• Aucun résultat trouvé

L La recommandation 90/109/CEE

244. La recommandation 90/109 du 14 février 1990 concernant la transparence des conditions de banque applicables aux transactions financières transfrontalières a été le premier texte adopté par la Commission qui se voulait spécialement focalisé sur la question de l'information des clients lors de virements intra communautaires. Les Etats membres ont été chargés par là de surveiller que les établissements qui procèdent à des transactions transfrontalières appliquent certains principes de transparence 710.

710 Les principes énoncés dans la recommandation visent généralement à "rendre plus transparentes les informations et les règles de facturation" observées par les établissements de crédit et les services postaux lors de transactions financières transfrontalières. Plus concrètement, l'annexe prévoit tout d'abord que les établissements concernés doivent porter à la connaissance de la clientèle une infonnation ex ante

"aisément compréhensible et accessible". Les moyens proposés sont: l'affichage ou tout autre moyen d'information pennanent indiquant les frais et les délais pour effectuer une opération financière transfrontalière, pour autant qu'ils incitent la clientèle à s'informer;

une infonnation standardisée, par exemple sous fonne de brochure, spécifiant notamment les commissions prélevées et les conditions relatives aux dates de valeur; une infonnation plus spécifique sur demande, qui devra pennettre au donneur d'ordre de connaître les différentes modalités offertes par l'établissement dans l'exécution des ordres et d'estimer les frais et délais fixés par les banques intermédiaires. La différence entre ces méthodes ne saute cependant pas aux yeux.

Deuxièmement, s'agissant de l'infonnation ex post, le texte communautaire prévoit que les décomptes consécutifs à une transaction doivent indiquer le détail des commissions et des frais facturés, ainsi que le taux de change appliqué. La Commission propose là encore différentes méthodes pennettant d'appliquer ce principe.

Dans une troisième partie, la recommandation vise à éviter le double prélèvement des frais: le client devrait ainsi être infonné des possibilités qu'il a de garder à sa charge les frais et commissions encourus ou au contraire de les faire supporter au bénéficiaire du virement, qu'il s'agisse des frais prélevés par la banque du donneur d'ordre ou de ceux de la banque du bénéficiaire. Le donneur d'ordre devrait dès lors recevoir une information préalable (évaluation forfaitaire ou estimation) sur les frais qu'il devra encourir pour l'intervention des différents intennédiaires.

245. La portée de cette recommandation a toujours laissé perplexe711, En effet, on y trouve tant des dispositions très précises que des principes beaucoup plus généraux. On ne peut manquer de relever la différence de formulation entre ce texte et un document comme la recommandation 88/590: si cette dernière est caractérisée par des termes très rigoureux ("les clauses contractuelles imposent ... l'obligation", "l'émetteur ... est tenu", etc.), la recommandation 90/109 est elle beaucoup moins stricte, la Commission proposant par exemple pour chaque principe exposé qu"une des méthodes d'application ... pourrait être", ce qui laisse ainsi la possibilité d'opter pour d'autres procédés, tous les principes à suivre étant par ailleurs mentionnés au conditionnel ("chaque établissement devrait ... "). Il est clair que la recommandation reste de toute manière un instrument juridiquement non contraignant au sens de l'art. 189 al. 5 du traité CE712, mais on peut se demander si la formulation plus ou moins stricte des règles à respecter ne réduit pas plus encore l'efficacité du texte713.

Quoi qu'il en soit, la recommandation 90/109 devrait perdre toute portée véritable. Ses insuffisances, son non-respect, le fait qu'elle ait été largement effacée par l'adoption de Lignes directrices du secteur bancaire ont en effet conduit à la mise en chantier de la directive 97/5, qui devrait faire seule référence en matière de transparence des conditions applicables aux virements transfrontières maintenant qu'elle est en vigueur.

