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La vente en ligne dans et depuis les autres États membres

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 52-55)

SECTION II – LA VENTE EN LIGNE DE MÉDICAMENTS EN FRANCE

C. La vente en ligne dans et depuis les autres États membres

1. LES DIFFÉRENTES RÉGLEMENTATIONS NATIONALES

183. Conformément à la directive du 8 juin 2011 précitée, la plupart des États membres de l’UE ont autorisé la vente de médicaments par internet. Toutefois, la réglementation de cette activité diffère fortement d’un État membre à un autre.

122 CE, 26 mars 2018, n° 407289.

123 Décret n° 2018-672 du 30 juillet 2018 relatif aux demandes d'autorisation de création, transfert et regroupement et aux conditions minimales d'installation des officines de pharmacie.

Figure 12 : Encadrement de la vente en ligne de médicaments en Europe

Sources : [informations issues de l’avis n°13-A-12 précité, du site https://uk.practicallaw.thomsonreuters.com, et du site http://www.iracm.com/2014/07/etat-des-lieux-de-la-vente-de-medicaments-en-ligne-en-europe/ ]

184. Ainsi, le Royaume-Uni et les Pays-Bas autorisent la vente en ligne de tous les médicaments, qu’ils soient ou non soumis à prescription médicale obligatoire et permettent la création d’acteurs spécialisés de la vente en ligne (ou « pure players »). L’Allemagne, le Portugal, la Suède et le Danemark permettent la vente en ligne de tous les médicaments, mais imposent la détention d’une officine physique. La Grèce interdit la vente en ligne des médicaments soumis à prescription médicale obligatoire, mais autorise les acteurs spécialisés de la vente en ligne. Enfin, la Belgique, l’Espagne, l’Italie et l’Irlande limitent la vente en ligne aux médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire et imposent la détention d’une pharmacie physique.

2. LE DROIT APPLICABLE AUX OPÉRATEURS DE VENTE EN LIGNE DE MÉDICAMENTS ISSUS DAUTRES ÉTATS MEMBRES OPÉRANT SUR LE MARCHÉ FRANÇAIS

185. Selon l'article 85 quarter du code communautaire précité, le droit applicable aux opérateurs étrangers souhaitant commercialiser des médicaments dans un autre État membre est celui du pays d’établissement : « Sans préjudice des législations nationales qui interdisent l’offre à la vente à distance au public de médicaments soumis à prescription, au moyen de services de la société de l'information (…) la personne physique ou morale offrant des médicaments est autorisée ou habilitée à délivrer des médicaments au public, également à distance,

conformément à la législation nationale de l’État membre dans lequel cette personne est établie ».

186. Toutefois, il est précisé dans le même article que « les États membres peuvent imposer des conditions, justifiées par la protection de la santé publique, pour la délivrance au détail, sur leur territoire, de médicaments offerts à la vente à distance au public au moyen de services de la société de l'information ». À cet égard, le préambule de la directive 2011/62/UE précitée précise qu’« à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice, les États membres devraient pouvoir imposer des conditions justifiées par la protection de la santé publique lors de la délivrance au détail de médicaments offerts à la vente à distance (…).

Ces conditions ne devraient pas entraver indûment le fonctionnement du marché intérieur ».

187. Cette disposition a notamment été transposée à l’article L. 5125-40 CSP, qui énonce qu’« une personne physique ou morale légalement habilitée à vendre des médicaments au public dans l'État membre de l'UE dans laquelle elle est installée ne peut vendre, dans le cadre d'une activité de commerce électronique de médicaments à destination d'une personne établie en France, que des médicaments mentionnés à l'article L. 5125-34 et bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché en France en application de l'article L. 5121-8 ou de l'un des enregistrements mentionnés aux articles L. 5121-13 et L. 5121-14-1 ».

188. Cependant, seule la disposition relative au périmètre des médicaments qui peuvent être vendus en ligne sur le territoire français a fait l’objet d’une transposition en droit français (article L. 5125-40 du CSP). Ainsi, aucune disposition de droit interne ne détermine actuellement les conditions applicables aux opérateurs établis dans d’autres États membres pour la vente en ligne de médicaments sur le territoire français. Il n’est pas non plus précisé si les règles définies dans les deux arrêtés précités du 28 novembre 2016 sont applicables à ces opérateurs.

189. En 2017, le tribunal de commerce de Nanterre s’est prononcé sur le droit applicable à la société de droit néerlandais Shop-Apotheke active sur le marché français, qui avait notamment distribué des prospectus publicitaires pour son site de vente en ligne de médicaments dans des colis d’autres acteurs de la vente à distance124. Il a fait application de l’article 85 quater précité et estimé que l'illégalité des publicités du site concerné ne pouvait pas être retenue sur le fondement de l’article R. 5125-26 CSP dès lors que celui-ci n’apparaissait pas proportionné à l’objectif poursuivi car il empêchait un site internet établi dans un autre État membre de se faire connaitre en France. En revanche, le tribunal a estimé que le caractère « incontestablement massif de cette publicité » était contraire à l’article R. 4235-22 CSP (interdisant la sollicitation de clientèle et les procédés et moyens contraires à la dignité de la profession) et à l’article R. 4235-64 (interdisant d’inciter les patients à une consommation abusive de médicaments). La question de l’applicabilité des règles définies dans les arrêtés du 28 novembre 2016 a été écartée car les arrêtés étaient postérieurs aux faits reprochés en l’espèce.

190. Saisie de ce dossier, la cour d’appel de Paris a, dans un arrêt du 28 septembre 2018125, transmis à la Cour de justice de l’Union européenne (ci-après, « CJUE ») des questions préjudicielles concernant la compatibilité des dispositions nationales encadrant la publicité applicables aux cyberpharmacies avec le droit de l’Union.

124 TC Nanterre, 11 juillet 2017, RG 2016038193.

125 CA Paris, 28 septembre 2018, n° RG 17/17803.

191. Dans l’attente de l’arrêt de la CJUE, il ressort de l’ensemble de ces éléments que les opérateurs établis dans d’autres États membres ne peuvent vendre en France que des médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire (conformément à ce que prévoit l’article L. 5125-34 du CSP). Ils ne sont en revanche tenus de respecter les conditions imposées par la réglementation française que dans la mesure où celles-ci n’entravent pas indûment le fonctionnement du marché intérieur et sont strictement nécessaires à la protection de la santé publique, justifiées et proportionnées à cet objectif126.

II. Constatations

A. L’ÉVOLUTION DU MARCHÉ DE LA VENTE EN LIGNE DE MÉDICAMENTS EN FRANCE

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 52-55)

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