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La publicité des groupements

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 102-105)

SECTION III – LA PUBLICITÉ ÉMISE PAR LES OFFICINES

E. La publicité des groupements

433. La réglementation interdit actuellement aux groupements de pharmaciens de faire de la publicité en faveur des officines qui le constituent, ou auprès du public pour un groupement ou un réseau constitué entre officines.

434. Dans son avis n° 17-A-10267, l’Autorité avait relevé que 70 % des officines françaises faisaient désormais partie d’au moins un groupement. En outre, elle avait noté que si les groupements avaient traditionnellement pour mission de négocier le prix d’achat des médicaments et des autres produits pour le compte de leurs adhérents, ils avaient élargi leur activité et offraient des prestations de services très diversifiées à leurs adhérents, comme le merchandising, les services informatiques, la mise en place de nouveaux services en application de la loi HPST précitée, le développement d’enseignes de pharmacie, etc.

L’Autorité avait cependant souligné que : « le développement des enseignes de pharmacie reste toutefois anecdotique, en raison de l’encadrement strict de la publicité et de la promotion des officines ainsi que des règles déontologiques de la profession »268.

435. L’Autorité a estimé que les restrictions empêchant la communication des groupements n’étaient pas justifiées à plusieurs égards. Ainsi, elle a relevé que le choix d’adhérer à un groupement relevait d’une stratégie concurrentielle et que les pharmaciens qui opéraient ce choix ne devaient pas être privés des bénéfices qui en découlaient : « dans la mesure où le choix de se grouper opéré par chaque officine est libre, dépendant de sa stratégie concurrentielle, la restriction du recours aux bénéfices en découlant ne semble pas justifiée pour les opérateurs ayant fait le choix de se grouper dans le respect des règles de la concurrence ». En outre, elle a indiqué que cette interdiction, qui avait pour objet d’empêcher tout contournement de la réglementation de la publicité en faveur des officines, n’aurait plus de justification si cette réglementation était assouplie et que les groupements pourraient alors être soumis au même régime que celui applicable aux pharmaciens269. 436. Dans le cadre de la consultation publique, 40 % des pharmaciens contributeurs ont estimé

qu’un groupement de pharmaciens ou ses adhérents devrait pouvoir se faire connaître auprès du public en communiquant sur les services proposés au sein de ces officines. Une telle

267 Avis n° 17-A-10 du 16 juin 2017 relatif à un projet de décret portant code de déontologie des pharmaciens et modifiant le code de la santé publique, point 39

268 Ibid., point 42.

269 Ibid., points 140 et 141.

possibilité permettrait, selon eux, de favoriser le développement de nouveaux services, de leur apporter une meilleure visibilité et de mutualiser les coûts (voir annexe II).

437. Face à une forte pression concurrentielle dans le secteur de la parapharmacie, certains groupements développent une stratégie commerciale autour d’une enseigne commune.

L’enseigne devient ainsi un facteur de différenciation pour les officines qui sont membres du groupement. Ce phénomène concerne une part croissante d’officines depuis une dizaine d’années : 5 % d’officines adhéraient à une enseigne en 2005, contre 20 % au début des années 2010 et environ 30 % actuellement270. Cette adhésion permet aux pharmaciens d’améliorer leur visibilité grâce au concept commercial et à la politique de communication portés par l’enseigne, la commercialisation de produits et médicaments MDD et l’offre de services d’accompagnement au patient.

438. Cependant, cet objectif de différenciation et de valorisation de services proposés est, comme indiqué précédemment, fortement freiné par l’interdiction faite aux groupements de faire de la publicité auprès du public et en faveur des officines qui en sont membres. Pour permettre aux pharmaciens de se différencier, d’attirer et de fidéliser une clientèle, les groupements souhaitent pouvoir s’appuyer sur des campagnes de communication multi-supports (numérique, presse, papier, etc.) au moyen desquelles ils pourraient communiquer sur les mêmes sujets que leurs officines adhérentes en apposant leur logo.

439. Plusieurs groupements participant à la consultation publique ont indiqué souhaiter pouvoir promouvoir ces nouveaux services pour attirer une plus large clientèle et trouver un nouveau relais de croissance271. Ils mettent en avant les bénéfices attendus d’un tel assouplissement, notamment par la promotion des services d’accompagnement des patients, le rôle accru du pharmacien dans la prévention de certaines maladies, et in fine, une meilleure information des patients sur l’existence de traitements ou de services fournis par les pharmacies272.

270 Article de Les Échos Études, « les enseignes de pharmacies redessinent le circuit officinal », 28 février 2018 (https://www.lesechos-etudes.fr/news/2018/02/28/les-enseignes-de-pharmacies-redessinent-le-circuit-officinal/ ). Cote 1 845.

271 Article de La Tribune, « Les pharmaciens réclament le droit de faire de la publicité », 21 octobre 2016 : https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/distribution/les-pharmaciens-reclament-le-droit-de-faire-de-la-publicite-607145.html. Cotes 1 851 à 1 853.

