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La définition technique de l’interopérabilité

SECTION I LA DEFINITION DE L'INTEROPÉRABILITÉ

I. La définition technique de l’interopérabilité

18. L'élément caractéristique de l'interopérabilité : « agir ensemble ». A raison de l'analyse de la définition générale de l'interopérabilité, il est possible de distinguer l'élément caractéristique de cette notion. Ainsi, c'est l'idée « d'agir ensemble », qui constitue l'élément déterminant permettant d'identifier l'interopérabilité, élément qu'il convient, aux fins de précision de la définition, d'articuler avec l'environnement du consommateur de technologies de l'information et de la communication.

Comme le souligne Madame David-Warcholak, on retrouve cette spécificité de l’interopérabilité dans la composition étymologique de la notion91. En effet, « (…) le terme se construit autour de deux mots latins :

inter, qui exprime notamment une relation de réciprocité, et opérabilité, issue du latin operari, qui signifie travailler. L'interopérabilité évoque donc l'idée de ce qui, étant en relation, peut travailler ensemble »92.

Plus précisément, l'interopérabilité renvoie, en raison de la conception de mise en relation qui émerge de l'analyse étymologique du mot, à l'idée d'une interaction, d'une réciprocité des échanges. Pour le Professeur Sirinelli, « pris à la lettre, le verbe " interopérer " renverrait à l'idée d'une possibilité, pour des personnes ou des éléments, de travailler ensemble »93. Cette notion de réciprocité, désigne donc, de manière évidente, ce

qui est réciproque est caractérisé par un échange équivalent entre deux personnes. On peut en déduire que l'interopérabilité n'est pas la seule réception d'informations et qu'elle induit un partage entre les éléments mis en relation.

Cette nécessité d'un échange se retrouve dans la définition spécifique de l'interopérabilité en matière informatique. Dans un dictionnaire « grand public », on la trouve ainsi présentée, comme la « capacité de matériels94, de logiciels95 ou de protocoles96 différents à fonctionner ensemble et à partager des

informations »97.

91 F. Duflot, « L’interopérabilité dans tous ses états »,<www.interoperabilite.net>, p. 7 : « étymologiquement, " interopérer " signifie " travailler ensemble ". Placé au sein d'un contexte technique, cela signifie qu'il existe un fonctionnement concomitant de deux éléments qui interopérent, auquel s'ajoute une communication technique entre ces deux éléments. D'une manière très générale, l'interopérabilité serait donc la capacité de plusieurs éléments à effectuer une forme de communication entre eux ». 92 N. David - Warcholak, op. cit., p. 10.

93 P. Sirinelli, « Numérique et interopérabilité : une nouvelle donne ? », in « Interopérabilité aspects juridiques, économiques et techniques », RLDI, supplément au n° 23, janv. 2007.

94 cf. infra, p. 54. 95 cf. infra, p. 55. 96 cf. supra, p. 18.

97 I. Jeuge-Maynart, C. Girac-Marinier et C. Nimmo (dir.), Le Grand Larousse illustré, nouv. éd. mise à jour, Larousse 2015, cf. Interopérabilité, p. 628 ; Dictionary of Computer and Internet Terms, 6e éd., Montréal, Barron's Business Guides, 1998 in M.-C.

19. Plan. Cette définition a le mérite de « vulgariser » l'aspect technique de l’interopérabilité mais manque quelque peu de rigueur, au sens où les précisions fonctionnelles impliquées, à savoir les notions de « donnée » (A), de « format » (B), de « documentation technique ou d'« interface de programmation » (C) ne sont pas mentionnées.

A. La donnée

20. L'interopérabilité : un échange de données. La définition précédemment exposée fait référence à la notion d' « informations ». Ce terme générique doit être expliqué pour l'appréhension de la notion d'interopérabilité en matière de technologies de l'information et de la communication. Ainsi, une information est, plus exactement, une donnée, une représentation sous forme codée d'un élément dans le but de permettre son traitement informatique.

L'interopérabilité trouve alors à s'appliquer à l'échange d'une multitude de données (textes, images, films, etc.) par le biais de réseaux informatiques98. Ces données peuvent être catégorisées. Ainsi, il convient de

rappeler que les données « produites et fournies sous forme numérique »99 sont qualifiées de « contenus

numériques » par les dispositions de l'article 2, 11) de la directive 2011/83/UE.

Une diversité des informations, des données, c'est donc ce que permet la réciprocité des échanges caractérisant l'interopérabilité mais une condition est posée pour que cette diversité ne soit pas un obstacle à sa mise en œuvre : le « format » adopté doit nécessairement intégrer cette exigence d'interopérabilité.

B. Le format

21. L'interopérabilité : un échange de données dans un format ouvert. Les données sont échangées dans ce qui est dénommé un « format ». Dans une approche simplifiée de la notion, le format peut se définir comme le mode de stockage des données informatiques, représentées sous forme de nombres binaires100.

