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Le bénéfice de la protection prévue pour les opérations sur fonds de commerce 

Dans le document Les dates de naissance des créances (Page 85-93)

§2 : La thèse périodique dualiste 

Section 1 : Des thèses lacunaires

B.   L’existence d’une protection antérieure 

2/  Le bénéfice de la protection prévue pour les opérations sur fonds de commerce 

132. En matière de fonds de commerce, il est prévu par les textes différents mécanismes de

protection des créanciers pour différentes raisons. Un droit d’opposition au prix de vente du fonds de commerce protège les créanciers du vendeur car le fonds de commerce constitue souvent la valeur essentielle et principale du patrimoine de leur débiteur (a). Un mécanisme de solidarité légale des dettes permet de prévenir le défaut d’information des créanciers professionnels du changement de gestionnaire du fonds de commerce durant les six mois suivant sa mise en location gérance (b). Le premier mécanisme protège tous les créanciers, le second se cantonne aux titulaires de créances nées à l’occasion de l’exploitation du fonds. Mais, dans tous les cas, la mise en œuvre jurisprudentielle montre que les créances naissent avant l’exécution postérieure et avant la survenance des échéances successives postérieures à la vente ou à la mise en location gérance du fonds.

a) L’opposition sur le prix de vente du fonds de commerce pour les échéances postérieures à la cession

133. Après avoir exposé les principes applicables dont on retiendra surtout que le droit d’opposition

ne peut être invoqué que pour la protection d’une créance née avant la cession du fonds (1°), il sera induit de la protection des échéances postérieures à ladite cession qu’elles correspondent à une créance née avant et non pas à une succession de créances qui seraient nées après la cession (2°).

1° - La naissance antérieure des créances invoquées au titre de l’opposition

134. Le fonds de commerce ne constitue pas une personne morale, c’est un bien incorporel auquel

n’est en principe attaché aucun passif1. Par conséquent, d’un côté le gage général accordé aux fournisseurs de l’exploitant du fonds n’est autre que celui correspondant au patrimoine de la personne physique ayant contracté, d’un autre côté le fonds de commerce constitue généralement l’actif le plus important de ce patrimoine, la substance même du gage général accordé aux créanciers du cédant. Pour ces raisons, diverses mesures sont prises pour tempérer l’application stricte de la

1

Sauf à considérer certaines créances attachées au fonds par un intuiti rei auquel cas il s’agirait d’obligations propter rem dont le débiteur se trouve désigné, non pas nommément, mais par sa qualité de propriétaire du fonds de commerce auquel elles seraient attachées. Cependant, le concept d’obligations propter rem n’a pas été consacré en la matière, même s’il arrive que la jurisprudence consacre le transfert automatique de certaines créances qui ne sont en réalité utiles que pour le propriétaire du fonds de commerce (O. DESHAYES, La transmission des obligations à l’ayant cause à titre particulier, th. 2003 LGDJ).

théorie classique du patrimoine afin de protéger les créanciers, non seulement ayant contracté pour l’exploitation du fonds, mais également personnels de l’exploitant du fonds de commerce en cas d’opérations sur celui-ci1. La cession du fonds de commerce figure au premier rang de ces opérations à risque pour lesquelles le législateur aménage un mécanisme de protection.

En cas de cession du fonds de commerce, tous les créanciers du cédant, qu’ils aient ou non contracté à l’occasion de l’exploitation du fonds, disposent d’un droit d’opposition sur le prix de vente du fonds de commerce. L’article L 141-142 du Code de commerce dispose que « Dans les dix jours suivant la dernière date des publications…, tout créancier du précédent propriétaire, que sa créance soit ou non exigible, peut former… opposition au paiement du prix… ».

