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La définition juridique européenne de l’interopérabilité

SECTION I LA DEFINITION DE L'INTEROPÉRABILITÉ

A. La définition juridique européenne de l’interopérabilité

28. Les multiples références des textes européens à la notion d'interopérabilité. Divers textes européens mentionnent la notion d'interopérabilité, principalement dans le secteur ferroviaire118. L'interopérabilité y est

par exemple définie comme « l'aptitude du système ferroviaire transeuropéen à grande vitesse à permettre la

118 Pour exemple, peuvent être citées, la directive 96/48/CE du Conseil du 23 juillet 1996 relative à l’interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen à grande vitesse, la directive 2001/16/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2001 relative à l’interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen conventionnel, la directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant la sécurité des chemins de fer communautaires et modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires, ainsi que la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (directive sur la sécurité ferroviaire), la directive 2004/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 modifiant la directive 96/48/CE du Conseil relative à l’interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen à grande vitesse et la directive 2001/16/CEu Parlement européen et du Conseil relative à l’interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen conventionnel.

circulation sûre et sans rupture de trains à grande vitesse en accomplissant les performances spécifiées. Cette aptitude repose sur l'ensemble des conditions réglementaires, techniques et opérationnelles qui doivent être remplies pour satisfaire aux exigences essentielles »119.

29. La définition de l'interopérabilité par la directive 91/250/CEE. Très tôt, cette notion fut également appréhendée par les textes relatifs aux programmes d'ordinateur. Ainsi, la directive 91/250/CEE du 14 mai 1991120, intègre l’interopérabilité comme une notion clairement identifiée. Selon ce texte, « un programme

d’ordinateur est appelé à communiquer et à opérer avec d’autres éléments d’un système informatique et avec des utilisateurs ; qu'à cet effet, un lien logique et, le cas échéant, physique d’interconnexion et d’interaction est nécessaire dans le but de permettre le plein fonctionnement de tous les éléments du logiciel et du matériel avec d’autres logiciels et matériels ainsi qu’avec les utilisateurs ; […] les parties du programme qui assurent cette interconnexion et cette interaction entre les éléments des logiciels et des matériels sont communément appelées " interfaces " […] cette interconnexion et interaction fonctionnelle sont communément appelées " interopérabilité " ; que cette interopérabilité peut être définie comme la capacité d’échanger des informations et d’utiliser mutuellement les informations échangées »121.

Dans cette approche européenne, il est donc fait expressément référence à la notion d'« interface », entre les seuls matériels et programmes d'ordinateur. En outre, il convient de noter que « le terme programme d'ordinateur vise les programmes sous quelle que forme que ce soit, y compris ceux qui sont incorporés au matériel ; que ce terme comprend également les travaux préparatoires de conception aboutissant au développement d'un programme, à condition qu'ils soient de nature à permettre la réalisation d'un programme d'ordinateur à un stade ultérieur »122.

Toutefois, l'apport majeur de la directive 91/250/CEE se situe au considérant 12. En effet, la définition juridique européenne de l'interopérabilité y est clairement posée. Il s'agit bien de « la capacité d’échanger des informations et d’utiliser mutuellement les informations échangées»123. En d’autres termes, « l’interopérabilité

119 Art. 2, b), directive 96/48/CE.

Art 2, b), directive 2001/16/CE : « l'aptitude du système ferroviaire transeuropéen conventionnel à permettre la circulation sûre et sans rupture de trains en accomplissant les performances requises pour ces lignes. Cette aptitude repose sur l'ensemble des conditions réglementaires, techniques et opérationnelles qui doivent être remplies pour satisfaire aux exigences essentielles ». 120 Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, JOCE

n° L 122 du 17 mai 1991, p. 0042-0046. 121 Cons. 10 à 12, directive 91/250/CEE, préc. 122 Cons. 7, directive 91/250/CEE, préc.

123 Cons. 10 à 12, directive 91/250/CEE, préc. ; cons. 10 Directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, codifiant la directive 91/250/CEE, JOUE n° L 111 du 5 mai 2009, p. 0016-0022.

est définie avant tout comme une faculté de communication, d’échange, pour ainsi dire de compréhension entre des programmes informatiques et plus largement entre des technologies différentes »124.

Cette définition est semblable à celle posée au paragraphe 1201 du Digital Millenium Copyright Act (DMCA) aux Etats-Unis125 : « la capacité de programmes d'ordinateur d'échanger des informations, et d'utiliser

mutuellement les informations échangées »126.

30. La comparaison de la définition de l'interopérabilité de la directive 91/250/CEE et de la définition technique. Cette définition juridique est-elle en adéquation avec l'approche technique de la notion d'interopérabilité ? Il semble que oui car, dans cette courte phrase, nous retrouvons le critère déterminant de la réciprocité des échanges d'« informations ».

Comme le souligne Madame David-Warcholak, il faut reconnaître à cette définition plusieurs mérites : « tout d'abord, celui d'exister, mais aussi celui de la simplicité, de l'efficacité, et de l'unicité »127. En effet, poser une

définition juridique de l'interopérabilité est essentielle ; cette notion d'interopérabilité est mentionnée à cinq reprises à l'article 6 du texte posant les conditions d'une exception importante à l'autorisation du titulaire de droits sur un programme d'ordinateur. Ainsi, la licéité de la mise en œuvre de ce qui va être appelée l'exception de « décompilation »128 va dépendre d'une bonne compréhension de cette définition de

l'interopérabilité.

En tout état de cause, la directive du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur a respecté la logique de la réflexion juridique, à savoir de placer la définition des termes utilisés avant l'exposition d'un nouveau régime juridique. Toutefois, l'erreur a été commise de proposer la définition de l'interopérabilité dans un considérant de la directive, sans l'inclure explicitement dans un article. Le risque de la mention de la définition dans un considérant et non dans un article de la directive est une absence de

124 H. Bitan, « La loi DADVSI ou la nécessité de clarifier les notions d’interopérabilité et de mesure technique », RLDI 2007, no 29.

125 Il s'agit d'un ajout au Copyright Act de 1976. L'article 1201 porte sur l'interdiction du contournement des mesures techniques de protection.

126 § 1201 (f), (4), Digital Millennium Copyright Act, Pub. L. No. 105-304, 105th Cong., 2d Sess. § 103(a), 112 Stat. 2860, 2867 (Oct. 28, 1998) : « (…) " interoperability " means the ability of computer programs to exchange information, and of such programs mutually to use the information wchich has been exchanged ».

Il est à noter qu'une définition similaire est également posée à la section 118(a) de l'Uniform Computer Information Transaction Act (UCITA) : « (…) interoperability means the ability of computer programs to exchange information and of such programs mutually to use the information that has been exchanged ».

127 N. David - Warcholak, op. cit., p. 32. 128 cf. infra p. 128 et s.

transposition par les États membres.

De ce fait, se pose la question de savoir si les transpositions dans les différents États membres, y compris la France, ont comblé cette lacune des articles de la directive, notamment par la reprise de la définition juridique européenne de l'interopérabilité.

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