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Test de réfutation

Dans le document Vers une algèbre des relations de discours (Page 146-150)

5.3 Analyse des données

5.3.3 Test de réfutation

Le test de réfutation s’appuie sur l’idée que pour tester la présence d’une relation de dis- cours, il nous faut vérifier l’engagement de celui qui produit le discours sur les conséquences sémantiques de la relation en question. Sur ce point, nous nous appuyons sur les travaux de Vieu (2011), qui introduit la notion d’engagement du locuteur dans la définition des relations de discours (voir section 4.2.2).

La définition du test part de l’hypothèse suivante : ce sur quoi le locuteur s’engage, il ne peut le réfuter sans produire un discours incohérent ou incomplet. Suivant cette hypothèse, pour tester la présence d’une relation Rz(α, γ) dans un discours contenant la prémisse Rx(α, β) ∧

Ry(β, γ), on continue le discours par un énoncé dans lequel on nie les effets sémantiques

φRz(α,γ) de la relation Rz(α, γ). La construction d’un discours incohérent ou incomplet par

l’utilisation du test de réfutation peut permettre de mettre en évidence l’engagement du locuteur en ce qui concerne les effets sémantiques de la relation Rz(α, γ).

Ce test peut être utilisé lorsque l’on cherche à identifier la présence de relations de la classe temporelle ou de la classe causale (opérant au niveau sémantique) : ces relations sont associées à l’établissement de liens sémantiques entre éventualités, et ce sont ces liens sémantiques que le test vise à réfuter. Par exemple, dans le discours en (199), l’énoncé en (δ) réfute les effets sémantiques de la relation Background(α, γ), dont on cherche à vérifier la présence : on infère ¬eα seγ (la négation d’un recouvrement spatial entre les éventualités

eα et eγ) de l’assertion de (δ), et le discours produit est incohérent. Dans les discours en

(200) et (201), l’énoncé en (δ) nie la présence d’une causalité entre les unités eα et eγ

(¬cause(eα, eγ)) et rend ces discours incohérents.

(199) a. Marie s’est installée à Paris, (α) b. puis elle a déménagé à Strasbourg, (β)

c. car il pleuvait trop souvent. (γ)

d. # (Mais) ce n’est pas à Paris qu’il pleuvait trop souvent. (δ) (200) a. L’entreprise a délocalisé ses usines. (α)

b. Les ouvriers ont donc manifesté devant la direction, (β) c. parce que ils ont perdu leur emploi. (γ)

(201) a. Les filles ont eu un accident. (α) b. Julie a trois côtes cassées. (β)

c. En revanche, Marie a un traumatisme crânien. (γ)

d. # (Mais) Marie a un traumatisme crânien à cause d’un accident de ski. (δ)

En revanche, pour tester la présence des relations de discours qui n’ont pas pour effet d’établir une relation sémantique entre éventualités, comme les relations de la classe ad- versative, le test de réfutation est difficile à mettre en oeuvre. Observons par exemple le discours en (202), qui fait intervenir une violation d’attente en (γ). L’utilisation du test de réfutation consisterait à nier les conséquences sémantiques de la relation Violation(α, γ), que l’on peut gloser ici par : le fait que les filles aient eu un accident provoque l’attente que Julie ne soit pas indemne et contrairement à cette attente, Julie est indemne.

(202) a. Les filles ont eu un accident. (α) b. Marie est blessée. (β)

c. Par contre, Julie est indemne. (γ)

Bien qu’il soit souvent difficile à mettre en oeuvre, le test de réfutation a l’avantage, contrairement aux tests précédemment présentés, de n’opérer aucune modification (inser- tion d’un élément linguistique, suppression ou déplacement d’une unité) dans le discours d’origine.

5.4

Bilan

Dans ce chapitre, nous avons précisé certains points de la méthodologie adoptée dans les études des prémisses de règles que nous présentons dans les chapitres 6, 7 et 8. Nous avons décrit une méthode d’extraction automatique de discours nous permettant de collecter des données contenant les prémisses étudiées. Nous avons également présenté les tests utilisés lors de l’analyse des données construites et des données extraites. Dans les chapitres qui suivent, les trois tests ne sont pas systématiquement effectués pour tous les discours présentés. Ils posent dans certains discours des difficultés de mise en oeuvre, dont nous discutons au fur et à mesure.

Dans les chapitres 6 et 7, nous proposons une analyse quantitative des annotations effectuées sur les données extraites. En effet, si la tâche d’annotation sert dans un premier temps à nourrir la réflexion sur la construction des règles, l’annotation des données peut permettre deux choses. D’une part, dans les cas où une prémisse donne lieu à la déduction d’une disjonction de relations, les résultats de l’annotation permettent d’évaluer l’importance, en termes quantitatifs, de chacune des relations pouvant être déduites — bien entendu, ces résultats sont à prendre avec un certain recul, car nous avons annoté un nombre restreint de discours, et n’avons pas procédé à une annotation multiple. D’autre part, toujours dans les cas où la déduction est une disjonction, les données annotées peuvent permettre, après en avoir extrait certaines informations, d’évaluer l’impact de ces différentes informations sur la déduction.

