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L’habitus fait le sens pratique, qui est lui-même « sens du jeu », donc compétence à suivre les règles instaurées dans un champ sans que ces règles n’aient besoin d’être discutées, formalisées, ni même exprimées verbalement. Mais à quoi bon être compétent si le jeu ne nous semble pas intéressant ? Les prises de position d’un sujet dépendent de ses dispositions et du contexte ambiant. Mais elles n’ont de sens que si elles s’adossent à des intérêts et des mobiles sous-jacents, qui justifient l’engagement du sujet dans le contexte en question.

Pour Bourdieu (1994) l’habitus d’un sujet procède d’abord du phénomène de l’illusio, c’est-à-dire du sens que ce sujet peut donner à une situation, de l’intérêt (objectif ou subjectif, matériel ou symbolique) qu’il trouve à s’y engager. Sans l’illusio, sans l’attrait du jeu, aucun champ ni aucune pratique n’ont d’enjeu. Il faut qu’une importance soit accordée au jeu, et que cette attribution d’importance soit apparemment spontanée, pour que le sujet s’attache quasi naturellement aux situations, aux choses et aux pratiques considérées. Le rapport ordinaire à un monde donné se joue donc et peut-être avant tout dans la valeur que certains êtres humains lui accordent avant même d’y rencontrer le succès.

3.2.1 De l’intérêt à s’engager dans une situation

Nous employons le terme de situation pour parler du contexte dans lequel le sujet évolue et déploie sa pratique. Bourdieu ne base guère sa théorie de l’habitus sur ce concept, utilisant toutefois de temps à autres le terme comme nous l’avons fait jusqu’à présent : « celui qui possède une maîtrise pratique, un art, quel qu’il soit, est capable de mettre en œuvre, dans le passage à l’acte cette disposition qui ne lui apparaît qu’en acte, dans la relation avec une situation [...] » (Bourdieu, 1980, p. 52). En fait, il développe bien davantage l’idée qu’en amont des situations, un espace social préexiste au sujet, cet espace étant vu comme un champ et plus particulièrement comme un champ de forces.

Toutes les sociétés se présentent comme des espaces sociaux, c’est-à-dire des structures de différences que l’on ne peut comprendre véritablement qu’à condition de construire le principe générateur qui fonde ces différences dans l’objectivité. Principe qui n’est autre que la structure de la distribution des formes de pouvoirs ou des espèces de capital qui sont efficientes dans l’univers social considéré – et qui varient donc selon les lieux et les moments. [...] C’est ce que j’entends signifier lorsque je décris l’espace social comme un champ, c’est-à-dire à la fois comme un champ de forces, dont la nécessité s’impose aux agents qui s’y trouvent engagés, et comme un champ de luttes à l’intérieur duquel les agents s’affrontent, avec des moyens et des fins différenciés selon leur position dans la structure du champ de forces, contribuant ainsi à en conserver ou à en transformer la structure (Bourdieu, 1994, pp. 54-55).

Cette définition de l’espace social comme un champ de forces offre plusieurs intérêts. Le premier est que ce champ et ses rapports de pouvoirs structurent les situations que le sujet est susceptible de rencontrer, et dans lesquelles il mobilise des schèmes d’action, de perception et de pensée. Ainsi, et toujours suivant Bourdieu, l’évolution des pratiques du sujet dans le champ considéré peut-elle être analysée selon le type de situations rencontrées, mais aussi selon les enjeux que ces situations présentent, notamment en termes de rapports de pouvoir.

On peut dès lors voir le champ et les situations qu’il regroupe comme l’espace d’un jeu, auquel les sujets observés prennent part, dans lequel ils affrontent les obstacles, développent des stratégies, prennent ou non le pouvoir, bref prennent position.

