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Les règles nationales encadrant la publicité par les pharmaciens

Dans le document Avis 19-A-08 du 04 avril 2019 (Page 83-88)

SECTION III – LA PUBLICITÉ ÉMISE PAR LES OFFICINES

B. Les règles nationales encadrant la publicité par les pharmaciens

334. Les règles nationales encadrant la publicité émise par les pharmaciens sont en partie codifiées dans le code de déontologie des pharmaciens (article R. 4235-30, articles R. 4235-57 à R. 4235-59 du CSP).

335. Le code de déontologie s’impose à tous les pharmaciens inscrits au tableau de l’Ordre National des Pharmaciens (articles L. 4234-1 et L. 4235-1 du CSP). Les infractions à ces règles sont passibles d’une sanction disciplinaire : avertissement, blâme, interdiction d’exercice temporaire ou définitive. Ces sanctions sont indépendantes des poursuites civiles ou pénales qui pourraient, dans certains cas, s’y ajouter. Si le non-respect des dispositions encadrant la publicité en faveur des officines prévues dans le code de déontologie des pharmaciens peut être puni d’une sanction disciplinaire, il est également soumis par l’article L. 5424-2 du CSP à sanction financière.

336. Le dispositif inscrit dans le code de déontologie est complété par les articles R. 5125-26 à R. 5125-29 du CSP, qui encadrent les conditions dans lesquelles la publicité est autorisée et interdisent les primes et moyens de fidélisation de la clientèle, ainsi que toute publicité par un groupement en faveur des officines qui le constituent et toute publicité pour un groupement.

337. Les points qui suivent dressent un état des dispositions applicables à la publicité en faveur des produits vendus dans l’officine (1), à celle en faveur de l’officine (2), à l’interdiction de sollicitation de clientèle (3), à l’interdiction d’octroyer des primes ou tout moyen de fidélisation de la clientèle (4) et enfin, à l’interdiction de la publicité par les groupements et les réseaux de pharmacies (5).

1. LA PUBLICITÉ EN FAVEUR DES PRODUITS VENDUS DANS LOFFICINE

a) Les principes généraux applicables à la publicité en faveur des produits vendus dans l’officine

338. Les principes généraux applicables à la publicité en faveur des produits découlent du code de déontologie des pharmaciens.

339. Ainsi, l’article R. 4235-30 du CSP dispose que « toute information ou publicité, lorsqu’elle est autorisée, doit être véridique, loyale et formulée avec tact et mesure ». La publicité est donc possible à condition de respecter les conditions générales en matière de publicité dans les officines, c’est-à-dire qu’elle soit proportionnée et conforme à l’image du professionnel de santé qu’est le pharmacien.

340. À cet égard, la présentation des produits sur le site internet d’une officine est étroitement contrôlée au vu de la pratique décisionnelle des instances disciplinaires. Ainsi, la chambre

de discipline du CNOP223 a considéré qu’un pharmacien violait l’article R. 4235-30 du CSP dès lors que, sur le site de son officine, les médicaments n’étaient pas présentés sous la forme d’une simple liste alphabétique avec indication des prix pratiqués, mais regroupés par indications thérapeutiques avec une mention explicative sur les traitements des pathologies les plus courantes , « une telle présentation [étant] de nature à constituer une publicité illicite en faveur des produits concernés »224.

341. Enfin, le principe de modération s’appliquant à la publicité des médicaments par les pharmaciens est également encadré par l’article R. 4235-64 du CSP qui précise que « le pharmacien ne doit pas, par quelque procédé ou moyen que ce soit, inciter ses patients à une consommation abusive de médicaments ».

342. Ainsi, la chambre de discipline du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens du Limousin a considéré que contrevenait à cette disposition un pharmacien qui avait, dans le cadre d’un partenariat avec le comité des œuvres sociales du conseil général, fait paraître un encart proposant des remises sur des médicaments et des produits non remboursables dans une brochure à destination des personnels adhérents225.

b) Les principes relatifs à la publicité en faveur des produits relevant du monopole pharmaceutique

343. L’article R. 4235-57 du CSP issu du code de déontologie des pharmaciens rappelle que la publicité pour les médicaments, produits et articles dont la vente est réservée aux pharmaciens ne peut s’effectuer que conformément à la réglementation en vigueur.

