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PARTIE 2 : L’ACCROCHAGE SCOLAIRE DES ENFANTS CONFIES A UNE FAMILLE

1. Une scolarité jalonnée de quelques obstacles

2.2. Le niveau Bac en poche et après ?

2.2.3. Les jeunes qui ont poursuivi vers des études supérieures

ont quitté le monde scolaire depuis plusieurs années. Nous avons souhaité leur consacrer une partie de ce travail de recherche car elles représentent la concrétisation des projets envisagés par les plus jeunes participants de notre étude.

Sur ces sept personnes, nous recensons six hommes et une seule femme. Les parcours scolaires menant aux diplômes de l’enseignement supérieur sont à l’image de leur parcours de vie, c’est-à-dire, extrêmement variés. Parmi elles, seulement deux ont effectué une classe de Terminale Générale option économique et social (J1, J16) et une seule sur les deux a obtenu son baccalauréat. Deux ont eu un Baccalauréat professionnel (J2, J12), un a obtenu un Baccalauréat Technologique (J3) et deux ont obtenu une équivalence au Baccalauréat via le DAEU (J24, J26).

Parmi ces sept personnes ayant obtenu un diplôme équivalent au baccalauréat et ayant choisi de poursuivre leurs études, deux ont obtenu un diplôme de niveau Master (Ingénieur et DESS), une un diplôme de travailleur social (Bac +3), deux un BTS et deux ont effectué des formations courtes professionnalisantes (Bac).

Au cours de nos entretiens, nous avons constaté que mis à part les deux plus jeunes hommes de ce groupe (J3 et J12) et le plus âgé (J1), la plupart (quatre personnes) n’excluent pas, l’éventualité de reprendre des études dans un futur plus ou moins proche.

J24 : « Après je pense pas que je ferai toute ma carrière dans ce métier-là ! Chercheur : Vous avez d’autres… Vous pensez à autre chose déjà ?

J24 : Ouais, ouais, ouais !

Chercheur : Poursuite d’études ou… ?

J24 : Poursuite d’études pas encore mais je pense que je reprendrai ! Ça peut être bien ! J’aimerais bien peut-être faire un Master en Psycho ou quelque chose comme ça parce que je pense que c’est complémentaire. Euh… après…, j’aimerais bien… un jour je serai directrice d’une structure ! Je sais pas laquelle encore mais un jour je serai directrice ! ». (Laetitia, vingt-neuf ans, confiée de douze à dix-huit ans à la même famille d’accueil).

Chercheur : Oui…

J2 : Moi je suis allé jusqu’au BTS, j’ai eu la chance d’aller jusqu’au BTS, mais il faut continuer encore ! Si on peut continuer, il faut, faut le faire !

Chercheur : Et c’est quelque chose que tu envisages ?

J2 : Euh…. Aujourd’hui, reprendre les études, je sais que c’est dur mais… euh… j’pense que, je pense que je vais pas avoir le choix hein ! Si…

Chercheur : … tu veux évoluer…

J2 : … évoluer en terme salarial, euh… il faut continuer hein ! Chercheur : Donc c’est quelque chose que tu envisages…

J2 : Prochainement ouais ! Prochainement ! Mais bon… être déconnecté des cours pendant plusieurs années, je pense qu’aujourd’hui, je me rends compte que, ben voilà, en postulant dans d’autres boîtes, on te propose ça donc euh… si tu veux plus et ben voilà, il faut continuer ! ». (Fouad, trente-et-un ans, confié à sept ans à une famille d’accueil chez qui il est resté jusqu’à vingt-et-un ans).

Le souhait de reprendre des études ou le regret de ne pas avoir suffisamment poursuivi étant plus jeunes trouve son origine dans deux causes principales que sont la revalorisation salariale (J2) et/ou l’exemple à donner à ses propres enfants (J16). Ainsi le motif épistémique qui semble apparemment le plus courant pour expliquer la motivation des adultes à reprendre des études (Nils, 2005 ; Henry & Basile, 1994 ;Vertongen et al., 2009) n’est pas un motif mis en avant par les personnes que nous avons rencontrées. Le choix de ces dernières s’appuie davantage sur des motifs extrinsèques de type économiques ou identitaires et vocationnels (Carré, 2001 ; Vertongen et al., 2009).

