• Aucun résultat trouvé

Cadre Théorique

CHAPITRE 1. L’IDENTITE PROFESSIONNELLE DES ENSEIGNANTS ENSEIGNANTS

1.5. Una aproximación a la identidad profesional de los docentes

1.6.4. Soi, expérience et subjectivation

Le soi met en scène la construction subjective dans un cadre interdépendant avec le social. Une dialectique se crée entre la dynamique identitaire que mobilise le soi en tant que redéfinition singulière, en même temps que les tensions relationnelles tissent et participent aussi à la constitution du sujet. La réflexion de Mead (1910 ; 1963 ; 1982) traite la problématique de l’expérience dans la construction subjective du monde où le soi se développe grâce aux processus d’interaction sociale en devenant une manifestation de l’expérience sociale : « l’individu devient objet d’expérience pour lui-même en réfléchissant son action sur les autres » (Bonicco-Donato, 2014, p. 52). Le concept de soi opère comme médiateur objectif de l’expérience pour réinvestir les processus de subjectivation. Une explication très précise nous est offerte par Vanhulle

63

(2012) sur le rôle de l’expérience dans la construction de l’identité. La chercheure reprend Dewey (2012) pour signaler que :

« il propose un changement de perspective sur l’expérience, qui consiste à déplacer la question de qui fait l’expérience vers le contenu de celle-ci, le quoi.

La question se porte alors sur les méthodes utilisées pour la conduire, sur le comment des changements qui affectent l’expérience. Cette enquête sur le quoi et le comment implique le sujet – corps et pensée rationnelle, langage et conscience – dans une séquence historique »9.

À cet égard, l’expérience n’est pas simplement une notion qui confère au sujet un sens historique, mais plutôt le produit qui permet de l’articuler dans un parcours personnel, les formes et les processus que le sujet trouve pour doter de sens leur vécu en termes de construction subjective. Le soi est donc le résultat de la mise en mots de l'expérience dans une histoire singulière. Comme l’affirme Ricœur (1991), le sens donné à l’expérience permet de construire l’ipséité, toutes les transformations subies par les altérations pendant l’expérience, ce qui s’inscrit dans les réélaborations des situations vécues. En même temps, la mêmeté forge des points d’ancrage de l’expérience dans une histoire, dans des logiques culturelles et sociales.

Ces deux mouvements, ces deux tensions, permettent au sujet de construire une continuité en parallèle avec les ruptures et les discontinuités de son expérience, idée forte dans la pensée de Dewey (2011) : « chaque expérience faite modifie le sujet et

9 Italiques dans l’original.

64

cette modification, à son tour, affecte - que nous le voulions ou non - la qualité des expériences suivantes, le sujet étant un peu différent après chaque expérience de ce qu'il était auparavant » (pp. 472-473).

Mais l’expérience ne transforme pas le sujet par le fait de la vivre ou de la raconter, il ne suffit pas d’expérimenter les situations vécues. C’est le sujet qui décide, qui fait les choix. L’émergence d’une subjectivation de l’expérience passe par des actes réflexifs :

« la subjectivation ne peut donc se réduire à la socialisation, passive et intériorisée en un soi, somme des rôles et des images de soi ; la subjectivation est une interrogation identitaire, c’est-à-dire une véritable activité du sujet, une activité critique et une recherche de distance à soi, aux divers soi perçus et aux modèles intériorisés, une volonté consciente de construction de son expérience personnelle et de ses relations aux autres » (Dumora et al., 2008, p. 393).

Si on suit Dewey (2011) qui dit que « toute expérience est une force propulsive » (p.

