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Chapitre V : Des mesures d’accessibilités pour établir un potentiel métropolitain

V.1 Première étape : établir des potentiels de fonctionnement territorial

V.1.2 Une approche classique éprouvée

Une fois les pôles sélectionnés, reste à définir la méthode d‟appréhension des facilités de relations entre eux. L‟accessibilité est apparue comme offrant la meilleure possibilité de quantification de la pénibilité d‟un trajet (II.2). Elle permet de couvrir les caractéristiques d‟un déplacement qui va orienter le choix des individus. Comme introduit précédemment (II.2), c‟est avec la distance-temps qu‟il est préférable de formuler les accessibilités, et mesurer ainsi une performance en termes de temps de parcours. Il convient de procéder à quelques précisions sur les modalités de calcul de l‟accessibilité en termes de temps de parcours.

Le calcul d‟un temps de parcours entre un lieu et un autre se heurte à des contraintes spatiales : « Toute mesure d’accessibilité se rapporte à un lieu donné, localisé avec précision dans

l’espace géographique. » (Chapelon, Baptiste, Coquio, Jouvaud, L'Hostis, Mende et Ramora

2005 page 26). En raison des grandes différences de vitesse dans les espaces métropolitains en particulier, l‟accessibilité d‟un lieu peut fortement différer de celle d‟un lieu voisin. Si un aéroport possède une accessibilité très satisfaisante au monde entier, à quelques centaines de mètres de là, en-dehors des boulevards périphériques, l‟accessibilité peut être totalement différente (exemple théorique). En particulier, les différentiels d‟accessibilité à l‟intérieur des espaces urbains sont trop grands pour pouvoir les généraliser. L‟accessibilité de Lille à Paris diffère grandement selon que l‟on se trouve à Lille-Flandres ou bien sur le Champs de Mars en face de la citadelle. Il est donc très important d‟établir avec précision le lieu où l‟accessibilité est calculée.

La même contrainte s‟applique aux représentations. En effet, l‟accessibilité n‟étant valable qu‟à un lieu précis, la valeur associée ne peut être étendue. L‟accessibilité est donc discrète dans l‟espace et sa représentation doit l‟être en conséquence, on parlera ainsi de représentations unipolaires (Chapelon, Baptiste, Coquio, Jouvaud, L'Hostis, Mende et Ramora 2005). Certes, des interpolations sont possibles et les moyens techniques modernes permettent d‟assurer le continuum des valeurs et de représenter les accessibilités par des plages continues, les isochrones (Mathis 2003b). Cependant, ces interpolations sont sujettes à la critique : l‟espace n‟est pas isotrope et les accessibilités décroissent rarement proportionnellement à la géométrie des espaces. Une autre solution pour représenter ces valeurs discrètes est le recours

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à un carroyage qui permet le calcul des temps de déplacement interne aux cellules (Passegué 1996) mais sa lisibilité cartographique pose problème (Chapelon, Baptiste, Coquio, Jouvaud, L'Hostis, Mende et Ramora 2005). Nous opterons donc pour une représentation unipolaire qui minimise toutes les imprécisions dues à l‟agrégation.

Les accessibilités sont aussi contraintes par des paramètres temporels : « Toute mesure

d’accessibilité se rapporte à un instant donné et à un seul. » (Chapelon, Baptiste, Coquio,

Jouvaud, L'Hostis, Mende et Ramora 2005 page 27). En effet, l‟accessibilité est fortement dépendante de toutes sortes de modalités pouvant changer d‟une seconde à l‟autre. Pour les modes à fonctionnalité permanente comme l‟automobile, les conditions d‟accessibilité peuvent changer fortement d‟un instant à l‟autre, en raison particulièrement du niveau d‟utilisation des infrastructures (Chapelon, Baptiste, Coquio, Jouvaud, L'Hostis, Mende et Ramora 2005). Les écarts entre les accessibilités en heures pleines et en heures creuses peuvent par exemple atteindre des niveaux très forts (Chapelon, Jouvaud et Ramora 2002). Pour les modes à fonctionnalité temporaires, la maxime précédente est encore plus vraie et l‟accessibilité encore plus discrète dans le temps (L'Hostis et Decoupigny 2001). En effet, l‟accessibilité en gare peut être excellente à 8h00 et mauvaise à 8h01 si les trains concernés partent respectivement à 8h00 et 8h30.

Ainsi, l‟accessibilité est non seulement liée à un couple de lieu précis dans l‟espace mais aussi à un moment donné dans le temps.

Il est donc nécessaire de préciser les paramètres spatiaux et temporels pour notre analyse. Pour les paramètres spatiaux, les lieux pris en compte sont les gares. Bien que les villes ne se résument pas à leur porte d‟entrée ferroviaire, la thèse porte sur les transports collectifs et les gares sont un substitut satisfaisant à cette échelle et dans cette première approche (les pré et post-acheminements de et vers la gare représentent à l‟échelle d‟un déplacement régional un segment de trajet marginal). Un problème se pose lorsqu‟une ville possède plusieurs gares. Dans ce cas, c‟est la gare centrale qui a été choisie, la plus représentative de la ville. Les gares périphériques ont été éliminées y compris les gares TGV d‟Avignon et Aix-en-Provence. Ce choix se justifie non seulement par l‟objectif de structuration, qui consiste en la mise en relation de villes entre elles et non des gares, mais en plus par le fait que ces gares ont une fonctionnalité plus proche du relais vers Lyon ou Paris que de pôles de construction du territoire régional.