344. Or, et comme déjà évoqué au paragraphe 314 ci-avant, l’article L. 5122-6 du CSP prévoit que la publicité auprès du public pour un médicament n’est admise en France qu’à la condition que ce médicament ne soit pas soumis à prescription médicale obligatoire, qu’aucune de ses différentes présentations ne soit remboursable et que l’autorisation de mise sur le marché (ci-après, « AMM ») ne comporte pas d’interdiction ou de restrictions en matière de publicité auprès du public.

345. Un pharmacien a ainsi été sanctionné pour avoir fait distribuer, à l’intérieur de la galerie marchande où était implantée son officine, des prospectus faisant la promotion de spécialités relevant de la liste I des substances vénéneuses, dont la publicité est interdite auprès du grand public226.

346. Lorsqu’elle est autorisée, l’article L. 5122-2 du CSP précise que la publicité pour les médicaments ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique.

Elle doit présenter le médicament de façon objective et favoriser son bon usage. Ces critères recoupent donc ceux définis par l’article 87, paragraphe 3 du code communautaire précité (voir paragraphe 317), même si le code communautaire fournit davantage de précisions

223 Les décisions juridictionnelles de la chambre de discipline du Conseil national peuvent être portées devant le Conseil d'État par la voie du recours en cassation (article L. 4234-8 du CSP), dans le délai de deux mois à compter de la réception de ladite notification.

224 CNOP, aff. M.A. n°844-D du 14 mai 2012, décision définitive.

225 Conseil régional de l'Ordre des pharmaciens du Limousin, décision 2123-D du 25 septembre 2014.

226 CNOP, aff. du 26 septembre 2005. Décision annulée par le Conseil d’État (décision n° 288616, 21 Mars 2008) pour ce qui concerne la durée de la sanction.

concernant ces critères et détaille, dans ses articles 89 et 90, les éléments que la publicité doit ou ne doit pas comporter (voir paragraphes 315 à 317).

c) Les principes relatifs à la publicité en faveur des produits situés en dehors du monopole pharmaceutique

347. L’article R. 4235-58 du CSP issu du code de déontologie des pharmaciens précise que la publicité pour les produits ou articles dont la vente n’est pas réservée aux pharmaciens est admise à condition de demeurer « loyale » de se présenter sur un support « compatible avec la dignité de la profession », d’observer « tact et mesure » dans sa forme et son contenu, et enfin de ne pas être trompeuse pour le consommateur.

348. À titre d’exemple, la chambre de discipline du CNOP a estimé qu’un pharmacien avait enfreint cette disposition en apposant sur ses vitrines des bandeaux promotionnels en couvrant toute la largeur et plus de la moitié de la surface vitrée, et comportant les indications suivantes : « Opération coup de poing / 2 produits achetés = 10 % de remise sur les 2 ; 3 produits achetés = 25 % de remise sur les 3 » et « marre de payer votre pilule contraceptive trop chère? venez nous voir »227.

2. LA PUBLICITÉ EN FAVEUR DE LOFFICINE

349. L’article L. 5125-31 du CSP prévoit que la publicité en faveur des officines de pharmacie ne peut être faite que dans les conditions prévues par voie réglementaire.

350. L’article R. 5125-26 CSP définit ainsi les conditions dans lesquelles une officine peut diffuser un communiqué dans la presse écrite (création, transfert, changement de titulaire d’une officine ou création d’un site internet) et les informations qui peuvent y figurer (nom et titres du pharmacien, adresse de l’officine ou de son site internet). Toute annonce doit être préalablement communiquée au conseil régional de l'ordre des pharmaciens, et ne doit pas excéder la dimension de 100 cm2.

351. S’agissant par ailleurs des dispositions issues du code de déontologie, l’article R. 4235-57 du CSP encadre les informations en faveur d’une officine qui peuvent paraître dans les annuaires ou supports équivalents. Ainsi, dans la rubrique « pharmacie », seules sont autorisées les mentions des noms, adresses, numéros de téléphone et de télécopie. Pour les autres rubriques, ne peuvent figurer que les annonces relatives aux activités spécialisées autorisées dans l’officine. Enfin, ces mentions ne peuvent revêtir, par leur présentation et leur dimension, « une importance telle qu’elle leur confère un caractère publicitaire ».