Le second avantage vient du fait justement que ces prises de position dans le champ ou dans le jeu sont observables et constituent en quelque sorte des éléments de pratiques. Ils peuvent notamment se traduire sous forme de choix perceptibles à travers les discours et/ou les gestes des sujets observables dans la situation. C’est à partir de l’analyse de ces prises de position dans le jeu que peut mieux se déceler l’habitus, parce qu’il fait justement agir les sujets selon une évidence, qu’il y a lieu de questionner. Tant que, pour les sujets, « le jeu en vaut la chandelle » (ibid., p. 151), ils s’y engagent et prennent position de manière quasi naturelle, c’est-à-dire en mobilisant des schèmes et en développant des pratiques qui vont de soi, parce que les structures de l’habitus (soit les dispositions intrasubjectives à leur principe), correspondent aux conditions intersubjectives de la situation. Autrement dit, les prises de position observables dans la pratique procèderaient d’un intérêt plus ou moins inconscient à s’engager dans le champ et dans le jeu, phénomène que Bourdieu nomme précisément illusio.

En fait le mot intérêt, dans un premier sens, voulait signifier très précisément ce que j’ai mis sous cette notion d’illusio, c’est-à-dire le fait d’accorder à un jeu social qu’il est important, que ce qui s’y passe importe à ceux qui y sont engagés. [...] Si vous n’êtes pas nés dans une société de cour, si vous n’avez pas un habitus d’homme de cour, si vous n’avez pas dans la tête les structures qui sont présentes aussi dans le jeu, [une] querelle [peut] vous [paraître] futile, ridicule. Si au contraire, vous avez un esprit structuré conformément aux structures du monde dans lequel vous jouez, tout vous paraît évident et la question même de savoir si le jeu en vaut la chandelle ne se pose pas. Autrement dit, les jeux sociaux sont des jeux qui se font oublier en tant que jeux et l’illusio, c’est ce rapport enchanté à un jeu qui est le produit d’un rapport de complicité ontologique entre les structures mentales et les structures objectives de l’espace social (ibid., p. 151).

Appréhender le « rapport enchanté » au jeu, c’est analyser les pratiques un cran plus profondément, pour commencer à envisager de nouvelles dimensions rendant leur origine compréhensible (leur attrait intrinsèque, l’oubli ou le déni de cet intérêt par les sujets, leur côté inconscient et/ou indicible). Pour Lahire (2006), le rapport de complicité ontologique entre l’externe et l’interne est aussi « au fondement de l’illusio, c’est-à-dire du rapport enchanté au monde » (p. 526). Pour fonder la théorie de ce rapport ontologique, Bourdieu s’inspire entre autres des théories phénoménologiques d’Husserl (1950) et de Merleau-Ponty (1945). En nous inscrivant dans cette visée épistémologique, il y a lieu de penser qu’en questionnant l’intérêt que les sujets ont à prendre telle ou telle position dans le jeu, dans

« l’espace social », on puisse en dire d’avantage sur leur habitus (les « structures mentales »).

En important par ailleurs cette idée dans le champ de l’école, au cœur des situations de classe et d’enseignement, nous pourrions peut-être mieux rendre compte de l’habitus des enseignants, en particulier de leur intérêt à montrer ou non à leurs élèves de quels savoirs et quelles compétences ils disposent personnellement. De quoi interroger par exemple comment ils s’engagent dans le jeu de la démonstration du salto, dans celui de la sollicitation des savoirs des élèves, ou encore dans celui du guidage magistral par l’enchaînement des questions-réponses (Maulini, 2001, 2004b).

3.2.2 Du sens à s’engager dans une situation

S’engager dans le monde, c’est-à-dire faire face à des situations qui se succèdent au cours du temps, constituées de sujets et d’objets, c’est donc percevoir, évaluer et agir (de manière plus ou moins observable) en fonction de ces situations, selon ses intérêts et valeurs. C’est prendre position en mobilisant un système de schèmes de perception, d’appréciation et d’action (un habitus), plus ou moins inconscient. Cet habitus structure non seulement la manière dont le sujet s’engage dans le monde, mais il se structure aussi lui-même, en même temps qu’il

oriente l’engagement. Cet engagement dans le monde est en fait inhérent à la condition humaine.

Naître, c’est entrer dans cette condition humaine. Entrer dans une histoire, l’histoire singulière d’un sujet inscrite dans l’histoire plus large de l’espèce humaine. Entrer dans un ensemble de relations et d’interactions avec d’autres hommes. Entrer dans un monde où on occupe une place (y compris sociale) et où il faudra avoir une activité (Charlot, 1997, p. 60).

