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Le monopole des pharmaciens dans les autres États membres

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 187-191)

SECTION VI – LE MONOPOLE DES PHARMACIENS

C. Le monopole des pharmaciens dans les autres États membres

851. Une majorité d’États membres (16 pays sur 28) a ouvert le monopole pharmaceutique et/ou officinal. Seuls la Belgique, le Luxembourg et l’Espagne ont une législation aussi restrictive que la France (monopole intégral sur tous les médicaments).

852. L’assouplissement du monopole opéré dans le reste de l’UE est néanmoins intervenu à des degrés divers :

a. des États membres n’ont effectivement permis la vente libre de certains médicaments que sous la condition qu’ils soient délivrés par des pharmaciens diplômés. Il s’agit dans ce cas d’une ouverture du seul monopole officinal, le monopole pharmaceutique restant intact. Cela a notamment été le cas en Italie ou au Portugal.

b. d’autres États membres ont autorisé la vente libre de certains médicaments et leur délivrance par des non-pharmaciens. Il s’agit alors d’une atténuation du monopole officinal et du monopole pharmaceutique. Tel est le cas au Royaume-Uni, aux Pays-Bas ou en Irlande.

c. l’Allemagne a, quant à elle, adopté une position intermédiaire, en autorisant la vente de certains médicaments en dehors des officines par du personnel qualifié à cet effet, mais pas nécessairement pharmacien.

500 Ces références sont inscrites sur une liste par l’ANSM sur demande du laboratoire et après instruction de la demande par l’autorité de santé (articles R. 5121-202 et suivants du CSP).

501 Ibid.

853. Le régime juridique applicable à la vente au détail du médicament dans les autres États membres est présenté dans la carte suivante, à l’aide d’un code couleur.

Figure 19 : Encadrement de la vente au détail du médicament en Europe

* Pays pour lesquels nous disposons de l'information selon laquelle le médicament peut être vendu par un professionnel non pharmacien.

Sources : Carte construite à partir d’une étude de l’UFC-Que Choisir de mars 2018502, d’informations communiquées par l’Ordre national des pharmaciens au cours de l’instruction503, d’une étude européenne présentée en 2014 à l’OCDE 504, de la base de données Thomson Reuters Practical Law505 et d’autres données collectées par les services d’instruction506.

854. Il ressort de cette carte que, dans les États membres, l’ouverture du monopole officinal est généralement partielle et ne porte jamais sur les médicaments à prescription médicale obligatoire, exception faite du Danemark. La vente dans les GMS, drugstores ou magasins spécialisés est souvent limitée à une liste prédéfinie de médicaments à prescription médicale facultative. Il s’agit alors de médicaments dits d’automédication, lesquels peuvent correspondre notamment à ceux proposés en libre accès dans les officines de pharmacie en France.

502 Étude UFC-Que Choisir, Le conseil et la concurrence en souffrance sur l’automédication, mars 2018, p. 6.

503 Cote 13 913.

504 La libéralisation du secteur pharmaceutique, Contribution au Forum mondial sur la concurrence de l’OCDE, Sabine Vogler, février 2014, graphique 1.

505 https://uk.practicallaw.thomsonreuters.com/.

506 Cotes 2 243, 2 259, 2 269, 2 300, 2 308, 2 313 et 2 319.

855. À l’exception de l’Espagne, tous les États membres les plus peuplés ont au moins partiellement libéralisé la vente au détail du médicament.

1. ALLEMAGNE

856. Les dispositions applicables se trouvent dans l’« Arzneimittelgesetz » (loi sur les médicaments), publié le 12 décembre 2005.

857. Certains médicaments d’automédication peuvent être vendus dans la grande distribution ou dans des magasins spécialisés (drogueries ou magasins de produits diététiques) mais la présence dans l’entreprise d’un expert « possédant l’expertise nécessaire » est obligatoire.

Il s’agit d’une personne ayant une expérience et des connaissances portant sur le conditionnement, l’emballage, la mise sur le marché et le stockage des médicaments ainsi que sur les règles applicables. La dispensation de ces médicaments ne passe donc pas forcément par un pharmacien.

858. L’ouverture du monopole pharmaceutique et officinal est partielle et les médicaments concernés sont en principe ceux qui n’ont pas d’effet thérapeutique ou dans le soulagement de la douleur ou des symptômes. À ces médicaments sans bénéfice médical peuvent s’ajouter des médicaments qui en possèdent un mais ne présentant pas de risque particulier s’ils sont librement délivrés. Ils figurent alors sur une liste édictée par le gouvernement.

