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ID. La relation institution financière - client

40. Parmi les différentes relations juridiques créées par tous les moyens de paiement transfrontières décrits plus haut, nous avons choisi de nous en tenir à la seule relation institution financière I client. Les débats qui ont eu lieu ces dernières années, tant dans l'enceinte de certains organismes qu'en doctrine, ont 80 Conseil national du crédit [France], moyens de paiement, p. 40.

81 Sur cette notion, cf. supra no 33.

82 Voir toutefois supra note 68 sur le statut de "monnaie électronique".

83 ESCHER, p. 1175 s. En tout état, VISA et MasterCard ont développé une norme commune (SEf = Secure Electronic Transaction) pour sécuriser les transactions par carte sur Internet, tandis que d'autres sociétés travaillent sur différents systèmes de paiement virtuel sécurisé: Institutions Européennes & Finance, no 28, 31.10.1995, p. 9 s.; no 32, 29.2.1996, p. 3, et no 42, 31.1.1997; L'Agefi, 7.11.1997.

84 "Groupe PADOA-SCHIOPPA 11, Payment Systems, p. 37.

85 Cf. BRI, Payment Systems, p. 488 ss; IME, "Blue Book" [2], p. 677 ss. Europay, partenaire de MasterCard, a été créée en 1992 et résulte de la fusion entre Eurocard International et Eurocheque International (ASB, Rapport 1991192, p. 157, et Rapport 1992193, p. 156). Europay propose aujourd'hui en Europe des services de paiement sans espèces selon un triple concept: ''pay be/ore", il s'agit de travellers' cheques; "pay now", soit les chèques et leur carte de garantie, les cartes de retrait aux distributeurs automatiques de billets et les cartes de débit, avec le nouveau service de paiement au point de vente (EFI'POS) edc/Maestro; ''pay later", au moyen de cartes de crédit ou accréditives. De son côté, VISA International propose également plusieurs services, dont le plus connu est représenté par les cartes de crédit émises par les banques membres du réseau.

mis en évidence combien cette relation juridique méritait une attention toute particulière en raison des enjeux que représente l'évolution des systèmes de paiement et la position bien souvent précaire qui en résulte pour le consommateur. Nous tenterons ainsi de montrer dans quels domaines et pour quelles raisons il paraît important d'assurer une meilleure protection du consommateur de services financiers, partie faible de la relation contractuelle.

41. Les autres rapports juridiques propres aux divers modes de paiement transfrontière posent des questions différentes86, qui ne seront abordées que dans la mesure où elles ont ou peuvent avoir une incidence sur la relation entre le client et son établissement.

La relation de base entre le débiteur et le créancier du paiement nous ramène essentiellement à la théorie générale du droit des obligations, bien qu'elle puisse présenter il est vrai quelques particularités dans le cas de paiements transfrontières (questions de droit international privé et de cours légal de la monnaie par exemple)87.

Quant aux relations entre institutions financières, pour le paiement et la compensation des chèques, l'exécution et le règlement de virements internationaux, etc., qu'il s'agisse de rapports directs entre banques, entre administrations postales ou via des systèmes de transfert électronique de fonds interbancaires, les questions posées sont nombreuses et complexes. Elles peuvent tant concerner la stabilité des systèmes dans leur ensemble (normes visant à éviter les risques systémiques88) que se rapporter aux problèmes traditionnels de droit des obligations (moment du paiement, révocation, régime de responsabilité, etc.), ceux-ci devant être appréhendés différemment que pour les relations faisant intervenir des consommateurs, dans la mesure où les professionnels sont en principe de force égale dans la négociation contractue!le89,

S'agissant enfin des relations entre institutions financières et commerçants / prestataires de services, dans le cadre des systèmes de paiement par carte au point de vente, elles posent d'autres problèmes contractuels encore, souvent d'ordre technique, et elles touchent également à d'autres domaines, tels que le droit de la concurrence ou la protection des données. Nous n'aborderons pas ces problèmes en détail, mais il sera tout de même fait mention des questions qui intéressent les consommateurs (acceptabilité des cartes auprès des commerçants, tarification différenciée en cas de paiement sans numéraire).

Relevons encore que le commerçant, et plus généralement tout bénéficiaire d'un 86 CRANSTON, Payment, p. 246 ss.