Naître pour un sujet humain, c’est nécessairement s’engager, au risque de ne pas survivre.

« Et par là-même, naître c’est être soumis à l’obligation d’apprendre ». C’est s’engager dans le monde au gré d’un triple processus : « (1) d’hominisation (devenir homme), (2) de singularisation (devenir un exemplaire unique d’homme), (3) de socialisation (devenir membre d’une communauté, dont on partage les valeurs et où l’on occupe une place) » (ibid., p. 60). Avec la naissance commence donc – et par nécessité – l’éducation et la socialisation qui sont « une production de soi par soi [...], autoproduction qui n’est possible que par la médiation de l’autre et avec son assistance » (ibid., p. 60). Par l’éducation, c’est donc des manières d’entrer, de faire face et de s’engager dans le monde qui sont transmises en termes de savoirs, de valeurs, de normes et de pratiques, mais aussi d’émotions, de postures, bref de manières diverses d’appréhender le monde et de l’assimiler.

Ainsi est-ce bien dans la confrontation aux situations au cours du temps, en interaction avec un milieu et des sujets vecteurs d’épreuves et de tensions (Dubet, 1994), que se manifeste l’habitus en même temps qu’il est produit par l’expérience. Par sa manifestation au sein des pratiques, cet habitus met en jeu – de manière plus ou moins tangible et visible – les intérêts du sujet, autrement dit les mobiles qui le font agir de telle ou telle manière, pour telle ou telle raison. Comprendre les mobiles de l’activité d’un sujet dans une situation, c’est comprendre le sens de son activité, diraient Leontiev (1975/1984) ou, à sa suite, Charlot, Bautier et Rochex (1992). Plus précisément, le sens d’une activité se définit dans le rapport entre le but des actions (opérées) et les mobiles de l’activité (réalisée). Buts et mobiles ne sont donc pas équivalents : les premiers désignent les objectifs de chacune des actions engagées par le sujet, tandis que les seconds sont « les raisons, le plus souvent d’ordre affectif, qui permettent de comprendre un événement ou une action » (Le Trésor de la langue française, 2015).

Prenons l’exemple de situation suivant : à l’école, une élève se met au travail pour finir son exercice de mathématiques. Nous observons ici son action (relire la consigne) et son but (finir son exercice). Un observateur extérieur peut constater d’ailleurs que d’autres élèves se mettent aussi au travail pour finir le même exercice. Toutefois, il ne pourra comprendre le sens de leur action qu’en connaissant leurs mobiles, c’est-à-dire en questionnant leurs raisons plus ou moins conscientes d’agir, raisons qui peuvent fortement varier d’un élève à l’autre.

Ainsi, la première élève pourra-t-elle se mettre au travail pour faire plaisir à sa maîtresse, une seconde parce qu’elle aime résoudre des problèmes mathématiques, un troisième pour finir en même temps que le quatrième et pouvoir jouer plus rapidement à autre chose avec lui. Les actes observables sont les mêmes, mais les ressorts de l’action changent diamétralement, et donnent un sens différent à la pratique commune.

Un chevalier errant rentrait chez lui. Au détour du chemin, le voilà dans une carrière à ciel ouvert où travaillent plusieurs centaines d’ouvriers. Au premier qu’il croise, il demande : « que fais-tu là brave homme ? » « Tu vois, je casse des cailloux » lui répond l’intéressé en maugréant. Au second, il demande à nouveau : « Que fais-tu mon ami » « je travaille pour nourrir ma famille, cela n’a rien d’étonnant. » Il voit alors un troisième, à qui il pose la même question : « Et toi, que fais-tu ici ? » « Je bâtis une cathédrale ! » répond l’homme en souriant. Ces trois carriers font le

simplement de passer le temps (comme on peut le faire dans un pénitencier). La même action gagne en crédit si elle s’inscrit dans le projet de nourrir sa famille. Elle peut devenir pleine de sens si l’on a le sentiment de contribuer à une grande œuvre, même modestement (Maulini, 2009, pp. 1-2).