Interaction entre relations causales et adversatives

Sommaire

6.1 Inférences dans le cas de Contrast . . . 148 6.1.1 Inférence de None . . . 149 6.1.2 Inférence de Result . . . 150 6.1.3 Inférence de Violation . . . 152 6.1.4 Bilan . . . 157 6.2 Inférences dans le cas de Concession et de Violation . . . 158 6.2.1 Inférence d’une relation de la classe causale . . . 159 6.2.1.1 Inférence de Result . . . 159 6.2.1.2 Une structure proche et l’inférence de Explanation . . . . 161 6.2.2 Pas d’inférence de relations de la classe adversative . . . 163 6.2.2.1 Pour la prémisse Result(α, β) ∧ Concession(β, γ) . . . 163 6.2.2.2 Pour la prémisse Result(α, β) ∧ Violation(β, γ) . . . 164 6.2.2.3 L’explicitation d’une attente . . . 165 6.2.3 Bilan . . . 165 6.3 Annotation des prémisses . . . 166 6.3.1 Données extraites et données annotées . . . 166 6.3.2 Résultats de l’annotation . . . 168

Dans ce chapitre, nous présentons l’étude de trois structures discursives, ayant pour point commun de faire intervenir la relation Result et une relation de la classe adversative. Rappelons que nous distinguons trois relations dans la classe adversative : les relations Contrast, Violation et Concession — voir section 2.2.3.3, page 68. Nous fournissons en (203), (204) et (205) des exemples de discours correspondant aux trois prémisses couvertes dans ce chapitre. Dans les trois discours présentés, les unités (α) et (β) sont communes : seules diffèrent les unités (γ).

a. L’examen d’algorithmique portait sur les arbres. (α) b. Du coup, Pierre a paniqué. (β)

c. Par contre, Marie était ravie. (γ) (204) Result(α, β) ∧ Violation(β, γ)

a. L’examen d’algorithmique portait sur les arbres. (α) b. Du coup, Pierre a paniqué. (β)

c. Mais il a réussi à faire tous les exercices. (γ) (205) Result(α, β) ∧ Concession(β, γ)

a. L’examen d’algorithmique portait sur les arbres. (α) b. Du coup, Pierre a paniqué, (β)

c. bien qu’ il ait beaucoup révisé. (γ)

Ce chapitre s’organise comme suit. Nous présentons à la section 6.1 les inférences identifiées pour la prémisse Result(α, β) ∧ Contrast(β, γ). À la section 6.2, nous présentons l’étude des prémisses Result(α, β)∧Concession(β, γ) et Result(α, β)∧Violation(β, γ). Pour terminer, à la section 6.3, nous présentons certains résultats quantitatifs concernant les données annotées pour ces trois prémisses.

6.1

Inférences dans le cas de Contrast

Dans cette section, nous décrivons les déductions identifiées pour la prémisse de règle Result(α, β) ∧ Contrast(β, γ). Avant de présenter ces déductions, nous examinons les contraintes sémantiques imposées par les relations de la prémisse.

En ce qui concerne les relations Result et Contrast, si l’on reprend les raffinements décrits respectivement aux sections 2.2.3.2 et 2.2.3.3, nous nous concentrons sur les cas dans les- quels la relation Result implique une dépendance causale forte, et dans lesquels la relation Contrast fait intervenir deux entités distinctes ou deux sujets distincts. Nous décrivons à la Figure 6.1 les conséquences sémantiques associées aux relations de la prémisse. Pour la relation Contrast, nous nous limitons à la définition de Hobbs (1985) : « on infère p(a) de l’assertion de (α) et ¬p(b) de l’assertion de (β) », ce que l’on exprime par les contraintes : Kα > p(a) ∧ Kβ >¬p(b).

En considérant uniquement ces conséquences sémantiques, les liens s’établissant entre les unités (α) et (γ) restent relativement indéterminés. On peut simplement « rassembler » les contraintes sémantiques établies de façon indépendante par les deux relations de discours de la prémisse, comme on l’observe à la Figure 6.1. D’après ces contraintes, on peut conclure que l’inférence d’une relation de la classe adversative est possible, puisque les contenus de (α) et (γ) peuvent impliquer directement ou indirectement des propriétés incompatibles. C’est essentiellement l’analyse des données construites ou extraites qui nous a permis de dégager un certain nombre de liens possibles entre (α) et (γ), que nous présentons dans les sections suivantes. Nous présentons trois cas d’inférence, respectivement illustrés par les discours en (206), (207) et (208) : l’inférence de None (section 6.1.1), l’inférence de Result (section 6.1.2), et l’inférence de Violation (section 6.1.3).

α β γ Result Contrast ? Kα Kβ Kα > Kβ Kβ Kγ Kβ > p(a) Kγ > ¬p(b) Kα Kγ Kα > Kβ > p(a) Kγ > ¬p(b)

Figure 6.1 – Contraintes sémantiques associées à la prémisse Result(α, β) ∧ Contrast(β, γ)

b. Du coup, elle est partie en vacances. (β)

c. En revanche elle n’était pas partie l’an dernier. (γ) (207) a. La France a perdu le match. (α)

b. Du coup, Marie est triste. (β)

c. En revanche, Julie est aux anges. (γ) (208) a. La voiture a fait un tonneau. (α)

b. Du coup, Julie est blessée. (β) c. En revanche, Léa est indemne. (γ)

Dans le document Vers une algèbre des relations de discours (Page 146-150)