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La documentation technique et l'interface de programmation

SECTION I LA DEFINITION DE L'INTEROPÉRABILITÉ

C. La documentation technique et l'interface de programmation

22. L'interopérabilité : un échange de données avec accès à la documentation technique. La notion d'interopérabilité est également intiment liée à deux éléments techniques, eux-mêmes interdépendants, à savoir la documentation technique et l'interface de programmation.

La documentation technique est un texte écrit, intégré dans le code source, qui accompagne un logiciel et qui indique comment l’utiliser. En effet, le code source est insuffisant à lui seul pour le développement d'un logiciel108. En d’autres termes, la documentation technique peut être définie comme l’ensemble des

informations écrites relatives au fonctionnement du logiciel. Il s'applique principalement à la description des interfaces de programmation.

23. L'interopérabilité : un échange de données par le biais d'interfaces. Le terme « interface » désigne la « jonction entre deux matériels ou logiciels leur permettant d’échanger des informations par l’adoption de règles communes, physiques ou logiques »109.

A l'instar de la présentation des formats de données, il existe différents types d'interface. Les éléments mis en relation sont en effet d'une grande diversité110. Cela va du logiciel à l'utilisateur, en passant par le matériel.

systématiquement ignorée, quels que soient les bénéfices potentiels. C’est un gâchis d’argent public que nous ne pouvons plus nous permettre ».

108 P. Roussel, « La maîtrise d’un langage de programmation s’acquiert par la pratique », Comm. Com. Electr., avril 2005, étude 15 : « Procédé de composition et de mise en forme de suite d’instructions de programmation à base de langages de programmation [...] ».

109 Arrêté portant enrichissement du vocabulaire informatique du 22 décembre 1981, JORF, 17 janv. 1982, p. 625, cf. Interface : « Jonction entre deux matériels ou logiciels leur permettant d’échanger des informations par l’adoption de règles communes, physiques ou logiques ».

110 H. Lilen, Dictionnaire informatique et numérique, 2e éd. FirstInteractive, 2014, cf. Interface, p. 112 : « élément logiciel ou matériel

Ainsi, l'« interface utilisateur » est celle entre l'humain et son ordinateur, tandis que l'« interface logicielle » désigne celle entre plusieurs composants logiciels.

Cette interface logicielle est notamment mise en œuvre par le biais d'une interface de programmation (Application Programming Interface ou API), un dispositif qui permet l’interaction des programmes les uns avec les autres. Les interfaces de programmation sont donc les moyens techniques permettant aux parties d’un programme d'assurer l’interconnexion et l’interaction « entre les éléments des logiciels et des matériels », « dans le but de permettre le plein fonctionnement de tous les éléments du logiciel et du matériel avec d’autres logiciels et matériels ainsi qu’avec les utilisateurs »111.

Interopérabilité et mise à disposition des interfaces vont donc de pair. De fait, « pour que l’interopérabilité puisse prospérer, il est nécessaire que ceux qui se disposent à mettre sur le marché un produit interopérable détiennent un certain nombre d’informations : les interfaces ( " place " réservée dans les programmes aux renseignements sur les interruptions, entrées-sorties, appel aux primitives d’un logiciel d’environnement, signaux vidéo pour les moniteurs, etc.) »112.

24. L'exclusion de la notion d'interface de la définition technique de l'interopérabilité. Cependant, cette notion d'« interface » est particulièrement complexe, ce qui explique que certains auteurs, à l'instar de Monsieur Duflot, l'élude volontairement de la définition qu'il propose de l'interopérabilité113. Ce dernier

définit en effet l'interopérabilité comme « l'aptitude, pour plusieurs systèmes hétérogènes, à pouvoir communiquer/échanger une information mécanique, électronique ou logique dans un environnement prédéterminé »114.

111 Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur.

112 Pour une analyse complète de la notion d’interface : X. Linant de Bellefonds, « Le droit de décompilation des logiciels : une aubaine pour les cloneurs ? », JCP G., 1998, I, 6.

113 F. Duflot, art. préc., note 34, p. 12 : « de manière totalement volontaire cette définition n'utilise pas la notion d'interface. En effet, il est aise de définir l'interopérabilité en précisant que ce n'est " que " le fait d'utiliser des interfaces fonctionnelles uniques nées d'une concertation préalable. Toutefois, il serait alors nécessaire de définir la notion d'interface, elle-même aussi vaste que celle d'interopérabilité ».