272 Ainsi, selon une étude économique commanditée par ces groupements, mais dont les conclusions ne sont pas suffisamment étayées pour permettre d’en vérifier la solidité, ouvrir la possibilité aux groupements de communiquer pourrait générer jusqu’à 1,3 milliard d’euros par an d’économies pour le système de santé grâce à l’amélioration de la prévention du diabète, de l’hypertension et de l’observance des traitements. Selon cette même étude, plusieurs pays de l’UE encadrent, sans l’interdire, la communication par les groupements. Ainsi, l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la Finlande, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovénie et la Suède la limitent aux médicaments non remboursés, et celle-ci doit rester exacte, sincère et éviter toute sollicitation directe des clients. Enfin, selon cette étude, « l’expérience internationale démontre que la communication, coûteuse, doit être élargie aux groupements de pharmacies car elle nécessite une mutualisation des dépenses afin de toucher une grande population à un coût abordable permettant une meilleure politique de prévention et de services comme dans les autres pays européens ». Étude d’Asteres et Rinzen Conseil, « le rôle de la communication et de la publicité des officines de pharmacie et de leur groupement », 2016 (http://static.latribune.fr/609957/etude-groupement-officines.pdf). Cotes 1 858 et 1 859.

Recommandations relatives au régime de la publicité émise par les officines

440. Les médicaments étant des produits particuliers, toute publicité les concernant nécessite un encadrement adapté, de nature à garantir la préservation de la santé publique. C’est pourquoi la publicité pour les médicaments à prescription médicale obligatoire et remboursables est interdite par l’article L. 5122-6 du CSP et celle pour les médicaments à prescription médicale facultative est encadrée par l’article L. 5122-2 du CSP, celle-ci ne devant ni être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique. En outre, l’article R. 4235-64 du CSP et le code de déontologie des pharmaciens prévoient que

« le pharmacien ne doit pas, par quelque procédé ou moyen que ce soit, inciter ses patients à une consommation abusive de médicaments ».

441. Outre ces dispositions, la réglementation actuelle prévoit un encadrement étroit de la publicité émise par les officines, que cette publicité soit faite en faveur de l’officine elle-même ou de tout produit, médicament ou autre, commercialisé par celle-ci. Or, l’interprétation actuelle de ces dispositions revient, en pratique, à empêcher les pharmaciens de recourir à toute forme de publicité, y compris lorsque celle-ci ne porte pas sur des médicaments et ne présente donc, a priori, pas de risque pour la santé publique.

442. L’Autorité avait déjà rappelé dans son avis n° 13-A-24 précité qu’une meilleure information du consommateur participe à l’animation de la concurrence, en ce qu’elle permet aux pharmaciens les plus efficaces de faire connaître aux consommateurs l’avantage concurrentiel dont ils peuvent les faire bénéficier.

443. Une clarification du régime actuel encadrant la publicité, levant les contraintes injustifiées, apparaît donc souhaitable.

444. Ainsi, il conviendrait, en premier lieu, de supprimer les notions floues applicables à tout type de publicité. Les règles concernant la publicité pour les médicaments devraient être clairement distinguées de celles encadrant la publicité pour les produits autres que le médicament, ainsi que de celles en faveur de l’officine, afin que ces dernières puissent être assouplies. Ces modifications devraient permettre une application sans ambigüité du régime de la publicité, tout en permettant aux officines de communiquer davantage sur les services et leurs offres de produits. L’assouplissement des règles de publicité en faveur de l’officine permettra ainsi de favoriser l’animation concurrentielle, sans présenter de risque pour la santé publique. Enfin, la transparence sur les prix et sur leur mode de fixation devrait être renforcée pour améliorer l’information des consommateurs et favoriser la concurrence par les prix.

A. Supprimer les notions floues de « sollicitation de clientèle » et de « dignité de la profession »

445. La réglementation interdit aux pharmacies de « solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession » (article R. 4235-22 du CSP). L’Autorité a

relevé à deux reprises, dans ses avis n° 13-A-24 et n° 17-A-10 précités, que les notions de

« sollicitation de clientèle » et de « dignité de la profession », trop floues, étaient susceptibles de permettre de nombreuses interprétations qui pourraient être considérées comme étant de nature à limiter la concurrence de manière excessive. L’imprécision de ces notions crée une insécurité susceptible d’inhiber les initiatives et donc d’empêcher la concurrence de jouer pleinement. Enfin, la formulation très large de cette disposition permet de l’appliquer à toute forme de publicité émise par les officines et restreint donc à la fois leur liberté de communiquer sur leur offre de produits, leur prix, mais aussi sur l’ officine elle-même et les services qui y sont offerts.

446. Il conviendrait donc de supprimer cette disposition, ainsi que ces notions trop floues et restrictives, afin de donner aux pharmaciens la liberté de promouvoir et de valoriser leur activité.

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 102-105)

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