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Paragraphe 4. Le dispositif antiterroriste de l’UE

A- La stratégie européenne de lutte contre le terrorisme

Lutter contre le terrorisme constitue une priorité pour l'UE et ses États membres328. La première forme de coopération en la matière a été dans le cadre du groupe TREVI (« Terrorisme, radicalisme, extrémisme, violence internationale ») constitué le 1er décembre 1975. Il s’agit d’un groupe qui réunissait les ministres de l’Intérieur et ensuite de la Justice des neuf États membres de la Communauté économique européenne (CEE). En 1992, le traité de Maastricht a créé la structure en piliers de l’UE, qui intègre la Justice et les affaires intérieures dans le troisième pilier. Le premier véritable plan de lutte contre le terrorisme a été adopté par l’UE après les attentats du 11 septembre 2001329. Ensuite, ce sont les attentats de Madrid en 2004, puis de Londres en 2005, qui ont suscité, d’une part, l’adoption d’une stratégie de l’UE pour lutter contre le terrorisme330 et, d’autre part, la création du poste de coordinateur européen de la lutte

328

W. SÉVERINE, « L’Union européenne et la lutte contre le terrorisme », Politique étrangère, Vol. Été, n° 2, 2018, p. 133-144.

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CCE, Conclusions et plan d’action du Conseil européen extraordinaire du 21 septembre 2001, SI (2001) 990.

330

Conseil de l’UE, Stratégie de l’Union européenne visant à lutter contre le terrorisme, Doc. n° 14469/4/05 du 30 novembre 2005.

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contre le terrorisme. Cette stratégie s'appuie sur quatre axes, à savoir la prévention (1), la protection (2), la poursuite (3) et la réaction (4).

1- La politique de prévention des actes terroristes

L'une des priorités essentielles de l'UE est d’empêcher que des individus se tournent vers le terrorisme en s’attaquant aux facteurs et aux causes profondes qui peuvent conduire à la radicalisation et au recrutement, en Europe et au niveau international. À cette fin, l'UE a adopté une stratégie et un plan d'action globaux visant à lutter contre la radicalisation et le recrutement de terroristes, plus particulièrement par Al- Qaida et les groupes de sa mouvance, étant donné que ce type de terrorisme représente actuellement la principale menace à laquelle l'Union dans son ensemble doit faire face. Même une latitude est laissée aux États membres d’opter pour les mécanismes et les mesures qu’ils jugeront adéquates pour atteindre un tel objectif, néanmoins il a été rappelé que les travaux de l’UE peuvent constituer un cadre important pouvant contribuer à la coordination des politiques nationales.

D’une manière générale, dans le cadre de l’axe « Prévention », il est question : d’élaborer des approches communes pour détecter les comportements posant problème, en particulier l'utilisation abusive d'Internet, et prendre des mesures pour les combattre ; de lutter contre l'instigation et le recrutement, plus particulièrement dans les endroits qui y sont propices, comme les prisons, les lieux de formation religieuse ou de culte, notamment en mettant en œuvre une législation érigeant ces comportements en délits ; de mettre au point une stratégie dans le domaine des médias et de la communication afin de mieux expliquer les politiques de l'UE ; d’encourager la bonne gestion des affaires publiques, la démocratie, l'enseignement et la prospérité économique à travers des programmes d'assistance émanant tant de la Communauté que des États membres ; de mettre en place un dialogue interculturel à l'intérieur et à l'extérieur de l'Union ; d’adopter un discours sobre pour parler de ces questions ; de poursuivre les recherches, partager les analyses et les expériences afin d'améliorer notre compréhension des questions et d'élaborer des réponses.

2- La politique de protection des actes terroristes

La deuxième priorité de la stratégie de l'UE visant à lutter contre le terrorisme est de protéger les citoyens et les infrastructures et réduire notre vulnérabilité aux

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attentats, notamment en renforçant la sécurité des frontières, des transports et des infrastructures sensibles. Cela comprend la protection des frontières extérieures, le renforcement de la sécurité dans les transports, la protection des cibles stratégiques et la réduction de la vulnérabilité des infrastructures critiques.

