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Chapitre 3 : Premiers stades de croissance de films minces métalliques

3.5 Contrôle de la microstructure et de la contrainte stationnaire lors de la croissance

3.5.1 Contrôle de la microstructure et de la contrainte par l’intermédiaire d’un

Lors de la croissance 3D de métaux, le rôle de la diffusivité de surface est déterminant pour l’épaisseur de coalescence et donc la microstructure finale. Nous proposons de contrôler cette diffusivité de surface par la présence d’un surfactant (Ge)22 qui a pour particularité de rester continuellement en surface23 du film en

cours de dépôt.

La croissance de Pd sur a-SiOx, a-Si et a-Ge (0,16 Pa, 0,07 nm.s-1) vue par des mesures MOSS et de

résistivité est présentée figure 3.5.1a. Alors que la croissance du Pd sur a-SiOx (cf. §3.2.3) est typique d’une

croissance 3D, les premiers stades de croissance sur a-Si et a-Ge sont beaucoup plus complexes. Lors de la

croissance sur une sous-couche de a-Ge, la résistivité augmente puis chute rapidement vers 1,6 nm (stade I).

Après un court régime constant (stade II), une seconde chute est visible à partir de 3 nm d’épaisseur avant que celle-ci ne tende vers un régime stationnaire (stade III). Ces différents stades sont à mettre en regard avec le pic transitoire visible en MOSS à une épaisseur équivalente (1,7 nm). Une même analyse peut être faite pour la croissance sur a-Si dont le premier stade est plus diffus. La seconde chute de résistivité se produit pour une épaisseur plus grande (4 nm). Le retard de cette transition par rapport au Ge est en accord avec le régime de contrainte transitoire obtenu pour la mesure MOSS.

a) b)

Figure 3.5.1 : a) Evolution de la force par unité de longueur (partie haute) et de la résistivité (partie basse) de films minces de Pd sur a-SiOx (courbe noire), a-Si (courbe rouge) et a-Ge (courbe verte) en fonction de l’épaisseur déposée ; b) Evolution de la force par unité

de longueur de films minces de Pd sur a-Si et a-Ge et d’un codépôt PdGe8.8%/a-Ge en fonction de l’épaisseur déposée.

22 Le Ge a été préféré à l’In car il ne pollue pas l’enceinte. De plus nous disposions d’une cible de Ge et non d’une cible

de Sn et le Ge a déjà montré son efficacité pour réduire la diffusivité de surface [Yang, 2010 ; Flötotto, 2012].

23 Pour une mesure précise de la quantité de Ge restant en surface, des mesures par AR-XPS seraient nécessaires.

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L’interprétation complexe des premiers stades de croissance observés requiert de nombreuses caractérisations ex-situ et d’autres observations in-situ qui viendront en chapitre 4. L’intérêt ici est de voir que la sous-couche de Ge amorphe a eu pour effet de diminuer l’épaisseur de transition (4 à 3 nm). Cet effet de la sous-couche d’a-Ge sur la croissance de métaux de très forte mobilité atomique a déjà été étudié numériquement et expérimentalement dans le cas de films minces d’Ag. Yang et al. [Yang, 2010] ont montré par des simulations Monte-Carlo cinétique le rôle d’un surfactant (Ge, In, Sn). Ils obtiennent une réduction de la diffusivité de surface qui lui permet d’obtenir des films sans compression, voire en tension en limitant la diffusion d’atomes dans les joints de grains en cours de dépôt. Expérimentalement, Flötotto et al. [Flötotto,

2012] ont montré lors de de la croissance d’Ag/SiO2 et sur a-Ge que cette réduction de diffusivité de surface

engendre aussi une réduction de la taille des grains à la coalescence, ce qui augmente la densité de joints de grains et donc vient contrebalancer la tension due à une faible diffusivité de surface. Ils observent que l’impact du surfactant est plus marqué sur la taille des grains que sur l’incorporation d’atomes dans les joints de grains en régime stationnaire. Au final, la présence de Ge augmente la contrainte de compression.

L’influence du Ge sur la contrainte de croissance stationnaire est présentée figure 3.5.1b pour deux

films de Pd déposés sur a-Si et a-Ge et un film de PdGe8.8%24 déposé sur a-Ge. La réduction de la diffusivité de

surface par la sous-couche d’a-Ge ne permet pas un basculement de la contrainte de croissance stationnaire en tension. Un effet notable sur la contrainte de croissance stationnaire, est obtenu lors du co-dépôt de Ge en continu et en faible quantité (8,8 %) pendant le dépôt de Pd. Ceci n’entraîne pas de modification des premiers stades de croissance mais permet l’obtention d’une contrainte de compression de – 0,76 GPa.

a) b)

Figure 3.5.2 : a) Images de topographie de surface obtenues par AFM (1 × 0,5 µm) de films minces de Pd déposés sur a-Si et a-Ge (hPd

= 76 nm) et d’un codépôt PdGe8.8% (hPdGe8.8% = 104 nm) déposé sur a-Ge ; b) Diffractogrammes correspondants.