87 Voir notamment: BÜLOW, p. 430 ss.

88 Cf. supra note 45.

89 Voir notamment: HOLZWARTH, p. 101 ss; GEVA, p. l ss.

paiement, peut aussi se trouver, à l'instar du consommateur, dans une position d'infériorité à l'égard de l'institution financière qui gère son compte. Certains développements que nous ferons dans l'optique des clients donneurs d'ordre quant au problème de l'égalité des parties en matière de paiements transfrontières peuvent donc s'appliquer mutatis mutandis aux bénéficiaires.

4 2. Dans l'optique du rapport contractuel entre un client et son établissement, nous accorderons une place particulière aux nouveaux systèmes électroniques de paiement grand public. Qu'il s'agisse de paiements face-à-face (distributeurs automatiques de billets, guichets automatiques de banque, terminaux aux points de vente, au moyen de différentes cartes en plastique) ou de paiements à distance (banque à domicile), ces systèmes, développés pour des utilisations d'abord nationales mais qui tendent à devenir transfrontières, posent de nouveaux problèmes juridiques fort intéressants de par la dématérialisation des opérations et le passage à des procédés entièrement électroniques basés sur des codes confidentiels.

Dans ce cadre, l'analyse juridique nous conduira à aborder en partie le droit du virement. Indépendamment du caractère électronique ou non des opérations, le virement fera de toute manière l'objet d'un certain nombre de développements car il constitue aujourd'hui le principal moyen de paiement transfrontalier à distance90, pour lequel des problèmes sérieux et spécifiques ont été constatés91.

En revanche, les spécificités du débit direct ou recouvrement ne seront pas traitées. D'une part, le débit direct semble être encore très peu utilisé en pratique comme mode de paiement transfrontière92. D'autre part, les principes développés pour le virement pourront lui être applicables dans de nombreux cas.

Quant aux problèmes des paiements transfrontières en espèces et surtout le droit du chèque, ils ne seront examinés que tout à fait incidemment. Ces méthodes traditionnelles de paiement semblent avoir de la peine à résister à la révolution de l'informatique et de la monétique, de sorte que, dans une certaine mesure, surtout pour le chèque, ils appartiendront bientôt au passé93.

90 Supra no 26.

91 92

93

Cf. infra no 167 ss.

Voir sur ce sujet W AND Lothar, Die grenzüberschreitende Lastschrift, in: HADDING W. I SCHNEIDER U. (éd.). Grenzüberschreitender Zahlungsverkehr im Europliischen Binnenmarkt I Transboundary Payment Transactions in the European Single Market I Transactions financières transfrontières dans le Marché unique européen, Cologne 1997, p. 117 ss; VOLLRATH, p. 31 ss.

Seront par ailleurs exclues de notre étude les opérations commerciales internationales qui comprennent un paiement mais qui ne correspondent pas à la définition traditiollllelle du trafic des paiements, comme les crédits documentaires, les lettres de crédit, les garanties bancaires, etc., de même que les effets de commerce ou effets de change (lettres de change

4 3. Selon les cas et en particulier pour les cartes, nous appellerons

"émetteur" toute institution financière qui propose, dans le cadre d'une relation contractuelle, un ou des moyens de paiement à un consommateur. L'expression d"'institutionfinancière" doit être comprise dans un sens très large: il peut s'agir bien sür d'un établissement de crédit (banque, caisse d'épargne, etc.), de tout autre professionnel proposant des services de paiements transfrontières (organisation de cartes accréditives, commerçant émetteur de cartes privatives, etc.), mais aussi d'une administration ou banque postale94. Par souci de simplification terminologique et pour mettre l'accent sur la relation entre un émetteur et son client, nous engloberons généralement dans la notion d'"intermédiaires" toutes les institutions financières autres que l'établissement du donneur d'ordre qui peuvent intervenir dans un paiement transfrontière jusqu'à achèvement complet en faveur du bénéficiaire, donc y compris l'établissement du bénéficiaire95.

Pour ce qui est de l'utilisateur de moyens de paiement transfrontière, nous emploierons indifféremment les termes de consommateur, titulaire d'un moyen de paiement, client, porteur de carte, ou encore donneur d'ordre. Dans la mesure où les petites et moyennes entreprises procèdent à des paiements transfrontières entrant encore dans la catégorie des petits paiements de détail que peuvent effectuer des personnes physiques, nos développements relatifs aux consommateurs valent mutatis mutandis également à leur égard dans de nombreux cas.