135. De façon générale, l’opposition constitue la manifestation de volonté destinée à empêcher

l’accomplissement d’un acte juridique ou à en neutraliser les effets3. Martine Behar-Touchais regroupe les droits d’opposition visant à protéger une créance par leur finalité spécifique, « prévenir les conséquences préjudiciables par un changement dans le patrimoine du débiteur qui affectera substantiellement le droit de gage général du créancier »4. Tel est le cas du droit d’opposition sur le prix du fonds de commerce qui permet à tout créancier du débiteur de faire valoir ses droits sur le prix de cession du fonds de commerce. Dès le jour de la vente, avant même toute opposition, le prix de cession demeure indisponible et l’acquéreur ne peut s’en défaire5 tant que le délai d’opposition de dix jours à compter de la dernière publication dans un JAL ne s’est pas écoulé6.

Bien que le texte prévoie la possibilité de faire opposition au titre d’une créance non échue, la cession du fonds de commerce n’engendre pas l’exigibilité immédiate des dettes du cédant7. Et le droit d’opposition ne constitue pas une mesure d’exécution forcée8. C’est une mesure conservatoire

1

Pour ne mentionner que les mesures visant à protéger les créanciers chirographaires, on peut distinguer trois types d’opérations, la cession qui nous intéresse tout particulièrement ici, mais aussi la location gérance et l’apport en société.

Concernant la location gérance, l’exigibilité immédiate des seules dettes afférentes à l’exploitation du fonds constitue la mesure de protection adoptée, facultative lors de la mise en location gérance si les juges considèrent que le recouvrement des dettes est menacé (art. L. 144-6 du Code de commerce), mais systématique et automatique, de plein droit, lors de la cessation du contrat de location gérance (art. L. 144-9 du Code de commerce). À cela s’ajoute un troisième mécanisme de solidarité du cédant pour les dettes contractées les 6 mois suivant la publicité au JAL de la mise en location gérance reposant sur le soucis de laisser le temps aux contractants habituels d’en être informés (art. L. 144-7 du Code de commerce) qui s’articule avec l’inopposabilité de la mise en location gérance tant que le propriétaire du fonds ne sera pas radié du RCS (art. L. 123-8 du Code de commerce, cet article s’appliquant également au cas de cession du fonds de commerce).

Pour ce qui concerne l’apport en société, il est prévu une procédure de déclaration au greffe du Tribunal de commerce de tout créancier du débiteur apporteur avec à l’issue l’annulation de l’apport ou la solidarité de la société bénéficiaire de l’apport pour le passif déclaré (art. L. 121-22 du Code de commerce).

2

Initialement, article 3 al. 4 de la loi du 17 mars 1909 sur la vente et le nantissement du fonds de commerce.

3

G. CORNU, Vocabulaire juridique, Assoc. Henri Capitant, Puf, 2011.

4

M. BEHAR-TOUCHAIS, Rapport de synthèse, colloque CEDAG du 30 mars 2006, « Existe-t-il un droit d’opposition, prérogative conservatoire des droits de créance ou des droits intellectuels ? », LPA 2007, n°68, p. 45 et s., spéc. n°33.

5

Sauf cas de remise à un séquestre où le prix demeure toujours indisponible, mais entre les mains de ce dernier.

6

CA Paris 17 avr. 1945, GP 1945, 2, Jur. p. 157 : l’arrêt rapporté précise incidemment que « le créancier du vendeur doit avoir été créancier au moment de la publicité de la vente ». Le commentateur expose que, si la loi ne précise pas formellement cette condition, elle paraît bien résulter de l’ensemble des textes, en particulier de l’exigence de la publicité.

7

Contra : F. MONTIER et G.-H. FAUCON, De la vente et du nantissement des fonds de commerce, Commentaire théorique et pratique de la Loi du 17 mars 1909, Paris, 1912, p. 203, n°186. La solution est d’après nous erronée, aucun texte ne prévoit de déchéance du terme en cas de vente par le débiteur de son fonds de commerce.

