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Paragraphe 2. La définition du terrorisme dans les législations régionales et internationales

A. La définition du terrorisme dans les législations régionales

4- La définition du terrorisme dans le droit européen

Pour l’UE, le terrorisme est un ensemble d’« actes intentionnels, qui, par leur nature ou leur contexte, peuvent porter gravement atteinte à un pays ou à une organisation internationale lorsque l’auteur les commet dans le but d’intimider une population ou contraindre indûment des pouvoirs publics, ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque, ou déstabiliser ou détruire les structures

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fondamentales politiques, constitutionnelles, économiques ou sociales d’un pays ou d’une organisation internationale »63.

Le double critère de détermination distingue une infraction terroriste d’une infraction de droit commun par la motivation de l’auteur. Cet objectif recouvre l’intimidation d’une population, la tentative de contrainte sur une entité collective (État ou organisations internationales) ou les atteintes aux structures fondamentales d’un pays. Du point de vue de la visée « terroriste », la décision-cadre a rappelé la proposition de définition faite par la Commission en septembre 2001.

Cette proposition, à la dénomination trop générale, avait été critiquée car elle pouvait en théorie qualifier de « terrorisme » des infractions relevant des mouvements sociaux ou des violences urbaines64. En dépit d’une plus grande précision - notamment vis-à-vis de la définition juridique française -, l’incrimination terroriste ne détermine pas précisément ce que le Conseil entend par la déstabilisation aux structures fondamentales d’un État, et elle comporte des éléments de variabilité historique et politique, puisque l’acte est à appréhender en fonction de sa « nature » et de son « contexte ».

Le document tente également de préciser la définition d’un groupe terroriste entendue comme « une association structurée, de plus de deux personnes, établie dans le temps et agissant de façon concertée ». L’élément objectif de la définition est beaucoup plus simple à déterminer, puisqu’il se fonde sur des incriminations déjà réprimées dans les régimes pénaux des États membres.

Les actes visés sont le meurtre, les dommages corporels, l’enlèvement, la prise d’otages, l’intimidation, le chantage, le vol simple ou qualifié, l’usage d’armes ou d’explosifs

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Décision-cadre du Conseil n° 2002/475/JAI du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le terrorisme, JOCE L n°164 du 22 juin 2002, p. 3.

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« La définition de la Commission ajoute toute une série d’actes plus proches de la désobéissance civile ou de moyens de lutte syndicale ou citoyenne (occupation de lieux publics ou d’infrastructures, certains dommages à des propriétés qui ont une valeur symbolique, cyber-actions). C’est l’intention politique qui rassemble tous ces actes. Une action anticapitaliste qui se servirait de moyens à la limite de la légalité, voire illégaux, mais en aucune manière violents, serait ainsi considérée comme du terrorisme », John BROWN, « Les périlleuses tentatives pour définir le terrorisme », Le Monde Diplomatique, février 2002, p. 5. Dans son rapport sur la proposition de la Commission, le Parlement européen avait amendé cet article afin d’exclure de la définition du terrorisme les actes mineurs, cf. Parlement européen, Rapport : 1. sur la proposition de la Commission de

décision-cadre du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme (COM(2001) 521 – C5-0452/2001 – 2001/0217(CNS))/ 2. Sur la proposition de la Commission de décision-cadre du Conseil relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (COM(2001) 522 – C5-0453/2001 – 2001/0215(CNS)), Commission des libertés et des droits des citoyens, de la justice et des affaires intérieures, 14