En suivant Charlot (1997), se mobiliser dans une situation, c’est donc suivre des mobiles internes, entendus comme des « raisons d’agir » et pour lesquelles on « se met en mouvement » (p. 62). Ainsi, le concept de mobile et celui d’intérêt ou d’illusio formalisé par Bourdieu (1994) semblent-ils converger pour montrer le sens qu’un sujet donne à son activité dans les situations. En d’autres termes, ils permettent de montrer comment le praticien investit les situations et ses (ré)actions face à elles. Si l’on considère que les situations sont constitutives des champs et des jeux qui se jouent dans chaque champ, alors les mobiles ou les intérêts qui sous-tendent l’engagement du sujet sont les ressorts principaux de son rapport plus ou moins enchanté aux différents mondes qu’il doit ou qu’il choisit d’habiter.

3.2.3 Un rapport ordinaire au monde

À partir du moment où le monde préexiste au sujet qui doit s’y intégrer (Charlot, 1997), chaque être humain a nécessairement un rapport avec ce monde, ses constituants et les situations qu’il rencontre : chacun a donc un rapport particulier (mais construit socialement), à la fois aux autres, à lui-même, aux objets et aux idées. À la suite de Charlot (ibid.), nous utiliserons la notion de « rapport au monde » pour désigner la relation d’échange que le sujet entretient avec le monde dans le but de l’assimiler intérieurement. On ne peut mettre ainsi le monde et le sujet simplement face à face. Chacun a une influence sur l’autre et vice versa, si bien qu’il faudrait plutôt parler, à la manière des biologistes, d’une « relation » d’un sujet avec son milieu : ce sujet « est biologiquement ouvert sur ce milieu, tourné vers lui, il se l’assimile [...]. Ce qui est bien autre chose qu’‘intérioriser’. Assimiler ce n’est pas seulement intérioriser, c’est ‘convertir en sa propre substance’ » (ibid., p. 90). Mais le monde

« assimilé » devient-il une disposition pour autant ? Nous pouvons postuler en tout cas, et en suivant Charlot et Bourdieu, que ce qui est assimilé n’est pas simplement empilé, mais s’organise et fait « système » à l’intérieur du sujet.

Bourdieu (1994) fait facilement l’économie du sujet lorsqu’il parle de « l’intériorisation », de

« l’incorporation » de « l’espace des positions sociales ». En effet, bien qu’il concède un psychisme à son « agent social », il semble réduire son activité à une simple intériorisation des stimuli extérieurs. Charlot (op.cit.) critique cette logique d’incorporation unilatérale et quasi mécanique du dehors par le dedans : « c’est négliger le fait que ‘l’intérieur’, le psychique, la subjectivité, a des lois propres d’organisation et de fonctionnement, irréductibles à celles de ‘l’extérieur’, du social, d’un espace de positions. Lorsque l’extérieur devient intérieur (pour autant qu’une telle distinction ait un sens…), il ne change pas seulement de place, mais de logique » (p. 38).

Hilgers (2006) affirme que l’habitus n’a jamais enfermé l’agent dans une reproduction irréversible de ses actions, et qu’il faut lui laisser son caractère dynamique. Il résulterait d’une superposition de couches de socialisation (familiale et scolaire principalement). L’agent agit en fonction de ce qu’il perçoit. Mais aussi, « d’une certaine manière, par sa pratique, l’agent fait exister ce qu’il perçoit. Il extériorise son intériorisation. Ce processus d’acquisition participe à la construction de ce que l’on est, de ce que l’on devient [...] ». L’habitus est à la fois ce qui expliquerait la reproduction des actions, mais également ce qui permettrait l’extériorisation, la création dans le monde. En parlant de l’action enseignante, Perrenoud

(1996e) explique aussi que « l’habitus ne s’oppose pas aux savoirs comme l’instinct s’opposerait à la raison. Il traduit simplement notre capacité de fonctionner ‘sans savoir ’, dans une routine économique ou pour faire face aux urgences du quotidien » (p. 192).

Si l’on reprend les propos de Bourdieu (1986), l’habitus d’un sujet « obéit à une logique pratique et définit le rapport ordinaire au monde » (p. 40) : cela signifie qu’il oriente les pratiques humaines dans ce qu’elles ont de plus fonctionnel, de plus stable et de plus efficace.