475), nous devons ajouter que les mécanismes de propulsion concernent les méandres réflexifs d’un sujet actif, qui revient sur le vécu et le resignifie. En tant que configuration et émergence du soi, la subjectivation se montre alors comme l’axe d’un fonctionnement mental et discursif incarné au sein d’un cadre intersubjectif. C’est dans une attitude réflexive que la subjectivité devient subjectivation. Dans les mots de Vanhulle (2009a) :

« la conscience vit dans l’énonciation du sujet après coup sur des traces soigneusement choisies […]. La conscience sélectionne dans l’expérience

65

vécue ce qui peut servir d’objet pour d’autres expériences vécues : ainsi elle ne s’attache qu’à une infime part de ce qui est réalisable » (p. 17).

Selon Dewey (2012) le devenir de l’individu par l’expérience et l’interaction ne se déploie pas dans la continuité, au contraire, les moments de perturbations et de conflits surviennent, qui l’incitent à s'engager dans un travail réflexif et critique où il s’agit pour lui d’intérioriser, de s’approprier des représentations tout en intervenant dans leur construction. Dans le cadre de l’insertion professionnelle, les préoccupations professionnelles (Mosquera et al., 2016) constituent ces moments où la capacité réflexive amorce les processus de subjectivation d’une expérience sur le métier.

Une flexibilité identitaire opère chez les individus lorsqu’ils trouvent dans le métier un espace pour la transformation du soi (Perez-Roux, 2011a). La construction de l’identité professionnelle se manifeste dans la tension entre les changements, les adaptations et les sentiments de rester le même ; entre la préservation d’une unicité cohérente et le déploiement des multiples facettes enseignantes pour s’adapter aux nouvelles situations, pour répondre aux questionnements du contexte, pour faire face aux soucis professionnels (Perez-Roux, 2012). Les savoirs occupent une place capitale, car ils mobilisent des représentations et se mêlent avec des conceptions personnelles. La dynamique entre les notions externes et les valeurs internes s’actualise dans l’action de l’enseignant esquissant des traits identitaires plus ou moins stables.

66

Notre posture s’articule aux propositions de Vanhulle (2009a ; 2009c ; 2012 ; 2013 ; 2016b), à propos de l’idée que la construction du soi professionnel est traversée par les processus de subjectivation de savoirs professionnels. Dans le cadre de la formation pour l’enseignement, ce processus de subjectivation s'articule au carrefour entre différents discours (disciplinaires, scientifiques, culturels, socio-économiques, institutionnels, idéologiques, etc.) et les positions que les enseignants disposent afin de constituer une idée sur la profession. Dans cette conception, la subjectivation implique l'effort d'apprendre à lire les attentes sociales et à s'y soumettre, mais aussi d'apprendre à maîtriser les discours qui subsument la profession d'enseignant (Lanas

& Kelchtermans, 2015). Il s’agit d’une configuration du soi professionnel qui émerge de l’exercice conscient, volontaire et réflexif permettant de revenir sur l’expérience professionnelle afin de transformer les savoirs socialement élaborés « dans un discours propre orienté vers un agir investi de signification » (Vanhulle, 2011, p. 148).

L’entrée par les savoirs professionnels articule cette boucle conceptuelle dans la mesure où la sémiotisation de l’agir « redouble l’expérience » (Vygotski, 2003) par des outils discursifs qui transforment la conscience individuelle. Au sens de Schwartz (2010) c’est dans le débat intrasubjectif à partir de l’expérience que le sujet construit ses propres « renormalisations ». Le débat se situe donc dans un système de savoirs en désadhérence (référentiels, normes antécédentes, savoirs codifiés, valeurs) qui tente de s’imposer ou de se proposer aux savoirs en adhérence (savoirs propres au sujet et à son histoire). L’activité comme débat de savoirs installe une dialectique sur l’expérience professionnelle, où le sujet construit ses propres renormalisations. Ce qui suppose un processus de subjectivation : une sémiotisation de l’agir par des couches

67

langagières, un exercice réflexif, et une réinterprétation d’un système de normes en propre.

1.7. Synthèse intermédiaire : l’IP des enseignants ou la permanente

Documents relatifs