2. ROYAUME-UNI

859. Au Royaume-Uni, le « Human Medicines Regulations » de 2012 énonce 3 catégories de médicaments en vue de leur dispensation :

a. les « prescription only medicines », autrement dit les médicaments à prescription médicale obligatoire, qui ne peuvent être délivrés que dans les pharmacies ou par certains professionnels de santé habilités (certains médecins par exemple) ;

b. les « P medicines » ou médicaments à prescription médicale facultative, qui ne peuvent être délivrés que dans les pharmacies ;

c. les « GSL medicines » ou médicaments inscrits sur la « General Sales List », qui ne présentent pas de danger particulier pour la santé et peuvent être délivrés dans des supermarchés, drugstores ou autres commerces spécialisés (magasins alimentaires, stations-service par exemple). Ces médicaments comprennent notamment certains antalgiques (paracétamol, aspirine), des antihistaminiques ou des anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène par exemple) à des doses faibles. Leur délivrance ne requiert pas la présence d’un pharmacien diplômé.

860. L’ouverture du monopole pharmaceutique et officinal est donc partielle et ne concerne pas tous les médicaments à prescription médicale facultative ou de médication officinale mais seulement ceux considérés comme les moins dangereux et pouvant par conséquent faire l’objet d’un usage sans avis médical.

3. ITALIE

861. En Italie, le décret-loi n° 223/2006 du 4 juillet 2006, ratifié par la loi n° 248/2006 du 4 août 2006, a permis la vente au détail des médicaments d’automédication (à prescription médicale facultative) dans les grandes surfaces et les parapharmacies, sous certaines conditions, de façon à préserver les objectifs de santé publique : délivrance sous le contrôle d’un pharmacien diplômé, inscription de ce pharmacien à l’Ordre, espace dédié prévu à cet effet et caisse séparée.

862. Si l’Italie a conservé le monopole pharmaceutique (monopole de dispensation), elle a choisi de procéder à une ouverture partielle du monopole officinal pour les médicaments ne présentant pas de risque notable pour les patients. Il s’agit là d’un modèle mixte situé entre le modèle français et le modèle britannique.

4. ESPAGNE

863. En Espagne, le décret-loi royal n° 1/2015 du 24 juillet 2015 réserve aux seules officines de pharmacie légalement implantées la dispensation des médicaments, qu’ils soient à prescription médicale obligatoire ou à prescription médicale facultative. Les conditions de délivrance des médicaments y sont donc aussi strictes qu’en France, y compris pour les médicaments d’automédication.

864. Le monopole des pharmaciens est ainsi intégral et porte à la fois sur la dispensation et le lieu de vente des médicaments (officine).

II. Constatations

865. Dans son avis du 19 décembre 2013507, l’Autorité de la concurrence avait recommandé

« l’ouverture de la vente d’un certain nombre de produits vendus aujourd’hui exclusivement en officine » qui, sans remettre en cause le monopole de dispensation des pharmaciens,

« aurait l’avantage d’offrir aux consommateurs un libre choix du circuit de distribution et d’orienter à la baisse le niveau des prix sur ces produits »508. D’autres rapports et études ont également appelé à une telle ouverture (A).

866. Les nouveaux éléments recueillis au cours de la présente enquête confirment qu’une révision encadrée du périmètre du monopole officinal pourrait être souhaitable, en ce qu’elle engendrerait des effets bénéfiques pour les patients (B).

867. De nombreux acteurs du secteur (pharmaciens, ministère des solidarités et de la santé, etc.) ont toutefois émis de fortes réticences à l’idée que ce monopole fasse l’objet d’un assouplissement. L’Autorité reste sensible à ces réticences, lorsqu’elles sont émises dans le but d’assurer une protection stricte de la santé publique. C’est pourquoi l’Autorité rappelle

507 Avis de l’Autorité de la concurrence n° 13-A-24 relatif au fonctionnement de la concurrence dans le secteur de la distribution du médicament à usage humain en ville.

508 Ibid., p. 143 à 146.

la nécessité de maintenir un encadrement étroit de la vente au détail de médicaments (C).

Pour autant, elle observe que des assouplissements encadrés des règles applicables aux conditions de vente de certains médicaments apparaissent opportuns (D).

868. S’il est peu probable que ces assouplissements soient de nature à affecter le maillage officinal, des mesures destinées à sa préservation peuvent toutefois être envisagées par les pouvoirs publics (E).

A. LES APPELS PRÉCÉDENTS À UNE OUVERTURE DU MONOPOLE OFFICINAL EN

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 187-191)

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