Même s’il revient à chaque États membre d’améliorer la protection des cibles essentielles, l'interdépendance de la sécurité aux frontières, des transports et des autres infrastructures transfrontières appelle une action collective efficace de l'UE. « Dans les domaines où un dispositif de sécurité existe au niveau de l'UE, par exemple la sécurité aux frontières et celle des transports, l'UE, et la Commission européenne en particulier, ont joué un rôle important dans l'amélioration des niveaux de protection. »331

La protection des frontières extérieures passe par le recours à des moyens technologiques sur le plan tant de la saisie que de l'échange de données concernant les passagers. Par ailleurs, l'introduction de données biométriques dans les documents d'identité et de voyage, augmentera l'efficacité de nos contrôles aux frontières et apportera une meilleure protection à nos citoyens. Le rôle de l'Agence européenne des frontières (FRONTEX) est important en la matière, en réalisant une analyse des risques dans le cadre des efforts visant à renforcer les contrôles et la surveillance aux frontières extérieures de l'UE.

D’une manière générale, dans le cadre de l’axe « Protection », il est question : d’améliorer la sécurité des passeports de l'UE par l'introduction d'éléments d'identification biométriques ; de mettre en place le système d'information sur les visas (VIS)332 et le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II)333; d’élaborer, par le biais de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (FRONTEX) une analyse efficace des risques en ce qui concerne les frontières

331

Conseil de l’UE, Stratégie de l’Union européenne visant à lutter contre le terrorisme, préc., paragr. 15, p. 10.

332

Décision 2004/512/CE du Conseil du 8 juin 2004 portant création du système d’information sur les visas (VIS) (JOUE L 213, 15 juin 2004, P. 5) ; Règlement (CE) n° 767/2008 du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008 concernant le système d’information sur les visas (VIS) et l’échange de données entre les États membres sur les visas de court séjour (règlement VIS) (JOUE L 218, 13 août 2008, p. 60).

333

Cf. Règlement (CE) nº 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JOUE L 381 du 28 décembre 2006, p. 4) ; Décision 2007/533/JAI du Conseil du 12 juin 2007 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JOUE L 205 du 7 juillet 2007, p. 63).

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extérieures de l'UE334 ; de mettre en œuvre les normes communes adoptées en matière de sécurité dans l'aviation civile, dans les ports et dans le domaine maritime ; de convenir d'un programme européen pour la protection des infrastructures critiques ; d’utiliser au mieux les activités de recherche menées au niveau de l'UE et de la Communauté.

3- La politique de poursuite des terroristes

Outre la prévention et la protection, la stratégie de l’UE de lutte contre le terrorisme s’intéresse à enquêter sur les terroristes et les poursuivre à l’intérieur des frontières européennes et au-delà, empêcher la planification, les déplacements et les communications, désorganiser les réseaux de soutien, empêcher l’accès aux financements et au matériel nécessaire à la réalisation des attentats et traduire les terroristes en justice. À ce propos, les analystes du Centre de situation conjoint, fondées sur les contributions des agences nationales de sécurité et de renseignement ainsi que d'Europol, devraient continuer à inspirer les décisions prises dans le cadre des différentes politiques de l'UE.

L’action de l’Union européenne pour la poursuite est basée sur le renforcement de la capacité nationale de chaque État, et à l’intensification des coopérations pratiques, et l’échange d’informations entre les polices et les autorités judiciaires des différents pays. Cette coopération est facilitée par les agences européennes de coopération policière et judiciaire (Europol, Eurojust). Il existe par ailleurs d’autres moyens de coopération judiciaire ou policière comme le mandat d’arrêt européen qui a été mis en place en 2001 afin de faciliter l’extradition des condamnés d’un pays membre à d’autres335

, ou encore, le système ECRIS, mis en place en 2012336, qui est une base de données contenant les casiers judiciaires qui permet de faciliter l’échange d’informations sur les condamnés entre les pays membres.

