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Le personnage de BOSCO vit toujours dans la campagne, il aime la nature et les animaux. Les principales descriptions se focalisent autour de ce cadre spatial et de tout ce qui s’y rapporte. Le premier roman qui s’illustre par cette conception est Hyacinthe. Le personnage vit seul dans une demeure à la campagne, ainsi qu’il le décrit : « La nuit après

ce feu, il n’y avait plus rien dans la campagne. J’avais l’impression que je voyais la dernière âme »279. Ou encore : « A travers la campagne, je cherchais ce secret depuis des

mois »280. Autour de cette maison, rien n’apparaît à l’horizon, mise à part une autre

maison qui semble vide puisqu’elle « Ne donnait aucun signe de vie. Pas même une

fumée. Rien ne décelait la présence de ses hôtes »281. Aux alentours de cette maison, régnait une atmosphère paysanne :

« Chaque vendredi soir, à la tombée de la nuit, un troupeau traversait les guérets entre La Commanderie et La Geneste282. Deux chiens le flanquaient. Le berger marchait en avant. Il était vieux. Je ne sais ce que pouvaient brouter ses bêtes sur toute l’étendue couverte de neige. Leur piétinement doux s’éloignait vers l’Ouest et pendant un moment on respirait dans l’air l’odeur de la laine »283.

Nous constatons que le narrateur emploie la lexie « Campagne » à maintes reprises, et en l’absence de ce terme, le personnage évoque tout ce qui s’y rapporte tel que l’illustre la confidence suivante : « J’attendais, livré aux puissances naturelles du lieu, mais avec

une sourde appréhension, cette dissolution et cet oubli de moi qui me livrait les eaux et la terre »284. En outre, le protagoniste se balade pour découvrir cet endroit, se retrouvant au milieu d’un désert et il ajoute : « J’avais laissé derrière moi le Dieu de la terre et j’étais

279Henri BOSCO, Hyacinthe, Op.cit., p. 10. 280Ibid., p. 19.

281

Ibid., p. 10.

282La Commanderie et La Geneste sont deux noms donnés à deux maisons, celle du personnage principal et

celle de l’unique voisin.

283Henri BOSCO, Hyacinthe, Op.cit., p. 15. 284

maintenant sous la main d’un autre dieu »285. Ainsi que l’évoque cette séquence, son admiration pour la campagne et la terre, le poussent à lui attribuer une entité divine.

La nature dans cette œuvre est omniprésente et les descriptions de celle-ci sont légion, ainsi qu’en témoigne le narrateur : « J’entendis tomber la pluie dans les feuilles.

C’était une pluie lente, large et encore hésitante »286. Une autre séquence illustre cette

constante : « Je devinais que déjà le peuple des oiseaux, si sensible aux moindres

messages, flairait à la pointe des vents l’odeur lointaine des premières pluies »287.

Dans Un Rameau de la nuit, une conception analogue de la nature prime dans la description suivante : « Ces beaux creux plantés de jardins, touché ces mamelons, longé

ces bois de pins, franchi en grondant la rivière aux oseraies pleines d’oiseaux… »288. La peinture exubérante de la nature conforte également le sentiment d’attachement à la campagne quand le narrateur annonce :

« J’avais moins des pensées qu’une seule hantise : celle, malgré l’hiver, de cette campagne, que j’aime, et dont l’attrait deviné par Drot m’échauffait le cœur, au souvenir des jours d’été. Alors je l’avais parcourue, de colline en colline, à pied, de ce pas vif qui a l’air d’ébranler la route et de faire jaillir des vergers entiers dans les champs, surtout le matin, quand le corps est frais »289.

Ces quelques lignes nourrissent l’attachement et le goût du personnage pour la campagne, notamment à travers la présence du champ lexical de l’attendrissement : « Que j’aime », « M’échauffait le cœur » ou encore : « De ce pas vif ». Ajoutons à ces indices textuels les propos suivants : « Au fond, voilà pourquoi j’ai voyagé à pied : par simple

amour du vent et de la terre »290. Encore une fois, le narrateur rend compte de son

affection pour la nature et emploie même le terme « Amour » qu’il attribue à la terre et le

285Henri BOSCO, Hyacinthe, Op.cit., p. 34. 286

Ibid., p. 70.

287Ibid., p. 37.

288Henri BOSCO, Un Rameau de la nuit, Op.cit., p. 194. 289Ibid., p. 166.

290

vent. Dans cet attachement, le personnage préfère le voyage à pied dans l’intention d’admirer à son aise tout ce que la nature peut lui apporter comme agrément. Le vent, qui généralement fait fuir les gens et les confine dans leurs maisons, est paradoxalement une source de bien-être, de contemplation ainsi que d’enivrement face à cet amas fait de sifflement et de courant qui le fascine.

Dans l’incipit de L’Enfant et la rivière, non sans nostalgie, le narrateur revient sur sa résidence d’enfance : « Quand j’étais enfant, nous habitions à la campagne. La maison

qui nous abritait n’était qu’une petite métairie isolée au milieu des champs »291. Là encore, le personnage principal réside dans une demeure en pleine campagne. A l’instar des romans précédents, le champ lexical de la nature est prégnant. En effet, « La pluie vint

dans le vent, en biais, et fouetta la maison qui se mit à gémir du haut en bas, sous la fureur de l’averse »292. Ainsi que sa passion pour la nature quand il déclare :

« Je partis à travers les champs. Ah ! Le cœur me battait ! Le printemps rayonnait dans toute sa splendeur. Et quand je poussais le portail donnant sur la prairie, mille parfums d’herbes, d’arbres, d’écorce fraîche me sautèrent au visage. Je courus sans me retourner jusqu’à un boqueteau. Des abeilles y dansaient. Tout l’air, où flottaient les pollens, vibrait du frémissement de leurs ailes. Plus loin un verger d’amandiers n’était qu’une neige de fleurs […]. Les petits chemins m’attiraient sournoisement. "Viens ! Que t’importent quelques pas de plus ? […]". Ces appels me faisaient perdre la tête »293.

La campagne, la nature et le chant des oiseaux emplissent le quotidien du personnage. C’est également cette atmosphère paisible, empreinte d’isolement, qui «Favorise la rêverie »294. Nous pouvons citer à ce propos Les Rêveries du promeneur

solitaire de Jean-Jacques ROUSSEAU295qui reflète parfaitement l’état d’âme, le quotidien

291Henri BOSCO, L’Enfant et la rivière, Op.cit., p. 13. 292Ibid., p. 30.

293

Ibid., pp. 21-22.

294Henri BOSCO, Malicroix, Op.cit., p. 42.

295Ce livre raconte le plaisir de la solitude du personnage, d’un homme complètement retiré de la société.

L’auteur dans ce livre nous donne une vision philosophique du bonheur dans une solitude face à la nature et les bienfaits qu’elle lui procure.

ainsi que l’environnement dans lequel évolue le personnage bosquien. Dans ce sillage, il convient d’aborder l’activité onirique qui jalonne l’œuvre.