352. Les règles encadrant la publicité en faveur de l’officine ont été précisées par plusieurs décisions de la chambre nationale de discipline du conseil de l’Ordre.

353. L’utilisation de mentions publicitaires en sus de celles autorisées peut être sanctionnée disciplinairement, comme contraires à la dignité de la profession. Le CNOP a ainsi sanctionné l’usage de mentions telles que « Centre acoustique moderne », « Tout pour le confort du malade ».228

227 CNOP, aff. n° 1055-D du 27 janvier 2014. Décision définitive.

228 CNOP, aff. n° A-D 1346 du 5 avril 1993. Décision définitive.

354. La publication d'un article de presse concernant le recrutement d’une diététicienne dans l’officine a été regardée comme constituant une publicité illicite et un moyen de solliciter la clientèle contraire à la dignité de la profession, au motif que les titulaires avaient participé à la réalisation du reportage. La chambre a également considéré que la distribution aux clients de boissons réhydratantes, dont l’étiquette portait en gros caractères le nom de l’officine et l’adresse de son site Internet, était contraire aux règles encadrant la publicité des officines et constituait un acte de concurrence déloyale229.

355. Par ailleurs, la publication d’un article de presse détaillant le transfert d’une officine, sans accord préalable du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens, a été considérée comme une publicité illicite et une sollicitation de clientèle. Les juges ont retenu que les mentions du nom de la nouvelle pharmacie, de sa localisation, des services proposés, accompagnées de photographies du pharmacien devant son local, constituaient une publicité illicite en faveur de son officine. Ils ont également rappelé que le pharmacien se devait de rester vigilant quant aux informations transmises et d’informer les journalistes des contraintes réglementaires auxquelles il était soumis230.

3. L’INTERDICTION DE SOLLICITER LA CLIENTÈLE

356. Les pharmaciens ne peuvent pas porter atteinte au libre choix du pharmacien par la clientèle.

Ils ne peuvent solliciter la clientèle par des procédés et moyens qui seraient contraires à la dignité de la profession (articles R. 4235-21 et R. 4235-22 du CSP, issus du code de déontologie).

357. De même, l’article R. 4235-59 du CSP, issu du code de déontologie, précise que les vitrines des officines et les emplacements aménagés pour être visibles de l’extérieur ne peuvent servir à présenter que les activités dont l’exercice en pharmacie est licite et que ces vitrines et emplacements ne sauraient être utilisés aux fins de solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession.

358. La chambre de discipline du CNOP a ainsi considéré que :

a. l’apposition de plusieurs affiches promotionnelles comportant le slogan « Trouver moins cher ? Mission impossible », disposées en quatre colonnes couvrant quasiment toute la hauteur de la vitrine et encadrant les deux parois vitrées présente un caractère excessif non conforme à la dignité professionnelle. Cet affichage a été qualifié de trompeur au motif qu’en l’absence de précision sur les produits visés par l’offre, il pouvait laisser croire que la promotion s’étendait à la parapharmacie ainsi qu’à tous les médicaments (remboursés et non remboursés), et ce malgré la présence d’un bandeau en vitrine faisant mention de « prix exceptionnels sur la parapharmacie » a été jugée comme n’étant pas de nature à lever l’ambiguïté constatée231 ;

b. un pharmacien titulaire qui appose en façade de son officine, de part et d’autre de la porte d'entrée, et de manière prépondérante par rapport à tout autre message de type sanitaire,

229 Décision de la chambre de discipline du CNOP du 18 décembre 2007. Décision définitive.

230 CNOP, aff. M. A. 1079-D du 20 mai 2014. Décision définitive.

231 CNOP du 18 octobre 2011. Décision définitive.

des affiches relatives aux prix pratiqués sur certains produits manque de tact et de mesure et porte atteinte à la dignité de la profession232 ;

c. l’exposition en vitrine de médicaments accompagnés d’affiches promotionnelles portant la mention « Promo Juin 2012 » se révèle contraire au CSP puisque ces affiches ne se limitaient pas à délivrer une simple information sur les prix pratiqués mais revêtaient le caractère d’une publicité auprès du public233 ;

d. le fait d’apposer, sur la moitié de la vitrine, un bandeau mentionnant « parapharmacie, prix bas permanents », a été jugé comme ne manquant pas de tact et de mesure. En revanche, l’apposition d’une dizaine de pancartes de format A4 portant la mention « prix bas permanents » est jugée fautive, car celles-ci laisseraient penser que les offres promotionnelles portaient aussi bien sur les médicaments remboursés que sur la parapharmacie234.

