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Le camp comme moyen principal pour atteindre les objectifs du mouvement

Chapitre I er L’assimilation, un axe politique et social central dans la Guadeloupe coloniale (premier quart du XXe S.)

CHAPITRE 4 Les Scouts de France de Guadeloupe

4 Objectifs et activités

4.7 Le camp comme moyen principal pour atteindre les objectifs du mouvement

Support de toute l'éducation scoute, il est pratiqué de façon régulière. « On

campait beaucoup, beaucoup. Un grand camp aux vacances, et de petits camps hors vacances. » (O. Lacroix). Le camp constitue l'aboutissement de la vie

scoute. Il est la concrétisation de tout le travail effectué dans l'année. Un enfant ne peut pas participer au camp s'il n'a pas suivi la formation scoute sur toute l'année. Son organisation est le support à diverses activités préalables (élaboration de l'itinéraire ; projet d'activités ; préparation du matériel ; budget…). Dans les débuts du mouvement, les camps se déroulent dans les campagnes environnant les bourgs de rattachement des troupes. Les moyens de communication étant réduits, les déplacements se font à pied, et les marches d'approche sont parfois longues et pénibles, en forêt ou dans les champs de canne à sucre. Les scouts de Pointe-à-Pitre vont ainsi à pied, camper à Gosier ou dans les Grands-Fonds des Abymes. Les Éclaireurs de France laïques ont eux aussi leur coin de campement à proximité des bourgs, à Boissard ou au Lamentin. Si l’occupation des lieux à proximité des communes d'implantation constitue un dénominateur commun au scoutisme local, catholique comme laïque, les lieux de campement sont distincts, et les troupes se rencontrent rarement.

Lors des camps de plusieurs jours, le froissartage (travail du bois) permet l'aménagement du camp, des lieux de vie aux lieux de culte. Les scouts guadeloupéens apprennent ainsi à connaître les bois utilisables pour confectionner des tables, des vaisseliers, des toilettes… Mais aussi les autels où l'aumônier célébrera la messe. Le badge de menuisier passé par les scouts locaux atteste cette connaissance des matériaux et de la capacité à les travailler. L'apprentissage des nœuds (et le badge qui en sanctionne la maîtrise) accompagne ces techniques du bois. « Il y avait les techniques de tous les

différents nœuds ; des nœuds compliqués pour que les bois tiennent. » (O.

Lacroix). Le journal Clartés se fait l'écho de ces activités de froissartage. Le nº 32 publie un article sur un camp de cheftaines3 en Martinique ; il retrace les activités de travail du bois qui se déroulent en commun. Cet aménagement du camp est destiné à améliorer le quotidien et à permettre la vie en pleine nature ;

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A. Baubérot, N. Duval, op. cit. P. 69.

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15 septembre 1945.

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Il s'agit là de cheftaines de louveteaux. Les SDF ne sont pas mixtes, mais l'encadrement des petits est assuré par des jeunes filles.

c'est un travail collectif qui demande l'entraide de chaque scout. Seront construits des sièges, des tables (« des bambous posés sur des troncs de

cocotiers sont des sièges bien confortables ; des planches supportées par des tréteaux forment une table un peu haute. »). Le nº 41, parlant d'un camp à Petit- Bourg, nous apporte des précisions : « Vendredi : aménagement du camp. Un

tronc d'arbre jeté sur la rivière sert de pont, puis nous établissons un barrage pour avoir de l'eau. Un petit escalier est creusé pour en rendre l'accès plus facile. » Notons enfin que dans certains cas les scouts pouvaient surélever leurs

tentes sur des pilotis à deux ou trois mètres de hauteur afin d'éviter les inondations.

La participation de tous aux différentes tâches de la vie quotidienne trouve sa mise en application la plus pertinente lors du camp. Corvée de bois, cuisine, nettoyage des sanitaires, vaisselle… se font à tour de rôle. Chacun participe aux activités matérielles indispensables au bon déroulement de la vie communautaire. Le camp facilite cet apprentissage de la prise de responsabilités au sein du collectif. Publié par le siège national parisien, l'ouvrage de Suzanne Bergeaud, commissaire assistante de Champagne, « Camp de meute »2, fixe les normes d'organisation des camps de louveteaux. La journée type d'un camp est ainsi découpée :

6 h 30 Réveil des cheftaines.