8

Le droit d’opposition ne fait pas obstacle à la saisie d’un tiers (Civ. 2, 6 juill. 2000, D. 2000, AJ 371). Il ne donne pas droit non plus à un paiement privilégié sur le prix de cession immobilisé par rapport à tout autre créancier. Tous peuvent participer à une procédure de distribution postérieure. Seul le cas d’affectation spéciale à la suite d’une procédure de cantonnement réserve exclusivement la garantie alors constituée au profit des créanciers opposants (A. COHEN, Traité théorique et pratique des fonds de commerce, Sirey, 2ème éd. 1948, n°357).

qui peut néanmoins déboucher sur un paiement anticipé. En effet, l’opposant bloque le prix de cession du fonds de commerce, son opposition « prolonge l’indisponibilité légale au-delà du délai d’opposition »1. Seul le paiement permet d’obtenir la mainlevée2. Il en résulte qu’en cas d’opposition de la part d’un créancier à terme, le seul moyen d’obtenir la mainlevée avant la survenance du terme réside dans le paiement volontaire anticipé du créancier à terme. À défaut, l’indisponibilité et le séquestre des fonds durent aussi longtemps que la dette subsiste, tant que le terme n’est pas survenu et que le paiement n’a pas été opéré et, en cas de termes successifs, tant que toutes les échéances successives n’ont pas été honorées, mais nous anticipons déjà ici les développements à venir.

Le droit d’opposition implique donc la possibilité d’effectuer un paiement anticipé et par conséquent l’existence de la créance au titre de laquelle il est formé opposition. Tel n’est pas tout à fait le cas de toute mesure conservatoire puisque la saisie conservatoire supporte une créance simplement fondée en son principe3. C’est sans doute pour ces raisons que, lors d’un colloque du 30 mars 2006 consacré au droit d’opposition4, les auteurs avaient semblé classer le droit d’opposition au prix de vente du fonds de commerce parmi les « faux droits d’opposition » qui cacheraient de véritables voies d’exécution similaires à une saisie attribution, alors que tel n’est pas le cas, parce que ce droit d’opposition implique une pression sur le débiteur et peut emporter paiement volontaire anticipé de la créance pourtant à terme sans que cela ne s’impose pour autant.

1

A. COHEN, Traité théorique et pratique des fonds de commerce, Sirey, 2ème éd. 1948, n°354.

2

Si la créance existe. Lors de l’exercice de l’opposition, seuls la cause et le montant de la créance invoqués doivent être déclarées. Il n’y a pas de procédure de vérification de la créance. Mais il existe une procédure accélérée de mainlevée auprès du président du Tribunal de commerce à l’art. L. 141-16 du Code de commerce qui pousse à introduire une instance au fond si la réalité du droit est contestée par le cédant du fonds de commerce, ce afin de pallier aux oppositions abusives. Il en résulte que la mainlevée peut être obtenue si la créance invoquée n’existe pas, soit de façon présomptive en cas d’application de la procédure accélérée de référée, soit à l’issue d’une instance au fond engagée sur le sujet. Mais, si la créance existe et que donc l’opposition est légitime, alors la seule façon d’obtenir la mainlevée réside bien dans l’obtention du paiement, quoique puisse être envisagée une renonciation du créancier à son droit d’opposition, par exemple si le débiteur lui propose des garanties suffisantes en échange. Mais, quoi qu’il en soit, le mécanisme du droit d’opposition implique qu’il puisse y avoir paiement anticipé et que, par conséquent, l’admission d’une opposition implique de facto que la créance invoquée pour faire cette opposition était née dès avant le jour de publication de la cession du fonds de commerce au JAL. Remarquons ici une différence importante d’avec la saisie conservatoire. La finalité d’une mesure conservatoire réside certes toujours dans le paiement. Ainsi, Messieurs Donnier écrivent au sujet de la saisie conservatoire que la mainlevée « peut intervenir à tout moment c’est-à-dire pendant toute la durée de la mesure conservatoire et jusqu’à l’issue consistant soit dans le paiement volontaire soit dans le paiement forcé (M. et J.-B. DONNIER, Voies d’exécution et procédures de distribution, Litec, 8ème éd. 2009, n°478). Mais il existe tout de même une condition supplémentaire pour la saisie conservatoire, son l’octroi et son maintien sont conditionnés par la preuve d’une mise en péril, d’une menace du recouvrement de la créance. Autrement dit, alors que toute créance implique la possibilité de faire opposition, toute créance n’implique pas la possibilité de pratiquer une mesure conservatoire, il faut, en sus d’une créance, des raisons de penser que son recouvrement est dès à présent menacé.

