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224. La fixation de normes minimales en matière de transparence pose bien évidemment la question des sanctions pour les faire respecter. Quid en effet si l'émetteur ne fournit pas par exemple une information précontractuelle suffisante, en ne respectant pas les exigences légales quant au contenu minimal du document contractuel? Les sanctions à appliquer doivent être choisies avec prudence car le but n'est pas de renvoyer systématiquement les parties devant les juges et d'engorger encore les tribunaux. Conformément au principe de la proportionnalité, il conviendrait normalement de prévoir des mesures civiles avant tout, voire administratives (retrait d'une autorisation d'exercer pour

645 Cf. infra note 831.

646 Comité consultatif [France], Rapport 1988-1989, p. 15.

l'émetteur, dans les cas graves), et de ne garder les éventuelles sanctions pénales que pour des infractions bien déterminée~?.

225. S'agissant des mesures civiles, diverses solutions sont envisageables.

Tout d'abord, dans la phase purement précontractuelle, tout défaut d'information devrait s'apprécier sous l'angle de la culpa in contrahendo, c'est-à-dire donner lieu à d'éventuels dommages-intérêts. Une fois le contrat conclu, le non-respect d'obligations d'information devrait ouvrir la voie à deux droits différents pour le client: d'une part la possibilité d'invalider ou de résilier le contrat à certaines conditions648; d'autre part le droit de prétendre à d'éventuels dommages et intérêts pour exécution imparfaite du contrat (responsabilité contractuelle)649 ou même consécutivement à l'invalidation du contrat (dommages-intérêts négatifs).

En matière de frais, on pourrait également imaginer que le manque de transparence soit sanctionné par la libération du client de régler les frais demandés.

226. Conformément aux principes généraux du droit civil, on pourrait soutenir que le fait de ne pas informer le consommateur sur l'existence de certaines clauses contractuelles devrait tout simplement conduire à la non-incorporation de ces clauses dans le contrat650, Un tel régime pourrait être favorable au consommateur lorsque l'on a par exemple affaire à des clauses d'exonération de responsabilité ou d'adaptation de tarif puisque de telles clauses seraient inapplicables. Toutefois, il ne nous semble pas qu'il s'agisse de la meilleure solution si la législation prévoit des obligations impératives en matière d'information. En effet, si l'on retient comme sanction du non-respect de ces obligations la seule non-incorporation, voire la nullité de certaines clauses pour

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Pour un exemple de sanction par des amendes en cas de violation de certaines obligations d'infonnation, voir l'art. 30 de la loi danoise consolidée sur les cartes de paiement etc. La · question du type de mesures à adopter (droit civil, administratif ou pénal) dépend toutefois étroitement de la tradition juridique de chaque Etat et toute initiative d'harmonisation au niveau européen devrait tenir compte de ces différences.

S'agissant du non-respect du devoir d'infonnation sur des points que le client aurait dft connaître au moment de la conclusion du contrat, c'est la validité même du contrat qui devrait pouvoir être remise eu question: si le client avait correctement été infonné, il n'aurait pas conclu le contrat en question, de sorte qu'il devrait pouvoir bénéficier d'un droit d'invalidation pour erreur (il faudrait pour éviter les abus que l'erreur ait porté sur des faits essentiels). Quant aux renseignements à fournir durant l'exécution du contrat, le non-respect de l'obligation d'infonnation devrait donner au client un droit de résiliation du contrat (par exemple avec effet immédiat, pour justes motifs).

C'est par exemple le système prévu par la directive 90/314/CEE du 13.6.1990 concernant les voyages, vacances et circuits à forfait (JOCE no L 158 du 23.6.1990, p. 59 ss):

l'organisateur doit fournir un certain nombre d'infonnations au consommateur, ces infonnations l'engagent et si elles sont incorrectes, incomplètes ou trompeuses, sa responsabilité sera engagée en cas de dommage (VIGNERON-MAGGIO-APRILE, p. 43).

De même, si l'on appliquait le principe du "Transparenzgebot" (cf. en détail infra no 282 ss), le simple manque de clarté des clauses pourrait cas échéant conduire à leur nullité.

manque de transparence, l'on reste confronté au problème du complètement du contrat. Comme certaines clauses n'ont pas pu être appliquées, quel régime doit-on substituer pour combler ces lacunes du cdoit-ontrat et permettre une informatidoit-on du consommateur?

Si l'on est en présence d'une législation réglementant les paiements transfrontières, on pourra recourir à ces dispositions légales pour compléter Je contrat. Ce comblement ne concernera cependant que les normes de fond, les droits et obligations des parties en cas de fraude, d'inexécution, etc., mais pas les exigences d'information sur ces droits et obligations. Or ce sont précisément ces exigences d'information qui nous intéressent ici. En l'absence de droit harmonisé des paiements transfrontières, la lutte contre des clauses contractuelles par Je biais des règles d'incorporation peut être précieuse, mais si l'on a affaire à un droit harmonisé avec des exigences d'information, le seul moyen de faire respecter celles-ci est d'adopter des sanctions spécifiques contre l'absence de transparence. Le simple comblement des lacunes contractuelles par des normes légales de fond n'assure pas une information préalable efficace sur ces dernières.

227. A noter que les sanctions civiles présentent un désavantage en faisant intervenir un mécanisme individuel de règlement des litiges. Dans de nombreux cas, on sait en effet que les consommateurs n'auront aucun intérêt à porter leur contentieux devant la justice ordinaire si celui-ci ne concerne que des questions d'information. L'administration des preuves peut être ardue, l'invalidation du contrat difficile si les conditions d'erreur sont interprétées restrictivement, des dommages-intérêts seront souvent inexistants en l'absence de dommage subi par les clients, sans compter la lenteur et les cofits importants que représentent une procédure judiciaire651. Le non-respect d'exigences impératives en matière de transparence devrait donc pouvoir être combattu parallèlement par un autre biais, soit par un mécanisme collectif. Les organisations représentant les intérêts des consommateurs devraient pouvoir, si elles constatent que des institutions financières ne respectent pas des obligations légales en matière d'information, saisir une autorité judiciaire ou para-judiciaire et obtenir la condamnation des professionnels à respecter la réglementation moyennant Je paiement d'astreintes, ou même obtenir des dommages-intérêts pour Je dommage créé à l'intérêt collectif des consommateurs, sans parler du rôle que pourrait également jouer Je droit pénal. De telles actions collectives existent déjà parfois ou pourraient être aménagées, par exemple sur la base des législations nationales en matière de concurrence déloyaJe652.

651 D'ou d'ailleurs l'intérêt de la mise en place de mécanismes de règlement des litiges simples, rapides et peu couteftx. Cf. en détail infra no 786 ss.

652 Voir en droit suisse infra no 303, 623.

Ces thèses dégagées, il convient maintenant d'examiner le niveau d'exigences que l'on trouve au niveau communautaire de lege tata en matière de transparence.