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(c’est-à-dire leur fabrication, leur possession, leur acquisition, leur transport ou leur fourniture), la destruction d’installations gouvernementales, de moyens de transport publics, d’infrastructures, de lieux publics et de biens (publics ou privés) susceptibles de causer la perte de vies humaines ou des conséquences économiques sévères. L’usage d’une double incrimination s’inspire des régimes pénaux des États membres qui disposaient déjà d’une législation antiterroriste spécifique (France, Royaume-Uni, Grèce, Espagne, Italie, Portugal)65. L’approche de la Commission, reprise dans la décision-cadre, s’inspire de la législation britannique. Le « Terrorisme Act 2000 » du 20 juillet 2000 définit le terrorisme par « l’objectif d’intimidation d’un gouvernement ou d’une population afin de promouvoir une idéologie ». Comme il a été précisé dans ce texte, « In this Act “terrorism” means the use or threat of action where the use or threat is designed to influence the government or to intimidate the public or a section of the public, and the use or threat is made for the purpose of advancing a political, religious or ideological cause »66. En dépit d’un volontarisme politique et d’un effort de précision quant à la détermination de la nature terroriste d’un acte, la décision-cadre ne parvient pas à dépasser les défauts intrinsèques des définitions juridiques du terrorisme.

Quant à l’UE, la désignation relativement générale était volontaire, puisque la décision-cadre avait également pour objectif la constitution d’un régime pénal antiterroriste dans les États membres qui ne disposaient pas de législation spécifique. Plus la définition demeurait générale, plus le rapprochement des législations nationales des États membres était facilité. Selon un rapport de la Commission daté du 8 juin 200467, la majorité des États membres a mis en œuvre les mesures nécessaires, même si certaines parties de la décision- cadre n’ont été que partiellement transposées dans quelques droits nationaux. Cette approche générale de la définition empêcha toutefois son maniement aisé.

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« La plupart des actes terroristes sont fondamentalement des infractions de droit commun qui prennent un caractère terroriste en raison des motivations de leur auteur. Si cette motivation consiste à porter gravement atteinte aux bases et aux principes fondamentaux de l’État, à les détruire ou à menacer la population, il s’agit d’une infraction terroriste. C’est sur cette idée que sont fondées les législations des États membres en matière de terrorisme. Bien que leur libellé soit différent, elles sont pour l’essentiel équivalentes », Commission européenne, Propositions de décisions-cadres relatives à la lutte contre le terrorisme et au mandat d’arrêt européen, COM (2001) 521 finals du 19 septembre 2001, JOCE n° C 332 E, 27 novembre 2001, p. 300 et s.

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Part 1, Terrorism Act 2000, 20 juillet 2000.

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CCE, Rapport de la Commission fondé sur l'article 11 de la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002

relative à la lutte contre le terrorisme, COM(2004)409 finals, Bruxelles, le 08 juin 2004, SEC (2004) 688,

disponible à l’adresse : https://eur-lex.europa.eu/legal-

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La Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme, signée à Varsovie le 16 mai 2005, utilise dans son article premier la définition issue de la Convention du 9 décembre 1999 sur la répression du financement du terrorisme68. Le problème réside dans la détermination de l’infraction qui peut être parfois difficile à prouver. L’article 6 sur le recrutement du terrorisme incrimine le fait de solliciter une tierce personne à commettre un acte terroriste, ou seulement à l’inciter à se joindre à un groupe qui commettrait des actions terroristes69. L’article 7 sur l’entraînement du terrorisme incrimine le fait de donner des instructions servant à la perpétration d’un acte terroriste (fabrication d’explosifs, modes d’action violents)70. Enfin, l’article 5 qualifie de « terroriste » toute provocation publique

pouvant être considérée comme favorisant la perpétration d’actes terroristes71

. En outre, selon l’article 8, « pour qu’un acte constitue une infraction au sens des articles 5 à 7 de la présente Convention, il n’est pas nécessaire que l’infraction terroriste soit effectivement commise ». En d’autres termes, certains actes répréhensibles peuvent être qualifiés de « terroristes » sans qu’ils n’aient abouti à la moindre violence, alors même que c’est la visée violente de ses actions qui fonde leur incrimination terroriste.

Qu’en est-il de la définition retenue par les Nations Unis ?

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