Quant au bénéficiaire du paiement, nous utiliserons, lorsqu'il s'agit plus spécialement d'un paiement au point de vente, les termes de commerçant ou prestataire, ce qui là encore doit être entendu dans un sens large comme toute personne envers qui le consommateur a une dette d'argent pour la fourniture d'un bien ou la prestation d'un service.

94 95

et billets à ordre) qui sont eux trop éloignés de la notion de moyens de paiement grand public et qui impliquent un élément de crédit qui ne nous intéresse pas ici. Ces instruments ne sont d'ailleurs pas du tout traités dans les travaux menés au niveau européen sur les paiements transfrontaliers.

Sur le rôle des organisations postales en matière de systèmes de paiement, cf.

GoRMANNS, p. 212 ss; "Groupe PADOA-SCHIOPPA", Payments Systems, p. 14.

Généralement, on distingue plutôt l'établissement du donneur d'ordre, l'établissement du bénéficiaire et les "intermédiaires", qui, dans le cadre d'un virement international, sont en principe surtout les banques correspondantes. Voir par exemple la définition de l'art. 2 lit. g de !aloi type de la CNUDCI. BILLOITE-TONGUE, no 17. Nous serons amenés dans certains cas à faire une différence entre l'établissement du bénéficiaire et d'autres intermédiaires (par exemple infra no 3%).

N. L'Espace financier européen

4 4. Il nous reste à définir notre champ d'application territorial et à expliquer la signification des termes "espace financier européen" qui apparaissent dans le titre de la présente étude.

Avant tout, notre réflexion portera sur le droit communautaire, qui revêt une importance majeure en matière de paiements transfrontières puisqu'il tend à les développer tout en remédiant aux problèmes qu'ils peuvent poser, par le biais de divers processus d'harmonisation des règles. En parallèle, nous examinerons quelle est la situation en droit suisse, de manière à voir quel pourrait être le degré de compatibilité des normes juridiques applicables aux paiements transfrontières dans une perspective d'intégration européenne.

Si l'essentiel de nos propos restera donc axé sur le droit communautaire et le droit suisse, nous étendrons toutefois notre étude sur certains points à toute une zone géographique dans laquelle les paiements transfrontières devraient se développer considérablement de par la libéralisation des marchés, soit un espace financier européen regroupant les Etats membres de l'Union européenne et les Etats membres de !'Association européenne de libre-échange (AELE), membres de !'Espace économique européen (EEE)96, Référence sera ainsi faite à certaines particularités que l'on peut trouver dans divers ordres juridiques nationaux ou au niveau international en Europe.

Si l'espace financier européen n'est pas une entité institutionnelle existante, il n'en est pas moins une image utilisée par la doctri.ne et les institutions communautaires pour décrire le thème général auquel nous rattachons notre étude, à savoir la zone européenne libéralisée dans laquelle circulent offrants et destinataires de services bancaires et financiers. Dans la mesure où la Suisse ne fait partie ni de l'Union européenne ni de !'Espace économique européen, mais qu'elle participe activement à la libéralisation du marché bancaire européen, tant par l'intermédiaire de son secteur bancaire présent à l'étranger que par sa politique d'intégration dans ce domaine (recherche d'une eurocompatibilité), le recours au symbole d'un espace financier nous permet de rattacher un tant soit peu la Confédération de ses voisins européens.

96 Comme l'a précisé le Comité économique et social des Communautés européennes, paiements, para. 1.6, "Tout développement des systèmes de paiement devrait notamment inclure les pays de /'Association europée1111e de libre-échange, afin de faire bénéficier partout les citoye11s d'u1111iveau de services homogè11es, tel que peut l'offrir u11 marché de dime11sio11 europée1111e. Cela stimulerait les efforts e11 vue de la co11structio11 d'u11 Espace éco11omique europée11 (EEE)". Des études ont d'ailleurs montré que le volume des paiements transfrontières de détail entre la Communauté européenne et les autres Etats de

!'Espace économique européen est important: Commission [UE], PSTDG, para. 20 (peut-être un peu moins cependant depuis que trois Etats de l'AELE - l'Autriche, la Suède et la Finlande - ont rejoint l'Union européenne).

R Le cadre juridique des paiements