[des] programmes de travailler ensemble. Deux ordinateurs sont interopérables s'ils peuvent être utilisés ensemble efficacement, pour travailler sur les mêmes dossiers ou partager des données à travers un réseau électronique ».

98 cf. infra, p. 54.

99 Art. 2, 11), directive 2011/83/UE.

100 H. Lilen, Dictionnaire informatique et numérique, 2e éd. FirstInteractive, 2014, cf. Bit, p. 27 : « unité d'information binaire

Il existe différents formats de données. Ainsi, si les spécifications du format sont sous le seul contrôle d'une entité déterminée et ne peuvent être librement utilisées, le format est dit fermé101. En revanche, si le mode de

stockage est rendu public et qu’il est librement utilisable, ce format est dit ouvert102.

Un format peut être un standard de communication, ce qui signifie qu'il a fait l'objet d'une normalisation par un organisme tel que l'Organisation Internationale de Normalisation (International Organisation for Standardization- ISO)103. Ce standard peut être ouvert. Il est alors défini comme « tout protocole de

communication, d’interconnexion ou d’échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre »104. L'interopérabilité

est permise s'il y a recours à un standard ouvert de communication105.

En effet, nul besoin d’un logiciel spécifique ou d’autorisation particulière pour pouvoir utiliser ce type de format, ce qui supprime tout obstacle à la compréhension mutuelle de deux logiciels et est donc favorable à l'interopérabilité. L’utilisation d’un standard ouvert et interopérable de communication serait également facteur de sécurité des données et systèmes, de par la connaissance de l'ensemble des informations s'y rapportant106. L’usage d’un standard ouvert permettrait enfin d’assurer la pérennité des données, par la

possibilité de développer de nouveaux moyens pour pallier l’obsolescence ou la disparition des outils existants107.

101 Le format .doc pour les textes ou .wma pour les fichiers audio sont des exemples de formats fermés. 102 A titre d'illustration, le format .odt est un format ouvert pour les textes.

103 Les organisations officielles mondiales de normalisation sont : ISO (Organisation internationale de normalisation), CEI (Commission électrotechnique internationale), UIT (Union internationale des télécommunications), UN/CEFACT (United Nations Centre for Trade Facilitation and Electronic Business -Centre de facilitation du commerce et des transactions électroniques), ETSI (European Telecommunications Standards Institute- Institut européen des normes de télécommunication)

104 Art. 4, Loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), JORF n° 0143 du 22 juin 2004,

p. 11168, texte 2.

105 IDABC (Interoperable Delivery of European eGovernment Services to public Administrations, Businesses and Citizens ), <http:// ec.europa.eu/idabc/en/document/3473/5585.html> : « le standard est adopté et sera maintenu par une organisation sans but lucratif et ses évolutions se font sur la base d’un processus de décision ouvert accessible à toutes les parties intéressées (décision par consensus ou majorité) ; le standard a été publié et le document de spécification est disponible, soit gratuitement soit au coût nominal. Chacun a le droit de le copier, de le distribuer et de l’utiliser, soit gratuitement, soit au coût nominal ; La propriété intellectuelle, les brevets éventuels- sur la totalité ou une partie du standard est mise à disposition irrévocablement et sans redevance ; il n’y a pas de restriction à la réutilisation du standard ».

106 Direction centrale de la sécurité des systèmes d'information - DCSSI [aujourd’hui Agence Nationale pour la Sécurité des Systèmes d’Information - ANSSI] Rapport public, « Orientation des travaux de recherche et de développement en matière de sécurité des systèmes d’information », no 757 /SGDN/DCSSI/SDC du 10/04/2008, édition 2008 : « De façon générale, tous ces protocoles sont

des structurations de l’information numérique, et leur bonne interprétation est cruciale en matière de sécurité informatique, tout autant que d’interopérabilité. La réalisation d’implantations de référence validées formellement est un facteur de sécurité et de confiance à développer ».

107 N. Kroes, vice-présidente de la Commission européenne à la stratégie numérique, discours sur les standards ouverts et l’interopérabilité, Open Forum Europe 2010, 10 juin 2010, <http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-10-300_en.htm? locale=en> : « de nombreuses autorités se sont retrouvées enfermées intentionnellement dans des technologies propriétaires pendant des décennies. Passé un certain point, ce choix de départ est tellement intégré que toute alternative risque d’être

Le choix du format de données influence donc la mise en œuvre de l'interopérabilité : plus on pourra accéder aux spécifications techniques d'un format déterminé, plus l’interopérabilité pourra être garantie. De même, la portabilité des données, c'est-à-dire la capacité à transférer les données d'un système informatique à un autre, est facilitée par l'adoption d'un format ouvert et donc par la mise en œuvre de l'interopérabilité. La mise à disposition de la documentation technique et des informations relatives à l'interface de programmation est également facteur d'interopérabilité.

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