4. L’INTERDICTION DOCTROYER DES PRIMES OU TOUT MOYEN DE FIDÉLISATION DE LA CLIENTÈLE

359. L’article R. 5125-28 CSP interdit aux pharmaciens d’octroyer à leur clientèle des primes ou des avantages matériels directs ou indirects, de donner des produits, à moins que ceux-ci soient d’une valeur négligeable, et d’avoir recours à des moyens de fidélisation de la clientèle pour une officine donnée.

360. Ainsi, la chambre de discipline du CNOP a considéré que l’opération commerciale mise en œuvre par une pharmacienne dans son officine, consistant à offrir une boîte d’Oscillococcinum®, spécialité pharmaceutique destinée à combattre les états grippaux, pour deux boîtes achetées est contraire à ces dispositions et constitue une faute235.

5. L’INTERDICTION DE LA PUBLICITÉ PAR LES GROUPEMENTS ET LES RÉSEAUX DE PHARMACIES

361. L’article R. 5125-29 interdit à un groupement ou un réseau de pharmacies de faire de la publicité en faveur des officines qui le constituent et interdit toute publicité auprès du public pour un groupement ou un réseau de pharmacies (voir paragraphe 330).

362. Les groupements, lorsqu’ils prennent la forme de structures de regroupement à l’achat, peuvent en revanche communiquer de manière strictement encadrée auprès de leurs pharmacies adhérentes, en vertu de l’article D. 5125-24-17 du CSP. En effet, une structure de regroupement à l’achat « peut, au bénéfice exclusif de ses associés, membres ou adhérents (…) diffuser des informations et des recommandations sur des thèmes de santé publique relatifs notamment à la prévention, à l'éducation pour la santé et au bon usage du médicament ».

363. Dans son arrêt précité du 4 juin 2014, la Cour de cassation, qui devait se prononcer sur la conformité de l’article R. 5125-29 du CSP avec l’article 10 de la CEDH, relatif à la liberté d’expression, a relevé que « l’interdiction de toute publicité auprès du public, faite aux

232 CNOP du 19 mars 2012. Décision définitive.

233 CNOP du 17 décembre 2013. Décision définitive.

234 CNOP du 18 décembre 2012. Décision définitive.

235 CNOP aff. Mme A n° 2101-D du 14 décembre 2015. Décision définitive.

groupements ou réseaux d'officine, était justifiée par un objectif de protection de la santé publique, celui de conserver une répartition géographique équilibrée des officines sur le territoire national, afin de protéger les petites officines et d’éviter de fragiliser celles qui n’appartiennent pas à un réseau fort, susceptible d’investir dans des campagnes publicitaires au profit de ses adhérents » et que « cette interdiction apportait, à la liberté d'expression, protégée par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, une atteinte nécessaire et proportionnée aux objectifs poursuivis »236.

364. Dans un arrêt du 5 mars 2015, la cour d’appel de Versailles, amenée à se prononcer sur la licéité d’une campagne de publicité du groupe PHR au profit des officines membres de son réseau, a considéré que « le fait de vanter la qualité des services offerts ou le prix avantageux de produits, même limités à la parapharmacie, constitue bel et bien une démarche publicitaire prohibée, même si elle ne vise pas les médicaments ». De plus, elle a estimé que

« le fait de vanter la qualité du service des officines du réseau est, indirectement mais certainement, dévalorisant pour les officines qui n’en font pas partie », cette publicité constituant selon elle une pratique commerciale trompeuse en ce qu’elle laisserait entendre que les pharmaciens du réseau seraient plus compétents ou engagés que les autres237.

C. LES RÈGLES ENCADRANT LA PUBLICITÉ POUR LES PHARMACIENS DANS LES

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