La topologie de surface pour ces trois films de Pd est présentée sur les images AFM de la figure 3.5.2a. Le passage d’une sous-couche d’a-Si à une sous-couche d’a-Ge entraîne une réduction de la rugosité du film et les grains obtenus semblent très légèrement plus petits et plus facétés, en accord avec une réduction de la diffusivité de surface. Lors d’un co-depôt avec du Ge, la microstructure obtenue est constituée de plus petits grains, avec une étonnante faible dispersion de taille, une sphéricité quasi-parfaite et une très faible rugosité25. Cette plus faible taille de grains entraîne une augmentation de la densité de joints grains qui,

24 La stœchiométrie de de film n’a pas de significations particulières, nous cherchions juste à augmenter la quantité de

Ge en surface. La valeur de 8,8% a été obtenue par analyse chimique en MEB.

25 Ici, les images AFM ont été faites plusieurs fois en utilisant différentes pointes de manière à être confiant sur le fait

que nous imageons bien les grains et non la pointe, car l’image observée est une convolution des deux.

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couplée à l’insertion de Ge dans le film, permet d’expliquer l’origine de la contrainte stationnaire en compression. La figure 3.5.2b nous permet de dire que tous les films sont texturés selon les plans (111) avec une mosaïcité étonnamment faible pour le film déposé sur a-Si. Les effets présentés vont dans le sens des observations de Flötotto et al., cependant, ceux-ci obtenaient une réduction de l’épaisseur de coalescence de l’Ag de 60 nm à moins de 10 nm et le passage d’une contrainte de compression de – 19 à – 103 MPa avec la présence d’a-Ge seulement en sous-couche. Pour relativiser les écarts d’amplitude observés sur l’impact du Ge, il faut rappeler que leurs expériences étaient menées lors de dépôts en évaporation thermique, permettant, par la faible énergie déposée de diminuer les sites de défauts en surface et ainsi augmenter les épaisseurs de coalescence. De plus, l’Ag est un métal plus mobile que le Pd et donc il n’est pas étonnant que l’effet y soit plus marqué. Il est naturel de penser que la forte réactivité d’interface du Pd masque en partie l’effet du surfactant. Enfin, le contrôle de la microstructure par un surfactant pour des dépôts par

pulvérisation n’a pas été étudié dans la littérature et aucune comparaison ne peut être menée.

A ce titre, nous avons entrepris d’étudier les effets d’un surfactant sur un autre métal à croissance 3D, l’Ir. Les évolutions de la force par unité de longueur pour deux films déposés sur a-SiOx (0,28 Pa, 0,076

nm.s-1) et a-Ge (0,17 Pa, 0,075 nm.s-1) sont présentées figure 3.5.3a. L’insert nous permet de mettre en

évidence une réduction de l’épaisseur de coalescence qui passe de 2,1 à 1,5 nm lors d’un dépôt sur une sous- couche de Ge amorphe. A plus forte épaisseur, le film déposé sur Ge amorphe a une contrainte stationnaire plus élevée de - 4,91 GPa contre - 4,10 GPa pour le film déposé sur a-SiOx. Cette augmentation de contrainte

stationnaire est ici directement liée à la réduction de taille des grains26 elle-même due à une coalescence plus

précoce induite par la réduction de diffusivité de surface due à la sous-couche de Ge amorphe. Malgré la faible mobilité atomique initiale de l’Ir, il est donc quand même possible d’observer l’effet d’un surfactant sur ses différents stades de croissance.

La figure 3.5.3b représentant l’évolution de la force par unité de longueur pour deux films de Ta déposés (0,16 Pa, 0,08 nm.s-1) sur des sous-couches de Si et de Ge amorphe vient confirmer que la mobilité

atomique ne joue pas de rôle majeur lors de la croissance 2D de métaux. Une seule différence peut être observée sur l’amplitude du saut de la contrainte de surface qui peut s’expliquer par la différence d’énergie de surface entre un film de Ge amorphe et un film de Si amorphe puisque γGe < γSi (cf. Tab. 3.1.1).

a) b)

Figure 3.5.3 : Evolution de la force par unité de longueur en fonction de l’épaisseur déposée de films minces de : a) Ir sur a-SiOx et a-

Ge ; b) Ta sur a-Si et a-Ge.

26 L’influence combinée de la plus faible pression utilisée pour le dépôt sur a-Ge n’est pas à exclure.

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