3

Art. 67 L. 1991 : « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable… ». Une comparaison s’impose ici entre la mesure conservatoire spécifique que nous abordons ici, le droit d’opposition sur le prix de vente du fonds de commerce, et la mesure conservatoire de droit commun que constitue la saisie conservatoire. Le droit d’opposition nécessite une créance née dès avant la publicité de la cession ouvrant le délai d’opposition et se met en œuvre au moyen d’un exploit d’huissier adressé au débiteur du prix de cession. À l’opposé, la saisie conservatoire, si elle peut se contenter d’une créance simplement certaine en son principe, nécessite également la preuve d’une mise en péril du recouvrement futur de la créance et se trouve soumise à une autorisation judiciaire. Si la menace de recouvrement disparaît, alors l’indisponibilité doit être levée (M. DONNIER et JB DONNIER, Voies d’exécution et procédures de distribution, Litec, 8ème éd. 2009, n°426 s). Quant au principe certain de créance, bien qu’il s’agisse d’une probabilité de créance, il s’agit toujours d’une créance existante, certes sur le plan des probabilités. S’il apparaît certain que la créance invoquée n’existe pas, alors la saisie conservatoire doit être levée. Mais il est sans doute toujours possible d’invoquer la fraude aux droits futurs d’un créancier pour obtenir une mesure conservatoire alors que la créance n’existe pas encore, comme c’est d’ailleurs le cas en matière d’action paulienne où le principe d’existence de la créance invoquée au jour de l’acte attaqué se trouve tempéré lorsqu’il est rapporté la preuve que l’acte avait été accompli en vue de spolier ses créanciers futurs.

4

Colloque du CEDAG du 30 mars 2006, sous la direction de M. BEHAR-TOUCHAIS, « Existe-t-il un droit d’opposition, prérogative conservatoire des droits de créance ou des droits intellectuels ? », LPA, 4 avr. 2007 n°68, spéc. P. THÉRY, « Le droit d’opposition en droit du paiement », p. 26 et M. BEHAR-TOUCHAIS, « Rapport de Synthèse », p. 48, n°13.

136. Enfin, la fonction du droit d’opposition implique également que la créance au titre de laquelle il

est invoqué soit née dès avant la date de publication de la cession du fonds de commerce. Il s’agit d’une mesure de garantie du gage général des créanciers du débiteur pour la simple raison que le droit n’est pas accordé aux seuls créanciers dont la créance serait née à l’occasion de l’exploitation du fonds, mais à l’égard de tous les créanciers1. On a craint que le débiteur fasse disparaître le plus clair de son actif « en aliénant son fonds pour un prix dérisoire, ou moyennant un prix qu’il ferait disparaître »2. Il en résulte logiquement que seul le passif du patrimoine né avant la date d’opposabilité aux tiers, avant la date de publication au JAL, peut être protégé par ce mécanisme d’opposition au prix de vente car seuls ces créanciers pouvaient compter sur la présence du fonds de commerce dans leur droit de gage général, contrairement aux créanciers postérieurs qui sont censés avoir eu connaissance de la cession avant que leur créance, que leur droit de gage général sur le patrimoine du débiteur ne naisse.

Puisque l’opposition implique la naissance antérieure à la cession des créances invoquées, il s’ensuit, en cas de créance à exécution successive, que la nature des échéances postérieures dépendra de la possibilité de les invoquer pour faire opposition. Si le créancier peut invoquer les créances successives postérieures, alors ces dernières correspondent à une créance unique née antérieurement, vraisemblablement au jour du contrat et pour toutes les échéances postérieures. Mais si le créancier ne peut les invoquer, c’est qu’il s’agit de créances postérieures à la cession, qui, n’étant pas nées au jour de sa publicité sont nécessairement nées de façon successive après cette dernière. La réponse se trouve dans l’histoire du droit ayant conduit le législateur à édicter une règle particulière pour la créance successive du bailleur.