2. La directive 97 /5/CE concernant les virements transfrontaliers

246. Les Lignes directrices des Associations européennes du secteur du crédit (AESC) pour une information à la clientèle sur les paiements à distance transfrontaliers auraient dO être appliquées par les banques dès le 1er janvier

711 712 713

La recommandation devient plus précise s'agissant du temps d'exécution des opérations, puisque dans un quatrième et un cinquième principe, il est prévu que les différents établissement bancaires devraient traiter les ordres de transfert dans des délais déterminés (deux jours généralement. Voir en détail infra note 1121).

La recommandation contient encore un sixième principe relatif au traitement des plaintes (cf. infra note 1951).

Critique par STAUDER, Droit de la consommation, p. 209.

Cf. toutefois supra no 127.

En outre, on peut reprocher à la recommandation 90/109 d'être incomplète sur certains points (voir les critiques de GOYENS, Payer, p. 88, et de HôRMANN, p. 210 ss). En particulier, elle ne définit pas de régime juridique spécifiquement applicable aux dates de valeur (cf. aussi DUSSEAUX, conditions, p. 79; ALLIX, Developments, p. 139) - si ce n'est un principe général d'information -, alors que les dates de valeur constituent un problème important des services bancaires aujourd'hui. De plus, il n'y a pas d'exigences quant à l'information précontractuelle sur le taux de change appliqué, celui-ci n'étant indiqué que dans le décompte de la transaction.

1993714, or les deux études réalisées par la Commission en 1993 et 1994 ont montré que le respect de ces règles déontologiques était pour le moins relatif. En matière de transparence, la directive sur les virements transfrontaliers ne vise donc, dans une certaine mesure, qu'à transformer ces lignes directrices non obligatoires en un instrument contraignant. Comme ces Lignes directrices s'inspiraient elles-mêmes de la recommandation 90/109, il en découle, comme on peut le lire dans un considérant de la directive, que la directive "satisfait aux conditions découlant des principes énoncés dans la recommandation"715.

247. Comme l'expose la Commission, les dispositions adoptées définissent des obligations générales de transparence que les établissements proposant des virements transfrontières seront tenus de respecter, et les Etats membres ainsi que lesdits établissements pourront librement déterminer le détail du contenu de ces exigences716. Conformément à l'art. 3 B al. 3 du traité sur l'Union européenne, la directive n'établit donc que les exigences minimales nécessaires pour assurer un niveau adéquat d'information à la clientèle717.

248. Seuls les virements sont concernés, alors qu'initialement, la Commission avait prévu d'étendre les dispositions relatives à la transparence à d'autres modes de paiement transfrontaliers, tels que les débits directs, les chèques et les cartes de paiement718. Ce champ d'application restreint constitue donc une lacune puisque les problèmes d'information se posent bien évidemment également pour d'autres moyens de paiement transfrontière que les virements. Cette lacune a en partie été comblée par la recommandation 97/489 pour les instruments de paiement électroniques et en particulier les cartes, bien qu'un tel texte juridiquement non contraignant n'ait évidemment pas la même valeur qu'une directive.

249. La directive 97/5 s'attache à juste titre à distinguer deux périodes quant à la transparence des condition applicables aux virements: la période qui précède le moment où le donneur d'ordre initie le paiement et où le bénéficiaire le reçoit (information ex ante) et la période qui suit l'exécution du paiement tant pour le donneur d'ordre que pour le bénéficiaire (ex post)719,

714 715 716 717 718

719

Cf. supra note 4-09.

Consid. 8.

Commission [UE], Transferts, p. 20.

Consid. 8.

Premier projet de proposition de directive du Conseil concernant la transparence et la qualité d'exécution des paiements transfrontaliers à distance, art. 1 para. 2, art. 2 Iit. d, art. 3 et 4, in: Communication de M. V ANNI D'ARCHIRAFI et de Mme SCRJVENER à la Commission, Transparence et qualité d'exécution des paiements transfrontaliers, SEC(93) 1968 (non publiée; cf. supra note 427). SOUSI-ROUBI, Dates de valeur, p. 218.