Un cas subsiste et pose problème. On peut en effet considérer qu‟avec Lille-Flandres et Lille- Europe, Lille possède deux gares centrales. La méthode a été en conséquence la suivante : ce binôme a été considéré comme une seule et même gare et les performances des chemins de fer mesurés comme si la gare était unique (cela se justifie assez bien par la proximité géographique des deux gares).

En ce qui concerne les paramètres temporels, l‟accessibilité a été calculée de manière classique. Ainsi, le meilleur temps de parcours est l‟indicateur synthétique le plus répandu dans les analyses d‟accessibilité (Bavoux, Beaucire, Chapelon et Zembri 2005). Il représente

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le plus court chemin en termes de temps entre un couple de lieu, quels que soient les paramètres temporels. Cette valeur absolue est un indicateur simple et efficace de comparaison des coûts de déplacement, ce qui lui vaut son succès (Gutierrez, Gonzalez et Gomez 1996, Schürmann 1996, Schürmann, Spiekermann et Wegener 1997, Spiekermann 1999).

Cependant, et d‟autant plus dans les modes à fonctionnalité temporaire, l‟accessibilité peut grandement varier d‟une minute à l‟autre et le meilleur temps de parcours propose une vision très restreinte de l‟accessibilité. On pense aux modes ferroviaires, mais le constat est encore plus probant concernant l‟avion : « When this (la fréquence des vols N.D.A.) varies from

several flights a day to one per week or less, the range of effective accessibility to a particular centre […] can be extreme… » (Quand la fréquence des vols varie de plusieurs vols par jour à

un par semaine ou moins, le différentiel d‟accessibilité à un centre donné peut être extrême. Traduction personnelle de (Ward 1998 page 182). À l‟instar du travail cité (Ward 1998), il est en conséquence plus exact de prendre en compte d‟une manière ou d‟une autre la fréquence du service offert.

En effet, la fréquence est, avec la vitesse et l‟amplitude horaire, le troisième paramètre temporel des modes de transports à fonctionnalité permanente (Bahn-Ville 2005). Il peut ainsi s‟avérer intéressant de combiner des indicateurs de vitesse et de fréquence.

Nous avons en conséquence choisi de mener une analyse construite autour de deux indicateurs : le meilleur temps de parcours et le nombre de trains directs par jour. Ces deux indicateurs se calculent sur MapNod qui est, à ce niveau d‟utilisation, un simple logiciel de gestion d‟horaires de transport.

Le meilleur temps de parcours est plus exactement le « temps minimal sur le réseau ». C‟est un temps de trajet qui additionne les durées les plus courtes de la journée entre chaque arrêt intermédiaire d‟un déplacement entre une origine et une destination. C‟est un calcul optimal

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Figure V- 1 : Calcul de temps de trajet sur MapNod

Le nombre de trains directs par jour est recensé à partir de MapNod comme le montre la figure V 2.

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Figure V- 2 : Comptage du nombre de missions pour une relation physique dans MapNod

Pour Lille, les trains directs de Lille-Flandres et Lille-Europe ont été ajoutés en ce qui concerne le nombre de trains, alors que, concernant le meilleur temps, c‟est le meilleur absolu entre les deux gares qui a été retenu. Les temps minimums pour Lille sont donc tour à tour valables pour l‟une ou l‟autre des gares, considérées comme un seul ensemble d‟échanges ferroviaires.

Pour toutes les relations, l‟ensemble des modes a été pris en compte (trains classiques + TGV en l‟occurrence).

Une dernière précision est à apporter concernant cette première étape.

Comme nous l‟avons affirmé, l‟accessibilité est extrêmement dépendante d‟un couple de lieu et d‟un moment donné. Cela implique que le sens de la relation a une importance. Il est en effet rare que l‟offre de transport entre deux lieux soit parfaitement symétrique. Les conditions d‟accessibilité doivent donc être testées en deux temps : l‟aller et le retour. Plus exactement, dans un sens puis dans l‟autre.

Tableau 2 : Meilleur temps de parcours et nombre de trains directs entre les pôles choisis de PACA et NPdC

1 heure : plus mauvaise accessibilité par colonne 1 heure : meilleures accessibilités par colonne 1 heure : meilleures fréquences par colonne

1 heure : meilleure accessibilité + meilleure fréquence par colonne

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Les résultats présentés dans le tableau1 montrent un aperçu des conditions d‟accessibilité dans les espaces d‟application.

Nord-Pas-de-Calais

- Bonne accessibilité et bonne fréquence générales pour Lille, Arras et Douai ; - Bonne accessibilité générale pour Béthune ;

- Bonne fréquence pour Paris - Lille et Paris - Arras et en général de Lille vers les pôles externes ;

- Mauvaise accessibilité pour Maubeuge.

PACA

- Bonne accessibilité et bonne fréquence pour Marseille - Toulon, Marseille - Aix et Nice - Antibes ;

- Bonne accessibilité générale pour Toulon, Antibes et à un degré moindre Avignon ; - Mauvaise accessibilité vers les pôles externes.

Ces résultats peuvent se prêter à l‟analyse et l‟interprétation. Cependant, ils masquent une grande partie de l‟état du service de transport. En effet, ces meilleurs temps théoriques et les fréquences associées ne peuvent suffire à rendre compte de la multiplication des possibilités données par les temps de parcours et leur positionnement dans le temps. Ainsi les possibilités

de fonctionnement territorial sont faiblement abordées. Afin de construire une méthode

plus apte à prendre en compte les variations quotidiennes de l‟accessibilité, il paraît nécessaire de se dégager des approches par l‟offre et de proposer un autre indicateur.