J16 : « Au fur et à mesure où t’évolues, tu prends conscience que t’as raté certaines étapes donc notamment le BAC et après tu te dis que ben, ta vie elle évolue, tu te maries, t’as des enfants, t’as un exemple à montrer, t’as… t’es devenu quelqu’un d’autre, tu te dois de réussir ! Euh, si c’est plus pour toi, c’est pour eux ! Donc et, donc voilà, il fallait décrocher quelque chose,… Là, j’ai fait 20 ans d’armée, je vais cumuler avec une deuxième carrière. Le diplôme, le titre IV, même s’il va pas me servir au quotidien ou que dans la reconnaissance d’un employeur, ça vaut peut-être plus rien, euh, c’est au moins un minimum de culture générale, de…, enfin, une ligne sur le CV supplémentaire qui me permet d’ouvrir peut-être des portes pour une deuxième carrière donc voilà, je pense que c’est une continuité de ta manière de concevoir ta vie et puis te dire que t’as envie de t’en sortir tout simplement donc voilà ». (Stéphane, quarante-deux ans, confié de dix-huit mois à vingt-et-un ans à la même famille d’accueil).

Parmi les personnes les plus âgées de notre étude, la nécessité de poursuivre des études au- delà du baccalauréat est une notion partagée et envisagée comme un facteur d’évolution professionnelle et personnelle, voire pour certains comme une façon « d’effacer quelque peu les étiquettes scolaires (échecs, décrochage…) qu’ils ont accumulées au cours de leur scolarité » (Zaouani-Denoux, 2014, p.429).

Conclusion :

En conclusion de ce chapitre, nous pouvons dire que les jeunes ayant été confiés à une famille d’accueil, et qui ont atteint un niveau baccalauréat, qu’il soit général, technologique ou professionnel, ont dans leur grande majorité intégré la norme sociale et la nécessité professionnelle d’obtenir un diplôme de niveau IV. Ce diplôme est alors vécu pour certains (trois jeunes) comme l’aboutissement de multiples efforts fournis au cours de leur scolarité et ils considèrent que ce titre leur donnera de meilleures chances pour s’insérer facilement et rapidement dans le monde professionnel. Pour les autres, c’est-à-dire, pour la grande majorité de notre échantillon (vingt-sept jeunes), le diplôme de niveau IV représenté par le baccalauréat ou un titre équivalent (DAEU), permet d’accéder aux études supérieures et se donner ainsi toutes les chances de parvenir à exaucer leurs rêves en termes de réussite scolaire, professionnelle mais aussi personnelle.

Conclusion du Chapitre 1 :

Au regard des témoignages recueillis dans le cadre de cette étude, nous pouvons dire que les jeunes ayant été confiés à une famille d’accueil et qui ont atteint un niveau baccalauréat, ont dû fournir des efforts en termes de persévérance scolaire, que ce soit d’un point de vue du travail fourni mais aussi, concernant le combat contre la stigmatisation dont ils peuvent être victimes dans le cadre scolaire par les étiquettes qui peuvent leur être attribuées au regard de leurs conditions de vie. Il semble alors que pour ceux qui parviennent à passer le cap de l’orientation en lycée, à l’issue de la classe de troisième, l’obtention du baccalauréat, qu’il soit général, technologique ou professionnel, soit désormais à portée de mains. Ainsi, à l’instar de la population générale, le risque de décrochage scolaire pour ces enfants est le résultat d’un processus engagé dès l’école maternelle et qui trouve son apogée au collège. Dès lors que le cap du collège est franchi, ce risque semble diminuer, même s’il reste présent en classe de seconde. Le risque de décrocher en cas de difficultés semble alors être contenu dans la mesure où, en cas de besoin, une réorientation vers une filière professionnelle est proposée. Cette dernière, bien que vécue par la plupart des jeunes comme une dégradation, permet aux jeunes de se raccrocher à l’idée d’obtenir un baccalauréat qui donne accès à l’enseignement supérieur ce qui reste l’objectif premier des personnes que nous avons rencontrées. Cependant, même si le baccalauréat professionnel permet l’accès aux études supérieures, il est probable que les chances de réussites universitaires soient moindres dans la mesure où l’objectif premier de ce

Chapitre 2 : Identification des facteurs de protection

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