2 - Le bénéfice de l’opposition pour les échéances postérieures à la cession

137. L’article L. 141-14 du Code de commerce dispose expressément que l’opposition peut se faire,

que la créance « soit ou non exigible »3. Mais il aménage un tempérament sous forme d’exclusion de son domaine : « Le bailleur ne peut former opposition pour les loyers en cours ou à échoir et ce, nonobstant toutes stipulations contraires ». Cela signifie a contrario que les loyers à échoir correspondent à une créance née antérieurement pour laquelle le bailleur pouvait faire opposition. Toutes les échéances postérieures du bail sont donc nées dès avant la cession du fonds de commerce, vraisemblablement au jour du contrat de bail, à défaut de quoi il n’aurait pas été nécessaire de ménager cette exception pour les exclure du domaine du droit d’opposition. L’analyse historique de cette exclusion expresse du bail confirme cette interprétation.

1

A. COHEN, Traité théorique et pratique des fonds de commerce, Rousseau 1948, n°334.

2

J. DERRUPPÉ, « Fonds de commerce », Rép. Dalloz droit commercial, 2013, n°557.

3

Cette possibilité résulte de l’application des principes généraux en matière de mesures conservatoires. En effet, l’art. 1180 dispose que la créance conditionnelle peut faire l’objet de toute mesure conservatoire. De ce fait a fortiori la créance à terme peut-elle faire l’objet desdites mesures puisqu’alors que la créance conditionnelle n’existe pas encore, la créance à terme existe d’ores et déjà quant à elle (AUBRY et RAU, t. IV, §303, texte et note n°22, PLANIOL, RIPERT et RADOUANT, t. VII, §1005, cités par A. COHEN).

138. Le droit d’opposition provient initialement de l’article 3 al. 4 de la loi du 17 mars 1909 sur la

cession et le nantissement de fonds de commerce. Or, l’article ne comportait pas à l’origine d’exclusion expresse du bailleur pour les loyers à échoir. Cette exclusion ne fut insérée que plus tard par l’article 1er de la loi du 31 juillet 19131 en réaction aux conséquences désastreuses auxquelles la loi de 1909 avait donné lieu.

En effet, au lendemain de la loi de 1909, les bailleurs des locaux commerciaux faisaient

opposition au prix de vente de celui-ci, non seulement pour les loyers échus, mais également pour tous les loyers à échoir. La jurisprudence validait cette opposition2. Les premiers jugements en ce sens étaient un jugement du Tribunal de Rambouillet du 8 juin 19103 ainsi qu’un jugement du Tribunal de Châteauroux du 29 décembre 19104. Certes, quelques tribunaux consulaires refusaient bien le droit d’opposition au motif qu’il s’agissait de créances à exécution successives qui n’étaient donc pas nées au jour de la publicité de la cession du fonds5. Mais ces arrêts sont minoritaires et les magistrats de profession étaient particulièrement clairs quant à eux ainsi que le montre un arrêt de la Cour d’appel de Douai du 16 janvier 1913 : « Attendu que les loyers à échoir constituent, dès l’instant où la chose louée a été délivrée au preneur, une créance certaine au profit du bailleur, que les échéances fractionnées auxquelles cette créance deviendra exigible n’en fait point une créance éventuelle, mais une créance à terme »6.

Ainsi, malgré l’existence de quelques auteurs7 et de quelques jugements de tribunaux consulaires en sens contraire, la jurisprudence validait l’opposition au titre des échéances postérieures, contredisant ainsi les thèses matérialiste et périodique. Le législateur de 1913 ne l’a point contredit en édictant une exclusion spécifique pour le cas du bail commercial.

Puisque le cours de l’histoire a tranché pour la naissance antérieure d’une créance unique correspondant aux échéances postérieures à la cession, il s’ensuit que l’exclusion concernant le bail commercial devrait être d’interprétation stricte. Elle ne devrait donc pas concerner les autres contrats à exécution successive. Pour ces derniers, l’opposition devrait pouvoir s’opérer, y compris au titre des échéances postérieures.

Il n’existe certes a priori pas d’exemples en jurisprudence. Cependant, à l’instar de certains auteurs8, il nous semble que l’évolution historique précitée du droit d’opposition et la jurisprudence survenue

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