114 F. Duflot, art. préc., p. 12. ; On peut également citer la définition du Professeur Gautier, pour qui l'interopérabilité est une « interaction nécessaire entre des programmes informatiques de nature et à fonction différentes, mais complémentaires », cf. P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, 8e éd. PUF, coll. Droit fondamental, 2012, p. 355.

D'autres auteurs ou organismes de normalisation115 ont choisi, quant à eux, de construire leur définition de

l'interopérabilité sur le fondement de cette notion d'interface. A titre d'illustration, pour le Professeur Bruguière, l’interopérabilité consiste à « permettre aux interfaces logiques de programmes, comme par exemple des systèmes de lecture, de communiquer entre elles par le biais d’échanges d’informations et d’utilisation mutuelle des informations échangées »116.

Madame David-Warcholak reprend également la notion d'interface, mais aussi celle de standard ouvert, pour définir l’interopérabilité en ces termes : « l'interopérabilité serait la capacité de plusieurs éléments hétérogènes matériels ou immatériels, complémentaires ou substituables, à fonctionner ensemble grâce à l'adoption de caractéristiques techniques communes, impliquant le recours à une ou plusieurs normes ou standards techniques, généralement ouverts, afin d'aboutir à un résultat parfait. Cette interopérabilité peut impliquer le recours à des interfaces physiques ou logiques »117. A titre de précision sur cette approche, un

élément matériel peut être défini comme un élément physique, que l'on peut toucher. A contrario, un élément immatériel est un élément qui n'a pas de substance physique palpable ; l'exemple le plus parlant en est le logiciel.

25. La définition technique retenue de l'interopérabilité. Pour notre part, nous nous accordons avec Monsieur Duflot pour écarter la notion d'« interface », d'une complexité technique extrême et dont l'insertion n'aurait pour effet que de nuire à la clarté de la définition de l'interopérabilité. La définition retenue va donc être axée sur le critère déterminant de la réciprocité des échanges de données ainsi que sur l'usage d'un standard ouvert de communication, essentiel à la mise en œuvre de l’interopérabilité.

Aussi, il est proposé de définir techniquement l’interopérabilité comme la capacité d'éléments matériels ou immatériels à échanger des données et à utiliser mutuellement les données échangées, par le recours à des standards ouverts de communication.

Le cœur de cette définition, l'échange et l'utilisation mutuelle des données, va s'avérer constituer également le fondement de la définition juridique.

115 ISO/ IEC Directive 5th Edition, version 3.0, Annexe I JTC 1 Policy on Interoperability (Comité technique des technologies de l'information de l'Organisation Internationale de Normalisation [International Organization for Standardization- ISO], p. 147, <http://www.jtc1sc34.org/repository/0856rev.pdf> : « interoperability is understood to be the ability of two or more IT systems to exchange information at one or more standar dised interfaces and to make mutual use of the information that has been exchanged ».

116 J.-M. Bruguière, « Le droit à l’interopérabilité », Comm. Com. Electr., fév. 2007, étude 3. 117 N. David - Warcholak, op. cit., p. 49.

II. La définition juridique de l'interopérabilité

26. De la définition technique à la définition juridique. La définition technique étant posée, l'approche juridique de la notion d'interopérabilité peut maintenant être exposée. L'une n'est bien évidement pas exclusive de l'autre. Plus précisément, le juridique découle de la technique. Aussi, la définition juridique de l'interopérabilité comprend nécessairement un aspect technique, dès lors qu'elle intervient postérieurement à l'établissement de la notion par les ingénieurs, informaticiens, développeurs et autres professionnels des technologies de l'information et de la communication.

Une bonne approche juridique passe donc par la compréhension technique du sujet. Ainsi, pour légiférer sur le sujet de l’interopérabilité, il est indispensable de savoir si les obligations ou restrictions imposées sont réalistes d'un point de vue technique. De même, aucune proposition visant à garantir le droit à l’interopérabilité du consommateur ne pourra être avancée de manière constructive s'il est impossible de la mettre en œuvre en pratique, d'où la nécessité de la présentation technique.

27. Plan. Or, il faut reconnaître que le travail de compréhension de l'aspect technique de l’interopérabilité, en matière de technologies de l'information et de la communication, est des plus ardus, comme le démontre l'approche exposée précédemment. Cela explique la difficulté de l'établissement d'une définition juridique qui puisse faire l'unanimité et qui corresponde à la réalité technique. A ce jour, il n'existe qu'une définition européenne de l’interopérabilité (A) car ni la France, ni les autres États européens n'ont posé de définition juridique de l'interopérabilité (B).

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