distance au sens mathématique. Celle-ci peut alors être assimilée à la durée de transport, le coût, la longueur des trajets, mais aussi aux différents modes de transport (avec une qualité des liaisons qui peut être homogène ou non) ou encore à la nature de ce qui est transporté.

Mesurer l‟accessibilité revient alors à calculer une fonction renvoyant à une mesure associée à un couple de lieux et répondant à une série de propriétés précises.

Citons aussi pour information l‟approche qualitative, basée sur les dires d‟expert autour du concept d‟« attractivité de la localisation » (Healey & Baker 1993).

Remarquons donc que les deux aspects de l‟accessibilité (contraintes spatiotemporelles de la géographie des lieux et performances du réseau de transport) sont plus ou moins considérés selon les méthodes.

Dans ce contexte, les choix concernant les paramètres spatiaux et temporels sont nécessaires à la justification de l‟indicateur construit. Comme l'affirment Javier Guttierez, Rafael Gonzalez et Gabriel Gomez , « There are a wide variety of accessibility indicators, for the accessibility

measure applied in each study depends on the goals aimed at. » (Il y a un large éventail

d‟indicateurs d‟accessibilité, la mesure d‟accessibilité appliquée dans chaque étude dépend de ses objectifs. Traduction personnelle de Guttierez, Gonzalez et Gomez 1995 p. 6.)

Les paramètres spatiaux concernent le choix des lieux à destination et au départ desquels on va établir la mesure d‟accessibilité. Il peut s‟agir de la localisation d‟un équipement, de celle d‟un secteur résidentiel, d‟une zone commerciale par exemple. Le plus souvent, on s‟intéresse à des sites attracteurs ou émetteurs de trafic. La détermination des paramètres d‟ordre spatial pose la question des chaînes de transport entre le site considéré et le point d‟entrée sur le réseau de transport. On emploie alors les termes de modes de rabattement, ou encore de pré et de post acheminement, pour appréhender la totalité du déplacement potentiel mesuré. La marche à pied intervient dans la chaîne de déplacement quels que soient les modes en

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présence, y compris en voiture où il est nécessaire de marcher entre l‟endroit où est garé le véhicule et le lieu de destination ou d‟origine.

Les paramètres temporels incluent les temporalités relatives aux transports et les rythmes urbains.

La délimitation des ces paramètres constituent le travail préalable et décisif à toute recherche quantitative sur l‟accessibilité (L'Hostis et Conesa 2009).

Pour constituer une réelle aide à la décision, il paraît nécessaire d‟appréhender d‟une certaine manière les comportements de mobilité et ainsi de rapprocher le concept d‟accessibilité de l‟usage réel (Faivre d'Acier 1983b).

En ce sens, les sociologues ont postulé que le temps était la métrique la plus adéquate à rendre compte de l‟accessibilité et que la minimisation de ce temps de déplacement était le facteur principal des choix de trajets (Diekmann 1995).

Construire un indicateur d‟accessibilité mesurant les potentialités de construction d‟un territoire métropolitain doit ainsi concrétiser des efforts de contextualisation. Si la mesure de la performance des réseaux est l‟objectif principal, les conditions spatiales et temporelles de réalisation des déplacements ne peuvent être totalement évacuées.

De plus, pour « coller » le mieux possible aux perspectives d‟appropriation, l‟indicateur concerné se doit de rendre compte le plus finement possible des paramètres spatiaux et surtout temporels d‟accessibilité.

Enfin, plutôt que d‟agréger les composants d‟un potentiel d‟interaction, qui fait correspondre l‟indicateur d‟accessibilité à un indice de centralité au sens de la théorie des graphes, nous préférons insister sur le calcul d‟une mesure précise entre un couple de lieux, définissant une relation. Si les deux démarches sont finalement assez proches dans les résultats qu‟elles peuvent produire, l‟accent mis sur la relation permet de concevoir les interactions construisant le territoire indépendamment des hiérarchies urbaines.

Conclusion

L‟accessibilité représente chez la plupart des auteurs une notion de facilité, de pénibilité dans un déplacement entre deux lieux. Elle est donc fortement liée au contexte et à la société concernée. De plus, il est admis que le déplacement est généré par un motif, un but : exercer une activité que l‟on ne peut effectuer à l‟endroit où l‟on se trouve. L‟accessibilité est donc aussi fortement liée à la localisation des fonctions attractives sur le territoire donné.

C‟est une approche de l‟hétérogénéité des lieux et des inégalités qui est particulièrement pertinente dans les territoires métropolitains, et ce à deux échelles.

Dans l‟objectif de s‟en saisir et de la mesurer, le bref inventaire des méthodes existantes nous enseigne quelques pistes :

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- Il doit d‟une certaine manière rendre compte des inégalités face aux contraintes

spatiotemporelles du territoire en intégrant les géographies et les situations locale ;

- C‟est une mesure de la performance des réseaux de transport et surtout de la manière dont ils permettent l‟appropriation des potentiels territoriaux ;

- La représentation en est guidée par l‟idée de montrer des conditions de fonctionnement

d’un territoire plus que d‟établir un classement des lieux selon leur situation topologique.

Avant de passer à la construction proprement dite de ces indicateurs, encore faut-il savoir sur quels territoires il est pertinent de mener cette recherche.

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II.3 L’objectif : prendre en compte l’inscription territoriale