D’une manière générale, dans le cadre de l’axe « Protection », il est notamment question : de renforcer les capacités nationales de lutte contre le terrorisme ; d’utiliser au

334

FRONTEX a été établie par le règlement (UE) 2016/1624 du 14 septembre 2016 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes (JOUE L 251 du 16 septembre 2016, p. 1). Son siège se trouve à Varsovie (Pologne).

335

Cf. Décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, JOCE L 190 du 18 juillet 2002, p. 1 et s.

336

Cf. Décision-cadre 2009/315/JAI du Conseil du 26 février 2009 concernant l'organisation et le contenu des échanges d'informations extraites du casier judiciaire entre les États membres, JOUE L 93, 7 avril 2009, p. 23–32 ; Décision du Conseil 2009/316/JAI du 6 avril 2009 relative à la création du système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS), en application de l’article 11 de la décision- cadre 2009/315/JAI, JOUE L 93, 7 avril 2009, p. 33–48.

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mieux Europol et Eurojust pour faciliter la coopération policière et judiciaire et continuer à tenir compte des analyses de la menace effectuées par le Centre de situation conjoint ; faire progresser davantage la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires, notamment par l'adoption du mandat d'arrêt européen ; de s'attaquer au financement du terrorisme ; de priver les terroristes de leurs moyens d'appui et de communication et de la possibilité de se procurer des armes et des explosifs, qu'il s'agisse entre autres de composants d'explosifs artisanaux ou de matériaux CBRN337.

4- La politique de réaction face aux actes terroristes

Partant du postulat qu’il est impossible de ramener à zéro le risque d'attentats terroristes, la stratégie de l’UE est basée, entre autres, sur des mesures pour faire face aux attentats terroristes lorsqu’ils se produisent. Donc, il est question en l’espèce de se préparer, solidairement, pour atténuer les conséquences des attentats terroristes en améliorant les capacités de gérer les effets d’un attentat, la coordination de la réaction et les besoins des victimes.

Ici également, c’est a priori aux États membres qu’il appartient de réagir lors d’un attentat terroriste. Toutefois, « il reste nécessaire de veiller à ce que l'UE, agissant de manière collective et avec le soutien des institutions européennes, y compris la Commission, soit en mesure d'apporter une réponse solidaire à une situation d'urgence extrême susceptible de dépasser les moyens d'un État membre isolé et de constituer une menace grave pour l'Union dans son ensemble. »338

La solidarité, l'assistance et l'indemnisation des victimes du terrorisme et de leurs familles font partie intégrante de la réponse à apporter au terrorisme au niveau national et européen. Les États membres devraient veiller à ce que les victimes bénéficient de dédommagements appropriés.

La réaction face aux attentats terroristes doit être envisagée aussi sur le plan international, pour apporter s’il est nécessaire une assistance aux citoyens de l'UE dans les pays tiers, voire également une assistance technique aux pays tiers.

337

Chemical, Biological, Radiological and Nuclear.

338

Conseil de l’UE, Stratégie de l’Union européenne visant à lutter contre le terrorisme, préc., paragr. 34, p. 15.

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D’une manière générale, dans le cadre de l’axe réaction, il est question : de mettre au point, au niveau de l'UE, d’un dispositif de coordination en cas de crise ; de réviser le mécanisme de protection civile de l’UE ; de faire de l'analyse des risques un outil contribuant au renforcement des capacités nécessaires en cas d'attentat ; d’améliorer la coordination avec les organisations internationales pour ce qui est de la réponse à apporter en cas d'attentats terroristes ou d'autres catastrophes ; d’échanger les meilleures pratiques et mettre au point des approches en matière d'assistance aux victimes du terrorisme et à leurs familles339.

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