• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : Premiers stades de croissance de films minces métalliques

3.3 Croissance de métaux de faible mobilité atomique

3.3.3 Transition de phases dans le stade II

Sur la figure 3.3.3 sont comparées les évolutions de la force par unité de longueur et de la résistivité électrique de films minces de Mo, de Ta et de W lors des premiers stades de croissance (hf < 10 nm). Précisons

que ces mesures ne peuvent être faites simultanément à cause des prises de contact du montage de résistivité qui ne permettent pas au substrat de Si d’être libre de tout mouvement ; condition nécessaire aux mesures MOSS. De plus, les mesures SDRS sont aveugles lors du suivi de films avec un mode de croissance 2D car la morphologie de surface n’évolue quasiment pas et aucune résonnance plasmon n’existe.

a) b)

c) d)

Figure 3.3.3 : Evolution de la force par unité de longueur (partie haute) et de la résistivité (partie basse) pour des films de : a) Mo ; b) Ta ; c) W déposés sur Si amorphe et Si oxydé ; d) Diffractogrammes obtenus pour deux films minces de W déposés sur a-Si avec et sans le montage de résistivité. Les traits pointillés représentent les positions théoriques des pics de diffraction indicés.

Durant la croissance d’un film mince de Mo, nous voyons que la transition amorphe-cristal pour une

épaisseur h*, caractérisée par un régime transitoire de contrainte assez difficilement discernable en MOSS

20 Nous faisons ici l’hypothèse que la distribution électronique n’influence pas la valeur de ξ.

98

est clairement visible sur les mesures de résistivité électrique. En effet sur a-SiOx, après un stade initial de

forte augmentation de la résistivité le film percole pour une épaisseur de 0,6 nm (i.e. environ 2 monocouches) et la résistivité décroît pour tendre vers une valeur quasi-constante de 90 µΩ.cm pour hf ~ 2,3 nm. Survient alors une seconde chute de résistivité attribuée à un changement de phase depuis une phase plus résistive vers une phase moins résistive. Les mêmes stades d’évolution sont visibles lors d’un dépôt sur a-Si, avec une différence dans les tous premiers angströms attribuée à la conduction au travers de la sous-couche de silicium amorphe dopée en surface par des atomes de Mo et une transition amorphe-cristal ici bien plus marquée à

h* ~ 2,5 nm. La différence de résistivité finale observée entre les échantillons est due à la différence de la géométrie de montage utilisée (« 4 plots » sur a-SiOx, « 2 bandes » sur a-Si, cf. §2.3.3c). Pour la géométrie de

bande la résistivité finale est d’environ 15 µΩ.cm (ρth ~ 5,8 µΩ.cm). A titre de comparaison, pour des dépôts

par pulvérisation à 400°C de films minces de Mo de 100 nm, Oikawa et al. [Oikawa, 1978] obtenaient 28 µΩ.cm21, Lim et al. [Lim, 2006] 5,78 µΩ.cm et Rane et al. [Rane, 2014] 13 µΩ.cm. A noter qu’à cette

température de dépôt les grains sont plus gros et la résistivité attendue est donc plus faible. Le léger décalage (0,2 nm) observé pour la transition amorphe-cristal entre les mesures MOSS et les mesures de résistivité électrique semble montrer que la seconde mesure serait sensible à la fin de la transition, alors que les mesures MOSS sont sensibles à l’intégralité de la transition.

Durant la croissance d’un film mince de Ta, il sera montré en détail (cf. Chap. 5) que le premier stade

de croissance est amorphe et est suivi pour hf ~ 2,3 nm de la croissance de la phase métastable Ta-β(002).

Sur la courbe MOSS (cf. Fig. 3.3.3b), cette transition se produit sans qu’aucune variation de contrainte ne soit observée, le choix d’un substrat d’a-Si ou d’a-SiOx n’influençant pas la croissance. Malheureusement, les

mesures de résistivité électrique ne montrent pas non plus de variation notable autour d’une épaisseur de 2,3 nm. Notons qu’il est assez plausible que la phase Ta-β, avec ses 30 atomes par maille ait un volume spécifique et une résistivité (ρTa-β = 190 µΩ.cm) assez proche de la phase amorphe du Ta, ce qui expliquerait

qu’aucun régime de contrainte ou de résistivité transitoire ne soit observé entre les stades II et III.

Durant la croissance d’un film mince de W, l’évolution de la contrainte intrinsèque lors du stade II

est très similaire à celle obtenue dans le cas du Mo, sauf que la transition vers la phase stable W-α s’opère pour une épaisseur plus élevée de l’ordre de 4 nm sur Si amorphe et 5,5 nm sur Si oxydé. L’amplitude et la largeur (Δh*) de la transition de phase pourrait laisser supposer une cristallisation sur toute l’épaisseur jusqu’à l’interface W/Si. Le couplage de la mesure MOSS à la mesure de résistivité n’est pas direct. En effet, pour la mesure de résistivité, lors d’un dépôt sur a-SiOx, un changement de pente (moins brutal que dans le

cas du Mo) a lieu pour une épaisseur hchgt ~ 4,5 ± 0,5 nm, suggérant la transition d’une phase plus résistive

vers une phase moins résistive. En outre, lors d’une croissance sur a-Si, cette variation de pente n’est pas discernable. Deux hypothèses peuvent être avancées concernant cette transition de phase :

- elle se ferait sans recristallisation des premiers nanomètres déposés ;

- elle trahirait la croissance d’un film biphasé W-α (30 – 40 µΩ.cm) et W-β (150 – 350 µΩ.cm).

La seconde hypothèse semble être confirmée par les diffractogrammes présentés figure 3.3.2d qui montrent que pour le film déposé avec le montage de résistivité, un pic de diffraction supplémentaire est présent à 2θ = 35,5°, correspondant aux plans (002) de la phase métastable de la structure quadratique W-β, en plus du pic de la phase stable W-α(110). Pour trancher entre ces différentes interprétations, des études complémentaires seraient nécessaires, en tenant compte du fait que la géométrie du montage de résistivité

21 Le vide résiduel dans l’enceinte était de 10-4 Pa !

99

pourrait impacter l’énergie déposée ; paramètre auquel la nucléation préférentielle de phase (α versus β), en pulvérisation, est très sensible [Petroff, 1973 ; Weerasekera, 1994 ; Shen, 2000 ; Rane, 2014].

Outline

Documents relatifs