VEREECKEN/TROBERG. p. 149 ss; MA TUSCHE, p. 136 SS (avec une comparaison avec le droit allemand, dans la perspective de la transposition de la directive); SCHNEIDER, Angleichung, p. 590 s. Présentation des dispositions de la proposition de directive, de la

250. S'agissant tout d'abord des informations préalables72°, les établissements doivent fournir des informations écrites sur les conditions applicables aux virements transfrontaliers, cas échéant aussi par voie électronique721, et sous une forme aisément compréhensible722, Cette transparence doit être pratiquée à deux niveaux: d'une part pour les clients potentiels, soit une information générale destinée au marché; d'autre part pour les clients effectifs, c'est-à-dire les cocontractants des établissements 723. Le minimum d'informations à fournir a été défini de la manière suivante:

a) indication des délais, d'un côté pour le donneur d'ordre jusqu'à ce que le compte de l'établissement du bénéficiaire soit crédité, de l'autre pour le bénéficiaire jusqu'à ce que le montant soit crédité sur son propre compte. Cette différence formelle entre l'expédition et la réception d'un paiement a été introduite par le Conseil dans sa position commune. Elle résulte du régime fixé dans la directive quant à la durée des délais eux-mêmes. La directive fixe en effet, en nombre de jours, d'une part un délai maximum pour l'établissement du donneur d'ordre, entre l'acceptation du virement et son crédit sur le compte de l'établissement du bénéficiaire, d'autre part un délai maximum pour l'établissement du bénéficiaire, entre le moment où son compte est crédité et le moment où il crédite le compte du bénéficiaire724;

b) modalités de calcul de toutes les commissions et frais payables par le client à son établissement, les taux y compris le cas échéant;

c) indication des cours de change de référence utilisés725;

d) la date de valeur appliquée par l'établissement, s'il en existe une;

e) indication des procédures de réclamation et de recours pour la clientèle, avec modalités d'accès726;

720 721 722 723 724 725

726

proposition modifiée et de la position commune du Conseil par HARRIS-BURLAND/DONÀ, p. 195 ss. Analyse critique de la proposition in BEUC, directive, p. 4 S.

Art. 3.

Introduit par le Parlement européen en première lecture.

Dans les propositions de la Commission, les informations devaient en plus être ''précises".

Introduit par le Conseil dans sa position commune.

Art. 6. Cf. infra no 425 ss.

En première lecture, le Parlement européen avait proposé que les informations données comportent toutes les commissions et tous les frais de virement, y compris toutes les taxes et assiettes sur la base desquelles le taux de change est appliqué, mais cette exigence de transparence beaucoup plus précise qu'une simple base de calcul n'a pas été reprise par la Commission.

Le Parlement européen avait proposé en première lecture que toutes ces informations soient fournies directement au client dans un format standardisé pour faciliter 1 a

251. S'agissant maintenant des informations postérieures à un virement transfrontalier727, tant pour le donneur d'ordre qui a exécuté le paiement que pour le bénéficiaire qui l'a reçu, les exigences à respecter par les établissements sont sensiblement les mêmes que pour la période ex ante au niveau de la forme728 . Au niveau du fond, les informations minimum à donner sont les suivantes:

a) référence permettant au client d'identifier le virement transfrontalier. Il est en effet important, non seulement pour le donneur d'ordre, mais aussi pour le bénéficiaire de pouvoir déterminer précisément la contrepartie concernée par le paiement;

b) le montant initial du virement, ce qui favorise la transparence des coüt puisque le bénéficiaire pourra par exemple se rendre compte que si le montant qui lui est viré est inférieur au montant de sa créance contre le donneur d'ordre, cette différence n'est peut-être pas due à une somme trop faible payée par ce dernier, mais aux frais prélevés pour l'exécution d'un virement international faisant intervenir plusieurs établissements;

c) le montant de tous les frais et commissions à charge du client.