Cependant, il permet à la fois la reproduction et la création, la répétition de procédures habituelles et le bricolage, l’ordinaire et l’extraordinaire, l’ancien et le nouveau, le rassurant et l’intriguant. Il définit un rapport au monde ordinaire, humain, donc à la fois socialement reconnaissable et subjectivement improvisable. Il rend compte de la manière dont chaque praticien s’engage effectivement dans sa pratique (prises de position) et comment il est susceptible de s’y engager ultérieurement (dispositions). Pour Troger (2010), la « relation au monde » est la face interne d’une habitude, qu’il qualifie précisément de « disposition ».

L’ensemble des dispositions n’est pas toujours cohérent, mais il s’efforce de faire avec les contradictions, sous peine d’obliger le sujet à perdre son identité, voire son unité.

La cohérence d’un rapport au monde est fondamentalement liée à la récurrence des relations sociales : c’est parce qu’il y a de la récurrence, de la permanence et finalement de l’histoire qui se répète, qu’il y a cohérence pour l’être social. [...] Comme un rapport au monde n’est pas un empilement, une juxtaposition de savoirs, de savoir-faire ou de rôles, comme le laissent penser les expressions de ‘répertoires de rôle’ ou de ‘stock de connaissances’, lors de la participation d’un être social à de nouvelles formes de relations sociales, il n’y a ni un processus linéaire harmonieux d’accumulation, de stockage de rôles ou des savoirs impliqués par ces rôles, ni un processus de substitution d’un savoir par un autre, mais un travail de recomposition constant du rapport au monde qui peut produire, dans des formes sociales différentes, des actes, actions ou pratiques contradictoires (Lahire, 1993, pp. 283-284).

Au final, nous pouvons dire qu’habitus et rapport ordinaire au monde expriment la même idée : celle d’un système de schèmes de perceptions, d’appréciations et d’actions à double face, qui se donne à voir dans les prises de position du sujet, et qui conditionne intérieurement ses comportements. Ce système dynamique est en constante recomposition. Il organise l’action ordinaire du sujet dans les situations qu’il rencontre habituellement, celles qui le sollicitent et lui apprennent à vivre humainement (Cifali, 1994). Le qualificatif d’ordinaire n’est pas anodin, et veut signifier trois idées concomitantes :

1. Comme nous l’avons déjà dit, l’habitus est placé sous le joug de la condition humaine : il ne peut produire que des pratiques humaines ordinaires, c’est-à-dire rationnellement limitées (Crozier & Friedberg, 1977). Des conduites exceptionnelles sont bien sûr envisageables, mais elles supposent précisément des ruptures avec celles que le sens commun ferait attendre a priori.

2. Deuxièmement, l’habitus d’un sujet désigne son rapport ordinaire au monde parce qu’il est intimement lié aux situations dans lesquelles ce sujet mobilise régulièrement les mêmes schèmes : ces schèmes sont automatisés et vécus comme évidents, naturels, ordinaires, parce qu’ils sont mobilisés dans des situations habituelles. Cela ne signifie pas que de tels schèmes excluent le calcul stratégique et la critique réflexive, mais qu’ils intègrent celles-ci dans une économie globale de conduites et de raisonnements.

3. Troisièmement, on peut aussi comprendre que le rapport au monde peut être provisoirement extraordinaire avant de devenir ordinaire à force d’expériences

peu à peu friand de résolutions de problèmes de géométrie analytique ou d’algèbre linéaire.

Dans l’expression « rapport au monde », nous considérons l’ensemble des êtres humains, des objets et des idées avec lesquels le sujet est susceptible d’entrer en rapport – rapport plus ou moins enchanté – par le biais des situations qu’il rencontre. Ainsi rapport enchanté et rapport ordinaire au monde expriment-ils potentiellement la même vertu de l’habitus : celle de rendre

Dans l’expression « rapport au monde », nous considérons l’ensemble des êtres humains, des objets et des idées avec lesquels le sujet est susceptible d’entrer en rapport – rapport plus ou moins enchanté – par le biais des situations qu’il rencontre. Ainsi rapport enchanté et rapport ordinaire au monde expriment-ils potentiellement la même vertu de l’habitus : celle de rendre