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La carence de la loi DADVSI dans la définition juridique de l'interopérabilité Les textes français

SECTION I LA DEFINITION DE L'INTEROPÉRABILITÉ

B. Les carences des définitions juridiques nationales de l’interopérabilité

34. La carence de la loi DADVSI dans la définition juridique de l'interopérabilité Les textes français

138 Art. 31, I, 3°, Décret n° 2006-1279 du 19 octobre 2006 relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l’interopérabilité du système ferroviaire : « l'aptitude d'un système ferroviaire à permettre la circulation sûre et sans rupture de trains sur les lignes qu'il comporte en accomplissant les performances requises pour ces lignes ; cette aptitude repose sur l'ensemble des conditions réglementaires, techniques et opérationnelles qui doivent être remplies pour satisfaire aux exigences essentielles ».

139 Art. 4 Loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), JORF n° 0143 du 22 juin 2004,

p. 11168, texte 2 : « tout protocole de communication, d’interconnexion ou d’échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre ».

140 cf. infra, p. 244.

141 Art. L. 331-5, al. 4, CPI : « les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d'empêcher la mise en œuvre effective de l'interopérabilité, dans le respect du droit d'auteur (...) ».

semblent donc établir un cadre favorable à l'interopérabilité mais ne posent aucune définition, ce que l'on peut regretter143. Cette absence est en effet préjudiciable à leur bonne mise en œuvre. Et ce n'est pas les

occasions qui ont manquées au législateur français pour parer cette lacune. La principale occasion a été l'adoption de la loi DADVSI, transposant la directive 2001/29/CE, dite directive EUCD144. Ce texte porte

notamment sur le régime juridique des mesures techniques145, initialement instauré par les traités WCT146 et

WPPT147, élaborés sous l’égide de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI)148.

Malgré la forte mobilisation autour du projet de loi DADVSI, et des amendements149 en ce sens, le législateur

français n'a cependant pas posé de définition de l'interopérabilité, alors que la notion fait partie intégrante du régime juridique des mesures techniques de protection. D'après les Professeurs Vivant et Bruguière, cette absence de définition de l'interopérabilité dans la DADVSI n'est nullement un oubli du législateur car « les raisons avancées en commission mixte paritaire, pour justifier cette abstention, étaient assez simples et relativement convaincantes : une définition trop précise, a-t-on jugé, ferait courir au texte le danger d'être vite dépassé, avec le risque que cela implique quant à la portée de la disposition »150.

Ainsi, par application des dispositions de l'alinéa 4 de l'article L. 331-5 du Code de la propriété intellectuelle, « les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d'empêcher la mise en œuvre effective de l’interopérabilité, dans le respect du droit d'auteur ». L'interopérabilité apparaît donc comme une limite au recours aux mesures techniques de protection.

Elle était même, dans la première version du texte adoptée, une cause d'exonération pénale en cas de contournement des mesures techniques de protection à cette fin. La sanction de l'absence de définition ne s'est alors pas faite attendre.

143 A. Lucas, H.-J. Lucas et A. Lucas-Schloetter, Traité de la propriété littéraire et artistique, 4e

éd., Lexisnexis, 2012, p. 795 : (…) on ne pouvait que regretter le refus réitéré de définir l'interopérabilité. Que la loi laisse une autorité administrative indépendante tracer le chemin, c'est une chose. Au moins devait-elle la munir d'une boussole. Lorsque le législateur prétend faire œuvre de " pionnier ", il lui appartient de bien délimiter le périmètre du chantier nouveau ».

144 Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information dite directive EUCD (European Union Copyright Directive).

145 cf. infra, p. 141 et s.

146 WIPO Copyright Treaty – Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur, adopté à Genève le 20 décembre 1996.

147 WIPO Performances and Phonograms Treaty – Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes, adopté à Genève le 20 décembre 1996.

148 World Intellectual Property Organisation- WIPO.

149 Amendement 341 projet de la loi DADVSI : « On entend par compatibilité la capacité de deux systèmes à communiquer sans ambiguïté (…). On entend par interopérabilité la capacité à rendre compatibles deux systèmes quelconques. L'interopérabilité nécessite que les informations nécessaires à sa mise en œuvre soient disponibles sous la forme de standards ouverts ».

150 M. Vivant et J.-M. Bruguière, Droit d'auteur et droits voisins, Précis Dalloz, 2e éd., 2013, p. 794. Contra. A. Lucas, H.-J. Lucas et A.

Cette carence dans la définition de l'interopérabilité a en effet entraîné la censure du Conseil constitutionnel, pour atteinte au principe de légalité des délits et des peines, par une décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, des dispositions des articles 22 et 23 de la loi DADVSI, instaurant une exonération pénale pour le contournement des mesures techniques de protection à des fins d'interopérabilité : « Considérant que le législateur a fait de l'"interopérabilité" un élément qui conditionne le champ d'application de la loi pénale ; qu'il devait en conséquence définir en des termes clairs et précis le sens qu'il attribuait à cette notion dans ce contexte particulier ; qu'en s'abstenant de le faire il a porté atteinte au principe de légalité des délits et des peines ; Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de déclarer contraires à la Constitution les mots : " d'interopérabilité ou " figurant au huitième alinéa de l'article 22 ainsi qu'au huitième et au dernier alinéas de l'article 23, et les mots : " d'interopérabilité " figurant au dernier alinéa de l'article 22 »151.

La censure du Conseil constitutionnel n'a toutefois pas conduit à une évolution de la législation dans le sens de l'établissement d'une définition de l'interopérabilité.

35. La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, la dernière occasion manquée pour

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