S'agissant des questions de répartition des frais, la directive prévoit que si le donneur d'ordre a spécifié que les frais doivent être en tout ou en partie imputés au bénéficiaire, ce dernier doit en être informé par son établissement. Si la directive ne prévoit pas que le bénéficiaire soit informé du choix inverse du donneur d'ordre de garder tous les frais à sa charge (ce qui permettrait de déceler un éventuel "double charging"), c'est tout simplement parce que cela est implicite: il s'agit là de l'hypothèse normale. Nous verrons en effet que la directive ne laisse pas le choix aux institutions financières de proposer ou non un service de paiement international net de frais 729, Les établissements sont tenus d'exécuter chaque virement transfrontière pour son montant intégral, sauf si le donneur d'ordre a expressément spécifié que les frais relatifs au virement doivent être imputés au bénéficiaire 730. Le bénéficiaire peut donc partir de l'idée que si son établissement ne l'informe pas d'une répartition particulière des frais, ceux-ci sont théoriquement entièrement à la charge du donneur d'ordre.

La directive ne prévoit en revanche rien quant à l'information du donneur d'ordre sur la décomposition des frais entre les différents établissements comparaison entre les coftts, mais la Commission n'a pas suivi cette voie de la normalisation.

727 Art. 4.

728 729 730

Quoi que les informations écrites doivent à ce stade être "claires", ce qui n'était pas précisé pour la période ex ante !

Cf. infra no 433.

Art. 7 para. 1.

participants, non seulement après l'exécution du virement, mais également dans la période précédant cette exécution. Une transparence efficace au niveau de l'origine des frais facturés au donneur d'ordre est pourtant un corollaire important à l'interdiction du "double charging" donneur d'ordre/bénéficiaire, en tant que moyen d'éviter que l'on reporte sur ledit donneur d'ordre un ensemble de frais ne correspondant pas à la réalité des coüts de chaque établissement et pouvant concerner la même activité déployée (service payé deux fois)731;

d) la date de valeur appliquée, s'il en existe une;

e) le taux de change utilisé (l'établissement qui a effectué la conversion en informe son client)732.

25 2. Quant au détail des informations à fournir, les exigences contenues dans la directive sont à saluer et vont constituer un progrès indéniable par rapport à la situation actuelle. L'information précontractuelle n'a pas été omise ("clients potentiels"). Les supports sont résolument tournés vers l'avenir puisque l'on prévoit tant une information écrite que par voie électronique. L'exigence de forme est globalement adéquate ("aisément compréhensible"), bien que l'on ait pu insister également, comme dans la recommandation 88/59()733, sur une forme qui permette de lire facilement les conditions (limitation des trop petits imprimés par exemple).

253. Il est curieux en revanche qu'à l'inverse des recommandations de la Commission touchant aux paiements face-à-face, il n'existe aucune disposition sur la langue des contrats. On peut se demander également ce qu'il faut entendre par une information sur "les conditions applicables aux virements transfrontaliers": cela comprend-il une description des services disponibles, une aide au choix du mode de paiement le plus approprié dans des circonstances données, des indications sur le mode d'utilisation, un résumé des droits et obligations des parties, etc.? On peut en douter dans la mesure où la directive prévoit une liste précise de ce que doivent au moins comprendre les informations préalables et que de tels éléments n'y figurent pas. Il aurait donc été souhaitable de rallonger quelque peu cette liste d'informations minimum et d'insister plus, non seulement sur des indications d'ordre juridique (le client devant savoir quels seront ses droits et obligations avant d'effectuer un paiement), mais aussi tout simplement sur des renseignements factuels quant aux services offerts et leur mode d'utilisation734.

731 Supra no 205.

732 Introduit par le Conseil dans sa position commune.

733 Art. 3.2.

734 Ceci était par exemple prévu dans les Llgnes directrices des Associations européennes du secteur du crédit pour une information à la clientèle sur les paiements à distance