7 heures Réveil des louveteaux au coup de corne du chef.

7 h 10 Séance de gymnastique (gymnastique naturelle comprenant des courses, des sauts, des marches diverses, des luttes, etc. Intercalés de mouvements respiratoires).

7 h 50 Lever des couleurs.

8 heures Messe, petit-déjeuner, toilette.

9 h 30 Inspection des tentes et « grand hurlement » (cri de la troupe près du mât).

9 h 45 Services (bois, eau…) 10 h 30 Jeux 11 h 15 Chant 11 h 55 Méditation. 12 heures Angélus. Déjeuner et vaisselle. 13 h 15 Sieste. 14 h 15 Promenade et jeux. 16 heures Goûter.

16 h 15 Travail manuel avec des matériaux trouvés dans la nature. 17 heures Préparation des étoiles et des badges.

18 heures Jeux.

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6 octobre 1945.

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18 h 30 Temps libre. Réunion des sizeniers. 18 h 45 Salut aux couleurs.

19 heures Dîner. 20 h 15 Jeux.

20 h 25 Feu de camp avec chants et scènes mimées. 21 h 15 Coucher.

21 h 30 Extinction des feux au coup de corne du chef.

L'éducation du physique occupe une place importante dès le réveil, par la gymnastique durant trois quarts d'heure, et par les promenades et jeux qui sont répartis de façon régulière durant la journée. Elle constitue ainsi une part importante de l'éducation du jeune scout, tout comme la formation disciplinaire assurée par les rituels (réveil et coucher au coup de corne, levers des couleurs, cris de troupe, inspections…). Travaux manuels et préparation des brevets occupent une large part de l'après-midi. L'éducation spirituelle occupe aussi une place non négligeable : messe, méditation et angélus jalonnent la journée. La journée type se termine par la veillée, lieu de rassemblement autour du feu pour les chants et les mimes. Mais ce qui frappe dans cette organisation quotidienne, c'est l'occupation ininterrompue des jeunes ; le temps libre ne dure que quinze minutes. Tout est prévu pour que l'oisiveté soit inexistante. Journée cadrée, organisée et ritualisée, telle est l'organisation type lors des camps, que l'on retrouve aussi durant les sorties. Le jeune scout est soumis à un emploi du temps contraignant qui, comme pour le jeune Sonis, l'éduque à une vie astreignante qui canalise son activité et son esprit et le laisse perpétuellement en prise avec les exigences des règles du mouvement. Ainsi, il ne peut qu'être imprégné des valeurs qu'on cherche à lui inculquer sans avoir la moindre possibilité de réflexion.

Les camps sont l'occasion de journées à thèmes telles que les « journées découvertes » où il s'agissait de découvrir un site naturel ou touristique de la région à partir de l'orientation avec carte et boussole. Ou les « journées dans les arbres » où la journée se passait à vivre sur une branche d'arbre. Il s'agit alors de s'aménager un coin de vie et de prévoir la nourriture et l'eau. À partir de ces « perchoirs », les scouts pratiquent des activités : recueil de feuilles pour des herbiers, exercices de morse sifflé et de sémaphore…

Les camps donnent lieu aussi à des concours dans lesquels le travail des patrouilles, travail collectif, est valorisé. Ils sont destinés à honorer le meilleur résultat. Ainsi, les scouts guadeloupéens s'affrontent-ils par patrouilles pour des concours de cuisine, de froissartage ou d'uniforme. « Il y avait aussi un système

d'émulation avec des prix, des récompenses pour les patrouilles ; il y avait des concours de cuisine, de travail du bois, etc. » (O. Lacroix). Concours de tenues,

de présentation de la troupe debout devant les tentes le matin ; nettoyage et rangement des tentes… donnent aussi lieu à des inspections et à des classements. Ces concours peuvent déboucher sur le classement de la meilleure

patrouille du camp. Enfin, le travail individuel est valorisé par les brevets dont le brevet de campeur couronne la vie du camp. Il sanctionne des capacités d'organisation, de froissartage, de cuisine…

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